Essai Honda CB 1100 RS
Quatre cylindres en ligne, 1140 cm3, 90 ch à 7500 tr/min, 91 Nm à 5500 tr/min, 252 kilos, 12999 €
Une version plus "sportive" du roadster néo-rétro
2013 : en pleine vague néo-rétro, Honda sort la CB 1100, non sans nous avoir alléché de jolis concepts bikes sur les salons, à l'instar d'une CB 1100 R qui peine à voir le jour. Qui, plus que Honda, est légitime dans ce domaine ? La moto reprend un patronyme qui n'a fait que, excusez du peu, révolutionner le monde de la moto à la sortie de la CB 750 de 1969, en apportant puissance, fiabilité et en démocratisant le quatre cylindres en ligne dans le monde motard.
Belle, bien que très classique dans sa conception, la CB 1100 de 2013 jouit d'un succès d'estime qui peine à se transformer, sur le plan commercial, en avalanche de pépettes. De fait, Honda retravaille sa copie et la dédouble un an plus tard d'une version EX, encore plus rétro, avec un poil plus de chrome et des roues à rayons.
Pour 2017, Honda fait passer son gros roadster aux normes Euro 4 et relance non pas une, mais deux machines : les EX et RS et non pas Rex, comme le chien, ou le cinéma art déco si vous êtes cultivé. La EX est toujours cette version rétro, la RS se veut plus sportive. Découvrons-là, si vous le voulez bien, mais pour cela il faut passer au paragraphe suivant.
Découverte
Pas de doute, on reconnaît la silhouette de la CB 1100, mais les différences avec la EX sont quand même assez nombreuses : en effet, les périphériques de la partie cycle sont nettement plus sportifs. On passe de roues de 18 à des roues de 17 pouces, les suspensions, toujours de chez Showa, évoluent, avec une solide fourche (dorée dans sa partie inférieure, hashtag #rninet) qui grimpe de 41 à 43 mm de diamètre tandis que les amortisseurs arrière se parent d'une couleur jaune (c'est toujours racing, le jaune sur les amortisseurs) ainsi que d'une bonbonne séparée. Même chose au niveau du freinage, avec des étriers radiaux Tokico et des disques qui passent de 296 à 310 mm. Et cela continue dans le détail avec un nuancier de couleur légèrement différent (jaune, rouge, blanc pour la EX, noir ou rouge pour la RS), une bande "racing" orne le réservoir et de nombreux éléments chromés laissent place à du noir : cuvelage de phare et de tableau de bord, garde-boue, traitement des cylindres...
De fait, le look plus sportif voulu par Honda est bien présent et de l'avis général, la CB 1100 RS a une bonne gueule. Ce qui ressort aussi en la regardant de près, c'est la très bonne qualité de construction et de finition, ce qui n'est pas un mince argument pour une machine vendue près de 13 000 €. On en a pour son argent, c'est toujours mieux à prendre que le sentiment contraire.
Petite touche de modernité : les CB 1100 2017 se dotent d'un phare et d'un feu arrière à LEDs.
En selle
Perchée à 795 mm, la selle devrait convenir à une partie conséquente de notre humanité, d'autant qu'elle n'est pas trop large, que le réservoir est assez fin dans sa partie arrière et donc que la prise en mains est plutôt facile.
Par rapport à la EX, la selle est plus haute de 5 mm, tandis que le guidon est à la fois plus étroit, plus bas et 7 mm plus en avant que sur la EX : résultat, on est un peu plus basculé vers l'avant sur cette version, dans des proportions éminemment raisonnables, cependant.
D'ailleurs, cette machine râblée et compacte, pour une 1100, n'en reste pas moins dense : les 250 kilos sont là et s'ils se font assez vite oublier en mouvement, ils restent présents lors des manoeuvres. Néanmoins, la CB 1100 RS reste facile à béquiller sur la centrale.
Une fois à bord, bienvenue dans le passé : le tableau de bord est classique (compteur, compte tours et fenêtre digitale au milieu) et la façon dont les aiguilles sont traitées, avec l'extrémité contrastée, est un clin d'oeil au passé. Le rapport engagé, l'indication d'autonomie voire, petite gâterie, de la quantité d'essence qui reste dans le réservoir, est plus moderne.
Au démarrage, bonne surprise ! Honda a réussi un coup assez magistral et qui participe vraiment au plaisir de conduite, par une sonorité magique. Non pas qu'elle soit agressive ni trop racée, au contraire, elle est délicieusement vintage : Honda a en effet réussi à reproduire ces raclements de gorge saccadés qui caractérisaient les gros 4 cylindres à carbus et ce son s'imprègne en vous au ralenti, mais même à l'accélération, il reste audible et identifiable. Au jeu du test en aveugle, on jurerait avoir affaire à un vrai Youngtimer !
