Essai Benelli Leoncino 800 T
A la cool
Bicylindre en ligne, 754 cm3, 76 ch, 68 Nm, 222 kg, 8.899 euros
La vague de la custom culture a relancé le ‘thème’ du scrambler. Un peu comme on remet au goût du jour la vieille cafetière à piston à l’heure des machines à capsules. C’est incongru, inutile pour faire du tout-terrain ; ça véhicule surtout du charme, une allure, une approche de la moto… Le scrambler des années 1950/60 consistait en une série de modifications à partir d’une moto de route pour rouler en chemin, sur du sable, dans des prés, parce que le trail et l’enduro n’existaient pas.
Les scramblers contemporains jouent eux sur route. Souvent lourds, avec une jante avant de 19 pouces (21 pouces pour les vrais trails), motorisés par des twins, ils n’invitent pas à la balade crottée, tout juste à l’excursion. Paradoxe qui a dû surprendre la production japonaise, elle n’a pas su s’y faire : la Yamaha SCR 950 en fut l’exemple le plus malheureux. La tentative française de Suzuki avec la SV 650 Scrambler n’a pas fait mieux. Honda semble tenté par la CL 500 Scrambler, rappelant ses 350 des années 70… A suivre.
Non, le scrambler est une spécialité européenne : Triumph d’abord, puis BMW et Ducati, puis Moto Morini… Et maintenant Benelli.
Découverte
La base technique est identique à sa sœur ‘standard’,le roadster Leoncino 800, mais le look est bien celui d’un scrambler. Avec ses jantes à rayons,sa roue avant de 19 pouces, une fourche au débattement augmenté de 10 mm, quelques millimètres supplémentaires pour la course de l’amortisseur… Et la double sortie d’échappement latérale haute, le signe distinctif visuel du scrambler. Les Pirelli Skorpion STR ajoutent la touche finale, crantée, au look subtilement agricole.
Tout cela ne fait pas de la Leoncino une moto off road, la TRK chez Benelli s’y prête un poil mieux (qui fait un carton en Italie et se vend bien en France), mais la hisse au rang de ses cousines européennes. Parce que la finition a énormément progressé chez Benelli, la Leoncino ne rougit plus aux côtés d’une BMW Ninety Scrambler ou d’une Ducati 800 Scrambler. Face à la première, la Benelli pêche toutefois par une puissance moindre (76 ch pour l’Italienne contre 109 pour l’Allemande) ; face à la seconde, elle paraît bien lourde : 234 kg tous pleins faits quand la Ducati 800 Dark Icon pèse 189 kg, soit 45 kg d’écart ! Kilos tempérés par un réservoir moins volumineux de 2 litres pour la Ducat’, mais quand-même. Le choix des matériaux y est assurément pour beaucoup, mais les tarifs entre la Benelli et la Ducati ne sont pas si éloignés : 9.190 euros pour la Ducati Scrambler Icon Dark, 8 899 euros pour la Benelli Lencino 800 T. Difficile dès lors d’expliquer cet écart, même ramené à une petite quarantaine de kilos.
Car le paralell twin de 754 cm3 conçu par Benelli, au centre historique de Pesaro, mais fabriqué en Chine (Benelli appartient au groupe chinois QianJiang Motorcycle, détenu lui-même par Geely Holding Group), affiche des caractéristiques proches du bicylindre en V Ducati de 803 cm3. 76 ch pour la Leoncino, 73 pour la Scrambler 800…
Les deux sont dépourvues d’électronique évoluée, type cartographie moteur ou antipatinage, mais de toute façon ce n’est pas ce qui pèse le plus lourd. On peut supposer que pour franchir les normes de bruit imposées par Euro5, les carters moteur sont plus épais que par le passé. Mais les deux motos sont soumises aux mêmes normes. Démarreur, batterie, de nombreux composants peuvent faire de petites différences.
Plus encore les jantes, à bâtons sur la Ducati, à rayons sur la Benelli, expliquent ce déséquilibre de poids. La Leoncino 800 T exhibe aussi une grosse fourche aux tubes de 50 mm (le groupe QJ a pris des parts de la marque Marzocchi), qui fait son effet (elle n’est pas réglable), mais n’a pas de raison d’être vu les performances. Les épaisses sections du cadre en treillis d’acier fournissent d’autres éléments de réponse. Ainsi que l’échappement, plus volumineux que sur la 800 ‘standard’.On verra que l’équilibre de la 800 T évite de trop faire ressentir au pilote ce poids conséquent.
Le freinage, a priori, coche toutes les cases de la sportivité, avec des disques de 320 mm de diamètre, de gros étriers à fixation radiale estampillés… Benelli, mais qui se donnent des airs de Brembo. A l’arrière, on trouve un gros disque de 260 mm.
