Essai MV Agusta Brutale 800 RR
L'exception italienne prodigue des sensations fortes. Vraiment fortes !
3 cylindres en ligne, 798 cm3, 140 ch à 12300 tr/mn, 87 Nm à 10100 tr/mn, 175 ch, 15770 €
Le roadster de moyenne cylindrée, c'est le gras du marché en France. Du coup, des roadsters de moyenne cylindrée, on en à la pelle, sauf chez Honda qui n'aime jamais faire les choses comme tout le monde. Parmi l'offre, certaines se distinguent par leur caractère joueur : on pense à la Triumph Street Triple 765 RS ou à la Yamaha MT 09 SP, par exemple.
Du coup, cette MV Agusta Brutale 800 RR pose plein de questions. Un roadster mid-size, certes, comme le gras du marché le demande. Une cylindrée de 798 cm3 entre la Triumph et la Yamaha, avec une architecture de trois cylindres, comme eux. Par contre, on est sur une gamme de prix digne d'un roadster de grosse cylindrée (une Aprilia Tuono V4 1100 RR est moins chère de presque 1000 euros) tandis que le niveau de puissance, certes respectable, est à mi chemin entre les gros roadsters et les moyens.
Bref, a-t-elle le fondement entre deux chaises ? Ne vaut-il pas mieux économiser ses sous et acheter l'un des deux roadsters mentionnés en introduction et avec le reste, offrir des fleurs à sa grand-mère ? Ou alors est-ce que cette MV est une moto parfaitement cohérente, qui aurait pour qualité de nous faire découvrir ce qu'est l'exception à l'italienne. C'est avec ces questions absolument pertinentes (je sais, merci) et d'un suspense insoutenable que je vous propose de poursuivre la suite de la lecture de cet article.
Découverte
Elle le porte bien sur elle : la Brutale RR est une athlète. Fine, ciselée, tout en muscles, elle ne demande qu'à bondir, ne trouvez-vous pas ? Entre le monobras, la triple sortie d'échappement bien intégrée sur le côté gauche, la coque de selle, minimaliste, avec cet espace vide sous le pilote et qui renforce encore le sentiment de légèreté, cette machine semble campée sur son train avant, prête à mordre les virages.
Bon, c'est subjectif, tout cela, mais l'engin est racé. Et effectivement, par rapport à une Street Triple ou une MT-09, certes bien construites, le niveau de précision semble supérieur. De quoi justifier, déjà, l'écart de tarif.
Par rapport à une Brutale standard, la RR se différencie par quelques détails de finition (liséré sur les jantes, cadre rouge sur la version blanche), mais aussi par son feu avant à LEDs. Bien entendu, il y a aussi des écarts plus que sensibles au niveau du moteur, que l'on vous détaille ci-dessous et qui justifient l'écart de tarif de quasiment 2.000 euros.
En selle
C'est fin, c'est ferme et c'est relativement haut, à 830 mm. Autant dire que le pilote d'1,70m ne met pas pied à terre. Néanmoins, les arêtes de selle ne sont pas trop prégnantes et le réservoir reste fin en sa partie arrière, donc ça va pour les grands. Une fois au guidon, on découvre un tableau de bord digital, mais qui n'a pas l'unité couleur de dernière génération vue sur la Gran Turismo Lusso 800 SCS. Ce tableau de bord est complet mais certaines données sont en tout petit, donc pas faciles à lire. En tous cas, on peut régler son niveau de contrôle de traction, de cartographie moteur ou encore de niveau d'intervention d'ABS.
Moteur et transmission
Là, il y a tout de même de grosses différences avec la MV Agusta Brutale 800 déjà essayée sur Le Repaire. Car les performances et le rendement de la mécanique sont d'un tout autre niveau. En effet, une Brutale 800 développe 110 chevaux à 11500 tr/mn et 83 Nm de couple à 7600 tr/mn (certes, nos lecteurs les plus érudits se rappellent que par le passé, une Brutale 800 développait 125 chevaux avant de devoir redescendre à 116, notamment pour des questions de réduction des bruits mécaniques).
Une RR, ça joue carrément dans une autre catégorie : ici, le trois cylindres de 798 cm3 développe 140 chevaux à 12300 tr/mn et 87 Nm à 10100 tr/mn. On voit dans les deux cas que si les valeurs augmentent, les régimes de rotation aussi, notamment au niveau du couple moteur.
On notera également la présence d'un shifter up & down, efficace à l'usage. C'est même un vrai régal d'arriver fort sur les freins et de descendre des rapports à la volée, entre les pétarades et les petits coups de gaz de l'électronique.
En ville
Le rayon de braquage n'est pas formidable mais c'est pas non plus impossible. Par contre, la sonorité du trois-cylindres n'est pas forcément très agréable à bas régime (une sorte de grognement sourd, avec beaucoup de bruits mécaniques). De même, le moteur a vraiment peu d'inertie à la réponse à la poignée de gaz et il peut arriver de caler quand on n'a pas l'habitude. Bref, il y a mieux pour le néophyte. Néanmoins, le trois cylindres est relativement souple. Mais la boîte de vitesses reste assez ferme et le moteur chauffe vite en ville. On sent donc que cette machine réclame surtout des grands espaces.
Sur autoroute et grandes routes
244 km/h ! C'est la vitesse de pointe à laquelle MV présente cette Brutale 800 RR et finalement, s'il restera difficile de plaider votre cas devant un tribunal en cas d'excès, la différence n'est pas si tranchée que cela avec la Brutale 800 standard, qui est déjà donnée pour 237 km/h. Donc, à la question de savoir si ça dépote, la réponse peut tomber d'elle-même : oui ça dépote et salement, même.