En ville
Peu de ville sur cet essai, mais un constat quand même : le 4 cylindres permet de reprendre à 1500 tr/min en 4e à 50 km/h, le dosage des gaz est extrêmement doux, l'attaque du freinage est progressive, le rayon de braquage n'est pas ridicule et en plus, il y a un micro espace sous la selle qui permet de loger un bloque-disque.
Sur autoroute et grandes routes
Peu d'autoroute lors de cet essai, mais un constat : la CB 1100 tire long ! A 130 km/h et alors que la zone rouge est à 8500 tr/min, le gros 4 cylindres ronronne à 3.700 tr/min. Autant dire qu'il y a de la marge et que s'il était capable d'emmener son braquet jusqu'au bout, la vitesse de pointe théorique frôlerait les 300 km/h ! Néanmoins, c'est forcément tout bon pour la consommation, puisque le régime bas ne fait pas forcer le moteur. Et puis en plus, le 4 cylindres est rempli partout, donc les reprises sont très correctes.
Lors d'un petit passage sur un bout droit dégagé et par pur acquis de conscience professionnelle, jouons à pousser les rapports. Premier constat : même si le régime maxi est fixé à 7500 tr/min et la zone rouge à 8500, le 1140 est capable d'aller jusque 9500 sans trop s'essouffler : voilà qui est bien pour qui cherche un peu d'allonge entre deux virages, en cas de conduite soutenue, pour faire l'économie d'un changement de rapport.
Synthèse des deux paragraphes précédents : malgré la boîte 6, la seconde entraine jusque 140 km/h, la troisième grimpe à près de 190 (le compteur est gradué jusque 200 et il reste alors 3 rapports à passer...). Ca tire un peu long quand même, tout ça. Lors de cette rapide tentative, il y a avait un début de léger louvoiement, mais il aurait fallu pouvoir tester plus longuement pour être définitif et affirmatif sur ce phénomène. En même temps, rien d'étonnant non plus : la rigidité n'est pas celle d'une sportive et à cette allure, on est un peu accroché aux branches.
Ce qu'il faut retenir, donc, c'est que le souffle du 4 cylindres est largement suffisant pour affronter les longs parcours...
Sur départementales
A 90 km/h, le gros 4 pattes ronronne vraiment à 2500 tr/min en 6e. Autant dire que c'est tranquille pour lui et la CB 1100 délivre un vrai plaisir à musarder en regardant le paysage.
Néanmoins, si on a pris la RS et pas la EX, c'est aussi pour voir ce que valent ses attributs sportifs. Sur petite route, vu l'allonge du moteur, autant dire qu'on ne va pas jouer longtemps de la boîte et que tout peut largement se faire en seconde et en troisième. La boîte verrouille bien (le sélecteur est cependant assez court) et avec l'embrayage anti-dribble, on peut rétrograder haut en régime sans se faire peur. Le freinage est correct, même si les 250 kilos se font sentir lors des gros ralentissements, que la fourche Showa encaisse sans broncher en limitant les transferts de masse. La guidon plus étroit et plus en avant réduit un peu le bras de levier par rapport à la EX et il ne faudra pas hésiter à s'aider de l'appui sur les repose-pieds pour faire tourner cette RS, repose-pieds qui viennent assez vite lâcher le bitume.
De fait, la CB 1100 RS promet du sport, oui, mais cela reste du sport à l'ancienne : n'espérez pas aller mettre la misère à un roadster moderne genre CB 1000 R, elle avouera ses limites bien plus tôt. Ce qui ne l'empêche pas de délivrer un vrai plaisir de conduite, une fois que l'on a intégré ses limites et son inertie, car elle reste une machine saine.
Par contre, avec ses petits pneus et son guidon plus haut, la CB 1100 EX est plus agile et au final, pas beaucoup moins efficace. Un comble...
Partie-cycle
Que du classique ici : un cadre en double berceau et des suspensions réglables en précharge, su lesquelles nous n'avons pas pu jouer, faute de temps... Par rapport à la EX, la RS peut mettre en avant des mouvements de transferts de masse nettement plus contenus au freinage.
Freins
Avec son dispositif plus costaud, la RS est un poil plus efficace au freinage, mais ce n'est pas non plus le jour et la nuit par rapport à la EX, la qualité de la fourche jouant aussi dans le ressenti final. Ce que l'on peut dire, c'est que malgré le poids et l'allonge, le freinage est au niveau avec un bon feeling, un parfait dosage entre progressivité et puissance et un ABS qui a le bon goût de ne pas se déclencher intempestivement.
Confort et duo
Le kilométrage nous a manqué pour être définitif sur ce sujet, mais la selle semble bien dessinée et rembourrée, tandis que les amortisseurs arrières restent prévenants avec vos lombaires en détente. De fait, il n'y a pas de quoi être trop inquiet sur ce chapitre. Le passager dispose d'une petite barre sous la selle pour se tenir, ça vaut que ça vaut. A noter cependant quelques vibrations mécaniques, sensibles à mi-régime dans le guidon et autour du réservoir.
