Essai KTM 990 SMT
SMT comme Sacrément Membré… le Touriste !!
Essai sur 100 cols et 3.000 kilomètres
Tout de black mat vêtue, la 990 SMT possède à l'instar de la gamme, un physique qui ne laisse pas de marbre. On aime ou on n’aime pas mais force est de reconnaître que le designer s'est quelque peu cassé le bourrichon pour assortir l'intégralité du matos. Chez KTM on fait dans le triangulaire et l'acéré et la SMT, posée sur la latérale, par son coté bête au repos, oblige le passant à jeter un regard. Soyez en certain si vous investissez dans cette machine vous ne passerez pas inaperçu !
Cette machine est en fait une Supermoto sur laquelle on a greffé une paire de sacoches. J'ai souvenances des années 70 où l'on partait au bout du monde avec les brellons qui nous servaient habituellement à se tirer la bourre sur la Corniche des Cévennes. Eh bien, j'ai retrouvé dans cette SMT un peu le même esprit. La lettre T signifiant bien sûr « Travel » il a fallu effectuer quelques modifs sur la SM traditionnelle sans pour autant en ôter la saveur et la façon d'être. Comment emmener en voyage un supermotard pur et dur ? Eh bien tout simplement en l'équipant d'un carénage solidaire du cadre, d'une semelle porte-paquets, d'un pare-brise qui peut en option prendre de belles proportions, de protège-mains et d'une selle étagée plus large et abaissée de 2 cm.
En route pour l'Aventure. Oh pardon, le nom est déjà utilisé par la marque.
En selle
Leviers réglables, protège mains, les poignées sont relativement fines, on sent une réelle recherche pour assurer le confort de conduite. RAS sur l'ergonomie du guidon. Il y a juste un petit moment de surprise quant à la position un peu inhabituelle du levier de frein, légèrement décalé vers la gauche, ce qui me direz vous favorise une préhension facile des deux doigts. Le reste des comodos est traditionnel.
Le cadre est le même que celui de la SM mais le débattement de la superbe fourche inversée toujours issue de chez WP a été un peu réduit. Les roues à bâtons proviennent de chez Marchésini. Le freinage est assuré à l'avant comme à l'arrière par la maison Brembo. Serions nous au guidon de la Supermoto ? En tout cas, cela lui ressemble toujours.
Dans la série « chaussettes », la machine est équipée de pneumatiques Michelin Power 2CT dernière génération…. que nous n'avons jamais pu mettre en défaut, que ce soit sur le sec ou le mouillé.
Les doubles échappements grondent généreusement et quel que soit l'état du revêtement, la machine superbement suspendue d'origine en White Power complètement réglables (fourche et combiné) mais que nous avions laissé en configuration « standard » pour notre test, n'est quasiment jamais prise en défaut. Freinages sur l’angle et reprises sur revêtement bosselé semblent être un terrain de choix pour une moto qui respire la sécurité.
Équipement
Le tableau de bord à l'instar de toutes les modèles de la marque n'est pas des plus complets. On apprécie le totalisateur partiel de réserve de carburant qui prend le dessus lorsque l’on arrive en bout de capacité (180 km avant que cela n’arrive et une autonomie après passage en réserve qui frise les 60 km) mais les affichages sont quand même trop petits et il y a peut être un peu trop de lacunes pour un usage qui se veut tout de même « Touring ».
L’affichage digital du compteur s’avère un peu optimiste (96 compteur pour 90 réels et 138 pour 130 km/h). Au point de vue pratique on découvre après quelques manipulations et en faisant gaffe de ne pas être sous les soleil, de ne pas avoir de gros gants et de repérer le bouton : 2 trips partiels, le trip de réserve, l'heure, le kilométrage total et la température extérieure. Le tachymètre se complète d’une batterie de voyants : passage en réserve (à remettre à zéro après le plein), témoins de feu de route, pression d'huile et clignotants. Il est complété par un classique compte-tours à aiguille très visuel.
Vous pourrez par contre trouver en option une prise de courant externe type européen, bien utile pour alimenter les GPS.
Le dosage du freinage commandé par ce levier décalé vers la gauche demande un petit temps d’adaptation. Chaque commande possède un réglage par molette mais celui-ci s’avère peu facile à utiliser pour un non averti. Le sélecteur tombe bien sous le pied de même que la minuscule pédale de frein AR. Les larges repose pieds sont équipés de caoutchoucs amovibles ils ne vibrent quasiment pas.
