english

MV Agusta Stradale 800

Mini Couteau Suisse

Autrefois cantonné aux machines radicales entièrement dédiées au plaisir de conduite, MV Agusta avec sa Stradale 800 s'aventure pour la première fois sur le segment touring. Le résultat est enthousiasmant à défaut d'être parfait !

Introduction

Avant de vous parler de la Stradale 800, il faut que je vous décrive la nouvelle stratégie globale de MV Agusta. On peut la résumer en un mot : « expansion » ! En 2013, le “Ferrari de la moto” a écoulé 7500 machines. Son objectif est de faire grimper ce chiffre à 14.000 d'ici 2016. Attention, MV n'a pas l'intention d'aller concurrencer les MT 07 et MT 09 de Yamaha,

« nous ne souhaitons pas descendre en gamme en proposant des machines plus abordables qu'actuellement » martèle Giovanni Castiglioni, actuel PDG de MV Agusta.

Ce serait même plutôt le contraire puisque MV est en rupture de stock sur ses modèles RR malgré des prix de ventes pour le moins salés... Attendez vous à voir des MV Agusta encore plus Premium qu'actuellement. En parallèle, MV s'attaque à des catégories d'où elle est absente actuellement comme les machines Touring, très populaires. A lui seul, ce segment pourrait, selon la marque, faire grimper ses immatriculations de 55 %! Cela passera bien évidemment par une gamme élargie de 16 à 26 modèles à l'orée 2018 et l'introduction d'un tout nouveau 4 cylindres, en cours de développement. Autre bonne nouvelle pour les fans de la marque, MV Agusta a (enfin) compris que pour pérenniser son activité, fabriquer des belles machines ne suffit pas. Séduire des clients c'est bien, les garder c'est encore mieux ! Un énorme travail de fond sur le contrôle qualité, le SAV et le réseau de distribution a donc été lancé en début d'année. Pour l'Hexagone, l'Italien a récemment créé une structure dédiée, MV Agusta France et recruté un homme d'expérience en la personne de Rémy Hasser. Successivement passé chez BMW Motorrad, Ford, Triumph et Ducati, il a la lourde tache de restructurer (assainir?) le réseau national. Ces précisions étant faites, passons à la Stradale 800.

Coloris MV Agusta Stradale 800

Découverte

Les récentes déclinaisons MV autour du trois cylindres se rapprochent du concept de plateforme commune chère au monde de l'automobile. La Stradale n'est pas pour autant une machine fabriquée au rabais, sur laquelle on se serait contenté de greffer un grand guidon et un petit saute-vent, bien au contraire. Sans édulcorer l'ADN mécanique de la marque, cette MV se veut moins extrême, plus polyvalente et même, n'ayons pas peur des mots, utilisable au quotidien. Ca passe par une partie-cycle pourvue de suspensions à grands débattements (150 mm) à triple réglage (compression détente précharge), un angle de chasse plus ouvert (22,5°) et un empattement rallongé via un bras oscillant plus long (607 mm). Le guidon a été relevé pour améliorer le confort sur long trajet et l'écran surmontant le tableau de bord s'ajuste sur 5 cm en hauteur et 5° en inclinaison. Le réservoir, nouveau lui aussi peut contenir 16 litres de carburant.

Coté droit MV Agusta Stradale 800

Côté pneumatiques, on a le droit en première monte à du Pirelli Diablo Rosso II ou des Scorpion Trail en 120/70 – 17 et 180/55 – 17. Le trois cylindres droit lui aussi à quelques aménagements : nouvel embrayage hydraulique pour une action adoucie, volume de l'échappement en hausse (+ 2,8 L) pour optimiser le couple dans les régimes intermédiaires réduire le niveau sonore, boite 6 retravaillée pour plus de douceur... La Stradale dispose aussi de quatre cartographies moteur spécifiques. Sport (115 ch à 11 000 t/min), normal et Pluie (90 ch) favorisant le remplissage à mi-régimes et un mode Custom personnalisable. Pourquoi un mode Custom ? Parce que chacun de ces 4 modes modifie également tous les périphériques électroniques. On peut ainsi agir sur la courbe de couple, l'entrée en action du rupteur (Hard ou Soft), la sensibilité de la poignée de gaz (3 positions), le frein moteur (2 niveaux) et l'antipatinage (8 niveaux dont un mode off). N'oublions pas non plus le nouveau quickshifter EAS 2.0 qui fonctionne en montant ET en descendant les rapports sans actionner l'embrayage.

