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Génération : KTM Superduke

De la 990 de 2005 à la 1290 R de 2017, 12 ans d'histoire et de souvenirs

Retour sur la carrière d'un roadster acéré et "ready to race"

C'est au début des années 90 que KTM a souhaité se diversifier et aborder le marché routier, voyant dans le bitume une belle opportunité de croissance et il faudra une dizaine d'années avant que cette stratégie ne passe à l'échelon supérieur avec une nouvelle clientèle à cibler. Car si KTM (pour rappel, la firme est née au début des années 50 et a conçu des machines très variées, du scooter Ponny au chopper 80 et 125 L avant de se spécialiser dans le tout-terrain) a conçu son premier gromono 4-temps en 1982, il faut attendre 1996 pour que le bloc LC4 conçu en collaboration avec Rotax se démocratise avec l'apparition d'un démarreur électrique, ce qui permettra d'étoffer la gamme avec des modèles Supermoto et Adventure. Mais l'image "racing" qui colle déjà fortement à KTM et le caractère de ses monocylindres performants (chez les japonais, le monocylindre est passé de mode) limite l'extension de la clientèle. Le salut viendra du bloc LC8, conçu en interne (mais sous la supervision de Claus Holweg, un transfuge de chez Rotax). Ce moteur arrive d'abord dans une version 950 cm3 et à carburateurs, dans l'Adventure et cette machine séduit par sa patate, son châssis précis, ses réelles aptitudes en TT, moins par son freinage léger et sa selle en bois.

Généalogie : KTM Superduke
Généalogie : KTM Superduke

Peu importe, car le LC8 est dans la place. Ce moteur est ingénieux, car il est très compact (angle de 75°) et le centre du V intègre un arbre multifonction qui actionne pompe à huile et à eau.

Dernier détail et pas des moindres : le LC8 ne pèse que 56 kilos, à comparer avec les 68 kilos d'un V2 Aprilia Tuono, les 73 kilos des blocs des Honda VTR et Suzuki TL, ou encore les 75 kilos d'un Desmoquattro de Ducati 999 contemporain... Le poids, ça a toujours été l'ennemi et KTM parvient à cet objectif grâce à une conception moderne du moteur, avec par exemple l'usage d'un vilebrequin monobloc qui pèse moins de 5 kilos... soit 3 de moins que celui d'une Suzuki TL.

Ce qui suit est donc un recueil de souvenirs d'essayeur au gré de roulages variés, mais toujours joyeux au guidon de la pétulante Autrichienne qui permet, façon coup d'œil dans le rétro, de retracer la généalogie de la Superduke.

2005 : essai de la première 990 Superduke

Généalogie : KTM Superduke de 990 de 2005
Généalogie : KTM Superduke de 990 de 2005

"Wilkommen", disent les panneaux à la sortie de l'aéroport. Je suis aux Canaries et cet archipel a parfois des airs de colonie teutonne, notamment dans l'île de Fuerteventura. Nous logeons dans un hôtel gigantesque et anonyme, mais peu importe : les routes du coin sont d'enfer, avec notamment un bitume parfait et un tracé sinueux dans un décor volcanique et, surtout, nous sommes ici pour découvrir la nouvelle 990 Superduke. Et c'est peu de dire qu'elle intrigue.

Rappel du décor : à cette époque, le monde du gros roadster est composé de machines sympa, mais pataudes d'un côté (GSX, XJR), de sportives dénudées de l'autre (Aprilia Tuono V2, Ducati Monster S4R), et, entre les deux, de machines qui jouent sur leur look agressif sans avoir un châssis aussi précis que celui des Italiennes (Kawasaki Z 1000, Triumph Speed Triple). Et n'oublions pas une pure curiosité telle que la Benelli 1130 TnT. Quand arrive la KTM 990 Superduke, certes, le look divise (comme tout ce qu'aura produit, d'ailleurs, Gerald Kiska), mais impossible de ne pas craquer devant le caractère généreux des 120 chevaux du moteur LC8, ni devant ce châssis affuté, avec ces freins puissants et précis, ces suspensions rigoureuses. La moto est explosive, un des essayeurs invité finira d'ailleurs sous un rail de sécurité et se fracturera une épaule. La selle est un peu dure, la consommation est élevée et la finition est inégale, mais KTM doit travailler sa pédagogie et expliquer que l'on paye pour un châssis et des périphériques de qualité, pas pour un cache en plastique dessiné pour cacher la misère d'une tôle emboutie...

En tous cas, avec ce coup d'essai, KTM a marqué les esprits ! Ce bloc passera d'ailleurs, dans une version légèrement dégonflée, dans l'Adventure 990 qui abandonnera ses carbus.

2008 : une petite remise à jour

KTM Superduke 990 de 2008
KTM Superduke 990 de 2008

Hiver 2008 / 2009. Il fait un temps pourri à Paris. On prend la crème des roadsters turbulents de l'époque et on les emmène pour 3 jours de tests dans le sud de la France, en Provence et sur la Route des Crêtes. Au programme : Buell 1125 CR (qui tombera rapidement en panne d'embrayage, du coup on fera toutes les photos d'action en la poussant, mais comme on est des pros, ça ne se verra pas dans les photos et la Buell fera donc le comparatif dans le camion), Triumph Speed Triple, Honda CB 1000 R (elle aussi finira cassée, avec un essayeur reposant de travers une roue arrière avec des pneus froids - quand ça veut pas, ça veut pas...- et il restera d'ailleurs quelques jours à l'hôpital de Cassis) et Ducati Monster 1100.

