Circuit 8 : Retour à Villeponceau, épisode 1

Le final de cette saison du Soctra sera grandiose...

Epilogue de la Kronik estivale... épisode 1... l'épisode 2 à midi

Président ne cache pas sa satisfaction : le final de cette saison du Soctra sera grandiose, avec trois concurrents se bagarrant pour la 1ere place. Il a convié la presse et affûté son discours.

Président sait bien comment médiatiser une situation, la monter en épingle, la tourner à son avantage. Il a passé quelques coups de fil à des gens qui lui doivent quelque chose, qui ont eux-même appelé d'autres gens… et la télévision régionale fait le déplacement pour la dernière manche.

Pour André, c'est l'occasion rêvée de gagner sur les terres de son vieil ennemi.

Pour Tonton, c'est l'occasion de revivre les moments presque hystériques de la victoire en fin de saison.

Pour Jordan, c'est une étape importante s'il veut sortir du lot et passer l'année prochaine dans un championnat plus sérieux.

Pour Jacqueline, c'est la petite fierté de pouvoir glisser à ses copines : "oh et il est maintenant Champion de France".

Pour Alicia… c'est beaucoup, beaucoup plus compliqué.

La chipolata de Jordan refroidit dans son assiette. Il mord dans la paille de son soda, les yeux perdus dans le vague. Tonton s'approche :

- C'est juste une course comme les autres, faut pas t'inquiéter, dit-il en posant sa main grise de cambouis sur l'épaule de son neveu.

Celui-ci a un petit haussement d'épaule :

- Faut juste que ça tienne et c'est bon, répond-t-il en faisant référence à la météo.

- Ouais, ben si demain ça flotte, roule régulièrement, fais de ton mieux et surtout finis la course sur tes roues. Va pas tenter de truc stupide : assure ta place au championnat.

Jordan hoche la tête.

Valentin a le même geste : dans un de ces moments de synchronicité, son propre mécanicien et mentor vient de lui tenir le même discours.

Prégrille : 27 motos donnent de la voix. C'est le chaos habituel de génératrices, de béquilles et de couvertures chauffantes pour les plus fortunés. En tête : Valentin, Christopher et Jordan, presque comme prévu.

Départ du tour de chauffe sur une piste où subsiste quelque flaques. Jordan démarre prudemment, au milieu du peloton : rien ne presse. La SV 650 numéro 17 fait de la godille sur la piste pour chauffer ses pneus. Il est sixième sur la grille, juste derrière Jordan. Tour de chauffe sans incident : les motos se rangent une à une. Le pilote de la SV n°17 chope sèchement les freins pour effectuer un stoppie juste sur la grille pour épater la galerie.

Surpris par cette manœuvre inhabituelle, Jordan, qui roulait juste derrière lui, ébauche un évitement, mais trop tard : il entre en collision avec la SV et tombe. Pas très vite. Mais assez pour briser la pédale de frein arrière.

Moment de confusion sur la grille. Tonton se précipite pour évaluer les dégâts. Président, depuis le muret du bord de piste, observe et réfléchit. Il parle avec le directeur de course dans son casque sans fil. Conciliabule rapide : nouveau tour de chauffe et si Jordan arrive à réparer, il partira de la voie des stands.

Jordan évacue sa moto à toute vitesse. Tonton fouille pour trouver la pédale de frein de rechange et sort les outils nécessaires.

André fulmine :

- Quel con ! Mais quel con ! grommelle-t-il en fusillant le pilote de la numéro 17 du regard.

Ce dernier a relevé sa machine, qui n'a rien. Il a la tête rentrée dans les épaules. Son voisin le regarde en secouant la tête.

Valentin s'est retourné et observe la scène. Il a déjà gagné ? Christopher fait des additions dans sa tête en tapotant sur son réservoir.

Tonton s'affaire. La direction de course ordonne un nouveau tour de chauffe. Tonton s'énerve sur une vis de platine de repose-pied tordue. Et la tige du maître-cylindre fait la tête. Les motos s'élancent. Le pilote de la numéro 17 fait lui aussi des calculs dans sa tête.

- Bondieud'bondieud'bondieud' gronde Tonton.

Snap ! La vis a cassé net au ras du filetage. Tonton se fige.

- Ah ! Merde !

- Qu'est-ce qu'il y a ? Quest-ce qu'il y a ? demande Jordan.

Tonton réfléchit à toute vitesse. Démonter le cale-pied, le repositionner à un autre endroit.

Les motos abordent le dernier virage.

Tonton se relève. Il regarde son frère et lève les mains en signe d'impuissance, puis touche son poignet et lève deux doigts, l'air de dire : "trouve-moi deux minutes".

André tourne la tête vers Président. Ils se regardent tous les trois avec Tonton. Président lève la tête vers la tour de contrôle, puis tourne les yeux vers la grille. Les moteurs tournent. Laisser Jordan rouler ? Faire partir la course ? Quel est l'option qui lui assure le maximum de prestige, de publicité et de drame ?

Président lève la main et fait un signe négatif à Tonton.

- QUOI ?

André bondit.

- Mais putain, Jacques, tu vas quand même pas l'empêcher de courir ! Jacques, merde ! Deux minutes, qu'on répare !

André se rapproche de Président. Madame la Présidente se penche par-dessus la rambarde de la tour de contrôle pour mieux voir. Les yeux de Jacqueline, sur le muret, passent de l'un à l'autre : André, Tonton, Président, Jordan, Madame la Présidente.

Président fait non de la tête et dit quelques mots dans son micro.

- Jacques ! DEUX minutes qu'on répare !

Sur la grille, le commissaire de piste a agité son drapeau rouge et s'écarte vivement de la grille. Les moteurs montent de deux octaves.

André est resté figé, le bras pointant vers la moto de son fils. Président détourne le regard.

Les épaules de Jordan s'affaissent. Tonton lâche sa clef à œil. Jacqueline pose sa tablette et lâche un soupir. Alicia hésite encore, pas sûre d'avoir compris. Quand les motos s'élancent dans un bruit fou, émerge lentement la pensée que Valentin ne risque plus rien.

Suite et fin à midi aujourd'hui pour l'épisode 2 !

Plus d'infos sur le Championnat

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