Côté droit MV Agusta Stradale 800

Tous ces paramètres sont modifiables via des commodos fixés au guidon. Enfin, MV Agusta précise que le réservoir est équipé d'un capteur « proportionnel » dans le réservoir pour offrir une lecture plus précise du niveau offrant une “descente constante” de la jauge. Vocation tourisme oblige, la Stradale est équipée de sacoches latérales semi-rigides. Comme elles occultent les feux stop de la Stradale, MV les a équipés de feux additionnels pour parer à cet inconvénient (voir la rubrique “duo et aspects pratiques”). La Stradale est disponible dans trois combinaisons de coloris : le traditionnel rouge/argent typique de la marque, blanc/gris et bronze/blanc.

Vue arrière MV Agusta Stradale 800

EN SELLE : Typé gros SM

La finition des MV Agusta a souvent été sujette à polémiques : périphériques superbes, peinture et fonderies de grande qualité côtoient stickers sans vernis, ajustement des panneaux de carrosserie aléatoire et circuit électrique version spaghettis bolognaises... Ici, il y a du mieux. Le cheminement des fils fait nettement moins fouillis (même si ce n'est toujours pas parfait), les ajustements sont précis et l'ensemble fait plus sérieux (ou moins artisanal) que les premières générations de trois cylindres. On regrettera en revanche les soudures quelquefois grossières du treillis tubulaire sur plusieurs de nos modèles d'essais. Mettons ça sur le dos la pré-série et montons – ou plutôt grimpons- en selle. Première constatation, il faut avoir les adducteurs souples pour passer sa jambe par-dessus la selle sans écorcher les valises latérales. Pour les plus petits, la solution consiste à grimper dans un premier temps sur le repose-pied intérieur pour gagner quels centimètres avant de s'assoir sur le promontoir perché à 870 mm du sol. Une fois là haut, un pilote de 1,70 mètre maintient l'équilibre sur la pointe des pieds. Vivement la selle basse optionnelle (850 mm)... Quant à la position de conduite, elle est plus typée (gros) supermotard que trail avec un guidon bas et proche du corps. Les repose-pieds sont bas et dans le prolongement du corps. Impossible de ne pas penser à une Ducati Hypermotard au guidon de la MV, ces deux machines boxent dans la même catégorie. Les leviers sont ajustable au millimètre près la navigation dans l'interface du tableau de bord se mémorise en quelques minutes. L'écran rétroéclairé est lisible à défaut d'être ultra complet, à l'exception du compte-tours.

Compteur MV Agusta Stradale 800

Ne reste plus qu'à choisir son mode avant de partir. J'opte pour le standard (90 ch.) mais le responsable technique me précise qu'il est possible de changer de mode en roulant d'un simple pression sur le démarreur (moteur en marche) et ce même en gardant l'accélérateur ouvert contrairement à la concurrence. Et contrairement à la concurrence, l'ABS peut être désactivé de manière permanente, même si on coupe le contact.

Commodos MV Agusta Stradale 800

EN VILLE : Pas mal du tout

La sortie de Malaga pour rejoindre les hauteurs de l'arrière pays se passe comme un charme. L'embrayage est toujours un poil dur pour une utilisation urbaine intensive mais la souplesse du trois cylindres et la douceur de la boite rendent l'expérience très vivable. Ne comptez pas trop sur le Quickshift II dans ces conditions. Certes, il est très efficace, même dans les régimes intermédiaires, mais il ne fonctionne qu'à partir de 30 km/h ce qui prohibe son utilisation dans les embouteillages. Autre motif de satisfaction, les suspensions à grands débattements remplissent parfaitement leur office et gobent sans rechigner trous, bosses et autres ralentisseurs. La direction se montre précise et la mise sur l'angle se fait naturellement. Même le rayon de braquage (à l'italienne) est loin d'être catastrophique. On est loin de ce que peut faire un vrai supermotard mais un demi-tour sur départementale se fait sans manœuvre ni sueur froide.

MV Agusta Stradale 800 sur route

AUTOROUTE ET VOIES RAPIDES : Touring pas GT

Les protège-guidon manquent d'efficacité contrairement à la bulle très efficace malgré sa petite taille en position haute. L'air est dévié sur le bas de la mentonnière et le haut des épaules sans générer de turbulences aérodynamiques ou bruit excessif. De quoi cruiser tranquillement à 150-160 km/h (en Allemagne) sans forcer.

MV Agusta Stradale 800 sur nationale

On aurait bien aimé tester la position basse mais les vis de nos modèles d'essai étaient tellement serrées que personne n'a été capable de faire la manipulation... La consistance de la selle est incroyablement moelleuse selon les standards MV et pas la moindre alerte de mal au fondement n'a pointé le bout de son nez durant notre essai d'un peu plus de 200 km. En revanche, l'espace est compté sur la selle à double étage ce qui risque de s'avérer problématique sur longues étapes. Non seulement la mobilité est restreinte mais le triangle en mousse dure marquant la séparation en pilote et passager se montre vite gênante quand on se recule au maximum.

