Que vérifier à l'achat d'un Youngtimer ?
Conseils et avis des pros de la moto de collection
Moteur, carrosserie, état général, frais à prévoir...
Quand le futur est incertain, on a tendance à survaloriser le passé, c'est normal. Et quand en plus, d'autres éléments de contexte convergent vers cette tendance, tout devient cohérent. Puisque l'on ne peut plus rouler vite, roulons différent ! Et tiens, pourquoi pas sur la machine de notre jeunesse, celle qui nous a mis le pied à l'étrier ou qui, justement, nous a fait tellement rêver et que l'on ne pouvait s'offrir à l'époque. Ces machines, qui ont entre vingt et quarante ans, on les appelle des Youngtimers, en contraste avec de simples occases vieillissantes et des machines de collection plus anciennes et vénérables. La tendance est forte au point qu'un magazine dédié, géré de main de maître par notre confrère et ami l'excellentissime Michel Bidault, a inondé les mètres linéaires des boutiquiers et avec un certain succès puisque de trimestriel, il est désormais passé bimestriel et c'est Youngtimers Moto.
L'avantage majeur des Youngtimers, c'est que ce sont des machines nettement plus fiables que celles des générations précédentes. Freins à disque, allumages électroniques, démarreurs électriques, elles sont souvent peu capricieuses et peuvent même, dans la plupart des cas, offrir un vrai usage polyvalent si ce n'est quotidien.
Mais attention : une machine de 20 à 40 ans, par définition, n'est pas neuve. Elle a ses petites manies. Elle a un vécu, un historique d'entretien parfois hasardeux. Une belle peinture pailletée ne doit pas cacher la misère. Voici quelques conseils, à appliquer en plus des conseils de base propres à l'achat de toute machine d'occasion : papiers en règle, concordance des numéros de série,
Avant l'achat : quid de l'écosystème ?
Ce n'est pas le tout de s'imaginer vivre une relation épanouie avec la moto de vos rêves, encore faut-il être un peu réaliste et penser aux aspects pratiques. Car ne vous faites pas d'illusion : aujourd'hui rares sont les "mécaniciens moto" qui savent encore mécaniquer et, expérience vécue, quand vous vous pointerez avec votre vieille Bol d'Or dont les carbus fuient, chez le concessionnaire du coin qui pourtant, représente la marque, il y a de fortes chances qu'ils vous envoient balader. Aujourd'hui, dans les concessions, on fait des vidanges et on passe la valise diagnostic. C'est triste, mais c'est comme ça. Mais c'est triste quand même.
Faire preuve de réalisme, c'est pouvoir répondre à ces questions : est-ce qu'il y a encore des pièces mécaniques dans le réseau ? Est-ce que, si je m'en mets bêtement une à l'arrêt, vais-je trouver un flanc de carénage dans le coloris d'origine ? Et des plaquettes de frein, ça existe encore ? Et qui sera capable de me faire une bonne révision ? Mon "centre moto discount" de quartier ?
Heureusement, internet est votre ami et la presse spécialisée aussi est en mesure de vous donner des informations. Souvent, vous trouverez des clubs spécialistes de ce modèle particulier, menés par des individus d'une folle érudition ! Ils sauront vous dire où commander des pièces à l'étranger, où trouver un spécialiste capable de refaire un embiellage ou de remettre en forme une rampe de carbus, voire un turbo. Et vous allez entrer dans un monde de passionnés à la passion assez addictive. Avec une question subsidiaire : dans certains cas, maîtriser l'anglais sera utile, car les sources d'informations et de pièces se trouvent souvent et principalement dans 4 pays : USA, Angleterre, Allemagne et Japon.
Il est toutefois nécessaire d'effectuer ces recherches avant de passer à l'acte, car la vivacité des clubs ne suit pas toujours de logique, en relation avec le pedigree et la diffusion de la moto de vos rêves. Pour une rare BFG, vous trouverez tout, par exemple. Pour une Yamaha 125 DTMX, des forums peu actifs, mais avec énormément d'infos. Pour un scooter Honda 125 Spacy pourtant largement diffusé ? Rien du tout ! Et pas beaucoup plus pour une VF750F, première sportive avec un V4 où vous allez devoir vous retrouver à faire un remake de seul au monde avec Tom Hanks ! Par contre, pour un Kawasaki Stinger, il y a des spécialistes...
