Essai moto Aprilia RSV4 1100 Factory
Veramente sensazionale
V4 à 65° de 1.078 cm3, 217 ch et 122 Nm, 199 kg pleins faits, 22.999 euros
Il est des machines dont le patronyme est presque plus connu que la marque à laquelle elles appartiennent. Et pourtant, Aprilia est une des firmes les plus fameuses et titrées au monde. En concevant la RSV 1000 en 1998, la fabrique à rêves de Noale pensait-elle assurer à la plus démonstrative de ses créatures un tel destin jusqu'à conduire à la l'Aprilia RSV4 1100 Factory d'aujourd'hui ? Cela méritait au moins un essai et sur le tout aussi mythique circuit du Mugello.
Motorisée par un bicylindre Rotax à sa création, le bloc en V à 60° développe alors 128 ch à 9 250 tr/min et 10,3 da.Nm de couple à 8 000 rotations/min. La machine est boostée en 2009 par l'adoption d'une toute nouvelle mécanique V4, délivrant 180 ch à 12.500 tr.min et 11,5 da.Nm à 10.000 tours sous contrôle d'une électronique (APRC) dérivée de la course. Ainsi, s'adjugeant 7 trophées en 6 ans (pilote et/ou constructeur), la RSV4 est devenue LA star incontestée du championnat Superbike. La sportive a ensuite bénéficé d'évolutions mécaniques majeures en 2015 pour passer la barre des 200 ch : 201 bourrins exactement à 13.000 révolutions et 11, 5 da.Nm à 10.500 tr.mn. Deux ans plus tard, une version RF reçoit une mise à jour électronique pour doper ses assistances et sa fiabilité.
A Noale, le segment hypersport, c'est un peu la causa nostra sur deux roues. On entendrait presque un parrain nous susurrer : "Tu vois, petit, le monde change et la concurrence veut nous faire du mal. Regarde le clan ennemi Ducati et leur Panigale V4, ou les Germains avec leur nouvelle BMW S1000RR. Même celle-là ressemble à une Italienne maintenant. On ne va pas se laisser faire..." Et on ne marche pas impunément sur les terres de Don Aprilia. La famille de Noale dégaine donc une nouvelle RSV4, la 1100 Factory. La supersport reprend à son compte la cylindrée de sa soeur Tuono V4 1100 Factory, dont elle tire la quintessence. Mais comme par le passé, la marque transalpine conserve sa RSV4 RR et son V4 de 999,6 cm3 afin de rester conforme aux règlements des compétitions superbike. Si la partie technique de cette dernière reste identique au millésime 2018, son électronique est mise à jour. Enfin, elle autorise la désactivation de l'ABS et peut recevoir un kit race.
Aprilia nous a convié à faire danser la plus volcanique de ses filles au coeur de la Toscane, entre Florence et Bologne (Italie), sur le fabuleux et rapide tracé du Mugello. Un essai qui ne se refuse pas et que l'on a apprécié... pour plein de raisons (lire ci-dessous).
Découverte
Face à la débauche technologique affichée par la concurrence, Aprilia investit le créneau du sport premium. En clair, on soigne autant l'habillage que les perfs. Cependant, hormis en mécanique, la nouvelle hyperpsort évolue globalement assez peu, même si quelques évolutions font une belle différence; on le verra en dynamique.
Le style complexe et acéré, initié en 2009, ne change pas sur la RSV4 1100 Factory. Et c'est un peu regrettable. Non qu'il soit réellement daté ou dépassé, mais Aprilia aurait pu donner à la face avant l'élégance de sa future RS660, pour marquer l'augmentation de sa cylindrée et de ses performances... Car les trois feux signant la personnalité de la sportive sont une signature intéressante, mais désormais un peu lourde avec l'avènement des leds...
Hyper-compacte, la sportive est toujours impressionnante de finesse. Elle conserve sa robe de mannequin, mêlant courbes tendues et arrêtes saillantes formant, au-dessus des flans, de mini-ailerons. Inchangée également, la contenance du réservoir est de 18,5 litres. S'y appuie la boucle arrière minimaliste, supportant de graciles repose-pieds passager et dissimulant l'assise de ce dernier sous un capot de selle aux courtes ailettes. Les galbes sculptées et complexes séduisent toujours par l'élégance et la finesse d'ensemble.
