Essai Aprilia RSV4 APRC
180 chevaux... Chevaux de route, de course ou sauvages
La série des RSV est apparue en 1999. Aprilia, groupe Piaggio, se charge de la partie cycle mais le moteur est alors conçu et fabriqué par l’autrichien Rotax. Ce sont les premiers succès du bicylindre en V à 60 °. La puissance est alors de 128 chevaux à 9.250 tr/mn et le couple de 10,3 mkg à 8.000 tr/mn. On note déjà un système pneumatique d’assistance au rétrogradage, limitant les blocages de roue arrière. La sportive évolue régulièrement par la suite, tant en mécanique qu’en esthétique, et se décline alors en version R et RSV4 Factory. Ces dénominations distinguent les versions « de base », déjà superbement dotées, des séries courses homologuées route, encore mieux équipées.
En 2009, pour lutter à armes égales avec les quatres cylindres, Aprilia lance la RSV4 Factory. Déclinaison toujours plus efficace de sa sportive, celle-ci est motorisée par un inédit et explosif bloc 4 cylindres en V ouvert à 65°, développant 180 chevaux à 12 500 t/min et 115 Nm de couple à 10.000 t/min. Un modèle moins coûteux, la version R, est également disponible.
Pour 2011, la firme de Noale présente sur le circuit de Jerez, en Espagne, la nouvelle mouture de son hypersport très haut de gamme désormais RSV4 APRC. Un cadre à la hauteur de la réussite de cet opus au V4 et de ses résultats en Super Bike cette année, piloté par Max Biaggi : Champion du monde... pas moins.
Découverte
Cet événement est d’ailleurs fièrement noté sur le réservoir et la coque arrière de cette RSV4 Factory APRC (Aprilia Performance Ride Control). Toujours aussi racé, le design ne change guère, hormis des effes de graphisme légèrement retouchés et l’apparition des trois couleurs italiennes sur le sabot du carénage.
On trouve un bloc compteur LCD au fond orangé, au coté d’un grand compte-tour. En mode circuit, l’ergonomie fait la part belle au chrono et rapport engagé, puis sont indiqués, cartographie moteur choisie, niveau d’antipatinage, température moteur et, en bas à gauche, le tachymètre.
Si toutefois on souhaite évoluer sur le bitume public, la RSV4 APRC propose un affichage de sa fenêtre LCD plus routier : autour de l’indicateur tachymétrique grand format central, sont disposées les informations de température moteur, rapport engagé et horloge en haut, type de cartographie et niveau antipatinage sur la gauche et odomètre en bas.
Cette finition course se distingue aussi de la version R par la profusion de pièces en carbone (garde boue, habillage latéraux), par les roues en aluminium forgé et les équipement de partie cycle signé Ohlins : fourche, suspension arrière et amortisseur de direction. On note également un silencieux d’échappement moins anguleux, plus long et plus léger de 2 kilos. L’ensemble est réellement de haute volée.
Mais, tout autant que mécaniquement, c’est aussi au niveau de l’électronique que le modèle 2011 s’envole. En effet, afin de contrer la concurrence, Aprilia dégaine l’électronique de course.
L’hyper-sport Avec Pilotage Rapide Corrigé !
Véritable engin de compétition, la RSV4 Factory APRC proposée à l’essai est en conditions course : couvertures chauffantes et mécano personnel compris...
Très compact, le gabarit de cette hyper sport fait croire à une 600 cc. Mon mètre quatre vingt quatre se loge pourtant sans difficulté sur l’échine du monstre. Difficile de croire que l’on est assis sur une machine de 180 chevaux pour autant de kilos à sec. Cependant, au démarrage, l’échappement mime plutôt bien la mélodie puissante, violente, d’une moto GP.
