Essai comparatif Kawasaki Z1000SX / BMW R1200RS
Voyageuses de caractère
Voyager à moto ne rime pas exclusivement avec grandes GT, efficaces mais encombrantes, ou maxi-Trails, utiles mais trop typés. L'alternative se nomme sport-GT. Ces machines mixtes reposent souvent sur une base de roadster sportif, grandement amélioré en attributs longue distance. Ce segment semble connaitre un regain de popularité. Mérite en revient, depuis 2010, à la Kawasaki Z1000SX qui représente 25% des ventes de ce marché… Face à elle, Honda aligne ses VFR 800 et VFR 1200. Si la première reste une valeur sûre mais de cylindrée moyenne, la deuxième n'a pas connu, loin s'en faut, le succès de sa soeur. Car sur ce terrain de compromis, l'alchimie doit être subtile. C'est à un spécialiste du genre que l'on doit une nouvelle challenger : BMW et sa nouvelle R1200RS. Le constructeur Allemand réaffirme ainsi son expérience de longue date, autrefois symbolisée par les R1100RS et R1100S. On opposera donc le dernier destrier Bavarois à la championne d'Akashi le temps d'une escapade, forcément dynamique.
Découverte
Nouvelle venue, la Munichoise ne manque pas d'arguments pour séduire, à commencer par son style résolument sportif. Emprunté à la référence des circuits, la S1000RR, la face avant conserve bien sûr une asymétrie étudiée au niveau des feux, mais la machine s'habille d'élégance. Assez large, les flancs s'équipent, latéralement, de déflecteur supplémentaires. Ils s'additionnent, en partie basse, à des écopes architecturées, double éléments multicouches, déviant les flux d'air. Au dessus, une bulle réglable sur 40 mm via deux positions (ou 4 avec outils), complète l'ensemble caréné.
Côté Japon, on s'inspire également d'une icône sportive, la Ninja ZX10R, là aussi apprêtée pour un usage plus routier. Toutefois, la Kawasaki conserve plus sensiblement une esthétique issue de la course. Effilés, les optiques s'étirent sur une tête de carénage aplatie, agrémentée d'une étroite bulle courbée et ajustable sur trois niveaux. De part et d'autre, les écopes s'évasent en larges flancs, plongeant ensuite sur le bas de la machine en un étroit sabot. Le sport n'est pas loin.
L'arrière des machines reprend cette différence déjà sensible entre les deux voyageuses. Assez horizontale, la boucle arrière en tubes acier de RS se fait minimaliste mais soutient de larges assises. Plus gainée, mais également plus relevée, la poupe aluminium de la SX offre un habillage soigné. Et surtout, elle intègre des supports de valises. Précurseur en ce domaine sur ces R1200RT et R1200GS, BMW fait ici l'impasse d'un tel système. Un simple et disgracieux tube surnuméraire vient se boulonner au bâtis… Comme sur le première génération de sa concurrente. Etrange choix.
Non disponibles pour l'essai, rappelons que les bagageries de l'une et l'autre, sont particulièrement qualitatives et leur utilisation intuitives. Chacune loge un intégral mais celles de l'Allemande sont plus vastes (31 et 32 litres contre deux fois 28).
Côté moteur, c'est l'opposition totale. BMW reprend son twin de 1 170 cm3, intégré en élément porteur au sein du nouveau cadre double poutre aluminium. Le premier développe 125 ch à 7 750 tr/min et atteint son couple maximal de 12,5 da.Nm à 6 500 révolutions/min, avec 10 da.Nm disponibles à minima. Le deuxième est fort de 138 ch à 9 600 tr.mn et 11 da.Nm à 7 800 tours. La mécanique allemande est, bien sur, sous contrôle électronique avec, de série, deux cartographies moteur (Road et Rain, lissant la réponse du bloc), ABS et ASC (anti-patinage). Et bien sur, la transmission finale se fait par arbre et cardan, via le monobras oscillant. Un vrai plus au long cours. Notre machine est équipée de suspensions ESA optionnel mais reçoit, par défaut, une fourche inversée de 45 mm non ajustable. L'amortisseur arrière est alors modulable en précharge via une molette côté droit et compression-détente associées par une commande pratique à sa base. On apprécie la disposition des valves de pression d'air sur une branche de jante. En revanche, certaines connectiques pourraient être mieux intégrées. Vous retrouverez tous les détails techniques dans l'essai de la R1200RS.