Le large guidon Renthal demande un petit réglage pour s'adapter à la morphologie de chacun mais une fois ceci effectué on a une bonne position et la conduite est très aisée. Des emplacements libres permettent de fixer facilement un GPS. La clé de contact est en position centrale et un voyant clignotant, dont je n'ai absolument pas compris l'utilité se met en marche une fois la clé retirée, comme une alarme intuitive.
Contact
La première impression qui se dégage dès les premiers tours de roues avec cette SMT, c'est l'extraordinaire légèreté du train avant. J'ai même cru un moment que j'avais un problème de gonflage tellement la machine sans la moindre difficulté prenait de l'angle à la moindre sollicitation. Eh bien non, la bestiole est ainsi. Héritage ou péché originel, il allait falloir que je m'y fasse cette machine avait tout d'un vélo, un vélo avec plus de 110 bourriques qui le poussaient au cul.
Le coffre du bicylindre est tel que la SMT est susceptible de se mettre sur la roue arrière à la moindre sollicitation. Mais cela se fait sans risque, tout en douceur… tiens je suis en wheeling ! Allez, repose l'avant Marcel, ça tourne !! Je n'ai pas essayé de lever trop l'arrière lors d'un freinage appuyé mais cela est fort possible et relativement aisé. Moralité, pour peu que vous soyez quelque peu déjanté vous pourrez ainsi n'user qu'un seul pneu à la fois !!
Bon, allez assez déliré, nous sommes là pour tester et non pour nous faire détester !!
En ville
Ce n'est pas le terrain de prédilection de la moto, du moins dans la version avec les deux énormes « paniers » parallélépipédiques qui ornent l'arrière. En effet, leur empattement est tel qu'il faut vraiment faire gaffe lorsque l'on déboîte de derrière un véhicule ou lorsque l'on veut passer au milieu d'une file. Le pire, c'est que la moto est tellement légère et facile à manœuvrer qu'on n'y pense pas. La 990 SM doit s'y plaire, mais la SMT rêve d'oublier les valises.
De plus dans les embouteillages le moteur monte rapidement en température et on se retrouve avec à la fois un énorme bruit de sèche cheveux et une douce chaleur qui remonte le long du carénage. Si en hiver cela doit être relativement supportable, dès que la température ambiante dépasse 20° cela vire au supplice.
Hormis le bruit qui provient du disque arrière, il est relativement difficile de faire reprendre la moto sans à coups en dessous de 2.500 tours. Il faut donc sans cesse jouer d'une boite qui heureusement est d'un verrouillage sans faille et d'une douceur exemplaire.
Autoroute
Grands axes, cela signifie cruising à une vitesse stabilisée en surveillant d'un oeil le compteur et de l'autre les éventuelles paires de jumelles, du troisième les panneaux de limitation
et du dernier les réactions des autres usagers. Ce n’est pas vraiment l’idéal, à moins de vouloir se laisser bercer par le ronronnement du gros twin qui ne va pas tarder à vous endormir.
A part cela RAS, ça freine, ça accélère, cela avale le bitume comme une strasbourgeoise une assiette de choucroute, caché derrière la grande bulle (option) on peut rouler casque entrouvert. Le bi ne vibre pas trop, mais à ce petit jeu, il vaut mieux une véritable GT avec régulateur et auto radio intégré.
Les départementales : c'est Là !!!
La SMT 990 arrive non sans déplaisir sur les départementales. Sa légéreté et sa maniabilité vous donnent l'impression de vous transformer en pilote... A ce jeu là, vous allez même prendre un max de plaisir à enrhumer la grande majorité de vos potes pour peu que vous ayez pigé comment se comporte la bête.
Elle permet de retrouver le plaisir de rouler à moto et vous surprenez même à apprécier les gouttes de bruine, malgré une protection bonne assurée par la haute bulle.
C'est là que vous allez aimer l'allonge du moteur, ses reprises à 3000 tours avec ce coup de pied au cul qui vous envoie dans les étoiles. C'est là que vous serez en sécurité grâce à ce freinage d'outre tombe (qui serait encore plus sécurisant avec un ABS même si ce n'est pas tout à fait dans l'esprit Supermot !!). C'est là que vous vous surprendrez à jouer avec la boîte au tours et détours des épingles et au mont et dévale des cols.