La position de conduite est un peu sur l'avant et du coup, cela permet de courber un peu l'échine afin de mieux lutter contre les éléments. Néanmoins, si elle n'a évidemment aucune disposition au tourisme, la 800 Brutale RR a des ressources pour tailler de la borne. A 130 km/h, son trois cylindres tourne aux environs de 6000 tr/mn (le compte tours n'est pas lisible avec une grande précision), le moteur ne donne que la moitié de son potentiel. Côté stabilité, c'est un rail.
Sur départementales
Conseil d'ami : choisissez des routes revêtues façon billard. Car la MV Agusta Brutale 800 RR est du genre ferme, très ferme, même. Mais si votre truc, c'est la conduite rapide, alors cette MV est un régal absolu. On découvre en effet une combinaison gagnante et là, aucune des concurrentes citées en introduction n'est au niveau. Entre le train avant de malade qui permet des inscriptions en courbe chirurgicales, le vilebrequin contrarotatif qui permet de réduire l'effet gyroscopique global, le grip des Pirelli Supercorsa et la qualité globale du châssis, on se surprend à rouler comme sur une sportive, avec beaucoup de confiance et d'engagement dans le train avant.
Bref, ça trace, ça dépote. Dans ce type de conduite, il est préférable de conserver le trois-cylindres au-dessus de la barre des 7000 tr/mn. Mais entre la sonorité qui devient sympa, nettement plus profonde, rauque et déchirante à la fois, l'agilité et la précision de la machine, difficile de rester sage au guidon.
Et au-delà des performances, il y a aussi l'émotion. Ici, on est également dans une autre catégorie et la MV sort facilement vainqueur d'une confrontation avec ses concurrentes du même segment.
Partie-cycle
Elle est identique sur la Brutale 800 et la RR : fourche inversée Marzocchi à l'avant (diamètre 43 mm, débattement 125 mm) et amortisseur Sachs à l'arrière (124 mm de débattement), le tout entièrement réglable (manuellement, sans électronique). Les pneus sont du 120/70 x 17 à l'avant, du 180/55 x 17 à l'arrière. Des dimensions classiques pour ce genre de moto.
Freins
La aussi, pas de différence entre les deux modèles : on a donc du Brembo radial 4 pistons à l'avant pinçant des disques de 320 mm, secondés par du Brembo à deux pistons à l'arrière, pinçant un disque de 220 mm, le tout sous le contrôle d'une centrale ABS Bosch 9M Plus. Autant dire que tout est top : puissance, dosage, feeling, tutto va bene !
Confort et duo
On l'a mentionné : c'est ferme. Pas invivable, mais ferme. Voilà, vous êtes prévenus. Sur une départementale morvandaise bien gravillonneuse, ça va vite tourner au rodéo.
Certes, la position de conduite aide à faire passer les kilomètres, sans trop souffrir d'un appui marqué sur les avant-bras. Côté duo, on s'en doute, ce sera spartiate.
Consommation & autonomie
Le réservoir contient 16,5 litres et MV Agusta annonce une consommation moyenne de 6,7 l/100. Pour notre part, la conso a tourné entre 6 et 7 l/100 à l'issue d'un usage mixte.
Conclusion
Belle révélation que cette Brutale 800 RR. Certes, elle est hors classe par rapport à d'autres "roadsters d'environ 800 cm3 et à trois cylindres". Mais, si j'avoue ne jamais avoir conduit de Ferrari mais avoir fait par contre pas mal de bornes en Nissan GT R, je me dis que c'est le même type de différence qui la sépare de ses concurrentes. C'est de la précision, c'est du feeling, c'est une sonorité, c'est de l'émotion : sur tous ces points, la MV Agusta Brutale 800 RR marque des points et se trouve au-dessus de la mêlée. Certes, il faut être en mesure de savoir apprécier ces caractéristiques, il faut être suffisamment éduqué et raffiné pour se dire que cette différence change tout et il faut ensuite être capable d'y mettre le prix. Ceux qui franchiront le pas découvriront une machine tout simplement jubilatoire.
Il n'empêche : des roadsters qui dépotent autant, on en trouve. Des roadsters qui offrent une telle efficacité et une telle précision dans les sensations et les remontées d'information sur une petite route (bien revêtue, la précision est d'importance), je cherche encore... Rien que pour cela, la MV Agusta Brutale 800 RR est une moto rare et qui mérite le détour.
Points forts
- Moteur vraiment punchy
- Look et finition
- Légèreté
- Électronique efficace
- Sonorité dans les tours
- Précision du châssis
- Qualité du train avant
Points faibles
- Un peu ferme de partout, forcément
- Chauffe vite en ville
La fiche technique de la MV Agusta Brutale 800 RR
Conditions d’essais
- Itinéraire: 800 km en une semaine d'essai avec du quotidien dans Paris et une virée en Champagne
- Kilométrage de la moto : 1300 km
- Problème rencontré : rouler à 80 km/h avec ça, comment dire les choses sans être grossier...
La concurrence : dans l'absolu, tout gros roadster velu...
Commentaires
A droite le triple échappement !
28-08-2018 15:24bien sur c'est à droite. Désolé, je suis dyslexique !
04-09-2018 14:29Merci de nous suivre,
Philippe