Détail des surpiqures de la selle de la MV Agusta Stradale 800

La Stradale est bien une GT mais pas au long cours. De toute façon, la capacité d'emport des valises latérales est trop faible pour emmener plus que le minimum vital pour un week-end en amoureux. Le côté positif, c'est qu'elles n'ont aucune influence sur la stabilité à haute vitesse de la Stradale, même à des vitesses largement prohibées. Aux allures légales, le trois pattes ronronne à 5500 tr/min à 110 km/h et grimpe jusqu'à 6.500 à 130 km/h. Ca tombe bien puisque c'est la zone où se trouve le gras du couple, assurant ainsi des reprises vigoureuses sans recourir à la boite de vitesse pour tomber un rapport.

MV Agusta Stradale 800 sur autoroute

DEPARTEMENTALES : Dans son élément

Si la Stradale est une machine dédiée au Touring, c'est avant tout une MV. Dans les petites routes surplombant les hauteurs de Malaga, elle fait étalage d'excellentes qualités dynamiques. Vive, précise, légère, elle virevolte d'un virage à l'autre sans faire transpirer son pilote tout en offrant un confort de suspension jusque là inconnu chez la marque italienne. En entrée de virage, le train avant va exactement où on lui demande d'aller que ce soit sur l'élan ou sur les freins et en sortie la motricité des Diablo Rosso II n'a jamais été prise en défaut, sur le sec tout au moins. Ici, tout est sain, facile et on se laisse enivrer par le charme du trois cylindres.

En mode normal (90 ch), il pousse naturellement son pilote à surfer sur le gras du couple, présent en abondance de 5 à 9.000 tr/min, moment où il pousse instinctivement à changer de rapport.

En mode Sport, c'est une toute autre histoire, le seuil des 9000 tours correspond ici au moment ou le trois pattes trouve un second souffle, montant avec allégresse à l'assaut de la zone rouge (12 000 tr/min) tout en changeant de voix, virant à l'aigu avec des accents métalliques à donner la chair de poule. On en viendrait presque à regretter que MV ait légèrement étouffé la voix de son trois cylindres pour coller à sa vocation de “toureuse”.

MV Agusta Stradale 800 à l'attaque

Notez au passage que les errances de gestion du ride by wire des premiers troix cylindres ne sont plus qu'un mauvais souvenir. La connection entre accélérateur et roue arrière est ici transparente et ce quel que soit le mode choisi. Le Quickshift II participe lui aussi énormément au plaisir de conduite. Agréable dans les ragimes intermédiaire, il est bluffant d’efficacité dans le dernier tiers du compte-tours. Les rapports se montent à la volée sans rupture de charge et les rétrogradages ne viennent jamais déstabiliser l'ensemble. Il suffit de couper les gaz et d'appuyer sur le sélecteur pour que l'électronique se charge du reste, mettant le petit coup de d'accélérateur en embrayant automatiquement pour bénéficier d'un frein moteur constant. On peut être un Ayatollah du “talon-pointe” (j'en fais partie) mais il faut reconnaître un système l'avantage de permettre d'oublier cette phase critique du pilotage pour se concentrer sur le reste. Particulièrement efficace en roulant à 80 % de ses capacités, la Stradale perd de sa superbe quant on la brusque un peu trop. La qualité très variable du bitume espagnol a notamment mis en évidence un petit désaccord entre suspensions avant et arrière ainsi qu'une hydraulique trop souple sur les successions de bosse. En freinant la détente à l'arrière, la Stradale retrouve un peu de sa superbe, notamment en se montrant plus stable dans les changements d'angles rapides mais elle reste tributaire de son architecture trail/supermotard. Les suspensions hautes et souples, l'empattement qui demeure relativement court et l'impossibilité de charger le train avant de par la position de conduite font que la Stradale se montre quelque peu rétive dès que les transferts de masses deviennent caricaturaux. Excepté sur du billard, un freinage surprise sur l'angle tend à désunir l'ensemble et provoquer quelques pompages de suspensions. Rien de grave ni de dangereux mais la contrepartie de la polyvalence et du confort de cette MV Agusta est une efficacité sportive en retrait de ses cousines à trois cylindres de la marque...

MV Agusta Stradale 800 sur départementale

FREINAGE : au top !