Pendant l'achat : des indices, qui ne suffisent pas...
Etat cosmétique, partie-cycle et mécanique
Il y a trois grandes rubriques à respecter :
L'état cosmétique
La machine est-elle complète ? Dans quel état sont les plastiques, la selle ? Est-ce que tous les indicateurs du tableau de bord sont fonctionnels ? Si vous êtes dans l'optique d'avoir une machine en bel état (soigner la nostalgie ne souffre pas de médiocrité), ces détails sont d'importance, car retrouver le petit logo d'époque ou le couvercle de réservoir émaillé risque d'être un peu compliqué. Et faites attention à ce que les accessoires soient du bon millésime : on a vu des BMW R 90/6 avec des clignos de série 5 et une fourche et un tableau de bord de Série 7. Dans le fond, ce n'est pas étonnant : ces machines ont parfois couvert plusieurs centaines de milliers de kilomètres.
L'état de la partie-cycle
Là, il suffit de faire preuve d'un peu de bon sens et de méthode. Est-ce que les roues sont alignées ? Est-ce que les suspensions sont rincées ? Dans quel état se trouvent les consommables (pneus, plaquettes) ? Est-ce que les roulements de fourche ou de bras oscillant sont en bon état ? Rien de tout cela n'est rédhibitoire, mais une réfection globale du châssis (après tout, il en va de votre confort, de votre sécurité et surtout, de votre plaisir de conduite), peut commencer à coûter un bras.
L'état de la mécanique
Là, il y a les gros indices. Des carbus qui fuient, des suintements d'huile partout, des culbuteurs qui jouent les castagnettes en cadence de la Lambada (dont, petite parenthèse culturelle, la mélodie originelle viendrait des frères boliviens Ulises et Gonzalo Hermosa, qui, eux, la jouaient à la flute de pan et avec un gros bonnet en laine de lama, non, pas Serge), des grosses fumées bleues ou blanches, des embouts d'échappement. Ne pas s'enflammer avec les faux indices, genre faire le marabout de la couleur de la bougie. Avec le sans-plomb moderne, elles sont quasiment toutes blanchâtres.
L'hypothèse de la restauration...
A partir de là, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Pas forcément, car on l'a vu plutôt deux fois qu'une, une belle peinture pailletée dans la belle teinte acidulée de l'époque peut masquer une vraie misère. Car à moins d'un démontage, comment être sûr de l'état réel de la mécanique de cette machine de plus de 30 ans et qui a probablement connu une première vie sportive et agitée, avant l'instauration de la religion RCA (Radar et du Contrôle Automatisé).
Pour en savoir un peu plus sur ce qui se cachait au fond des embiellages, nous avons demandé aux experts de Passion Motor Sport situés dans un atelier / loft à Villemandeur, près de Montargis (45) où ils proposent aussi de regarder les GP sur grand écran entre passionnés, de nous expliquer en quoi consiste un boulot de restauration. Ils sont spécialisés dans la restauration de machines toutes marques (ils ont en chantier une Honda 1100 CBX et une Motobécane de 1926) et s'occupent aussi de la préparation et de l'entretien des Kawasaki du Hampe Racing, multiple vainqueurs (4 fois) du Bol d'or Classic et de courses historiques à Spa-Francorchamps. Bref, la moto ancienne, c'est leur truc et on peut admirer dans leur atelier des engins aussi variés et dans des états de travaux divers, qu'une Honda 350 Four, une Suzuki GT 750, une Kawasaki 900 Ninja, une Suzuki T500 et des Kawasaki Z1000R.
- Et nos amis de nous conter l'histoire de cette Suzuki T500 qui présentait bien, qui démarrait avec une toute petite fumée, mais dont le joint spy de vilebrequin (une faiblesse récurrente sur les 3 cylindres Suzuki ayant de la bouteille) était mort. Résultat : moteur dans le sac. Or, il n'y a plus que deux personnes en France qui savent refaire et rééquilibrer des vilebrequins de Suzuki 3 cylindres 2 temps. "Et dans ce cas, il faut que le type, qui est généralement à la retraite et qui fait ça en plus, t'accepte comme client, car c'est lui qui choisit avec qui il veut travailler. Et tu ne discutes pas les tarifs ni le timing. D'ailleurs, faut être patient", nous expliquent nos hôtes. Et tout cela a un coût : un réalésage, c'est 600 € pour les 3 cylindres, un vilebrequin, c'est 700 €.