Toutefois, en pure Italienne, elle soigne ses atours dans le détail, privilège de raffinement des grandes maisons. Ainsi, son coloris noir mat s'enrichit de matériaux nobles comme le carbone composant ailerons latéraux, flancs de selle, protections diverses et garde-boue avant. Cette teinte sombre contraste avec les superbes parties métalliques de la machine. Soutenant, le cœur, on retrouve l'esthétique et imposant cadre aluminium double poutre, dont le polissage contraste avec les renforts et platines aux surfaces laissées brutes. La partie cycle modifie à peine ses cotes. L'angle de chasse diminue à nouveau, retrouvant sa valeur de 24,5°. Le décalage des nouveaux Té de fourche est réduit de 2 mm afin de rapprocher le train avant du pilote, pour augmenter la charge sur la roue avant (et donc la stabilité) sans diminuer l'agilité. Mais l'empattement augmente de 4 unités, soit 1.439 mm. Enfin, le sculptural bras oscillant aluminium renforce sa rigidité. Et bien sûr, les RSV4-1100 Factory et RR opus 2019 sont toujours les seules machines de série à proposer une personnalisation poussée du châssis : position du moteur dans le cadre, angle de la colonne de direction, réglage du pivot du bras oscillant et garde au sol !
Bref, l'Italienne reste séduisante, mais ne surprend pas. Seuls ses ailerons latéraux viennent parer ses flancs. Ces winglets exploitent la pression vers le bas provoquée par le flux d'air ainsi canalisé. Ils augmentent la stabilité à grande vitesse. Des appendices qui devraient amener davantage de nouveautés en comportement dynamique à haute vitesse.
Et du dynamisme, la machine n'en manque pas... Car le point d'orgue de cet opus est d'adopter la mécanique équipant déjà le roadster Tuono V4 1100. La cylindrée du quatre cylindres en V à 65°, passe en effet à 1.098 cm3 par augmentation de l'alésage de 78 à 81 mm; la course de 52,3 mm reste inchangée, comme le rapport de compression de 13,6:1. Attaquant 4 soupapes en titane par cylindre, la distribution est modifiée pour la RSV4 1100 Factory. Les cames modifiées des doubles arbres autorisent un timing d'ouverture plus long. Histoire de gaver le bloc de mélange détonnant. Ainsi, pas moins de 217 ch sortent désormais du bloc à 13.200 tr.min (+ 200) et le rupteur coupe 400 révolutions plus haut. Le couple s'accroit sur toute la courbe de plus de 10% par rapport au moteur de la RR et affiche un maximum de 122 Nm à 11.000 tr.min (+ 500). Des valeurs en progression sensible à des régimes plus élevés. Le V4 souffle désormais dans un nouveau silencieux Akrapovic en titane de série. Une ligne complète vous octroiera jusqu'à 225 ch...
Comme sur la Tuono 1100, la lubrification bénéficie d'une pompe à huile plus puissante qui alimente désormais deux jets d'huile dans chaque cylindre afin de diminuer la température du piston. Et comme sur le roadster, la transmission allonge les cinquièmes et sixièmes rapports comparé à la version RR (34/26 contre 31/23 et 33/27 contre 34/27).
La RSV4 1100 Factory reconduit également les optimisations vues sur la Tuono. Rappelons que les arbres à cames sont forgés, idem pour le vilebrequin. Enfin, les pignons de la boite à cassette reçoivent désormais un traitement DLC (Diamond Like Carbon). Bien entendu l'embrayage est, comme depuis longtemps, anti-dribble.
Avec ce surcroît de caractère, la mécanique soigne aussi ses puces. Car l'électronique de pointe APRC (Aprilia Performance Ride Control) est une autre des qualités des RSV4. L'injection adopte une centrale Magneti Marelli 7SM qui pilote trois cartographies moteur, Track, Race et Sport. Le rapport puissance/régime est toujours le même, mais la façon dont arrive la cavalerie diffère. En S, la réponse est rapide et le frein moteur effectif pour un usage route. En T, la réponse est progressive et le frein moteur réduit. Et sur R, la réactivité à l'accélération optimale et l'inertie mécanique au minimum. Le choix des cartographies de Ride by Wire se fait aussi en roulant.
