Essai Triumph Tiger Sport 1050
Un Tigre plus sauvage
Tiger ! En 20 ans, le trail Triumph a profondément évolué. De l'imposant trail Tiger 900, apparu en 1993 au salon de Cologne, il ne reste plus guère que le nom à associer à la dernière mutation.
En 2001, la machine tout chemin adoptait le nouveau moteur de 955 cm3, issu des Daytona et Speed Triple. La révolution vient en 2006. Le Tiger se dote alors une nouvelle fois du bloc de la nouvelle Speed, le 1050, dégonflé pour délivrer 115 chevaux à 9.400 Tr.min et un couple de 10 mkg à 6 250 Tr.min. La roue avant de 19 pouces, propice à l'offroad, disparait au profit d'une jante de 17, montée avec un pneu de 120 mm de largeur. L'enveloppe arrière passe de 150 à 180 mm de large… Ainsi le Tiger change définitivement de terrain de chasse, quittant la nature pour plus de bitume. Malgré tout, le félin Anglais menaçait de disparaitre, coincé entre deux autres prédateurs de la même famille : les Tiger 800 et 1200 Explorer. Cette situation appelait une déclinaison encore plus dynamique, logiquement dénommée Sport et optimisée tant en esthétique qu'en mécanique et partie cycle. Décidée à relancer son modèle routier, Triumph tente de lui redonner du poil de la bête.
Découverte
Elancée, haute et musculeuse, la Tiger impose sa plastique d'athlète élégante. Certes, les différences d'habillage ne sont pas fulgurantes, mais dynamisent toutefois efficacement la silhouette de la Tiger Sport 1050. Ses flancs redessinés, autour d'un réservoir de 20 litres, s'échancrent désormais, affinant ses lignes et intégrant de factices prises d'air.
De même, le sabot percé d'ajours se fait plus anguleux. Mais c'est surtout la nouvelle boucle arrière et son assise monobloc, entourée de longues poignées de maintien, qui allègent visuellement la machine. Très sensiblement affinés, ces éléments lui confèrent une allure nouvelle. Une esthétique soulignée, côté droit, par le nouvel échappement, toujours en position haute et, côté gauche, par l'apparition d'un monobras oscillant en aluminium, dégageant pleinement la jante arrière aux cinq branches dédoublées.
Ces nouveaux éléments en alliage du même métal, aux valves coudées, se dotent d'enveloppes Pirelli Angel ST. Et les bonnes nouvelles ne s'arrêtent pas à la robe.
On retrouve l'habituel et gracieux cadre à doubles longerons, également fait d'aluminium, soudés à deux platines basses. Ses formes galbées, parées d'un séduisant revêtement noir mat, supportent le bloc trois cylindres de 1 050 cc. Soigneusement habillé, ses carters eux aussi matifiés arborent toutefois une visserie assez présente. Douze soupapes, double ACT et alésage x course de 79 x 71,4 mm, le bouilleur britannique fait dans le dynamique, délivrant désormais 125 ch (92 kW) à 9 400 Tr.mn en full (115 ch auparavant). La valeur de couple s'élève de 0,6 points, à 10,4 da.Nm à 4.300 (107 ch et 78 kW en France et 10,1 da.Nm à 4 200 révolutions chez nous). Son souffle puissant se jette dans un collecteur trois en un, courant jusqu'au nouveau silencieux au corps satiné.
L'agilité est également travaillée, la géométrie subissant quelques modifications. Empattement allongé de 3 cm (1 540 mm), chasse augmentée de 4 mm et angle de fourche ramené à 22,8° (-0,5). Les longues jambes du félin routier se dotent d'une fourche inversée Showa de 43 mm, délaissant l'or pour des fourreaux noirs. Ressorts et clapet de cet élément sont nouveaux et l'ensemble est ajustable en précharge, détente et compression. Le train arrière reçoit un amortisseur de même marque, réglable en précharge et détente. Leur débattement respectif est de 140 et 150 mm.
