Les routes des Alpes avec la Transalpes AMV Légende
Alpes-Maritimes, Hautes-Alpes, Savoie, Isère, 3 parcs naturels nationaux : Mercantour, Écrins et Vanoise, 4 parcs naturels régionaux : le Queyras, le Vercors, le Verdon, les Préalpes d’Azur.
1.300 km de route, 45 cols, 5.000 virages et 45.792 m de dénivelé en 6 jours
Les routes des Alpes et des Pyrénées font rêver de part leurs virolos à gogo et autant de raison de simples balades ou d'expériences comme les 100 Cols pour se faire plaisir. Ainsi après la Transpy, on vous invite à nous suivre dans la première édition de la TransAlpes avec AMV Légende.
Pourquoi AMV Légende ? Parce que si AMV est un assureur historique des deux roues depuis plus de 40 ans, c'est aussi un acteur impliqué dans de nombreux événements et pas uniquement Moto Verte comme le Trèfle Lozérien, la preuve avec cet événement passant au sein des massifs montagneux français à travers les Alpes-Maritimes, les Hautes-Alpes, la Savoie, l'Isère mais aussi 3 parcs naturels nationaux (Mercantour, Écrins et Vanoise) et 4 parcs naturels régionaux : le Queyras, le Vercors, le Verdon, les Préalpes d’Azur. De quoi faire rêver.
A l'origine de tout événement, il y a souvent une rencontre humaine, en l'occurrence celle de Franck Allard et de Jacques Sentenac, en 1980. Le premier est PDG d'AMV, le second organisateur du Raid des 1000 cimes depuis l'année précédente. Sous l'impulsion de Franck, désireux de créer des raids siglés AMV, Jacques conçoit alors, parallèlement à son activité, de multiples parcours : Raid des Pèlerins de Saint Jacques de Compostelle, Croisière des Sables en Libye, Désert Challenge et Raid Marabha au Maroc…
Plus récemment, lors du rachat par AMV de la compagnie d’assurance Légende, spécialiste des véhicules de collection, les deux hommes profitent de la dynamique néo-rétro pour créer un événement dédié aux motos anciennes afin de promouvoir la nouvelle branche de l'entreprise. En 2015 naît ainsi la première édition de la Transpy AMV Légende, odyssée motorisée égrenant ses étapes au long des Pyrénées, réservées aux machines vintages (anciennes ou récentes). Elle sera suivie de deux autres éditions.
Nouveau parcours routier pour 2018, la randonnée mécanique s'attaque aux Alpes ! Et fort logiquement, elle s'intitule Transalpes AMV Légende, chapitre 1. Sous forme d'une boucle Nice-Nice de 1.300 km, cette randonnée propose 6 étapes de 220 km en moyenne. Au programme de la semaine, 4 départements traversés (Alpes Maritimes, Hautes Alpes, Savoie et Isère), 45 cols franchis dont celui de la Bonette, 45.792 mètres de dénivelles, plus de 5.000 virages à négocier et 5 arrivées en station d' altitude.
Une véritable épopée que le Repaire des Motards vous propose de revivre.
Prologue
Lors d'un périple au long cours, les ennuis n'arrivent pas forcément au guidon. C'est à l'aéroport congestionné d'Orly que je rencontrerai mon unique souci, mais pas des moindres : monter dans l'avion… Après avoir bataillé deux heures pour faire valoir mes droits, j'obtiens enfin le sésame me laissant l'accès à l'appareil, 10 minutes avant le décollage.
Nice m'accueille enfin sous un soleil radieux, augurant une météo des plus favorables pour la semaine transalpine. Le temps de récupérer ma monture, une Bonneville T120 Triumph et me voilà prêt, veille du départ, à étudier mon premier roadbook. Si vous pensiez utiliser un GPS, c'est loupé. L'organisation propose des bandes de feuillets à relier et à placer dans un lecteur de road-book à l'ancienne, vintage oblige… Bien sûr, on pourra utiliser son smartphone ou mieux, sa tête, si comme moi, on n'est pas équipé de dérouleur.
Ce premier soir met en contact les 160 équipages participant à la Transalpes. Aux abords de l'hôtel comme au parking, les machines de tout type et toute époque ronflent, se toisent du phare et de l'échappement.