Cette possibilité de modifier en un instant et à tout moment les réglages électroniques les plus importants reste la grande force d'Aprilia, traduisant son expérience en compétition. On use donc ainsi au mieux du système APRC. Celui-ci renouvelle ses composantes et en amène de nouvelles. Optimisés dans leur fonctionnement, on retrouve le contrôle de traction (ATC), la gestion de l'anti-wheeling (AWC), le Launch Control (ALC) optimisant les départs et le Quickshifter (AQS) désormais en montée ET descente des rapports. Le millésime 2017 se dote aussi d'un régulateur de vitesse (ACC) pour rejoindre votre circuit et d'un Pit Limiter (APL) fixant vote vitesse dans les stands. L'un vous évitera de perdre des points sur votre permis, l'autre au championnat...
Précisons l'usage des plus importantes de ces aides. Directement paramétrable en course/route, l'ATC, Aprilia Traction Control, se module toujours sur 8 valeurs sans relâcher la poignée de gaz grâce aux mini-palettes + et -. Il en va de même de l'AWC: Aprilia Wheelie Control, grâce à un nouveau poussoir au commodo gauche. En cas de levée de la roue avant, l'électronique intervient sur l'avance à l'allumage et les papillons d'injection. Réglable sur 3 niveaux, il dispose de nouvelles lois d'utilisation plus précises et progressives, grâce au repositionnement de la plate-forme inertielle.
Cette dernière est également indispensable lors des freinages, surtout sur l'angle. L'ABS fait appel au dispositif Bosch 9.1 MP miniaturisé, largement utilisé chez la concurrence également. Hyper compact et léger, il permet désormais d'optimiser le freinage dans les virages grâce à un algorithme spécifique Aprilia, qui contrôle constamment l'accélération latérale, la pression exercée sur le levier de frein avant, les angles de roulis, de tangage et de lacet. En cas d'incohérence, il module la pression des étriers pour assurer le meilleur équilibre entre la décélération et la stabilité. Le système reconduit le RLM (Rear Liftup Mitigation) limitant la levée du train arrière lors des décélérations les plus importantes. Une aide désormais en vogue chez la concurrence. Multifonctions, cet ABS est réglable sur 3 niveaux Track, Sport et Rain et déconnectable (mais se réactive au redémarrage... Euro4 oblige). Sur Track, le RLM et l'ABS sur l'angle sont désactivés, pour les puristes. Sport conserve une levée arrière progressive au-delà de 140 km/h et complète sous 80 km/h.
Pour rappel, l'ALC (départ arrêté) contrôle la position de l'accélérateur, celle du papillon des gaz, le régime moteur, le rapport de boite et la vitesse des roues. Lorsqu'on lâche la poignée d'embrayage, l'électronique maintient le moteur au meilleur couple pour une accélération la plus efficace possible en évitant le wheeling.
Les suspensions Öhlins évoluent peu, juste de quoi suivre les nouvelles prétentions dynamiques de la machine. La fourche NIX de 43 mm, entièrement réglable, est à cartouches étanches pressurisées réduisant le volume d'huile et donc le poids. Sa course est augmentée de 5 mm (125 mm) et s'adjoint le contrôle d'un vérin de direction suédois également paramétrable. Té supérieur et pied de fourche sont aluminium taillé dans la masse. Multi-ajustable également, l'amortisseur TTX 36 à piggy back est monté sur biellettes.
Posée sur des jantes en aluminium forgé, la RSV4-1100 Factory s'équipe d'étriers avant Brembo monoblocs Stylema, à montage radial et 4 pistons de 30 mm. Equipés de nouvelles plaquettes de frein, ils attaquent des attaquent des disques flottants en inox allégé de 330 mm. Le tout commandé par maitre cylindre radial de 18 mm et durites de freins tressées renforcées. Le ralentisseur opposé, un étrier flottant Brembo à 2 pistons, serre une galette de 220mm. Le tout est sous surveillance d'un ABS Bosch 9.1 MP ajustable sur 3 valeurs, sous contrôle de la centrale inertielle et doté du RLM (Rear wheel Lift-up Mitigation). Chacune des trois cartographies du Cornering ABS peut être combinée à l'une quelconque des trois cartes du moteur (Sport, Track, Race). Pour coller au bitume, des Pirelli SuperCorsa SC V3 en 120/70 et 200/55 chaussent les petons de l'Italienne (alternative en 190/50 ou 190/55).