Pour ralentir sa course, des étriers Nissin radiaux à 4 pistons mordent des disques de 320 mm. A l'opposé, un élément deux pistons pince un disque de 255 mm. L' ABS est de série et déconnectable.
Particulièrement valorisante et bien construites, la Tiger Sport 1050 peut se targuer d'une finition sans fausse note et d'une ligne générale attirante. Au final, seule sa large tête de fourche aux (trop) grandes optiques semble un peu rapportée sur un corps maintenant plus élancé. Et la bulle non réglable en hauteur aurait gagné à des positions multiples.
En selle
Le sport commencera, pour les plus petits, au moment de se jucher sur la selle, qui exige de lever la jambe. Avec 830 mm au garrot de son assise, mais en baisse de 5 unités, le tigre sport reste une moto haute. Heureusement, l'arc de jambe très faible compense beaucoup ce point et autorise un bon contrôle de la machine et ses 235 kg (tous pleins faits). D'ailleurs, la Triumph se manie aisément moteur coupé, prouvant malgré tout une excellente répartition de ses masses. Particulièrement confortable, la selle au revêtement anti-glisse efficace révèle un espace de 1,6 litre, permettant de loger un bloc disque et divers menus objets. Egalement, quatre petites sangles d'accroches permettront de fixer facilement de faibles charges. Des ajours aménagés dans les platines de repose-pieds passager serviront plus habituellement à de solides tendeurs.
Les jambes trouvent une place idéale, le corps se penche à peine vers le large cintre à diamètre variable, reculé de 26 mm et abaissé de 11,5, pour saisir les poignées. Au commodo gauche, un nouveau poussoir permet de faire défiler les informations de la planche de bord. Cette dernière est toujours aussi ergonomique, s'articulant autour d'un large compte-tours analogique flanqué d'un vaste écran LCD très complet.
Sur celui-ci, s'affiche tachymètre, horloge, jauges de température moteur et essence, vitesse, odomètre, deux partiels kilométrique comportant chacun : conso moyenne et instantanée, autonomie restante, vitesse moyenne et temps du parcours. On regrettera l'absence d'anti-patinage, d'un témoin de rapport engagé et le positionnement de la commande des warnings sur la console d'instruments et non au guidon.
La tête de fourche large aurait également pu accueillir un vide-poche. Austère, elle dissimule toutefois bien les divers fils électriques. Plus harmonieux, le té supérieur de fourche est constitué d'une massive platine aluminium aux reliefs supportant les hauts pontets de guidon. Enfin, les sommets des tubes arborent des éléments de réglages bleutés et les repose-bottes sont particulièrement esthétiques, effilés à leur extrémité extérieure... On note également des rétroviseurs efficaces et aisément réglables et une béquille longue et facilement accessible. La centrale reste hélas en option, à 239 €.
En ville
Après une toux énergique du démarreur, le trois cylindres émet immédiatement sa sifflante mélopée, mêlée d'un discret feulement. Les premières évolutions mettent en valeur sa douce disponibilité à bas régime, seulement amoindrie par une injection un peu sèche. D'emblée, la position de conduite parait excellente, laissant apprécier la machine de façon intuitive. Précis, le train avant permet de virevolter dans le trafic, grâce et en dépit du large guidon, qui passe, souvent, au-dessus des rétros des caisses. L'agilité de la Tiger est appréciable et le velouté de son moteur charme le citadin, limitant le recours au sélecteur de vitesse. Les commandes sont de même et la boite précise, verrouillant en douceur.
Contrairement à certains modèles de la marque d'Hinkley, le trail braque plutôt bien, autorisant des demi-tours aisés et des manœuvres faciles. Enfin, les transferts de masse restent contenus, la Triumph ne plongeant que modérément au freinage urbain.
