Essai Triumph Daytona 955i centenial edition
Centenial Edition - L'élégance anglaise
GSX-R1000, R1, CBR 900... Il y a les hyper-sportives qui sont toujours sur le devant de la scène et puis, il y a les autres. La Triumph Daytona 955i fait partie de celles-là... une bonne raison de comprendre en l'essayant.
Quand on voit la Daytona 955i pour la première fois, il est certain que la livrée unie de l'anglaise tranche par sa sobriété face aux japonaises. Ici, il n'y a pas de couleurs voyantes et tapageuses. Dans sa version limitée, réalisée pour le centenaire de la première moto de la marque, la Centenial Edition apparait même dans une robe sombre - "Aston Green" ou vert anglais - particulièrement élégante et discrète. Par contre, quand on s'approche, il n'y aucun doute : c'est bien une hyper-sportive : ligne tendue, strapontin pour le(la) passagèr(e), demi-guidons bas... De loin, extérieurement, seule l'inscription 955 à laquelle s'accole un "i" (pour Injection) laisse éventuellement deviner qu'il peut y avoir un caractère sportif.
De plus près, on remarque le cadre en treillis tubulaire de grosse section, identique à celui de la Speed Triple, le roadster méchant de la marque. On admire, le monobras oscillant mettant en valeur un immense pneu en 190 ! On remarque également les éléments carbones qui ponctuent discrètement le réservoir, les flancs de selle et les retours de carénage. De la qualité, non ostentatoire : la classe !
Une fois assis, il n'y a par contre plus aucun doute. Le tableau de bord dévoile un immense compte-tours sur fond blanc avec une zone rouge à 11500 tours, au sein duquel s'inscruste un affichage digital pour la température d'huile et les alertes de l'ordinateur de bord. Puis à sa gauche, se découvre un affichage digital pour la vitesse, les deux trips et l'horloge.
Quand on parle d'informatique embarquée, la Daytona en est un excellent exemple. Les courbes de l'injection sont régulièrement mises à jour directement par ordinateur; le concessionnaire reçoit simplement les nouvelles versions de courbes par le réseau informatique et celles-ci sont changées en moins d'une minute lors de la révision suivante, permettant d'optimiser en permanence, les courbes qui permettront d'utiliser au mieux, la puissance de la machine.
Au-delà de cet aspect, l'ordinateur conserve en mémoire les différents problèmes qui ont pu intervenir (huile, essence, injection...) qui apparaitront automatiquement au concessionnaire. Bref, on commence à avoir une véritable boite noire !
Contact
Béquille repliée, embrayage maintenu, la Daytona s'ébroue dans un bruit rauque et feutré. Le gabarit la situe bien dans la catégorie des 900-1000 cm3. Une selle relativement large et basse, les pieds restent malgré tout en appui sur le sol. Il faut s'arcbouter nettement pour accrocher les demi-guidons. Je règle simplement les immenses rétroviseurs, fixés sur le carénage et particulièrement modulables en positions, pour s'adapter à la position du pilote et à sa taille. Je m'attendais à des rétros minuscules, souvent presques inutiles. Ceux-là, sont exceptionnels en taille et en utilité ! Première et c'est parti...
Le rayon de braquage est fidèle au sportives : inexistant. Est-ce vraiment important? Ici, c'est la moto qu'on incline pour tourner. Le guidon se tourne vers la gauche ou la droite uniquement sur les vélos ! Seconde... doucement... Je joue avec l'embrayage, sinon je sens que la moto va partir toute seule et que je vais rester sur la route. Il n'y aucun délai entre la main droite qui tourne la poignée et la réactivité du moteur. La poussée franche et saine commence dès les deux mille tours, même sur les rapports supérieurs. J'avais oublié qu'une telle moto ne se conduit pas : elle se pilote, en dosant au millimètre près l'accélérateur.
On sent rapidement sur les premiers kilomètres le caractère du trois cylindres... exactement entre un gros twin et un quatre cylindres souvent linéaire. Le trois cylindres a son caractère ou du caractère tout simplement. Juste ce qu'il faut pour avoir l'impression d'être sur une machine pas comme les autres.