Chez MV, on ne mégote pas avec la sécurité : double disque radial 4 pistons signés Brembo à l'avant pinçant des galettes de 320 mm de diamètre ; simple disque de 220 mm et étrier deux pistons à l'arrière, le tout sous le contrôle d'un ABS Bosch 9+ intégrant un système anti-stoppie. Les afficionados du freinage au panneau trop tard apprécieront, les stunters un peu moins mais l'ABS est déconnectable donc vous avez le choix... Côté agrément, c'est tout simplement parfait avec du feedback, de la puissance et de l'endurance à gogo, le tout sans déclenchement prématuré de l'ABS à l'avant ET à l'arrière.

Freins Brembo et fourche Marzotti MV Agusta Stradale 800

DUO ET ASPECTS PRATIQUES

L'espace passager est compté mais la mousse de selle est confortable. Les jambes ne sont pas gênées outre-mesure par les valises mais les repose-pieds sont ancrés trop haut pour envisager de longs trajets avec un sac de sable mesurant plus de 1,70 m.

Selle biplace MV Agusta Stradale 800

Un mot sur la manipulation des valises latérales. Outre la présence de raccords électriques pour alimenter les feux stop intégrés, le système de fixation est pour le moins compliqué avec, en plus du verrouillage par clef, une vis “quart de tour” planquée dans un petit trou sous la platine du repose-pied passager. Bref, pour déposer les valises, il faut avoir des doigts de fée, une bonne vue et accessoirement un chiffon vu que l'endroit est particulièrement exposé aux projections. Conscient du problème, MV Agusta nous assure se pencher sur la question. A vérifier si ces fameuses vis seront toujours présentes lors de l'arrivée de la Stradale en concession. Côté contenance, les valises latérales sont bien trop petits pour contenir un casque mais elles peuvent être agrémentées en option d'un top-case, seule option Touring à ce jour annoncée par MV Agusta.

Valises MV Agusta Stradale 800

Consommation

Durant notre journée d'essai, la consommation moyenne affichée par l'ordinateur a navigué entre 7,8 L/100km et 8,5 litres en mode énervé. On peut donc tabler sur une autonomie totale aux alentours de 200 km en utilisation mixte et un probable 250 km à régime stabilisé sur autoroute avec le réservoir de 16 litres. Pas la panacée pour une machine à vocation touring mais pas de carton rouge non plus...

Vue de dessus des différrents coloris MV Agusta Stradale 800

Conclusion

Giovanni Castiglioni décrit sa Stradale 800 comme une Tourer Light. Si on s'en tient à cette définition, cette MV Agusta remplit parfaitement son objectif. Polyvalente, charmeuse, confortable (surtout pour une MV), efficace dans les limites du genre, elle peut s’appuyer sur un package technologique particulièrement fourni et parfaitement au point pour séduire. Du moins ceux qui sont à la recherche d'une machine de caractère utilisable au quotidien. Quelques détails sont à peaufiner comme l'embrayage, l'autonomie et l'accord de suspensions pour en faire une machine réellement homogène mais la base est suffisamment saine pour séduire une nouvelle clientèle. Sur la micro-niche des supermotards Gtisés type KTM 990 SMT (aujourd'hui disparue), le package offert par la Stradale est pertinent, même au niveau tarifaire avec un prix de vente fixé à 13 990 € soit un tarif proche de sa rivale la plus directe, la Ducati 821 Hyperstrada, affichée à 13.050 €. Après ceux qui sont à la recherche d'une “vraie” machine pour tailler la route avec armes et baggages devront soit passer leur chemin, soit (peut-être) attendre la sortie de la Turismo Veloce...

Points forts

  • Polyvalence
  • Confort
  • le trois cylindre envoutant
  • package technologique-

Points faibles

  • Accord de suspensions
  • Quelques détails de finition
  • Autonomie un peu juste

La fiche technique de la MV Agusta Stradale 800

Commentaires

Tyrrell-008

C'est dingue, c'est le seul site moto de la toile où y a pas de troll ! (ni trop de commentateurs d'ailleurs...)

19-12-2014 20:51 
waboo

oui, les gens lisent mais postent, hélas, peu...

19-12-2014 21:12 
radames

Si cherchez une moto fiable qui marche très bien, fait 20 km par litre et coute juste la moitié de la Stradale….c'est la mt07, qui amuse bien sans électronique, trepistoni, Brembo e Mazzocchi!Je viens de l'abandonner pour une stradale. Ce n'est pas rationnel mais cette moto a une ligne superbe, elle sait séduire. La différence par rapport à BMW ou une japonaise? couts d'entretien, 12km par litre, durée de la garantie, en définitive c'est un peu risquée. Mais quand on la conduit en modalité sport, on lui pardonne tout ça: c'est un vrai plaisir.

12-12-2015 21:01 
 

Connectez-vous pour réagirOu inscrivez-vous