Essai Moto Guzzi 1200 Sport 8V ABS
Routière à sensations, le sport... en option
La mythique V11 de Mandello ayant tirée sa révérence, la marque transalpine confie son image de performance à la 1200 Sport, depuis fin 2006. Dopée par l’évolution du bicylindre dénommé Ottovalvole, 4 soupapes par cylindre début 2008, cette version plus dynamique de la Breva n’en diffère que légèrement. Un peu plus puissante et coupleuse sur une plage de rapport différente, la Sport se pare, de plus, d’un capot de selle, d’un saut de vent et d’un échappement spécifique.
Cette version Corsa Sport 8V de notre essai s’habille d’une peinture exclusive, d’une sellerie bicolore rouge/noir et reçoit le logo «Spécial Anniversaire 90 ans Moto Guzzi».
Découverte
Cette aigle sportif est une machine imposante. Sa large carrure mêle toutefois les styles avec élégance. Ainsi, classique d’apparence, la grande optique ronde est à réflecteurs multiples.
Autour de la colonne de direction, des prises d’air habillent l’intérieur des longues écopes latérales. Flanquées de chrome, elle encadrent le large réservoir de 23 litres (dont 4 de réserve) et coiffent le bloc moteur.
Le respectable twin de 1200 cm3 et son cardan en imposent et soulignent, de leur finition noir mat, la carrosserie rouge et blanche Corsa surlignée d’un liseré or...
Seules les platines du cadre, tubulaire en acier, sont visibles et se prolongent pour supporter les repose-pieds passager. Très belles pièces métalliques que protègent deux inserts plastiques. Les collecteurs de large diamètre se jettent dans un silencieux satiné à l’esthétique étudiée. Son extrémité reprend quelques codes aéronautiques, choix logique quand on connaît la sonorité de bombardier des Guzzi. La qualité supérieure de la finition générale est particulièrement valorisante.
Etonnamment, la suspension avant est confiée à une simple fourche télescopique. Signée Marzocchi, et dotée de plongeurs de 45 mm, elle n’est réglable qu’en détente. L’amortisseur arrière Sachs propose l’ajustement en précharge, via une molette coté gauche, et en détente.
Pour ralentir les ardeurs du pilote et les 240 kg à sec de la machine, deux étriers Brembo à quatre pistons pincent les disques avant de 320 mm. Un ensemble à 2 pistons freine la galette arrière de 282 mm. Cette version Corsa embarque, de série, un système ABS.
Le dessin de la boucle arrière est particulièrement réussi, intégrant de jolis feux à diodes. S’y trouvent également quatre esthétiques crochets d’arrimage et deux larges poignées de maintien passager. Autre aspect pratique, une fois levée, la selle révèle un petit espace pour loger un bloc disque.
On note aussi l’accès facile à la batterie et aux fusibles.
En selle
Confortable est spacieuse, l’assise, agrémentée de surpiqures, se situe à 800 mm du sol et s’enjambe facilement. Heureusement, car le poids est perceptible pour redresser la machine. On prend d’emblée la mesure du roadster routier de Mandello. Le long réservoir plonge vers le large cintre plat à diamètre variable surplombant un vaste tableau de bord.
Regroupant pas moins de 3 compteurs et une fenêtre LCD, l’ensemble offre une lisibilité perfectible. Tant le nombre d’informations, leur dispersion que la finesse des graduations rendent malaisée leur lecture.
Analogique, compte-tour en arc de cercle, tachymètre centrale et jauge carburant s’affichent sur fond blanc. Le bloc digital regroupe, dans le coin supérieur gauche, horloge et température extérieure. D’autres fonctions occupent le reste de l’espace et se choisissent aux commodos de gauche selon 3 modes. Les deux premiers regroupent chacun odomètres partiels, temps de parcours, consommation moyenne, instantanée, vitesse maximale et moyenne. Le troisième permet à l’utilisateur d’enclencher un chronomètre, vérifier la tension de batterie et l’accès à divers paramètres (choix du régime maxi pour le shiftlight, langage de l’affichage… etc.). L’aspect du té de fourche supérieur est sobre mais lui aussi de qualité. On y trouve les commandes de warning et déconnection de l’ABS.
L’ergot de béquille, dotée d’un indicateur de déploiement, tombe parfaitement sous le talon. Tout comme les repose-pieds. La position est, pour les grands, plutôt droite, et les mains tombent sur le guidon. Les rétroviseurs donnent un bon champ de vision et, malgré l’énergie du bicylindre, vibrent peu.
En ville
Une pression sur le démarreur réveille le gros twin, qui tousse et gronde, cherchant son souffle de ralenti.