Toutefois, ce calme apparent cache à peine un orage mécanique ne demandant qu'une autorisation pour surgir. Si l'on taquine un peu la poignée droite, le Tigre commence à montrer les dents à votre permis. Ayant validé ses aptitudes entre les murs, il est temps de lâcher le fauve qui sommeille.
Autoroute et voies rapides
Le triple coeur de l'échassier sait s'affranchir de ses bonnes manières Britanniques. Sans trainer. Passé 4 000 tours, la Tiger bondit allègrement et se lache après 7.000 révolutions minute, dans un grondement enfin perceptible. La force du bloc est égale à son onctuosité : ample et généreuse.
Calé à 130 km/h, le Tigre ronronne à 5.600 tours, prêts à se relancer vivement, même sur le dernier rapport, légèrement raccourci. La protection au flux d'air de la bulle est correcte, mais perfectible au légal autoroutier, mais s'amoindrit vite par la suite, notamment pour les plus grands. Ceux-là devront piocher dans les accessoires la bulle "Touring", plus haute de 5 cm et plus large de 2,2 cm, tarifée 170 euros. Le confort d'assise laisse toutefois envisager de long parcours sans autre fatigue. Avant de s'endormir, quittons le ruban des hautes vitesses pour un asphalte plus joueur.
Départementales
La Tiger Sport sait faire honneur à sa dénomination nouvelle, sous toute réserve bien sûr. On compte désormais une dent supplémentaire sur sa couronne qui, associée au travail réalisé sur son moteur, rend le trail anglais d'autant plus tonique. A l'usage, le quatrième rapport se révèle bon à tout faire. Une traversée d'agglomération ou celle d'une série de virages se joue sur la même note. Et tant qu'on parle de son, la boite à air modifiée fait résonner plus sensiblement les puissantes montées en régime du triple 1050.
Maintenue au-delà de 5.000 tours, la Triumph donne le meilleur de son caractère. Son couple maximum, obtenu bien avant, lui autorise des relances musclées dans la virole serrée. La puissance prend alors le relais pour bondir vers la courbe suivante, griffant le bitume de ses repose-pieds stylés. On se prend vite au plaisir de faire rugir le trois cylindres, pour masquer le sifflement de la distribution. D'autant qu'après 7.000 révolutions, la Tiger Sport parle un langage viril et débridé (moins chez nous) et laisse la politesse au vestiaire.
Large cintre, agilité sauvage, pneumatiques accrocheurs, les prises d'angle se font vite excessives. Rigide et précise, la machine apprécie un rythme enjoué. Et l'on atteint alors les limites d'homogénéité de la Tiger Sport en pilotage engagé. Le trail avoue alors une hydraulique trop lâche que l'on pourra aisément améliorer. D'origine, sans se désunir, sa rigueur est toutefois moindre en entrée de courbe sur les freins et la machine se tasse sur les relances. Pas de quoi vraiment baisser le rythme une fois les suspensions ajustées au mieux. Pour ralentir la bête, les étriers avant procurent un excellent mordant, mais également une progressivité bienvenue. Ainsi, on pourra sans trop de remords, agripper le levier avant sur des freinages un peu tardifs. L'arrière demande à incliner le pied sensiblement, mais sa mise en oeuvre complète efficacement le travail du train directeur.
A rythme plus délié, on profite à nouveau des grâces de l'Anglaise. Facile à emmener, la Tiger Sport est une dévoreuse de bornes confortable, donnant l'impression d'une machine à deux visages. Le contraste n'est certes pas extrême, mais assure une polyvalence agréable.
Partie-cycle
Châssis rigide, géométrie dynamique, suspensions ajustables, le tigre se fait plus incisif. Son agilité et une bonne précision rendent ce trail facile en toute occasion, sans sacrifier le confort.
Freinage
Un bon point de ce millésime. Le mordant des étriers avant est franc, mais conserve une progressivité efficace sous contrôle d'un ABS Bosch discret, mais vigilant. La pince arrière assure un guidage optimal en courbe si besoin et seconde les ralentisseurs opposés avec force, mais sans activer l'anti blocage inopinément.