Trois catégories de machines sont acceptées : catégorie "légende" (immatriculée avant 1990), "classic" (avant 2000), ou "New classic (néo-rétro). Cette dernière classification regroupe la moitié des motos présentes, parmi lesquelles de nombreuses Triumph Bonneville, Royal Enfield, Ducati Scrambler et BMW R nine-T. Mais de nombreux bijoux motocyclistes côtoient cette nouvelle génération ; Honda 400, 500 et 750 four, Yamaha 350 RD LC, Kawasaki Z1 900, Suzuki GT750… les gloires japonaises sont en force !
Plusieurs Norton sont également de la partie. Et puis il y a les doyennes, égéries historiques italiennes, que leurs pilotes de même origine vont emmener une semaine durant. Ces Moto Guzzi de 1952 sont de véritables objets de collection, rarement visibles autrement qu'à l'usine de Mandello del Lario. Leur vénérable monocylindre horizontal aura fort à faire pour vaincre les méandres alpins.
Les pilotes sont tout aussi éclectiques. Du trentenaire stylé au retraité de retour au guidon en passant par les passionnés de toutes sortes aux motos parfois savamment "bricolées". Une poignée de femmes également, mais pas encore assez à mon avis. Quelques jeunes permis faisant leurs armes sur des motos produites bien avant leur naissance… Ca parle mécanique, accessoires, itinéraire… Certains se connaissent depuis les éditions pyrénéennes précédentes, mais la moitié des participants sont nouveaux ! Un renouveau et un signe d'engouement pour l'événement !
Enfin, anecdote, trois personnalités accompagnent la Transalpes. Camille Lacourt, Florent Manaudou et Gregory Mallet, multiples champions de natation, sont aussi amateurs de moto.
Nice - Pra-Loup, 252 km
Départ de la capitale azuréenne vers Barcelonnette pour rejoindre Pra-Loup, station des Alpes du Sud. Les départs s'enchainent au rythme de chacun. Car ici pas de chronomètre stressant ni de cortège abrutissant. D'ailleurs, quand les premiers filent sur la Promenades des Anglais, d'autres commencent déjà à réparer… Durites baveuses, condensateur farceur, batteries fatiguées, quelques vraies anciennes exigent l'attention que leur âge vénérable impose. Histoire de se faire remarquer pour mieux briller. Avantage de l'absence de technologie électronique sur ces modèles âgés, on répare facilement ! Les moins bien disposés feront la liaison dans le camion d'assistance, en attendant l'intervention plus poussée du soir. Tout est prévu ! Et pour ceux qui peineront en route, la voiture balaie veille…
La Côte d'Azur porte aujourd'hui bien son nom et sa lumière vive accompagne nos premiers kilomètres au long des criques et promontoires découpant la grande bleue. Mais nous quittons bien vite l'étendue bleutée pour arpenter l'arrière-pays, entre oliviers, eucalyptus et garrigues parfumées. Entre les villages perchés assiégés de cyprès et sur des routes vibrantes de chaleur, nous passons le Col de Braus. Puis, effleurant Sospel, les gorges sinueuses du Piaon nous mènent au Col du Turini (1604 m), un peu de fraîcheur avant de reprendre vers Saint Martin de Vesubie.
Il est conseillé de faire le plein d'essence dès que possible, car les stations sont rares. Cela donne parfois lieu à une concentration de motos, entourant les pompes comme un troupeau à l'abreuvoir. Car plus loin la montagne se fait plus abrupte, sauvage, encerclant les villages colorés décorant ses étroites vallées où file un torrent encore vif. Via Saint Sauveur, c'est à Saint Etienne de Thinée que la végétation marque elle aussi un changement notable. Les sapins se substituent aux pins, accompagnés de feuillus plus denses.
Les prochains kilomètres vont nous projeter en haute altitude vers le col de la Bonette et ses 2860 m d'altitude ! Record d'Europe pour cette voie napoléonien, dominant la vallée de l'Ubaye. Impressionnante, elle est également délicate pour les machines à carburateurs, notamment les plus anciennes à la puissance réduite. Et pourtant, même notre groupe d'Italiens franchira le Léviathan de roc aux nombreuses écharpes de neige. Pour chacun, la photo est de rigueur afin de témoigner du passage au point le plus haut de la Transalpes 2018.
Abrupte, aride, la montée à l'Est est aussi désolée que la descente sur la face opposée est charmeuse, avec ses torrents et lacs naturels. Dansante, la route file vers Barcelonnette ou l'on retrouve des surfaces agricoles avant de monter, à nouveau, vers Pra-Loup, terme de notre première notre journée. C'est dans les sept derniers kilomètres que, emporté par mon élan, j'emmène un collègue se perdre dans la montagne… La journée avait pourtant été longue et ô combien fournie en petites routes aux innombrables courbes. C'est à 21 h 30 que nous regagnons enfin l'hôtel, bons derniers et un poil fourbus de 50 km supplémentaires de mono-voies cassantes, dressant un virage tous les 10 mètres ! Presque trop pour une fin de journée. Ou pas.