Sur la Japonaise, l'ABS est désormais en série et l'anti-patinage KTRC possède trois niveaux de réglage. Deux cartographies moteur sont également disponibles, Full et Low, limitant alors la puissance à 80% du maxi et modulant la réponse des gaz. La transmission par chaine bénéficie d'une esthétique et pratique tension par excentrique, sur un double bras oscillant tout aussi remarquable. Kawasaki équipe sa monture d'un train directeur inversée de 41 mm associé à un combiné arrière, tout deux entièrement ajustables. La finition anodisée des commandes et bouchons est particulièrement valorisante. Vous retrouverez tous les détails techniques dans l'essai de la Z1000SX.
On notera également une meilleure intégration des composants sur la Japonaise. Platines de repose-pieds, poignées de l'accompagnant, silencieux d'échappement satinés.. etc). En option, l'Allemande reçoit une béquille centrale, élément impossible à fixer sur la Kawasaki en raison du catalyseur placé sous la machine.
En selle
Les spécificités de chaque machine s'accentuent dès que l'on se met en selle. Sur la BMW, les assises sont particulièrement confortables pour l'équipage. Celle du pilote, large et longue, culmine à 820 mm et son étroitesse au niveau du réservoir optimise l'accessibilité. raisonnablement fléchies, les jambes bénéficient d'une place importante. Le passager trouve également une position confortable et un maintient efficace. Sa rivale offre un accueil à même hauteur mais plus sportif et donne l'impression d'être posée sur la machine, alors que l'on est "dans" l'Allemande. Plus élevés, les repose-pieds induisent une flexion légèrement supérieure. L'accompagnant dispose de poignées ergonomiques mais placées trop en avant, grevant son aisance. De même, l'appui sur les demi-guidons de la SX est sensible, tandis que la RS laisse une position plus naturelle.
Plus récente, la Bavaroise dispose d'un bloc instrument complet, associant tachymètre analogique et large écran digital, dont l'ergonomie d'affichage est même variable. Toutefois, l'on peine à lire intuitivement la vitesse au cadran de gauche. La fenêtre LCD est bien plus compacte sur la Kawasaki, mais s'associe plus heureusement à un compte-tours à aiguille. A l'usage, cela est plus efficace en pilotage dynamique. L'oubli principal est celui de l'indicateur de rapport engagé… Enfin, l'ergonomie des commandes est correcte sur les deux modèles, mais la machine d'Akashi bénéficie de poussoirs plus facile à mettre en oeuvre. L'ensemble des fonctionnalités électroniques est disponible dans les essais R1200RS et Z1000SX.
En ville
Deux mélopées se mêlent. Celle, grondante, de la BMW répond au feulement rauque de la Kawa. D'emblée, la sélection de cette dernière se montre plus agréable. La boite claque moins et verrouille avec naturel, notamment sur les trois premiers rapports. De plus, le quatre cylindres se montre bien disponible et souple, capable de reprise à 30 km/h sur le dernier rapport. Le twin, dans sa version liquide, a perdu de sa rondeur à bas régime. Seconde de rigueur, ce qui rend les évolutions moins douces. Car la vitesse supérieure fait hoqueter le flat au dessous des 2 000 tours.
L'Allemande se rattrape en confort, son ergonomie étant plus propice aux évolutions urbaines. Ainsi, les poignets y souffrent peu des freinages récurrents. On note également une meilleure rétrovision. Dans le trafic, les deux machines révèlent une agilité comparable. Leur poids similaire (236 kg pour la RS et 231 kg pour la SX ABS) ne greve pas leur facilité en manoeuvre. Moteur coupé, la Kawa se montre toutefois plus facile à manipuler. Au quotidien, l'une et l'autre satisferont sans mal un usage citadin, en attendant la sortie dominicale, voire bien plus.
Autoroute et voies rapides
Affuté, le bicylindre à plat dispose désormais d'un caractère sportif affirmé, que les grands espaces permettent d'apprécier. Rongeant son frein au légal autoroutier, 4 300 tr.mn, il reprend avec vigueur sur tous les rapports, montant sans hésitation vers sa zone rouge. Bulle en position haute, la protection est efficace jusqu'à plus de 170 km/h et la tenue de cap parfaite. Seuls les bras prennent d'avantage l'air. La SX n'en donne pas tant. Plus aérodynamique, son CX laisse passer plus de flux sur le haut du corps et sa bulle dévie logiquement moins la pression du vent. Les plus grands pesteront alors contre une selle trop courte, limitant le recul. L'ensemble reste cependant efficace pour abattre les kilomètres, l'appui généré allégeant celui du corps sur l'avant. A bord, les vibrations restent contenues et le bloc multi-cylindres prompt à réagir aux accélérations. Toutefois, à 5 000 révolutions-minutes pour 130 km/h, il convient de tomber la 5e pour jaillir vers l'horizon avec plus de force.