- Il y a aussi la question de tout l'assemblage mobile. Pistons, segments, soupapes, culasse : tout finit par s'user et ne plus être vraiment étanche. Ca commence par consommer de l'huile, être moins performant et ça finit par casser.
- Et une fois que tout est remis en place, il faut encore savoir la régler, cette machine. Outre les appareils de réglage de carbus à cuves, le must reste un passage au banc, afin d'optimiser les bonnes aiguilles et les bons gicleurs en fonction du dispositif d'admission d'air. C'est bien beau de monter un échappement racing d'époque et une jolie rampe de filtres KN en cornet, si les réglages ne sont pas adaptés, c'est de l'énergie, du temps... et surtout de la puissance perdue, en nous citant le cas d'une Kawasaki Z900 à châssis Martin, arrivée sur le banc en faisant 47 chevaux et en repartant avec 92...
Bref, on assiste à trois types de profils de machines dans le monde du Youngtimer : celle raide de neuve, entièrement restaurée par une officine renommée et qui va être en gros à 150 % de la cote. Il y a aussi celle à la cote, dont l'historique repose parfois sur 3 factures et demie à la provenance floue et on repart avec un truc dont, au final, on ne sait rien. Sur un malentendu, ça peut marcher ! Et une machine un peu patinée, achetée en dehors des boutiques clinquantes et spécialisées, à laquelle on peut offrir une restauration complète, afin de pouvoir en profiter comme aux premiers jours. A chacun sa voie...
Commentaires
Je confirme, pour m'être fait envoyer paitre de chez un gros concessionnaire avec un 1100 GSXR, "ah non, ces motos, on ne les prends que en hiver, au printemps, on les accepte plus"
29-03-2017 19:32tom4
Il faut bien comprendre qu'avec ces machines si on est pas un mec adroit de ses 10 doigts il vaut mieux laisser tomber. 2 mains gauches, ça ne suffira pas!
30-03-2017 08:22Une machine "d'époque" même trés bien restaurée, c'est une machine ou certains matériaux ont vielli et les casses de tout un tas de petites conneries sont régulières, donc si on ne veut pas laisser sa paye au concessionnaire pas toujours trés efficace, il vaut mieux savoir bricoler.
De plus, certains modèles anciens n'étaient pas du tout fiables et il vaut mieux bien se renseigner avant de se lancer dans un achat qui aura vite fait de finir en pièces au fond du garage.
....et si on remonte loin; les freins à tambour, c'était des freins de vélos qui pouvaient perdre toute efficacité à l'échauffement ou bloquer brutalement à froid, alors attention à ceux qui n'ont connu que les freins à disques efficaces
D'accord avec TOM.
30-03-2017 12:37Si on ne bricole pas, vaut mieux s'assurer qu'on a un bouclard à l'ancienne pres de chez soi.
Et aussi, que la moto visée a un forum sympa sur le net. C'est important, ça aussi. C'est sympa et ça dépanne bien.
J'ai essayé de m' inscrire par exemple que un forum d'italienne.
J'attends encore le lien pour l'inscription depuis un mois.
Ca compte aussi.
d'accord avec tout, bien sûr, sauf que les premières 90S (1974) avaient des clignos alu et que c'est la première chose qu'on montait sur les suivantes, z'étaient plus beaux et plus solides, si vous avez des clignos de béhème en alu, faut les garder, c'est introuvable
30-03-2017 13:04c'est aussi très dur de trouver une japonaise des années 70 avec les amortos d'origine, z'étaient remplacés d'office par des bons
Ouais, comme le fait justement remarquer commando, les machines anciennes etaient trés imparfaites et souvent on y rajoutait les trucs indispensables (amortos pompes à vélos, phares additionnels à cause du manque de puissance de l'origine, carénages faits de bric et de broc, porte bagages plus ou moins adaptés et le fait de remettre tout à l'état concours, on reprends tous ces défaut qui énervaient......
30-03-2017 14:18