Enfin, la RSV4 1100 Factory avoue 199 kg prête à la course, soit 5 de moins que la version RF de 2015. Un poids gagné sur les étriers de freins et sur la nouvelle batterie lithium-ion Bosch avec système de gestion intégré. Particulièrement séduisante, la RSV4 1100 Factory est remarquablement finie et équipée. Ajustement des éléments, qualité des composants et revêtement de la majorité des surfaces métalliques sont sans reproche. Les surfaces des blocs cylindres et carters centraux affichent toujours une finition brute, conférant toujours à la machine un côté course.
Version RSV4-RR
Le modèle standard se dote de suspensions Sachs. La fourche inversée de 43 mm est ajustable en tout sens et à sa base forgée dans l'aluminium. Un vérin de direction de même origine limite également les mouvements intempestifs du train avant. A l'arrière, l'amortisseur se paramètre aussi en précharge, compression, détente et entre-axe (empattement).
Sur la RR, les jantes sont en aluminium moulé, mais le freinage reprend les mêmes éléments que ceux de la RF à l'exception des disques non inox. L'électronique APRC est identique et la RSV4-RR possède également le Quickshifter up et down. De plus, en pure pistarde dédiée aux championnats, son ABS peut être désactivé.
En selle
Relativement haute perchée sur ses talons aiguilles, la Transalpine de course avoue 851 mm de hauteur de selle. C'est 11 de plus qu'avant. Eh oui, à tout niveau il faudra vous montrer à la hauteur de la sublissima si vous voulez décrocher son coeur et l'adoubement de la famille. Autant dire que le pilote d'1.70 ne posera pas les deux pieds à terre. Compacte, étroite, la RSV4-RF est une vraie machine de superbike, à l'ergonomie typée et spécifique. L'assise se révèle assez longue, mais surtout toujours remarquablement dessinée. Ses flancs inclinés favorisent une gestuelle sportive.
Et le sport, la belle en fait sa raison d'être. A bord, c'est ambiance course, avec une position dédiée à l'efficacité. L'inclinaison de la machine vers l'avant est marquée, basculant le pilote sur des demi-guidons assez bas. Arborant des échancrures très marquées, le réservoir forme des arrêtes importantes en partie haute, très efficaces pour y caler les jambes. Ces dernières sont d'ailleurs sensiblement relevées, en appui sur des repose-pieds hauts perchés garant d'une garde au sol appréciable. Faute peu acceptable, la commande d'embrayage à câble n'est pas réglable en écartement ! Un comble pour ce type de fleuron ultime. Heureusement, le levier de frein est modulable et son maître-cylindre radial.
Inchangé, le cockpit regroupe les instruments sur un large écran TFT couleur. Surmonté d'un large shiftlight, l'écran passe automatiquement en mode jour ou nuit et possède deux affichages différents, routier ou circuit. Sur ce dernier, la disposition des infos fait la part belle au sport. Il regroupe ainsi, sous le compte-tour barre-graphe hautement lisible, l'affichage du chrono ou de la vitesse, le rapport engagé et la vitesse limite choisie pour la pitlane (ou cruise control). Egalement, les informations de l'APRC sont judicieusement regroupées à gauche, avec la cartographie moteur retenue, le niveau d'ATC, ABS, AWC et ALC souhaité (anti-patinage, ABS, anti-wheeling et départ-arrêté. Un menu permet aussi de rentrer plus en détail si on le souhaite. Enfin, l'angle d'inclinaison de la machine et niveau d'accélération et freinage sont affichés sur un graphique en temps réel... mais guère utile ou exploitable en pleine action. La vitesse maxi est conservée en mémoire... pratique pour se concentrer sur la piste et pas le compteur pour voir si on a dépassé la valeur symbolique.
Pour commander l'ensemble, l'ergonomie des commodos est un autre point fort des sportives Aprilia. Les fameuses mini-palettes + et - commandent toujours en direct et sans fermer les gaz ou débrayer, le traction control (ATC). Les modes moteur se choisissent par pression du démarreur, une fois le V4 en marche. Enfin, de nouveaux boutons au côté gauche gèrent l'AWC, le Pit Limiter et on note même l'apparition d'un curseur mutli-directionnel de navigation ! De plus, il n'y a désormais plus aucune latence électronique au moment des changements. Seule la sélection des aides APRC au joystick demande un peu d'habitude pour être précise.