Amples vibrations et couple de renversement font chalouper l’équipage et chavirer le coeur des connaisseurs... La douceur des commandes est exemplaire et la Guzzi Sport décolle prestement, portée par un gros couple déjà bien sensible.
L’impression de poids s’évanouit, faisant place à un équilibre étonnant. Le vrombissement réjouissant de la machine est un plaisir sur les boulevards. On se surprend à ralentir puis relancer la moto, pour le plaisir des sens. Une main de géant semble alors pousser le pilote dans le dos. Calé sur le troisième rapport, au milieu du flux urbain, on apprécie également la souplesse du bicylindre Italien. Même en 4e, il permet de reprendre à 30 km/h et 1 500 tours/minutes. Le confort suit la même tendance. Amortisseur comme fourche sont, de base, réglés pour un voyage pullman.
La boite, bien que précise, n’est pas très franche. Mais cette Sport Corsa n’avait qu’une vingtaine de kilomètres au compteur... un rodage s’impose. Pas de miracle en revanche pour le rayon de braquage inspiré d’une machine Anglaise, sans doute... C’est surtout la hauteur de fourche qui se révèle gênante lors des manoeuvres. La chaleur dégagée par le bloc italien est également sensible en ville. Agréable par temps frais ou froid, les calories supplémentaires sont moins agréables à supporter l’été, au milieu du trafic.
Autoroute et voies rapides
Reprenant avec force sur les rapports intermédiaires, le volatile de course s’égosille dans une envoûtante montée en régime. Passé les 5.000 tours, la poussée est encore plus forte et envoi l’équipage vers la haute vitesse. Enthousiasmante à bon rythme pour profiter des relances coupleuses, la protection limitée incite toutefois à réduire les gazs. Le petit tête de fourche montre vite ses limites, obligeant le pilote à se coucher afin d’éviter, en plus des points, de perdre la tête. Des tés de fourche placés plus bas basculeraient d’avantage le pilote sur l’avant. La résistance au vent serait ainsi meilleure.
En véritable routière qu’elle est réellement, la 1200 Sport Corsa ronronne à 4 000 tours seulement, en 6° à 130 km/h. Ce rapport est assez long et, sur route, on restera plutôt en 5° pour bénéficier du meilleur de la motorisation. La pression d’air est alors supportable, bien plus que l’interminable ruban d’asphalte rectiligne.
Départementales
Taillé pour la longue route, certes, la Transalpine est bien plus charmeuse sur le réseau secondaire. Mais point de sport en elle. Les longues platines repose-pieds passager écartent les talons du pilote, gênant sa position. Ce qui, couplé à un réservoir assez proéminant, rend encore plus malaisé tout déhanchement. A l’ancienne on vous dit !
Et avec bonheur. Car l’important couple disponible dès les bas régimes permet d’énergiques sorties de courbes. Les 10,7 m/kg de couple maxi délivrés au régime plutôt élevé de 6 750 tr/min témoignent cependant d’un comportement mécanique plus pointu que le reste de la gamme. La puissance maximale débarque également à peine 300 tours plus haut... Le tout est parfaitement transmis à la roue arrière par l’efficace cardan, aux performances au moins égale en qualité à ceux des cousines germaniques.
Ce profil moteur ne grève en rien agrément et performances de sa motorisation qui se déguste en 3° ou 4°, avec un pilotage enroulé. Mais surtout des suspension bien réglées ! Trop souple, l’accord de suspension avant/arrière n’est pas des meilleurs quand le rythme augmente. La 1200 Sport peut même se révéler alors délicate à emmener...
Ce n’est ni la plus alerte, ni la plus vive, bien sur, ayant une tendance naturelle à élargir légèrement sa trajectoire en courbe. Mais une fois l’hydraulique refermée et la précharge sérieusement durcie, on découvre enfin une routière délurée. On regrette d’autant plus l’absence d’une fourche de meilleure qualité, de type inversée comme celle de la Griso. Manquant de rigueur, le train avant est son point faible et son poids conséquent oblige à soigner les trajectoires.
Mais son équilibre, l’important bras de levier du guidon et une garde au sol généreuse donnent beaucoup de plaisir. Au son de sa voix rocailleuse et ample. La Guzzi se jette sur chaque virage avec un grognement féroce, assurée de l’excellent grip de ses pneus Metzeller Interact M3 et d’un freinage progressif et puissant. Elle n’est la plus simple à emmener, mais pas la plus facile à suivre non plus...
Chaque décélération fait ensuite gargouiller l’échappement. Un plaisir que l’on renouvelle en se gavant chaque fois d’une louchée de couple à l’accélération, avant de recouper les gazs...