10 h de petites routes non-stop, record battu.
Etape 2 : Pra-Loup - Serre Chevalier, 233 km
Retour vers la Bonette ! Eh oui, histoire de profiter des lieux. Toutefois, je coupe un peu plus tard l'itinéraire du jour afin de m'attarder sur quelques lieux intéressants. Notamment un musée moto, niché dans le village de St Paul sur Ubaye. Cette commune recèle en effet un petit trésor, que vous vous devez d'admirer.
Avec l'association Mot'Art, Laurent Gonnard, amateur passionné et passionnant, a patiemment déniché et magistralement remis en état des raretés de la production motocycliste Européenne. Réunie dans une grange aménagée comme un vaste garage, une cinquantaine de machines semble marquer les pages d'une encyclopédie mécanique. Entre la frêle Terrot de 1932, doyenne des lieux et la Moto Guzzi 1100 Sport de 1996 s'échelonnent des modèles quasi inconnus pour nombre de motards : Favor, Hirondelle, Automoto, Phanomen, Malanca, Flandria… Des noms plus habituels résonnent également : BSA, Norton, Benelli, MV Agusta, Peugeot, Honda… Roadster, routière, scooter ou enduro, l'exposition est riche d'une diversité réjouissante, témoin d'une époque glorieuse où la moto rendait libre.
Toutes sont en état de marche et certaines roulent quasi quotidiennement. Fruit d'un long travail passionné, cette collection s'adjoint la présence de nombreux objets liés à l'univers motocycliste, élégamment mis en scène dans cet espace authentique. L'entrée est libre, ne demandant que votre acquiescement pécuniaire éventuel si, comme moi, vous fûtes émerveillés. Une façon discrète et efficace de soutenir la démarche de sauvegarde du patrimoine mécanique. Ouvert tous les jours de juin à octobre, de 9h à 12h30 et de 14h à 19h.
Je serai bien reparti au guidon d'une de ces merveilles. Je ne suis pas à plaindre, ma Bonneville est une ultramoderne ancienne. La route est encore longue et je dois laisser l'histoire derrière moi pour passer le Col de Vars. C'est un point de départ de nombreux sentiers de randonnée pédestre, entouré de sommets massifs. A nouveau, la montagne change, moins aride, couvrant ses sommets d'un profil plus nuancé et couverts d'épicéas. La route plonge ensuite dans les gorges abruptes de la Durance dont nous quittons vite le cours pour aborder un autre monument naturel.
L'Izoard est un lieu improbable, inattendu, effondrement minéral garni de cheminées rocheuses surgissant au détour d'une tranquille forêt. Comme si un volcan s'était figé là, laissant une moitié de son cratère à nu. Fantastique. Le passage du col est marqué plus loin d'une haute pile de pierre, témoin des travaux d'aménagement du siècle dernier.
Les premiers lacets serpentent encore dans cet environnement géologique étonnant avant de retrouver une nature plus douce. C'est ensuite la descente vers Briançon, surplombée de nombreux forts dont l'ensemble impressionnant domine la ville. Le style Vauban, (ingénieur, architecte militaire, urbaniste et ingénieur hydraulicien de Louis XIV), est tout de suite reconnaissable sur ces bâtiments, conférant puissance et élégance au lieu. Nous n'avons hélas pas le temps d'en étudier d'avantage le génie. Serre-Chevalier est désormais tout proche, surtout si l'on ne se perd pas.
Serre Chevalier - Les Arcs 1800, 214 km
Cette étape est probablement l'une des plus marquantes de la semaine. Je trace ma route dès 7 h dans cette large vallée encadrée de roches sommitales garnies de névés. Dans la lumière du matin, ces douces montagnes se révèlent tout en nuances, jusqu'au Col du Lautaret. L'itinéraire bifurque vers celui, magistral, du Galibier. La route se fait désormais plus sauvage et surtout aérienne. Pas de barrière, de garde fou. Les pentes abruptes Il convient d'admirer le paysage en laissant un oeil sur l'étroite voie d'accès. Guère simple tant le pont de vue est impressionnant. On accède enfin au passage tracé à 2.645 m.