Mais au jeu des reprises, la Z1000SX fait mieux que sa comparse, quelle que soit la vitesse de départ. 90, 110, 130… la Kawa s'échappe. De peu certes, mais inévitablement. De même sur un départ arrêté, la Japonaise grignote toujours une longueur. Pas de quoi en prendre ombrage au guidon de la R1200RS, qui attend son heure sur le réseau secondaire.
Départementales
Les modèles flat twin de la marque à l'hélice possèdent un équilibre particulier, une aisance peu commune sur routes. Forte de cette génétique, la nouveauté enfonce le clou, délivrant une agilité et une évidence enthousiasmante. On emmène la monture sans effort, au regard, passant d'une courbe à l'autre comme télécommandée par le très haut constructeur. La virole serrée met d'autant plus en lumière ce châssis rigide, guidé par un train avant un peu léger. Dénué de Telever, il perd en neutralité mais gagne en facilité, sous la surveillance d'un amortisseur de direction.
Au guidon de la SX, c'est toujours plus sport, la Kawa demandant d'avantage d'engagement dans les enchainements. Dynamique, son châssis réagit toutefois efficacement aux impulsions guidon/repose-pieds, virant d'un bloc. Sans reproche en grande courbe, les changements d'angles plus rapides nécessite, comparativement, un peu plus d'application pour passer d'un bord à l'autre. Mais son train avant procure une meilleure lecture du bitume. Particulièrement bien suspendue sur ses équipements non pilotée, la Japonaise autorise un réglage fin, mais manuel, de ses suspensions. Celles-ci travaillent efficacement, absorbant petites et moyens défauts du bitume. Sur les plus grosses compressions, l'amortisseur est un peu plus sec, tout comme la fourche, qui, par défaut, plonge sensiblement.
Même constat sur la Bavaroise et son amortissement électronisé, privilégiant un certain confort, même en mode Dynamique. Particulièrement efficace pour effacer les irrégularités de la route, l'ESA optionnel apporte un vrai plus en cas de duo récurrent ou utilisation des valises. Cependant, le réglage est toujours une évaluation moyenne. Certains préfèreraient sans doute plus de fermeté ou, à l'opposé, plus de confort aux valeurs extrêmes.
Côté mécanique, l'important couple de la BMW fait merveille, dynamisant les sorties de courbes. Et, disposant maintenant d'une allonge puissante dans les hauts régimes, la R1200RS reste une arme de toute première catégorie sur le segment. Trépidante, la bande son s'enrichi de pétarades au rétrogradage. A bord, on roule sur le "gras" du twin, catapulté à chaque remise des gazs dès les mi-régimes. Un plaisir que goutent moins les adeptes des hautes révolutions propres aux quatre cylindres. La Z1000SX fonctionne joyeusement dès 5 000 tours mais s'énerve réellement au-delà de 7 500 tr.mn. Son grondement se fait turbine et le bloc cherche alors à vous satelliser, à l'approche de la zone rouge. Puissant et long, son souffle fait merveille sur les tracés déliés, empruntés à vives allures.
Sur l'angle, la Kawasaki tend à se redresser lors de la prise des freins. Sa rivale bavaroise est moins sensible sur ce point, mais sans Telever, elle se fige désormais d'avantage sur sa fourche. Bonnes freineuses, les deux machines offrent un ressenti différent. Mordant dès la prise du levier, les étriers de la SX délivre des décélérations puissantes mais moins progressives que celles de son opposante. Sur cette dernière, la course morte du levier parait bien longue, mais le système est efficace, autorisant plus de contrôle. Enfin, chacune des GT-sport avoue des pinces arrières un peu timides.
Partie-cycle
Vives et rigides, les concurrentes du jour offrent une philosophie différente. Cependant, leur efficacité reste proche. La BMW procure indubitablement une aisance supérieure au guidon mais son train avant reste avare en retour d'informations. Plus précis, sous la contrainte, celui de la Kawasaki apprécie le pilotage au scalpel.
Freinage
Brembo radial monobloc pour la servante d'Akashi. Ces étriers avants sont parfaitement dimensionnés pour des virées sportives en duo. Leur mise en oeuvre demande toutefois un peu de douceur. La belle de Munich affiche des pinces du même fournisseur, non monobloc, procurant plus de progressivité. A l'attaque, la BMW parait plus simple à maitriser sur ce point.