Partie-cycle
La suspension est, dans une certaine mesure, le point faible de la 1200 Sport Corsa. Pour une routière, et une fois ajustée en hydraulique, l’amortissement est très correct. Alors homogène et confortable, on peut abattre les kilomètres à son guidon. On aurait tout de même souhaiter trouver le Sport, voir le côté Corsa de cette 1200… L’ultra confidentiel sportive de la marque, la MGS 01 ne trouve pas là de descendance.
Freinage
Pas de critique particulière sur ce point, hormis un léger manque de mordant des étriers avant. Là encore, une meilleure fourche serait profitable. L’arrière permet d’asseoir la machine en virage et se montre facilement dosable.
Confort/Duo
En bonne voyageuse, ce gros roadster routier offre une place de choix au passager. Flexion mesurée des jambes, poignées de maintien confortables et assise moelleuse. Sans oublier un réservoir au galbe sécurisant pour y poser ses mains… Bien sur, il ne faudra pas oublier d’enlever le joli capot de selle. La bagagerie optionnelle achèvera de convaincre un accompagnant au long cours.
Le pilote est lui aussi plutôt bien logé. Seule la déflexion du vent se révèle insuffisante sur les longs trajets à vitesse soutenue.
Consommation
Véritable overdrive, le dernier rapport permet de cruiser en ménageant la consommation de liquide détonnant. La moyenne s’établie, en solo, à 6,6 L/100 km. Il est possible de réaliser entre 330 et près de 400 km avec le plein sur trajet mixte. En utilisation plus véloce, et surtout urbaine, la belle de Mandello réclame jusqu’à 7.3 litres d’essence au 100 km.
Conclusion
La Moto Guzzi 1200 Sport 8V ABS Corsa ne fait guère illusion sur les aptitudes que sa dénomination lui prête. Routière confortable et dynamique, elle comblera les amateurs de gros roadsters confortable et coupleux, à la finition flatteuse. Plaisir des sens, elle révèle son agrément au fil des kilomètres. La puissante souplesse de sa motorisation, l’excellence de sa transmission par cardan en font une routière performante et attachante. Capable d’emmener son équipage à bon train ou de musarder au gré des routes, l’italienne se veut compagne fidèle plutôt que frivole maîtresse. Sa plastique soignée contribue à son charme. Belle sous tous les angles, accueillante et démonstrative, la 1200 Sport ne souffre que de suspensions un peu souples.
Disponible au tarif de 12 790 €, cette version Corsa, avec l’ABS de série, est au même prix que les versions standards (noir Guzzi et gris titanium). Si l'on se réfère à la concurrence du segment roadster, des Yamaha XJR 1300 à 9 889 € et Honda CB 1300 S à 10 990 €, sans ABS toutefois, sera rude, sans oublier la Bandit 1250 N, à 8 249 €, la moins chère mais sans le même niveau d’équipements et finitions. Mais la Sport ne s'achète pas sur un simple critère roadster.
La Guzzi mise sur son bicylindre de caractère, son ABS et son cardan si efficace et pratique, pour faire la différence et séduire les routards esthètes.
Points forts
- caractère et souplesse moteur
- autonomie
- sonorité
- finitions
Points faibles
- suspensions très souples
- protection au vent
- chauffe en ville
La fiche technique Guzzi 1200 Sport
Commentaires
superbe moto, avec du caractère, chose de plus en plus rare. Vu les restrictions routières, une moto avec du couple, quel pied!
03-09-2011 17:51Les commentaires concernant la qualité de la fourche sont peut être à pondérer. En effet, si la fourche de cette version est la même que celle de la version 2V (et il me semble que c'est le cas), alors l'auteur de cet article à raté le fait que les reglages de detente ET compression sont séparés. Un par fourreau : compression à gauche et détente à droite. Du coup si on essaie de toujours régler les deux de concert on aura un comportement ... bizarre. Surtout que la belle est sensible à ces réglages
03-09-2011 20:23superbe moto, avec du caractère, chose de plus en plus rare. Vu les restrictions routières, une moto avec du couple, quel pied!
03-09-2011 23:55Quelle moto ne chauffe pas en ville?! Sinon, je trouve que son habillage n'est quand même pas au niveau d'une V11 Coppa Italia, malheureusement!
04-09-2011 14:54>Le Gone
05-09-2011 12:19et bien... non, je ne les pondère point.
Et je confirme que le fourche n'est réglable qu'en détente. Et que cette 1200 Sport 8v mériterait mieux.
Tant la qualité que la hauteur de la fourche sont pénalisantes à son guidon pour qui veut trouver le Sport.
> RJVB
Certes, la chaleur dégagée se ressent plus en ville. Mais la Griso ou la Stelvio, moins carénées, semblaient vraiment plus agréables sur ce point. La Sport génère (dissipe moins bien) pas mal de calories...