Une pensée pour les sportifs du Tour de France qui gravissent ces pentes à la force du mollet, quelques photos et on file vers Valoire. Là encore, cette descente est superbe, traçant son sillon au milieu des roches et les dalles de pierre plissées en un drapé éternel. On plonge à nouveau dans une vallée encaissée au fond de laquelle roule un torrent pressé. Puis l'horizon s'ouvre sur la charmante station de Valoire et, plus bas encore, Saint-Michel de Maurienne. En suivant direction Modane, on se dirige alors vers un autre géant des Alpes, le Col de l'Iseran. Mais avant, sur un haut plateau, une halte est indispensable dans le village de Bonneval sur Arc. Intégralement bâties en pierre, les maisons se fondent presque dans le paysage sous leurs lourds toits de lauzes. Ces pierres, taillées comme d'immenses ardoises, couvrent les habitations, donnant une authenticité brute au hameau.
C'est de nouveau l'ascension, moins vertigineuse que celle du matin, mais offrant un balcon encore plus vaste sur les massifs environnants. L'ensemble est désormais rigoureusement alpin tant la neige est présente. D'immenses murs blancs encadrent la route, preuve de la rigueur de l'hiver passé. Perché à 2.770 m, le Col de l'Iseran offre un large espace ceinturé de falaises.
Quelques remontées mécaniques rappellent que la station de Val d'Isère n'est pas loin, mais bien plus bas, au bout d'une route sinueuse à souhait. Comme depuis le début du périple en fait… Il serait intéressant de savoir combien de temps la moto reste droite. A force de jouer au culbuto à tout instant les rares bouts droits créent presque une surprise.
Bref, après avoir traversé la ville, on accède vite au lac de barrage de Tignes, sympathique miroir reflétant les cimes. Avant de piquer sur Bourg Saint Maurice, on pourra rejoindre le bourg de La Rosière. Oui, ce n'est pas direct, mais c'est juste histoire de reprendre une bonne tranche de courbes bien épaisse avant de poser la moto aux Arcs 1800.
Epilogue
C'est le lendemain que je quitte, à regret, la Trans'Alpes AMV Légende. Les participants se rendront à l’Alpe d’Huez et le jour d'après à Orcières Merlette. Deux étapes splendides elles aussi, avant le retour sur Nice.
L'expérience est réellement addictive. Préparer l'étape, rouler, contempler, s'arrêter, échanger, puis repartir à nouveau en suivant les méandres innombrables du tracé. Chaque jour est promesse de découverte, de rencontre et de moments intenses au fil des longues étapes conçues avec soin. Car 220 à 250 km de petites routes représentent, pour beaucoup, une vraie aventure routière; notamment au guidon de machines anciennes et, plus généralement, d'engins peu conçus pour le voyage comme on l'imagine désormais. Qu'importe, le charme agit à tout moment et le rythme délibérément paisible du raid participe à l'agrément général.
C'est d'ailleurs pour ce dernier point que les organisateurs choisissent de réserver leur événement aux motos anciennes. Pas de sportives, roadsters musclés et autres machines dernier cri dont les pilotes énervés pourraient causer quelques soucis. Dédiée aux épicuriens, la Transalpes forge ainsi un état d'esprit amical, presque familial, où la seule performance exigée est celle de prendre le maximum de plaisir. Une évidence. Voire une positive dépendance.
Côté tarif, pour 7 jours et 6 nuits en demi-pension en hôtel haut de gamme (optionnel), l'aventure se chiffre par pilote à 1.480 €, soit 350 € d'inscription (avec un passager + 150 €) et 1.130 € d'hébergement (790 € en chambre double). Mais vous pouvez choisir une solution hôtelière personnelle moins dispendieuse. Tout au long du parcours, des professionnels de la randonnée motorisée suivent cette course au bonheur. Enfin, assistances médicales et mécaniques performantes garantissent une expérience de qualité.
Amateurs d'expérience humaine et mécanique au long cours, dévoreurs compulsifs de routes torturées ou tout simplement envie de changer d'air au guidon de votre machine ? Franchissez vous aussi les sommets, vos sommets, à la découverte de notre territoire sur ce qui se fait de meilleur pour un motard : des routes à virages… sur 1.300 km.
A l'année prochaine pour une nouvelle édition...
Commentaires
Ça met l eau à la bouche tout ça ! Merci pour ce récit !
14-07-2018 17:47Salut
15-07-2018 15:50....et à travers les Alpes de Haute Provence également.
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