Le cœur de l’affaire, le bicylindre, se laisse moins envisager sous l’angle sportif. Quatre soupapes par cylindre, deux arbres à cames en tête, soit, mais une puissance honnête et un couple raisonnable (6,8 mkg à 6 500 tr/mn), délivrés sur 6 rapports de vitesse, nulle fougue ou fantaisie de ce côté. Benelli a rompu avec les trois cylindres des Tornado et autres furies des années 2000. La marque voit large, l’Europe n’est plus l’unique marché à conquérir. Ce que confirmait déjà une ancienne interview pour le magazine italien Motociclismo du designer italien de la marque, Stefano Casanova : « Dans les grands marchés émergents comme la Chine, l’Inde, l’Asie du sud-est, la moto a toujours été un moyen de transport purement fonctionnel. Les choses changent un peu, ces clients regardent maintenant le design. Deux éléments comptent encore beaucoup pour eux : une hauteur de selle contenue et une autonomie importante ». Sur la 800 T, la contenance du réservoir est annoncée à 15 litres et la hauteur de selle à 834 mm du sol, soit 30 mm de plus qu’une Ducati Scrambler 800 mais 6 mm de moins qu’une Triumph 1200 Scrambler.
Quant au look, Stefano Casanova continuait ainsi, à propos de la Leoncino : « Notre objectif est de réunir l'élégance et l'intemporalité de l'âge classique avec le dynamisme et la puissance du monde moderne. C'est l'essence du code esthétique Benelli pour l'avenir. Pour la Leoncino, je me suis inspiré de la première de 1956, qui mêlait simplicité et fonctionnalité. Le style est un langage. Pour moi ce langage doit être direct, clair et honnête. Si ce n'est pas le cas, le style finira par être confus, exagéré. Une déclaration claire vous aide à vous concentrer sur ce dont vous avez besoin. Il vous permet d'aller droit au but de la moto. J'aime parler simple. Je veux que mon style le reflète ».La ligne est réussie, indéniablement et la finition a progressé chez Benelli. On est encore loin du niveau de Triumph ou même de Ducati, en témoignent les soudures de cadre, les jointures des éléments de carénage et quelques cosses et faisceaux encore trop visibles. Mais la Leoncino est valorisante.
En selle
L’écran TFT 5" est le premier élément qui attire l’œil une fois sur la moto. Bien disposé, toujours lisible quelles que soient les conditions de luminosité, il se montre facile à manipuler, via des commandes aux deux commodos.
Deux interrupteurs supplémentaires trouvent place d’ailleurs sur lesdits commodos, en précâblage pour de futurs équipements. Mesurant 1m67, je pose un demi-pied au sol et l’autre sur la pointe, je suis un peu moins à l’aise que sur la Leoncino standard mais la largeur de selle contenue permet de bien maîtriser la moto. A l’arrêt, une fois en selle, le poids ne se fait pas trop sentir. Il est bien présent en revanche lors des manipulations à la main. Idem, il ne faut pas se laisser embarquer au feu, de droite ou de gauche. Il faut alors de solides jambes pour tenir la Benelli.
Par bonheur, le guidon large et haut s’allie au bon équilibre de l’Italienne pour la dominer ou plus modestement l’accompagner…
En ville
Les gros pneus Pirelli (170 à l’arrière, un peu moins large que le 180 de la Leoncino sans T) nuisent un peu à la maniabilité, de même que les jantes à rayons plus lourdes (et non suspendues), mais là aussi, la position de conduite, avec des jambes pas trop repliées, est un atout pour guider la moto. Très équilibrée, elle ne piège jamais à basse vitesse, on sent ses réactions venir, franches.
Ce qu’on sent bien aussi, ce sont les dos d’âne (une épidémie !) ou les grosses imperfections (de plus en plus fréquentes) de la route : les suspensions ne sont pas un modèle de confort, l’hydraulique est de piètre qualité. Les débattements légèrement supérieurs par rapport au roadster atténuent un poil plus les chocs, mais il y a mieux à faire, surtout avec une pareille fourche.
Les commandes sont douces, notamment l’embrayage, mais le frein avant noircit un peu le tableau. Aucune progressivité dans la course du levier, l’attaque est nette, il faut du temps pour bien doser le freinage. A basse vitesse et malgré l’ABS, la roue avant à tendance à se bloquer sur les freinages d’urgence ; par à-coups, évidemment (ABS) mais c’est surprenant au début et probablement pas très efficace en cas de péril, ce que par chance je n’ai pas testé (je ne vais pas m’en mettre une maintenant à chaque essai…).
Le moteur descend facile sous les 2 500 tr/mn, sans hoqueter à la remise des gaz, même sur le quatrième rapport. Une vraie peluche !
Sur départementale
Ceux qui s'attendent à prendre du retard sur leurs potes en roadster seront… agréablement déçus. Il me faut justifier cet oxymore : malgré ses modifications scrambler, la 800 T ne perd pas grand-chose en termes de sensations sur l’asphalte. Stable et précise, la Benelli Leoncino 800 T épouse les virages, pourvu qu’on roule coulé.