En piste
Le moment tant attendu arrive enfin ! Accéder au Mugello est un rêve de pistard que peu d'entre nous exauceront. Autant dire que nous mesurons notre chance d'évoluer sur ce tracé vallonné de 5.245 m aux 15 virages (6 à gauche, 9 à droite). Autour d'une ligne droite explosive de 1.141 m, ses courbes s'entrelacent subtilement, dessinant une piste de danse idéale pour notre ballerine en habit de sport.
Le nouveau silencieux Akrapovic titane sied bien mieux à notre monture. Si les vocalises à très bas régime sont modulées, l'Italienne retrouve de la voix sur les coups de gaz. Pas de doute, la diva a toujours son caractère de feu et fait craquer l'air impatiemment.
Couvertures chauffantes, mais pneus tout neufs, je quitte la pitlane, APL activé, limitant la vitesse dans la pitlane... efficace, il se désengage dès que l'on repasse la seconde. Je m'élance sur la piste toscane pour un premier contact d'observation. D'abord apprendre le tracé et ensuite mesurer les évolutions de l'opus 2019. La prise en main de la RSV4 1100 Factory est toujours surprenante de facilité. Posé sur l'étroit missile italien, on prend vite conscience de faire corps avec la machine. Plus encore que sur une autre sportive, l'ergonomie parait idéale et les dimensions réduites en font presque une extension de votre personne.
Cette aisance permet d'aborder les choses sérieuses avec sérénité, en dépit d'un faible nombre de sessions pour découvrir la machine. Hyper démonstrative, l'Aprilia accompagne vos évolutions d'une bande-son inimitable, rauque, ample et frénétique. Cette signature sonore est un enchantement permanent qui participe nettement à l'agrément.
Exubérante, la mécanique particulière de l'Aprilia est une arme de séduction, notamment sur les mi-régimes. La mécanique bodybuildée a tôt fait de démontrer toute son optimisation. Déjà copieux sur l'ancien millésime dès 5.000 tours, le V4 1100 amplifie sensiblement sa poussé sur une large plage de régime. Encore plus disponible, il satellise l'équipage à chaque remise de gaz. D'autant que la moitié des virages se passent idéalement en seconde et l'autre en troisième. Autre point d'excellence sur ces phases de pilotage sur l'angle. Toujours plus réactif, le V4 prend ses tours avec vigueur et sans inertie, finement guidé par une poignée des gaz des plus précises. Un peu plus brusque en mode "Race" ou "Track", l'électronique donne une réponse plus progressive en "Sport". L'aisance venant, on apprécie de piloter la mécanique sans filtre. L'accélérateur semble "lié à la roue arrière" tant les relances sont évidentes à doser ou les gaz à maintenir en virage.
On est alors quasiment à la croisée des courbes de couple et puissance, entre 8 et 9.000 tours. A ce moment, la RSV4 1100 oublie la bienséance pour muter en harpie démoniaque. Dans un grondement idoine, elle se dresse à l'accélération, mettant au boulot ses nombreuses assistances dont les voyants illuminent le cockpit. Car la sportive de Noale reste une moto vivante, mais saine. Son centre de centre de gravité assez haut et une géométrie inclinée sur l'avant en font une machine vive et démonstrative. Créature mécanique enchanteresse, elle communique son exubérance maîtrisée à son pilote. Ainsi, le train avant bouge sous la charge du moteur, mais l'amortisseur de direction veille. Tandis que l'anti-wheeling repose la roue directrice au sol rapidement, la machine se cale sur l'arrière à la remise des gaz et l'anti-patinage contrôle la dérive du pneu. Ajustable à tout moment au guidon par les palettes, on jouera en fonction de ses envies avec la glisse. En un rien de temps, le virage suivant est déjà là. A un doigt, le levier permet des décélérations aussi puissantes que modulables, même sur l'angle. On remercie bien fort le cornering ABS lors des freinages trop tardifs en courbes.