C’est pourtant sereinement que je m’élance sur la piste de Jerez. Tout d’abord par l’euphorie de piloter une pure réplica puis surtout par la présence d’assistances électroniques ultra performantes. Celles-ci sont conçues par Aprilia et réalisées par Magneti Marelli. La cartographie d’injection Ride by Wire, bien plus douce que sur le précédent modèle, propose 3 modes : T (track), S (sport) et R (rain) : piste, sport et pluie, actionnables par pression successives sur le démarreur une fois la moto en marche. Sur ce dernier mode, «seuls» 140 chevaux sont alors disponibles.
Les commandes sont douces et précises, leur ergonomie conforme au standard sportif.
Le nouveau système APRC embarqué comprend un ensemble d’assistances entièrement paramétrables, croisées ou non.
Pour résumer, on distingue l’ATC (contrôle de traction ou anti-patinage, l’AWC (anti-wheeling), l’ALC (assistance au départ) et l’AQS (montée des rapports sans embrayage).
Le plus bluffant est sans nul doute l’ATC, paramétrable sur huit niveaux, du plus contrôlé (8) au moins effectif (1) voire carrément désactivé, pour les meilleurs. Le système est même capable de s’auto ajuster à différentes montes de pneu ! Sur la poignée de gauche se trouve deux mini-palettes, + et -, actionnable à n’importe quel moment, permettant de régler le niveau désiré de traction : plus le niveau est bas, plus le couple disponible est grand et donc la glisse sensible. Le calculateur embarqué tient compte de la vitesse de chaque roue via des capteurs type ABS avant et arrière, mais aussi de l’inclinaison de la moto (position dynamique)...!
Jusqu’au réglage 6, on sent nettement la limite apportée en dynamique. Idéal pour les débuts de course, par temps froid ou les jours sans...). Transparent, le système transcende le pilotage. En position 5 puis 4, les dérives du train arrière se font plus sensibles mais en total maîtrise... électronique. Et c’est alors que l’ont visse encore d’avantage la poignée droite, par défi, par incrédulité aussi. Et chaque fois la «magie» opère, permettant à chacun, selon son niveau, de repousser ses limites. On peut ainsi se concentrer sur le pilotage et profiter de la disponibilité moteur démoniaque, de 4 à 13.000 tours, seulement rappelé à l’ordre par le shift light. D’autant plus agréable sur ce circuit de Jerez, aux longues courbes prises sur l’angle, que les 3 premiers rapports ont été rapprochés pour privilégier la vitesse en sortie de courbe. Jouissif et addictif !
En position 3 et moins, il faudra bien sur justifier d’un bagage technique croissant ou d’une aisance plus prononcée. Mais quelque soit le pilotage, l’intervention de l’ATC est nettement meilleure que celui des Ducati et BMW S 1000 RR de par sa progressivité remarquable.
De même, on ne peut que louer l’efficacité de l’AQS, onomatopée synonyme de montée de rapports à la volée, en pleine accélération. C’est encore du temps de gagné, le tout dans un fonctionnement ciselé. Le système apparaît meilleur que son homologue Allemand ou Bolognais. Au rétrogradage, il faudra user du levier gauche et constater alors que l’anti-rebond de l’embrayage permet de rentrer les vitesses à l’approche des épingles sans le moindre blocage de roue arrière. Précis et efficace.
Cette facilité à souder l’accélérateur appel donc un autre contrôle : l’anti-wheeling (ALC). Une pression sur le sélecteur «mode» permet de paramétrer son action sur trois niveaux dégressifs jusqu’à la désactivation. L’architecture moteur et les performances de la RSV4 Factory APRC sont propices au délestages intempestifs. Figures souhaitables pour certains, d’autres préfèreront coller au sol pour grappiller les centièmes de secondes. Au 3° et plus assisté des modes, rien ne bouge. En position 2, la roue avant quitte le sol brièvement pour se reposer, grâce au calculateur, toujours en douceur sans que votre pilotage n’ai changé. Maîtrise et sérénité.