Consommation / autonomie
L'ordinateur de bord indiquait 6 l/100 lors de cet essai. Avec une contenance de 16,8 litres, il y a donc de quoi voir venir. A noter qu'en plus de la jauge à essence matérialisée par quatre ou cinq petits carrés, l'ordinateur de bord indique la contenance restante au dixième de litre près. Bien utile pour envisager une traversée du Morvan un dimanche soir...
Conclusion
Que Honda laisse le choix entre une version "classique" et une autre plus "sportive" de sa CB 1100 est une bonne chose. Les univers esthétiques sont différents et en fonction des sensibilités de chacun, elles pourront s'exprimer au mieux. Ce qui les rassemble, c'est, outre l'excellente qualité de finition et de présentation, un 4 cylindres souple, onctueux, avec beaucoup d'allonge et qui, surtout, sonne "comme dans le temps" sans emmerder les voisins. Bien joué !
Maintenant, il faut être franc : la CB 1100 est une moto saine et amusante à emmener à un rythme rapide et coulé sur petite route, mais les attributs de la RS ne la transforment pas en sportive pour autant. Un chouia plus rigoureuse que la EX, elle est aussi un peu plus exigeante à emmener pour au final, un niveau d'efficacité qui est en fait similaire.
A chacun sa façon de cultiver la nostalgie...
Points forts
- Look soigné
- Qualité de finition
- Confort qui semble correct
- Sonorité très vintage
- Moteur souple et onctueux
- Plaisir de conduite
Points faibles
- Démultiplication qui tire un poil long
- Garde au sol en courbe
- Un peu trop pataude pour être vraiment sportive
- Quelques vibrations sensibles
La fiche technique de la Honda CB 1100 RS
Conditions d’essais
- Itinéraire : une cinquantaine de kilomètres (sic) dans les environs de Barcelone (Espagne)
- Kilométrage de la moto : 900 km
- Problème rencontré : aucun dans l'absolu, mais bon...
La concurrence : BMW R nineT, Triumph Thruxton
Commentaires
J'aurais bien aimé un double essai RS / EX 2017 (là, il n'y a que quelques allusions). Il y a quand même de quoi hésiter en ces deux modèles, même si la RS est mieux équipée pour à peine plus cher.
05-04-2017 08:37Merci de votre commentaire, et sachez que nous faisons le maximum pour vous servir : nous avons d'ailleurs été les premiers à vous informer sur ce lot de nouveautés Honda. Néanmoins, les conditions d'essai ne permettaient pas, en plus de couvrir la EX.
05-04-2017 14:16On essaie de vous en proposer un essai complet et spécifique d'ici peu
Merci de nous suivre,
Philippe
Merci pour l'article, toujours bien fait.
05-04-2017 16:42Je suppose que la vitesse de pointe est plus élevée que celle de sa devancière?
Ben en fait, si on regarde les démultiplications (un poil longuettes...), 130 à 3700 tr/mn en 6, ça fait 260 à 7400, donc 265/270 à 7500, le régime de puissance maxi. Avec 90 ch, il n'y a aucune chance de parvenir à tenir ce braquet en 6. Donc la vmax, que nous n'avons pas pu vérifier lors de cet essai, doit probablement se faire en 5ème, autour de 210/220 compteur... voire peut-être même en 4.
05-04-2017 18:37On retentira l'expérience lors de l'essai de la EX, éventuellement,
Philippe
Soit 10 à 20 de plus que l'autre environ...
10-04-2017 14:27Merci!
Petit essai aujourd'hui. Moteur très plaisant, comme la machine par ailleurs.
04-07-2017 16:36C'est coupleux, très souple, confortable, ça freine bien. Petit bémol sur le frein arrière qui déclenche un peu trop l'ABS à mon gout. On ne sent absolument pas les 250 kg, elle est facile à manipuler à l'arrêt. Elle est assez aisée à emmener sur l'angle.
En usage "sportif" (suis pas un essayeur ni un pilote mais bon habituellement je roule sur un VFR 800 qui sans être une sportive pure et dure permet quand même de s'amuser sans être un pro) on trouve assez vite les limites : j'ai noté un léger louvoiement à vitesse élevée, j'ai trouvé que sur des grosses accélération le train avant avait des réactions pas très saines (impression de délestement sur l'avant) et que ça tortillait vite si on la brusquait un peu en virage rapide. Bon clairement c'est pas au niveau des machines modernes mais c'est pas la vocation de la machine.
Une super machine pour se promener même à un bon rythme mais sans bourrer, avec un moteur et un caractère attachant, belle, confortable mais qui manque d'aspects pratiques (comptez pas partir en voyage avec topcase, bagagerie etc.)