Un regard, une pression sur le guidon et les repose-pieds et vous voilà prêt à attaquer le virage suivant. Dans Casanova, Savelli et la montée rapide des Arrabbiata, la ballerine de compétition démontre tout son potentiel. Naturelle, la RSV4 1100 Factory est un monstre d'efficacité et de force qui se pilote presque intuitivement. L'agilité de la machine, la précision de son train avant et la rigidité de son châssis sont définitivement une référence dans la catégorie. Le scalpel transalpin délivre également un très bon retour d'information du train directeur. Rivée au sol, l'Aprilia autorise toute correction de trajectoire. Sur chaque phase de pilotage, les suspensions filtrent tous mouvements parasites et fixent la machine sur sa trajectoire. De tour en tour, on hausse sans mal son niveau de pilotage à son guidon. Pas de quoi inquiéter Max Biaggi qui me fait l'intérieur dans Correntaio avant de disparaître, signant sa démonstration d'une virgule de gomme de plus de 30 mètres...
Vient le dernier virage, Buccine, toboggan incliné qui commande l'infinie ligne droite du Mugello. Sa largeur autorise différentes trajectoires, pour mieux accéder à la rampe de lancement vers les stands. Dans le haut du compte-tour, le surcroit de puissance donne de l'aisance supplémentaire au modèle 2019. Remarquablement stable à très haute vitesse, l'Aprilia file sans trembler vers l'horizon. L'apport des ailerons n'y est peut-être pas anodin. Bien calé en fond de selle et abrité correctement par les carénages et la bulle, mon mètre quatre-vingt-quatre se prépare à la satellisation.
Rapide et précis en montée comme en descente de rapport, le shifter est un atout pour la vitesse de pointe comme pour les décélérations. Et heureusement, car je déboule à près de 300 km/h sur San Donato, virage serré et relevé que l'on passe 200 km/h moins vite... La prise des freins est incroyable de force et de contrôle, prouvant la performance des étriers Brembo Stylema. Ils vous feraient presque pousser les nichons. Sous leur morsure, le train avant semble se planter dans le sol, mais, encore une fois, électronique (LRM) et suspension font merveille, laissant la moto à peine frémir de l'arrière sur ces freinages intenses. De plus, l'ABS est transparent dans son fonctionnement. La qualité constante des décélérations est notable, peut être amplifiée encore par les écopes en carbone optionnelles (276 € !) placées sur les étriers de nos machines d'essai. Et empiler les rapports se fait instinctivement, l'embrayage anti-dribble avale tout sans broncher dans le ronflement dantesque du V4. Toujours plus réduite, je ne pourrais hélas pas reculer ma distance de freinage comme je le souhaitais. Mais même lors de la dernière session, j'avais encore une bonne marge de progression sur ce point à mon humble niveau. Les jambes calées dans les larges épaulements du réservoir, on prépare la mise sur l'angle. Et le manège dantesque recommence...
Conclusion
A n'en pas douter, avec sa RSV4 "augmentée", Aprilia magnifie son hypersport. Si la personnalité mécanique est son atout principal, la précision de sa partie cycle et sa vivacité en font décidément une machine à part. Plus encore que ses performances dynamiques en hausse, je retiens l'excellence du freinage, des suspensions et l'efficacité de l'électronique APRC. Intuitive et efficace, la nouvelle RSV4 1100 Factory est une évolution sensible, mais sans révolution. Véritable superbike de série, elle est le Graal des amateurs de machine de caractère sans outrance. Tarifée 22.999 €, elle s'accompagne d'une presque jumelle inchangée, la RSV4 RR, à 16.999 €.
Principale opposante, la tonitruante Ducati V4 R réclame à minima 22.790 € pour élire domicile dans votre garage. Autre Européenne incontournable, la BMW S1000RR s'affiche à 19.200 €. Chez Suzuki, la performante GSXR1000 est disponible contre 16 599 €, la version GSXR1000R demande 19.399 €. Et chez Yamaha, la R1 et son quatre cylindres crossplane sont à 18.999 € et la version R1 M à 23.999 €.
Optimisée et toujours plus efficace et sensationnelle, la sulfureuse sportive fait honneur au clan de Noale. Mieux équipée que la Panigale standard elle est également plus facile pour en tirer le meilleur. Nul doute que la belle ne manque pas de répartie pour tenir la concurrence à distance. Raffinée et performante, expressive et séduisante, l'Aprilia RSV4 1100 Factory est décidément un choix de coeur.