C'est là que vous trouverez dans cette moto comme une sorte d'esprit nouvelle vague, avec ce coté rebelle et son anticonformisme à la Truffaut. C'est là que vous prendrez plus que votre pied, que vous vous demanderez pourquoi cela va s'arrêter à un moment ou à un autre, que vous sentirez l'adrénaline qui dégouline dans le bas du dos, à moins que ce ne soit la sueur de devoir mener cet engin comme on mène un cheval de course.
C'est là que vous comprendrez ce que la moto peut apporter de plaisir lorsqu'elle se retrouve dans l'élément qui lui sied le mieux.
C'est là que vous vous prendrez pour un pilote, que vous n'atteindrez jamais la limite des pneumatiques, que vous ne pourrez pas mettre la tenue de route en défaut quelle que soit la mauvaise qualité du revêtement.
C'est là que vous prendrez aussi des risques inconsidérés et que si vous continuez comme ça à faire des conneries vous allez vous en mettre une.
Vous l'aurez compris cette moto c'est une machine à bouffer du Col, à se faufiler au long des départementales tortueuses, à enfiler des courbes comme ma grand mère enfilait son crochet, à jouer par monts et par vaux ou par vache et par veaux, à avaler virage sur virage, à reprendre après une épingle sur un coup de gaz rageur qui va vous projeter dans l'épingle suivante.
Vous l'aurez compris, c'est là que la moto est à l'aise, qu'elle va parfaitement s'exprimer, qu'elle va pleinement développer tout son potentiel, qu'elle va vous donner tellement de plaisir que ç'en est érectile, qu'elle va vous faire apparaître le sourire même si les conditions atmosphériques sont déplorables.
En fait cette moto c'est un pousse au crime dès que la route s'élève et que les lignes droites ne sont plus pain bénit, c'est pas loin d'être l'arme absolue pour peu que vous sachiez vous en servir et que vous soyez Sérieusement Membrés. Touriste !!
Freinage
Lorsque j'avais pris la moto chez KTM on m'avait prévenu, attention le freinage est assez impressionnant … Bien vu docteur, il n'est pas impressionnant, il est démentiel. C'est à se demander s’il n'est même pas surdimensionné par rapport à la machine. Le disque arrière, parfait ralentisseur et stabilisateur se dose relativement facilement mais le double disque avant réclame un minimum de doigté surtout au ralenti. Par contre en freinage appuyé c'est un vrai bonheur ! L'énorme White Power inversée ne plonge absolument pas et la machine se stoppe dans un mouchoir de poche même dans les situations les plus extrêmes.
En ce qui concerne le freinage il y a toutefois un problème auditif. Et apparemment après discussion avec une paire d'autres utilisateurs de SMT, cela serait même un défaut récurrent. A chaud et à basse vitesse, le frein arrière émet un couinement des plus désagréables qui fait se retourner la populace. En ville cela confère au malaise. J'ai ouïe dire que cela viendrait des plaquettes. Mais SVP, monsieur KTM fait vite quelque chose car au bout d'un moment je n'osais plus appuyer sur la pédale !
Confort
La selle est très confortable et les longs trajets même sur départementales au revêtement pas toujours très lisse ne sont pas un calvaire. Le passager est également bien installé, peut être un peu haut car il va prendre de plein fouet les turbulences, la proximité des échappements semble toutefois présenter sinon un certain risque au moins une accumulation de chaleur qui risque d'être très désagréable une fois la belle saison venue. Il dispose de deux poignées de maintien qui tombent bien sous les mains. Notre machine d'essai était équipée d'une bulle haute (en option) qui, même si elle est affectée d'une vibration désagréable, présente la qualité de protéger efficacement, au dépens toutefois de l'esthétique. Le tête de fourche protège bien mais on peut regretter certaines remontées d'air chaud qui sont limites désagréables surtout en ville quand le ventilo se met en route, ce qui est très fréquent.
Pratique
La moto peut être équipée au choix de minuscules sacoches triangulaires en carton bouilli qui sont certes fort esthétiques mais qui seront pleines avec deux slips et trois paires de chaussettes… ou de vastes valises dont on ne peut que regretter de ne pouvoir y intégrer ne serait-ce qu’un casque jet et qui de surcroît ne comportent aucune sécurité : ouverture par un crochet, désolidarisation du support par un autre simple crochet et même disparition totale du support valise avec un simple tournevis en agissant sur les 3 « quart de tour »… Bien vu pour la facilité de maintenance mais on peut craindre leur disparition rapide !