En ville, l'appui sur les poignets est rapidement invivable. Et si vous avez l'habitude de rester gentiment à suivre les automobilistes... oubliez ! Avec une sportive comme celle-là, vous êtes poussés à vous démener, à sortir, à vous faufiler pour agir et faire bouger les poignets, au propre comme au figuré. Et la maniabilité est au rendez-vous, d'autant plus qu'elle réagit au quart de tour, aussi bien pour l'accélération que pour le freinage. Ce dernier est progressif et ne surprend jamais. Par contre, l'efficacité des étriers quatre pistons - estampillés Triumph - est au rendez-vous. Le résultat met rapidement en confiance.
En fait, en ville, c'est mon poignet gauche qui souffre avec la poignée d'embrayage, qui me fait vivre une réelle séance de musculation. Elle est vraiment dure cette poignée ! Par contre, il est vrai que les vitesses passent toutes seules, sans acrocher, quel que soit le niveau du compte-tours. Une petite exception toutefois pour la première qu'il faut passer moteur au ralentit : sinon, le passage sera salué par un maginfique "Klonk" sourd, sympathique et surprenant, mais heureusement sans aucun danger, ni dans les réactions de la moto, ni pour le moteur.
Une les portes de la ville dépassées, vous appréciez de vous retrouver sur l'autoroute. La moto apprécie également... et vous remercie en faisant redescendre la température d'huile qui était montée à plus de 130° sous les 100°. La vitesse permet d'alléger l'appui sur les poignets. Le passade d'une voie à l'autre se fait naturellement, rapidement, très très rapidement si nécessaire, sans aucun délai d'attente : elle semble avoir toujours autant de puissance en réserve.
Retour rapide sur la nationale, puis en ville. Je reviens prendre ma passagère après ces premières dizaines de kilomètres qui m'ont permis de prendre tranquillement en main le monument.
Installation en duo
Elle monte à l'arrière, s'assied sur le strapontin. Elle est tout de suite surprise par la visibilité. Au-dessus de ma tête, elle peut en effet admirer le paysage. Cette position en hauteur lui donne même une petite impression de vertige qui disparaitra rapidement. Elle cherche alors les poignées pour s'accrocher. Ah non, on est sur une sportive : il n'y en a pas. Ah bon ?!
C'est comme la place sous la selle... Elle n'existe pas non plus... Enfin, si, la place pour une mini combinaison de pluie, une carte routière et dans les flancs une canette de coca ! Et l'antivol alors ? Un bloc disque peut-être... mais pas d'antivol homologué. Il faudra installer un porte-u sur la moto elle-même. Autant dire que je n'étais jamais vraiment rassuré quand j'abandonnais la moto sur un parking, avec le seul neiman comme protection !
Et çà repart... Tient, c'est rigolo, la Daytona est encore plus sécurisante avec ma passagère. J'aurais pensé qu'avec un poids plus haut perché, l'équilibre aurait changé. En fait, le poids supplémentaire amortit sensiblement la tendance au décollage permanent ou c'est moi qui m'habitue à la puissance. Toujours est-il que je commence à réellement apprécier.
Nationale... j'entends dans les écouteurs "eh, tu te traines..."... benh, non pourtant, je suis déjà en excès de vitesse et on roule plus vite que sur le roadster habituel, à une vitesse où elle me dit généralement stop ! Bon, et bien, on y va alors...
Retour sur autoroute, direction les Chateaux de la Loire pour le week-end qui s'annonce prometteur...
La Daytona se détend et moi avec. Tous les rythmes sont agréables, dès lors que l'on ne descend pas sous les 100 km/h. J'accélère régulièrement tout en restant dans le flot de la circulation, puis je le dépasse. La moto est imperturbable. Et quand arrive la grande courbe rapide à l'horizon, je ne déccélère même pas, inclinant simplement la moto qui s'inscrit naturellement dans la courbe, sans plus d'effort de ma part. Et pourtant, je suis bien au-dessus d'une vitesse maximale en roadster en ligne droite. La chaussée n'est pas parfaite, mais la moto est imperturbable : pas de tressautement, ni de derrière bougeant dans tous les sens, ni survireuse, ni souvireuse. Alors qu'en ville, seul, mon dos avait bien senti les inégalités de la chaussée et que la moto semblait 'rebondir' dessus, en duo et sur routes rapides, la Daytona s'avère confortable, surtout en considérant que le comfort n'est pasparticulièrement une qualitée reconnue à une sportive. En fait, elle ne surprend jamais et ne demande aucn effort particulier de la part du pilote, sauf celui de bien maitriser l'accélérateur. Même à une telle vitesse, la moto possède encore une réserve incroyable de puissance et de vivacité. C'est maintenant mon blouson de cuir qui claque au vent, et tire sur les bras, ce qui m'oblige à revenir à une vitesse plus raisonnable.