(sauf erreur de Luigi de l'assemblage ou Luigi de la doc )
Griso, Stelvio et 1200 Sport, toutes sont des motos "nues", non carénées. La différence en termes de chaleur ressentie est la position du conducteur (et du radiateur, sur la Griso). 05-09-2011 15:23
>RJVB : oui, la fiche technique est fausse, même sur le site Guzzi...
05-09-2011 17:08Quant à la chaleur et position de conduite : Stelvio et 1200 S sont assez "proche" et, néanmoins, j'ai eu un ressenti de chaleur excessif.
Importance relative mais notable. Un trois cylindres Triumph me surprend de même à chaque fois.
On est beaucoup plus "dans" la moto sur les modèles à base de Breva: mes genoux touchent les cylindres ou presque. Sur la Stelvio on a (j'ai...) un peu plus de place.
05-09-2011 19:24J'ai la flemme d'aller vérifier, mais le ressenti de chaleur dépend de la quantité transmise et il me semble bien que celle-là ne diminue pas linéairement avec la distance par rapport à la source. Surtout si on plus il y a de l'air en mouvement.
Quant aux réglages de la fourche: difficile de les distinguer quand on n'a pas la notice sous les yeux: cf. les pages 68 et 67. Je sais, la moto dans le dessin est une 1200Sport 2v, mais ça ne fait que démontrer à quel point ils ne changent que le stricte nécessaire
Sur ma Stelvio la chaleur dégagée par les cylindres n'est génante que par très forte chaleur et vitesse faible. Cet été, en voyage dans le Périgord avec des températures de 35 à 38°C et une circulation souvent encombrée, j'ai souffert pour la première fois des remontées de chaleur sur les tibias et les genoux mais ça restait très supportable. Dans ces conditions, beaucoup de motos dégagent trop de calories vers le pilote.
06-09-2011 11:40Franck
effectivement superbe machine,j'en ai une et est parcouru 21000kms a son guidon,hormis la fiabilité perfectible comme AAC,et électrique,c'est le pied totale quand ont est a sont guidon,comme un gosse avec sa première mobylette!!!,et c'est un gars de 50 balais qui vous le dit a essayer impérativement ,en oubliant bien sur le côté sportif!!quoi que!!vive guzzi
23-08-2013 12:28mr propre
ah je possède depuis peu une 1200 sport 4v l'indestructible.
06-05-2014 22:01quel son le panard
prendre son pied en respectant les limitations de vitesse
GENIAL
Essai honnête,
07-05-2014 19:05même si les deux défauts relevés sont dus, l'un, la température, à l'extrème jeunesse du modèle essayé (ce type de moteur commence à se libérer, et donc à moins chauffer vers 7/8000 km), l'autre, les suspensions à un manque de réglage. Par exemple, pour ne pas élargir dans les courbes, il faut vraiment relever l'arrière en augmentant la précharge et là tu as (presque) un vélo qui plonge à la corde et y reste à l'envi.
Sinon, je suis étonné comme mes petits camarades que la fourche ne dispose pas du réglage de la compression et de la détente...Les proprios de de 4v peuvent-ils confirmer ou infirmer?
Enfin, il est vrai que la Sport, en 2 comme en 4v, peut être difficile à suivre si elle est bien menée, faut juste un peu de pratique!
> caillou38
15-05-2014 21:04Essai :
"Mais une fois l’hydraulique refermée et la précharge sérieusement durcie, on découvre enfin une routière délurée."
J'avais tout à fait relevé, et corrigé sur la moto, ce point.
La fourche comporte bel et bien un réglage de détente d'un coté, de compression de l'autre.
Sorry,
16-05-2014 18:57je devais être en mode "peau de sauc' devant les yeux.
Un très bel article pour un très belle moto.
18-07-2014 17:34J'en suis propriétaire et je vous confirme que la conduire sur les routes de France est un plaisir, tant en montagne qu'en ville. Cependant, il est un point que vous n'abordez pas dans votre article et qui la met largement à l'amende par rapport à ses concurrentes. Il s'agit de sa fiabilité. En effet, au delà du 20.000ème kilomètre, la moto passe une bonne partie de son temps au garage et on ne peut pas dire que le SAV de Guzzi soit d'une grande efficacité.
Dommage car cette moto aurait pu susciter des vocations de guzziste
Oui, hélas, il y a encore du travail à apporter sur le SAV. Il y a beaucoup de progrès, mais ça partait de tellement loin...
Question fiabilité, je serais plus nuancé. Quelques machines sont très touchées par des pannes ou casses diverses. Mais chez BMW, il y a aussi pas mal de soucis.
Quels sont les problèmes que tu as rencontré? 05-11-2014 17:34