La moto qui essayait d'être plus futée que toi

Un constructeur essaye de nous faire croire qu'il a collé une IA dans une de ses brêles

Dans un roman de Gibson, j'y aurai cru

I.A. par ci, IA par là ! Un constructeur ouvre un centre de R&D pour les IA. Un nouveau constructeur français affirme avoir mis de l'intelligence artificielle dans sa moto destinée à optimiser la consommation d'énergie et les trajets et de prévoir les besoins de maintenance de la moto. Un autre essaye de nous faire croire qu'il a collé une IA dans une de ses brêles afin d'analyser l'état émotionnel du pilote pour adapter le comportement de la moto. Dans un roman de Gibson, voire un film de Steven, j'y aurai cru. Là, seul le mot « boulechitte » vient à mon neurone.

Reviens à ma mémoire le refrain d'une chanson ("mais j'en suis sûr, sûr, qu'on nous prend pour des cons") datant du milieu des années 90, quand je faisais l'idiot sapé en kaki dans les Vosges -refrain que nous entonnions à tue-tête à l'arrière d'un TRM 4000 conduit par un âne de classe internationale ; mais je digresse. Si Kawa a réussi à caser une IA dans une meule, j'ai des doutes sur le côté pratique de la génératrice électrique de 5 MW à trimbaler partout avec toi pour fournir de l'électricité au bouzin. Mais disons qu'il a réussi ce tour de force technique qui consiste à caser une IA dans une moto et à l'alimenter avec l'alternateur embarqué.

Et ensuite ?

C'est quoi l'intérêt ?

Nan parce que, m'sieur le constructeur, ça existe déjà, c'est en plastique avec quelques bouts de métal dedans et un câble au bout et ça s'appelle une poignée de gaz : plus que t'ouv', plus que ça fait eud' bruit (en théorie). Je suis par ailleurs fort inquiet quand on commence à parler de « générateur d'émotion » perché à califourchon sur une machine vibrante : sera-t-elle déclarée illégale par la Brigade des Moeurs, ou, à l'opposé, remboursée par la Sécurité Sociale comme une séance chez le psy ?

Fort heureusement, une petite start-up française a devancé Kawa dans la mise au point d'un système au fonctionnement similaire, sinon que ses effets sont diamétralement opposés. Baptisé Système de Modération des Emissions Limites non-Linéaires, il s'agit d'un ensemble électronique susceptible d'être monté sur toute moto dotée d'une injection et d'un allumage électronique. Un capteur, placé dans le rembourrage de la selle, recueille des données biométriques spécifiques permettant d'évaluer le niveau de stress du pilote. Ces données sont analysées par un ordinateur de la taille d'un paquet de cigarette et donc facile à loger sous la selle. La partie la plus délicate de l'opération vise à placer le capteur biométrique suffisamment près de la surface du revêtement de la selle pour obtenir de bonnes mesures, sans pour autant en remettre en cause l'étanchéité : l'opération sera à confier de préférence à un professionnel, même si le mode d'emploi de l'appareil précise la marche à suivre. Selon le modèle choisi, la moto pourra être équipée d'un ou deux capteurs : un pour le pilote, l'autre pour le passager.

Pourquoi la selle plutôt que les poignées ? Parce que le capteur serait perturbé par les variations de pression et de position de la main du pilote sur la poignée de gaz et la difficulté d'intégrer gracieusement le système aux poignées passager quand il y en a. De ce point de vue, la selle reste l'élément commun à toutes les motos qui est le plus susceptible d'intégrer le capteur.

Son fonctionnement est très simple et se résume en une phrase :

Le motard se c*** dessus ? ça coupe tout.

S'il arrive la même chose au SDS, il ne se passe rien. Faudrait voir à pas déconner non plus avec la moyenne horaire.

Ou alors, tout va se passer comme pour l'ABS. Au début, tout le monde disait que c'était inutile et que le motard était bien meilleur que cela. Et au final, la législation l'a imposé sur toutes les motos et on n'a plus eu le choix.

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