La technologie des Avinton (ex-Wakan) : twin en V ouvert à 45°
A vos marques : la rubrique technique et mécanique
On la prendrait volontiers pour une américaine, mais en fait elle vient du sud de la France ! C’est l’œuvre de Joel Domergue, créateur des premières motos de trial Scorpa. Une filiation dont elle garde les traces par sa simplicité et sa façon d’aller à l’essentiel...
Sacré, insaisissable, telle est la signification de « Wakan », dans le langage des indiens Sioux Lakota. Bien que française, cette machine d’exception ne renie pas ses inspirations d’outre atlantique et tout particulièrement celle des « muscle cars » américaines. Sa référence, c’est l’incroyable AC Cobra conçue par Carroll Shelby. Un roadster équipé d’un énorme V8 culbuté pour aller chatouiller les Ferrari et autres italiennes aux mécaniques sophistiquées. Aux fioritures et à la haute technologie, les deux concepteurs ont préféré la simplicité et l’efficacité. Pour obtenir de la puissance et surtout du couple, leur recette est simple : mettre de la cylindrée !
Un moteur gros comme ça !
Pièce d’anthologie, le moteur du roadster hundred est un twin culbuté S&S, 2 soupapes refroidi par air. S&S est à l’origine un célèbre préparateur de Harley Davidson qui a conçu depuis ses propres mécaniques et les propose à de petits constructeurs artisanaux. Si l’on parle d’abord du moteur, c’est qu’il est énorme et saute aux yeux comme le nez au milieu de la figure. Il n’est pas monté dans la moto, c’est plutôt la moto qui est construite autour de lui. Sur cette mécanique on retrouve tous les fondamentaux du célèbre moteur Harley Davidson : Un ensemble moteur boîte séparé, un angle d’ouverture de 45° et une bielle à fourche qui permettent un parfait alignement des cylindres, (contrairement aux autres moteurs en V dont les bielles sont cote à cote). La distribution très originale commandée par 4 arbres à cames latéraux, chacun n’ayant qu’une came, est aussi typiquement « Harley ». Avec des côtes carrées, 101,6 X 101,6, l’énorme bicylindre cube 1640 cm3 soit 100 cubic inch (pouces cubiques), d’où son nom de roadster hundred (100 en anglais, pour ceux qui ne parleraient pas la langue de Shakespeare). Cependant dans les détails, le moteur S&S se distingue du Harley, à commencer par son admission plus verticale (inclinée de 43°) qui permet un meilleur remplissage et une meilleure intégration de la boîte à air, sans que rien ne dépasse sur le coté. La transmission des 120 chevaux et 165 Nm vers la boîte Andrews à 5 rapport se fait par une courroie en Kevlar, mais par contre c’est une chaîne qui est retenue pour aller jusqu’à la roue arrière.
Tout un monde de saveur
Pour mémoire, l’attrait de ce type de mécanique repose sur sa réponse à bas et mi-régime (le rupteur intervient à 6500 tr/mn). Gavé par une unique soupape d’admission, chaque cylindre de 820 cm3 impose des vitesses élevées aux gaz dans le conduit d’aspiration et ce dès les plus bas régimes. Si une culasse deux soupapes se révèle limitée en puissance maxi (la puissance spécifique n’est ici que de 73 ch/L), elle donne toute sa saveur en bas, car les diagrammes de distribution prévus pour éviter le refoulement assurent un parfait remplissage du moteur quasiment dès le ralenti. Grâce au moteur bien rempli, la réponse aux sollicitations de la poignée de gaz est pour le moins vigoureuse, ce qui se traduit par un violent coup de pieds dans le bas du dos, plaisir sans cesse renouvelé à chaque passage de rapport. Un univers qui rappellera la conduite des vieilles anglaises aux nostalgiques du genre. Clin d’œil aux amateurs de voitures, les volets d’admission sur le faux réservoir qui rappellent les prises d’air montées sur les capots des gros V8.
Commandés électriquement, ils s’ouvrent à mi-régime pour mieux gaver le moteur.
Eloge de la simplicité
Formé par des années à la conception de machines de compétition (trial) , Joël Domergue s’est naturellement concentré sur l’essentiel, chassant le superflu, sans qu’il ne revienne au galop pour autant. Résultat, malgré son énorme moteur qui n’a rien d’un poids plume, la bête ne pèse guère plus de 180 kg à sec. Un exploit pour ses 1640 cm3 ! Pour y parvenir son géniteur a tout simplement éliminé des pièces : exit les radiateurs, le liquide de refroidissement, les durits, les colliers et la pompe à eau. Quelques ailettes suffiront à la tâche. Le cadre constitué d’une poutre de 75 mm de diamètre tire une partie de sa rigidité de ses 8 points de fixation au moteur.
Il fait office de réservoir d’huile, alors que le superbe bras oscillant qui se passe de biellette sert pour sa part de boîtier reniflard.
Fort de cette légèreté relative et d’une vocation avant tout routière, le roadster se contente d’un simple disque avant de 340 mm avec un étrier six pistons conventionnels. Encore une façon d’éliminer un second étrier avec son disque, ses vis et sa Durits. Le freinage reste parfait en usage courant, même un peu rapide. Ce qui vaut pour le freinage, vaut pour les accélérations. Grâce à son poids réduit, la wakan tient la dragée haute à des plus fortes cylindrées. Pensez qu’elle affiche un couple comparable à une Suzuki 1800 intruder, mais pèse 120 kg de moins ! ! ! !
Une géométrie soignée
Sans tomber dans les excès de Buell, la Wakan ne fait que 1380 mm d’empattement avec un angle de colonne de 22° et 83 mm de chasse. C’est court et maniable, mais pas déroutant. Le centrage des masses favorise l’avant (52/48%) alors que le positionnement de l’essence sous le pilote dans un petit réservoir de 13L concoure a l’abaissement du centre de gravité. Là encore, Joël reprend le meilleur du trial…
Une marque haut de gamme
Très bien finie, le roadster se distingue par sa qualité de fabrication. Les motos sont assemblées à la main. Cependant, malgré les faibles quantités produites (environ 100 unités par an), l’entreprise n’a pas hésité à investir dans des outillages de production industriels, pour garantir une parfaite constance des produits et une interchangeabilité sans failles des pièces en SAV. Conséquence de ce choix, une grande qualité, mais des prix de revient relativement élevés qui font de Wakan un nouveau bastion du luxe à la française, comme le fût Facel Véga en son temps. Encore une référence automobile… française cette fois et propulsée par un V8 évidemment !
Gentlemen riders
Pour les amateurs de rencontres en circuit fermé (au propre comme au figuré), Wakan envisage de mettre sur pieds des journées piste réservées aux heureux propriétaires de version track racer. Il s’agit d’un modèle en développement dérivé du roadster. Il s’en distingue par un tête de fourche qui fait office de volume de résonance supplémentaire pour la boîte à air.
L’essence migre un peu dans le dosseret (5 L) et beaucoup sous le moteur (9L). Le freinage confié à une paire de disques Béringer avec des étriers radiaux devient dantesque, alors que le silencieux fait place à une paire de fusils à canons sciés…
Le moteur gagne une dizaine de chevaux et des rapports de boîte plus serrés. Ainsi parée, la bête est prête à affronter la piste…
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