C'est ma passagère qui déclare forfait en premier... et réclame un arrêt en bonne et due forme. Plus haute que moi, elle profite de la vue... et du vent. Son casque est trop lourd, les cervicales font mal et elle est obligée de se replier derrière moi, pour être protégée, diminuant son plaisir de contemplation.
On redémarre... Et c'est reparti ! ... Plaisir... Il arrive un moment où il faut pourtant revenir sur la nationale. La moto évolue ici également dans son élément et se balance de gauche à droite quand nécessaire sans réel effort, ni aucune surprise.
Ma seule surprise viendra de la pompe, lorsque qu'arrivé à 240 km, je viens de passer en réserve, automatiquement. Seul un voyant me signale qu'il faut ravitailler et je dispose normalement de 30 à 50 km d'autonomie. A la pompe, un rapide calcul me fait alors réaliser que sur ce premier parcours, mixte, je n'ai consommé que 5,5 litres au cent ! Certes, je n'ai pas vraiment titillé la zone rouge mais j'étais pourtant à des vitesses nettement supérieures à celles qui sont ma moyenne en roadster et qui me font alors titiller les 8-9 litres. Il n'y a pas à dire : les anglais ont fait de réels progrès et l'injection s'avère particulièrement efficace également sur la consommation. Il faudra vraiment rester sur des rapports intermédiaires et jouer davantage dans les tours, pour qu'au cours de l'essai, je monte à une consommation de 7 litres au cent. La consommation peut grimper jusqu'au 8-9 litres, au maximum, mais en utilisation intensive.
Conclusion
La Triumph Daytona 955i est une hyper-sportive extraordinaire. Elle ravira tous ceux qui souhaitent une moto d'exception, que l'on voit rarement dans la rue et aiment les sensations généreuses. Comme toutes les hyper-sportives, elle est plus dédié aux célibataires qu'aux amoureux qui souhaitent partir en week-end. L'absence de poignées passager et de crochets d'arrimage, ne la destine pas à des routes buccoliques. Par contre, c'est un exemple de droiture et de comportement. Elle semble toujours rivée au sol, comme sur un rail. Il doit surement être possible de la prendre en défaut, mais je laisse cela aux vrais pilotes, sur circuit.
Ai-je vraiment testé cette moto ? Je dirai que je l'ai conduite sur plusieurs centaines de kilomètres. Je suis par contre très loin d'en avoir exploité les possibilités et la puissance. Modestie ? Aucunement. Réaliste ! Cette moto est réservée à des motards avertis et expérimentés. Comme toutes les hyper-sportives, me direz-vous... Certes, d'autant plus que la Daytona est loin d'être la plus excessive des hyper-sportive, notamment grace à un agrément moteur dès les bas tours et un couple important, qui n'oblige pas à monter dans les tours pour se faire plaisir.
Alors pourquoi n'en voit-on pas davantage ? A 13500 euros, l'anglaise n'est que 500 euros plus chère que la concurrence japonaise. En fait, elle ne bénéficie pas de tous les succès en courses de ses concurrentes. Sa sobriété extérieure la fait également moins remarquer pour la situer davantage dans la catégorie GT Sport plutot qu'hypersportive extrême.
Et pourtant... c'est bien un hyper-sportive, de caractère de plus est, qui comme les autres, ne peut être exploitée sur routes ouvertes et c'est ma grande frustration.
La Daytona est disponible en livrée "Aston Green" (vert) pour cette Centenial Edition ainsi qu'en jaune ou gris.
Consommation pendant l'essai : moyenne : 5,5L/100km - maxi : 7L/100km
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