A force de se prendre pour un pilote, les plus passionnés souhaiteront réaliser des départs canons. Ce serait bien d’imiter Biaggi, non? Chiche? Car cela aussi c’est possible. Retour à l’écran du tableau de bord et sélection de l’ALC, soit assistance au départ, là encore, ajustable sur 3 niveaux dégressifs. Testé sur les deux premiers, c’est le paramètre qui m’a le moins emballé, et de loin. Régime moteur à 9 000 tours, on lâche alors progressivement l’embrayage et... la RSV4 décolle mollement. Un comble ! A l’évidence, Max est bien plus talentueux et son électronique sur ce point sûrement plus fine. Ce mode nécessite aussi sûrement un peu d’expérience. Pas de quoi en tenir rigueur à l’hyper sport de Noale. Il fallait bien un «défaut», une qualité moindre. Ce sera donc celle-là.
Puisqu’il faut aussi parfois ralentir, et même très fort, le freinage radial Brembo à quatre pistons est tout aussi puissant que dosable. La fourche inversée Ohlins de 43 mm encaisse à volonté les plus fortes déccélérations, tout comme l’amortisseur gère les montées en régime les plus violentes. Le missile V4 suit alors précisément la trajectoire souhaitée, plonge dans les courbes et autorise aussi les rectifications des pilotages imparfaits. Docile, facile !
La RSV4 2011 est également extrêmement vive bien qu’équipée d’une nouvelle monte de pneumatique Pirelli Super Corsa (SP) dont le boudin arrière affiche les dimensions respectables de 200/55... Spécifiquement développé pour la version Factory APRC, le pneu avant est monogomme, l’arrière bi-composant. Leur forme d’ogive prononcée est due à une augmentation du diamètre de 8 mm pour l’arrière et 2 mm pour l’avant sans modification de leur section. Le grip est irréprochable et durable.
Cette version compétition, Factory, reçoit également des possibilités de réglages poussés du châssis : angle de colonne, hauteur du moteur dans le cadre, hauteur du bras oscillant. Tout est prévu pour le compétiteur exigeant.
Ce cadre est d’ailleurs composé de 8 éléments, dont 6 en fonte d’aluminium pour un ensemble plus rigide et léger. Le moteur est fixé sur 5 points et sa lubrification a été améliorée.
Conclusion
On ne devient pas champion du monde par hasard. C’est un ensemble de qualités extrêmes qui imposent le succès en course de cette machine, au niveau mondial. Aprilia propose à la vente une synthèse du meilleur de la mécanique, de la partie cycle et électronique actuelle. Car l’étonnante efficacité de la RSV4 Factory APRC 2011 réside dans la symbiose évidente entre ces trois paramètres. C’est cette alchimie permanente qui permet à chacun de piloter au dela de son niveau réel et ceci dans une sécurité effective rarement atteinte. Evolutive de par ses réglages multiples, la Factory « électronique » semble être un vrai outil pour progresser. Il n’est d’ailleurs à déplorer aucune chute sur ces journées presse, preuve du niveau de qualité des technologies et mécaniques embarquées.
La voici désormais disponible au «commun des pilotes » , fortunés ou passionnés. Car certes, son tarif de 21.990 € la met hors de porté de nombre d’entre nous. Plus abordable, la version R demande tout de même 15.000 € mais n‘offre vraiment pas les mêmes atouts. Malgré tout, le modèle Factory représente déjà un tiers des ventes de RSV4...! A l’heure du choix de l’ultra sportive idéale, la diva de Noale risque fort de truster une nouvelle fois la première place. Et vu sa facilité à être emmener, le titre semblera à la portée de beaucoup… à chaque tour de piste. Et c’est là le plus important.
Points forts
- mécanique enthousiasmante
- partie cycle
- assistance électronique progressive et positive
- Freinage
- Sonorité de l’échappement
Points faibles
- assistance au départ semblant décevante
- esthétique de l’échappement moins marquée
Aprilia RSV4 APRC : 19.990 €. Garantie deux ans pièces et main d'œuvre.
Concurrentes : BMW S1000RR, Ducati 1198S, Honda CBR 1000 RR, Kawasaki ZX-10R, Suzuki GSXR 1000, Triumph Daytona, Yamaha R1.
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