Et là, y'a pas photo : la Triumph est sympa, mais un peu empotée, la Honda efficace, mais chiante, la Ducati est limitée en allonge et en garde au sol. Dans ce contexte, la KTM n'a pas pris une ride, avec son moteur toujours explosif, mais un peu plus souple et son châssis lui permet de mener la meute dans le sinueux. Et ce, d'autant que les nouveaux coloris sont un peu plus classe, notamment ce blanc et que le réservoir a pris 3,5 litres (en passant de 15 à 18,5 litres) ; comme c'est bibi qui avait la mission de récupérer la KTM chez l'importateur à Lyon et de rejoindre ses camarades en Provence, ça permettait (un peu) de limiter les pleins...

2011 : une fin de carrière la tête haute

KTM Superduke 990 de 2011
KTM Superduke 990 de 2011

Été 2011 : on reconvoque le gratin des roadsters et la 990 Superduke répond toujours à l'appel. Cette fois-ci, le terrain de jeu, c'est le Jura et une fois de plus, c'est moi qui me colle le trajet et la logistique depuis Lyon, mais si ma mémoire est bonne, j'étais reparti avec une RC8 R pour un autre comparatif (où elle affronta une Ducati 1198 et une Bimota DB8 sur route et sur piste et où elle démontra une homogénéité qui fait que son relatif échec commercial fait figure d'injustice).

Dans les monts du Jura, la Superduke croisa la fer avec la dernière Kawasaki Z 1000, la Triumph Speed Triple, la Ducati Monster 1100 Evo et la MV Agusta Brutale 920, qui elle, fut une vraie déception avec son moteur rugueux et ses suspensions bas de gamme. Certes, la Superduke était immatriculée en plaque autrichienne et ainsi, arrivait en full power et s’était montrée une nouvelle fois totalement insuivable sur une petite route de montagne, ses suspensions de qualité suffisant à elles seules pour prendre les devants. Évidemment, son look avait pris un petit coup de vieux, à peine compensé par des coloris noir et or se voulant, une nouvelle fois, assez classe, mais sa technologie commençait à prendre un coup de vieux (pas d'ABS). Au final, c'est la Triumph Speed Triple qui remporta le comparatif, grâce à sa polyvalence et au gros gain en agilité apporté par le châssis 2011, mais la Superduke ne déméritait pas, d'autant que KTM avait baissé son prix à 10 990 €.

Par la suite, KTM eut aussi une version R de la 990 Superduke, avec une puissance en hausse de 12 chevaux (132 au lieu de 120), un couple en hausse de 0,2 m/kg, à 10,4, des suspensions plus évoluées et une ergonomie différente grâce à une selle monoplace. Je ne vous en parlerai pas, faute de l'avoir essayée.

2014 : la 1290 R, un énorme bond en performances !

Généalogie : KTM Superduke 1290 de 2014
Généalogie : KTM Superduke 1290 de 2014

En 2015, je récupère une 1290 Superduke R pour un essai qui prendra la forme d'un week-end balade avec une bande de potes, avec une virée dans le Morvan au départ de Paris, principalement par les petites routes, puis une extension en Bourgogne et en Pays de Bresse, jusqu'au circuit éponyme, puis un beurk-retour par l'autoroute. Et ceci en compagnie d'une bande aussi joyeuse que disparate, puisque composée d'une BMW R 1200 GS, de deux BMW R 1200 RT et d'un pur débutant qui fit sa première sortie et avec les honneurs, sur une Kawasaki Er-6f.

Autant dire que le potentiel de la Superduke ne fut pas réellement mis à rude épreuve et que ce sont ses qualités de souplesse moteur (supérieure à celui de la 990) et de confort (là aussi supérieur à ce que les lignes acérées laissaient supposer) qui ont d'abord transparu. Ensuite, dans quelques moments d'évasion sportive, elle se révéla évidemment capable de déposer le reste de la troupe en un claquement de doigts (ou une franche rotation de la poignée), mais avec un style différent : là où la 990 se laissait mener en courbe d'un coup de guidon, sans mode d'emploi particulier, la 1290 était un peu moins agile et demandait plus d'engagement de la part du pilote, avec notamment plus de mobilité au guidon et de pouvoir coercitif au niveau du train avant.

Il n'empêche : même sur les routes défoncées du Morvan et de la Bourgogne, ce bout de route en 1290 Superduke R fut un réel bonheur, même si elle était bridée, malgré sa plaque autrichienne. Et si l'électronique avait fait son apparition, sur le sec et avec 100 chevaux, ça ne laissait pas tellement beaucoup d'opportunités pour jouer avec. Autant dire que j'attends avec impatience de voir où sont les limites du millésime 2017, avec ses 177 chevaux, son ABS avec fonction virage !

Et tout ceci montre que le concept "ready to race" n'est pas incompatible avec du plaisir pris sur le réseau secondaire, toutes les Superduke se distinguant par des suspensions de très haute qualité...

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