Essai de la RSV4 Factory en vidéo
Points forts
- Esthétique forte
- Personnalité mécanique
- Précision et vivacité de la partie cycle
- Ergonomie générale
- Qualité des suspensions
- Assistances électroniques efficaces
- Freins et ABS sans faille
- Quickshifter up and down précis
- Sonorité addictive
- Qualité des finitions
- Efficacité dynamique globale
- Instrumentation agréable
Points faibles
- Design inchangé
- ABS non déconnectable
La fiche technique de l'Aprilia RSV4 1100 Factory
Conditions d'essais
- Itinéraire : circuit du Mugello
- Météo : soleil, 10 à 25°C
- Kilométrage de la moto : 100 km
- Problème rencontré : ras
Equipement essayeur
- Casque Scorpion Exo R1
- Gant Vanucci Speed Profi IV
- Combinaison Dainese Laguna Seca
- Bottes Dainese Torque D1
Accessoires
- Ailerons Verticaux 780 €
- Échappement slip-on 1.200 €: réalisé par Akrapovic, il est doté d'un silencieux en titane et est homologué pour une utilisation sur route. La version slip-on en carbone est également disponible, pour une utilisation exclusive sur piste.
- Échappement complet racing 3.415 € (+10 ch) : groupe d'échappement avec collecteurs, réalisé par Akrapovic. La sortie est en carbone.
- Prises d'air frein avant 276 €: elles s'installent facilement sur le système de freinage avant, en réduisant les températures et en maintenant les mêmes performances de freinage dans des situations de stress prolongé.
- Boîtier électronique : Boîtier électronique de contrôle moteur dédiée à l'utilisation sur piste, programmée avec la cartographie racing. À utiliser si des installations d'échappement différentes de l'original (complètes ou seulement un tuyau slip-on. Homologués ou non) non fournies par Aprilia sont installées.
- Amortisseur Öhlins TTX 1.700 € (de série sur RSV4 1100 Factory): la série TTX est le plus haut de gamme des produits Öhlins (la tête et le pied d'attache sont aluminium taillés dans la masse). Il permet d'effectuer des réglages précis et complets, pour toutes les fonctions d'amortissement. Peut être équipé de capteurs linéaires pour installer la télémétrie.
- Amortisseur de direction Öhlins (de série sur RSV4 1100 Factory): son réglage fin dans l'hydraulique permet d'avoir un avant-train toujours solide dans les accélérations les plus violentes.
- Fourche Öhlins NIX 4.079 € : (de série sur RSV4 1100 Factory) : le top pour les prestations sur piste et sur route. Une vaste possibilité de réglages fins dans la précharge du ressort et dans l'hydraulique en extension et en compression.
- Composants en carbone : carénage, ailes et protège-talons. Réalisés en fibre de carbone mat. Ils garantissent un look sportif et un poids total moindre.
- Cache rétroviseurs 122 €: en matière plastique haute résistance. Avec des logos gravés au laser. Ils permettent la dépose des rétroviseurs pour l'utilisation sur piste.
- Sélecteur inversée racing : élément mécanique qui inverse le passage des vitesses, pour améliorer les performances sur piste.
- Jantes forgées avant 1.230, arrière 1.365 € (de série sur RSV4 1100 Factory): elles sont en alliage d'aluminium et ont été forgées. Elles offrent une résistance maximale pour un poids réduit, essentiel pour augmenter la maniabilité.
- Leviers racing en aluminium 122 € : usinés dans la masse, ils donnent un look encore plus vif et réduisent le poids du composant de série.
- Contrepoids guidon 69 € : ils sont réalisés en aluminium usiné dans la masse. Avec bouchon en nylon noir et logos gravés au laser. La construction particulière cache la vis de fixation.
- Sacoche réservoir : elle est réalisée en tissu technique avec des inserts effet carbone. Testée et approuvée pour résister à l'huile, à l'essence, aux rayons UV et pour ne pas compromettre la stabilité, même à grande vitesse.
- Support de plaque d'immatriculation réglable 233,00 € : réalisé en acier découpé au laser. Il comprend l'éclairage de la plaque d'immatriculation à LED.
- Housse moto : en lycra anti-transpirante, elle a été étudiée pour protéger la moto de la poussière.
- Kit Aprilia MIA : le kit d'installation de la plate-forme multimédias est dédié aux modèles V4 Aprilia et il est composé de l'unité de contrôle Bluetooth et des câblages nécessaires au montage.
Commentaires
Top moumoute ! Dommage, coloris tristoune ...
26-03-2019 17:00Le noir, ça va avec tout...
26-03-2019 17:59