Confort/Duo
Sans hésitation, la R1200RS fait merveille à ce sujet. Géométrie et selles sont taillées pour les longues virées. De même, la protection à bord et plus importante que celle de sa rivale. Celle-dernière délivre toutefois des prestations correctes, en accord avec son positionnement plus sportif.
Consommation
Le flat est moins gourmand, avec une moyenne de 6 L/100 km, soit près d'une unité de moins que celle du quatre cylindres. A contenance égale, 18 litres, l'autonomie maximale oscille respectivement entre 300 et 250 km.
Conclusion
Il n'est pas si simple de départager nos deux machines. Leur géométrie et mécanique les opposent nettement. Twin à plat, cadre tubulaire acier allemand, cardan, angle de colonne (27,7°) et longueur supérieur de la BMW (10 cm) affrontent quatre cylindres japonais, châssis double poutre aluminium, distribution par chaine et une direction nettement plus fermée (24,4°). L'efficacité est au rendez-vous mais donne à chacune une prise en main bien différente.
Leur tarif pourrait faire la différence. Disponible en standard contre 14 105 €, l'Allemande est plus chère que les 13 399 € de la Japonaise ABS. Et, à ce ce prix, la BMW présente une fourche non pilotée qualitative mais dénuée de réglages… Pour obtenir la RS de notre essai, il faudra tout de même débourser 1 445 € pour le Pack Touring (dont ESA, régulateur, béquille centrale, porte bagage, supports valises…) et 595 de plus pour le Pack Dynamic (dont DTC, mode de pilotage…) Soit environ 2 000 € de plus, pour un total de 16 145 €. De quoi s'offrir valises, poignées chauffantes, selle confort et Indicateur de rapport engagé (1 356 € au total) pour équiper la SX.
L'une et l'autre se dispute les points, tant en terme de finition qu'en agrément et style de pilotage ou d'usage. Certainement la preuve d'excellentes prestations pour chacune, sur un segment ou la BMW doit encore prouver son succès commercial. La R1200RS est une GT-sport, la Z1000SX une sport-GT… nuance importante au moment du choix. Les attentes et le type de pilotage de chacun conditionneront la décision. Ainsi, les amateurs de longs voyages dynamiques et des derniers raffinements technologiques optionnels préfèreront le confort de l'Allemande, surtout en duo. Enfin, les indéfectibles pourfendeurs de bornes à l'affut d'une arsouille, choisiront l'efficacité homogène et éprouvée de la Kawasaki.
Points forts
BMW R1200RS
- Caractère et disponibilité moteur
- Agilité de la partie-cycle
- Cardan
- Confort
Kawasaki Z1000SX
- Caractère et disponibilité moteur
- Sportivité de la partie-cycle
- Finitions
Points faibles
BMW R1200RS
- Bulle perfectible en mécanisme
- Détails de finition
Kawasaki Z1000SX
- Protection perfectible
- Confort
Commentaires
Pour les départager vous pourriez utiliser le critère "valeur à la revente"...
24-07-2015 18:12Et là BM l'emporte haut la main.
Même pas...
26-07-2015 19:23Bmw a tué son marché saturé de l'occasion...
Les reprises par les concessions Bmw sont souvent mal ou sous-cotées...
C'est aussi pour cela que Bm va passer à 2 ans de garantie sur ses occasions pour empêcher la concurrence de reprendre des bmw et donc de gagner des clients...
La sur-cote des BMW n'est souvent pas en leur faveur. Il suffit de voir le nombre d'occasion qui traine sur le marché avant de partir pour bien moins cher.
27-07-2015 00:31Et ce n'est certainement pas un gage de qualité et fiabilité, qui ne sont surement pas meilleures que celles des Japonaises équivalentes.
Le seul plus de BMW est de proposer des options interessantes et bien intégrées. Une machine bien équipée garde alors, effectivement, une bonne valeur de revente.
J'ai un petit faible pour la BMW, malgré que je ne l'ai pas essayée et que je ne sois pas spécialement fan de la marque. Je pense aussi que ça se revend mieux, malgré les commentaires précédents.
29-09-2015 14:41J'ai essayé la Kawa et elle m'a pas emballé, surtout niveau position de conduite. J'étais pas très bien dessus !
Concernant la fiabilité, je n'ai pas le moindre doute : Kawa bien plus fiable !!!
J'ai la Kawa depuis 2011.
28-09-2016 16:10Une fiabilité à toutes épreuves (froid, pluie, chaleur...)
Je roule tous les jours en ville et montagne et c'est un véritable plaisir! Je la recommande à tous!