Par de gros freinages, d’accélération porcine en sortie de courbe ou de rond-point, mieux vaut conserver de la vitesse de passage en réaccélérer progressivement. Vos potes seront surpris, vous ne seriez pas très loin derrière eux. Le mode enroulé s’avère de toute façon dix fois plus efficace sur route que l’agressif. Ce châssis est plus voué à l'agrément qu'au confort - l'arrière aussi est plutôt rigide - et le moteur est rond à mi-régimes.Ce bicylindre parallèle n'est jamais agressif, à tel point qu'on ne regrette pas l'absence totale d’électronique. Il rupte un peu tôt, à 9 500 tr/mn au compte-tours, mais on s’adapte vite à sa plage de régime favorite, entre 5 et 8 000 tr/mn. En deçà, il est souple mais peu vigoureux. En termes dynamiques, la seule limitation tient encore une fois dans ce poids qui nécessite des engagements musclés lors de changement d’angle, sensation renforcée par les pneus crantés.
Hormis le manque de confort, la 800 T est une super moto pour choisir les petites routes.
Sur autoroute
Ce n’est pas bien sûr pas environnement naturel, mais on y reste une petite heure sans trop souffrir. La conso descend à 5,7 l/100 km stabilisé à 130 km/h et, selon les quelques dépassements de régime nécessaires pour ne pas s’endormir ou juste doubler (et donc ne pas s’endormir), l’autonomie sera d’environ 200 km avec un brin de réserve. La selle ne fait pas trop souffrir le fessier mais ce n’est pas un modèle de confort non plus.
Etrangement, la protection n’est pas si mauvaise, malgré l’absence de bulle ; peut-être un heureux effet de la petite casquette de phare…
En tout-terrain
La Benelli 800 T n’incite pas à l’attaque en off road. Là, le poids se fait vite sentir, ainsi que le manque de progressivité des suspensions. On se contentera d’une gentille balade.
Partie-cycle
La 800 T, comme la 800, brille par son équilibre, renforcé sur la T par un empattement légèrement plus grand. Encore une fois, le poids se ressent dans certaines situations mais moins que ne le laisse suggérer la fiche technique. Le train avant est rassurant et c’est un atout majeur sur une moto. Le grip des pneus atteint ses limites quand on attaque de manière agressive, mais ce n’est pas du tout l’esprit de la moto et tout le monde en prend conscience d’un simple coup d’œil sur une photo.
Freinage
La sensation au levier de frein avant est pénible : malgré le réglage en écartement, rien n’y fait, il reste dur et loin de la poignée, avec peu de feeling.
Le frein arrière peu puissant ralentit bien mais là aussi, le feeling et la progressivité manquent.
Confort/duo
Ai-je assez parlé du manque de confort des suspensions ? Il est tout de même meilleur que sur la Leoncino 800, grâce au léger débattement supplémentaire. Ce qui suffit à faire de la 800 T, à mes yeux, un meilleur choix.
Le duo se pratique plutôt bien, avec une selle assez large mais une absence de poignées de maintien. Côté équipement, des valises latérales et une béquille centrale seront bientôt disponibles en accessoire Benelli.
Consommation
Je suis déjà tombé en panne d’essence avec la version roadster, qui possède la même mécanique et le même réservoir et je peux dire qu’on dépasse difficilement les 190/200 km d’autonomie. Mes consommations moyennes variaient entre 5,5l et 6,5 l/100 km.
L'essai de la Benelli 800 T en vidéo
Conclusion
Benelli pense vendre deux-tiers de ses Leoncino 800 en version Trail (c’est-à-dire scrambler…) en Italie, gros marché du trail. Il est possible qu’en France le roadster l’emporte. Il me semble toutefois que la version T est plus sympa, tant au niveau look qu’en terme de confort, même si les progrès à faire ne sont pas négligeables. Dispo en version A2, elle serait alors une excellente moto pour découvrir le gros cube, si le poids n’était pas si élevé. Pour les plus aguerris, la 800 T séduit par sa mécanique cool et volontaire, son comportement très sain, sa facilité et son lionceau sur le garde-boue avant… L’effet Benelli fonctionne toujours, la marque conserve de la renommée, malgré sa propriété chinoise.
Points forts
- Souplesse moteur
- Position de conduite
- Confort un brin meilleur que sur la 800
Points faibles
- Feeling du frein avant
- Poids élevé
La fiche technique de la Benelli Leoncino 800 T
Coloris
- Gris acier
- Vert forêt
- Marron mat
Conditions d’essais
- Itinéraire: routes sinueuses + autoroutes interurbaines avec un peu de ville
- Kilométrage de la moto : 400 km
Equipement essayeur
- Casque X-Lite X 803 Carbon
- Blouson cuir Helstons Rocket marron
Commentaires
A ce prix la .. ? C est un prix au kilo de trop..qu elle a en excès..elle devient tres tres chère la ferraille chinoise qui nous fait le coup de niaiserie que l italien c est bien de l européen .
11-11-2022 10:19la désinformation et l intox chinoise qui met des sous dans les médias spécialisés et autres pour prendre la place des autres constructeurs .. pour les éliminer..
Il ne suffit pas de mettre un blason Marzocchi pour faire de bonnes suspensions... comme il ne suffit pas de mettre un écusson Benelli pour faire un moteur de caractère. 20-12-2022 00:15