Sous la selle, c'est la foire à la grimace. Si on peut trouver une trousse à outils très complète, avec même le décapsuleur qui va bien, il n'est pas question d'y glisser un U, ni même une bombe anti crevaison. En tassant bien, on trouvera juste la place pour un petit pantalon de pluie.
Le bouchon de réservoir n'est pas monté sur charnières, comme beaucoup de machines supermot, avec le risque de le mettre par terre ; un peu rageant.
Le carter d'huile en matériau composite fait office de sabot de protection. Un très bon point pour le contrôle du niveau d'huile et pour la facilité de remplissage. La moto dont nous disposions était équipée d'un jeu de pare carters qui semblent extrêmement efficaces et qui ont le mérite de ne pas défigurer la machine.
La SMT est pourvue de deux béquilles, une latérale et une centrale. La latérale mériterait comme sur l 'Adventure d’être un poil moins droite et surtout d'avoir une assise légèrement plus grande. La béquille centrale, parfaitement intégrée à la moto et ne gênant absolument pas la garde au sol, se révèle très facile à utiliser, la moto se béquillant sur un simple appui.
La trousse à outils est complète.
Un réglage de suspension arrière est situé à porté de main sur la partie droite de la machine.
Les équipements électriques sont très efficaces. En code comme en phare c’est le TOP.
Consommation
Sur les 3000 km effectués au guidon de la SMT, la consommation s’est stabilisée à 6,8 litres au 100. La capacité affichée du réservoir est de 19 litres dont 4 litres de réserve ce qui donne une autonomie relative d’environ 280 km.
Conclusion
Acquérir cette SMT c'est vouloir faire du GT avec une Supermoto. Eh bien, nous avons testé l'engin sur 3000 km, c'est en effet possible.
Il est vrai que pour ceux qui ne sauraient pas limiter leurs envies de laisser pleinement s'exprimer la puissance de la bête, vous risquez de sacrément surprendre le camping-car que vous doublerez dans la montée du Galibier, droit sur la roue arrière avec armes et bagages !
Sans retomber dans l'image Dr Jekyll et de son pote, il est facile de dire que cette moto a deux visages. C'est d’ailleurs sûrement pour cela que le kit bagages s'enlève aussi facilement. Toute l'année on va aller s'arsouiller avec les potes dans la montée du Col St Pierre et au mois de Juillet, en selle ma douce, directions la grande bleue en passant par les châteaux de la Loire histoire d'user la partie centrale de la bande de roulement.
Cette machine réalisée avec grand sérieux peut intéresser une certaine catégorie de voyageurs mais elle va tout de même rester dans une niche bien particulière et c'est sûrement cela son principal défaut ou sa principale qualité.
Trop typée pour les uns, pas assez pour les autres, cette KTM SM.. T est tout de même bien dans l'esprit de la maison de Mattighofen. Certes elle ne pourra guère être considérée comme une vraie GT mais elle rentre parfaitement en concurrence avec une Triumph Tiger et autre Ducati Multistrada qui font partie de cette nouvelle génération de « Trails Routiers sportifs ».
Arriver à concilier le confort du conducteur et du passager, la possibilité d'emmener des bagages, une tenue de route exemplaire, un freinage démoniaque et un coffre moteur inépuisable sur la même machine cela ne semble pas facile à faire. Eh bien si !! Alors nous tenons là la moto parfaite. Eh bien non !!
Mais pourquoi ?
Je dirais qu'elle est trop tout ! pour être vendue à des gens honnêtes !
Points forts
- Coffre moteur
- Tenue de route
-
Freinage
Points faibles
- Moteur qui chauffe
- Capacité du réservoir
- Tableau de bord peu lisible
Concurrentes : BMW 1200 GS, Ducati Multisrada 1200, Honda Varadéro 1000, Moto Guzzi Stelvio, Triumph Tiger 1050, Yamaha XTZ 1200 Super Ténéré
Commentaires
Moto extra (moteur, tenue de route, freinage, confort ...), mais dommage que le moteur chauffe autant !! C'est infernal l'été !!
30-11-2016 12:21J'avais le même problème avec ma KTM 1190 Adventure.
Salut
C'est vrai que le cylindre arrière chauffe.
Lors de mon essai, j'avais trouvé la remise des gaz ( un peu ) brutale par rapport à mon 950 à carbus. ( un temps d'adaptation certainement )
Par contre je préfère ce coloris :
V
02-12-2016 13:40