Confort/Duo
Autre grande qualité de la monture d'Hinkley, son aptitude à emmener l'équipage avec confort. Accueillante, pilote et passager disposent d'un espace très honnête est d'une ergonomie convaincante. Les suspensions avalent facilement les défauts du bitume et les transferts de masse restent limités.
Enfin, des valises amélioreront encore l'agrément des voyages. La gauche est de 31 litres, la droite de 24,5 Litres (pour cause d'échappement haut). La première peut contenir un casque intégral. L'ensemble est tarifé 1.298,90 € (coques couleur inclues).
Consommation
En pilotage coulé, la consommation s'établit à environ 7 litres, mais monte vite si l'on taquine l'accélérateur. Plus de 8 litres sur les parcours menés à bon rythme. En ville, comptez un entre-deux, soit 7,5 litres au 100 kilomètres. Toutefois, l'autonomie reste acceptable grâce à un réservoir de 20 unités.
Conclusion
Avec cet opus dynamisé, Triumph donne à son trail de bons arguments pour tenter de convaincre une clientèle boudeuse du félin anglais. Finition, motorisation, confort, esthétique, la Tiger Sport propose un ensemble séducteur. On aurait tout de même souhaité que le constructeur aille un peu plus loin, en affinant notamment une face un peu massive et lui greffant une bulle réglable en hauteur. Si le premier point est à l'appréciation de chacun, le deuxième est plus regrettable.
Cependant, hormis ces rares regrets, la Tiger Sport est plus que jamais un efficace trail routier. Il saura charmer tant au quotidien que lors de longues escapades. Sa douceur à bas régime séduit autant que la force de ses relances et la disponibilité de son bloc, quelle que soit l'allure. De même, le trail offre une prise en main intuitive. On ne peut nier les efforts apportés à cette machine. Proposée à 12.490 €, elle nécessite tout de même, on l'a vu, quelques recours à la longue liste d'accessoires. Avec valises, bulle touring, poignées chauffantes (215,90 €) et béquille centrale (239,90 €), la facture monte alors à 14.414 €.
On lui opposera une autre redoutable européenne, la KTM 1190 Adventure, proposée à 13.995 euros et bien équipée : cartographies moteur multiples, anti-patinage, ABS combiné… Vers l'Orient, la Kawasaki Versys 1000 ABS 12.499 € est également une challenger en confort et performance. Sa dotation est également fournie : ABS, anti-patinage variable KTRC, béquille centrale… Et pour 1.000 € de plus le pack Grand Tourer donne valises avec sacoches internes et top case de 47 litres.
On le voit, la Triumph Tiger Sport devra sortir toutes ses griffes pour défendre son territoire face à ces concurrentes. L'agrément de son trois cylindres reste probablement sa meilleure arme.
Points forts
- Caractère et disponibilité moteur
- Agilité de la partie cycle
- Confort
- Finitions
Points faibles
- Manque d'assistances électroniques
- Bulle non réglable
Commentaires
Elle me plait bien !
29-09-2015 14:26J'ai eu l'ancienne Tiger 1050. Achetée neuve, d'entrée elle voulait plus démarrer (batterie HS et ça avait provoqué un problème électronique !), puis embrayage qui "broutait" (pris en garantie).
L'éclairage était nul et je me faisais peur en roulant de nuit !
A part ça, elle était plutôt bien, légère, bonne tenue de route, confortable, bon moteur ...
La nouvelle a dû être améliorée concernant les points négatifs je suppose.
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26-02-2016 02:08Un comparatif serait, je crois le bienvenu, avec sa ''s½ur'', la TRIUMPH Tiger Adventure XC (Mouture 2016)...
Comparatif avec la Versys 1000, MT09 Tracer et BMW S1000XR (et Multistrada 1200?) plutôt
26-02-2016 13:06La 1050 n'a rien à voir avec la 1200, elle est bien plus routière et sportive