Essai Kawasaki KX 250 et 450
Etroitement dérivée de la compétition, les Kawasaki KX 250 F et KX 450 F synthétisent innovations et performances tout terrain. Luttant au meilleur niveau, elles font progresser cette année encore leurs suspensions et adoptent quelques améliorations, tant au niveau technique qu'esthétique. Revue de détail via l'oeil d'un débutant.
Bienvenue sur terre
Comme nombre d'adeptes des motos de route, je classe les amateurs d'offroad dans les rangs d'équilibristes, poussiéreux ou boueux selon la météo. Des gens à peine fréquentables, dont le seul but est de salir leur machine et rouler sur des surfaces accidentogènes. Bref, je leur voue une admiration teintée d'incompréhension, avec une vague envie de les imiter… un jour.
Les choses auraient pu en rester là… mais voilà, avant quelques jours de vacances d'été, Monsieur le Rédacteur en Chef s'est soudainement dit : "Il serait bon que Mr. Propre descende sur terre et se salisse un peu les bottes (et le reste)." Puis il a ajouté : "tu verras, c'est un essai de motos genre enduro…" Le fourbe ! En fait, c'était genre plutôt voire vraiment Cross. Et pas n'importe lesquelles : des Kawasaki KX, légendes à crampons emmenées pas la Green Team, professionnels de l'offroad maison, depuis 40 ans. Cette structure interne permet de détecter et d’entraîner de très jeunes pilotes pour en faire de futurs étoiles de la discipline. De plus, la marque d'Akashi propose une gamme évolutive, pour s'entraîner et monter en puissance au fur et à mesure des années. Pour 2014, ce sont les modèles 85, 250 et 450 cm3 que le constructeur ré-ajuste avec quelques améliorations. Me voilà donc désigné pour plonger, aux environs de Frankfort sur Main (chez nos amis teutons à tétines), dans ce monde parallèle au mien. Ces univers motocyclistes sont finalement peu transverses ou miscibles. On est soit de l'un ou soit de l'autre mais assez rarement des deux. En témoigne mes confrères de circonstance, n'ayant pour la plupart jamais roulé sur l'asphalte… Pour eux je suis, au sens strict, un "extra-terrestre" tout autant qu'eux me paraissent être d'indécrottables "hors-bitumes".
Découverte KX 250 F et 450 F
En attendant que les infrastructures du terrain soient prêtes, je détaille les vertes nouveautés. Pour ce millésime 2014, on note tout d'abord de légères retouches esthétiques des deux machines, en grande partie similaire d'apparence. Le dessin de la plaque de course ainsi que des garde-boues est plus dynamiques, l'élément arrière n'est plus vert mais blanc, à l'image des modèles d'usine. De contenance réduite (seulement 6,1 L, petit pour un routard) et forme moins haute, le réservoir s'inscrit désormais mieux dans le prolongement de la selle. Composée d'uréthane pour une meilleure longévité, son dessus est constitué d'une surface antidérapante pour un meilleur maintien en position assise. Ses côtés lisses favorisent, eux, la mobilité du pilote. De même, le bidon moins large permet de s'asseoir davantage sur l'avant.
Cette notion d'ergonomie dynamique prévaut à la conception des presque jumelles. Ainsi, le cadre périmétrique aluminium, mêlant section forgées, moulées et extrudées, est désormais plus étroit de 4 mm entre les poutres principales. Il s'élargit ensuite au niveau des chevilles pour permettre de mieux serrer la machine et rétrécit à nouveau sous la selle afin d'affiner la position de conduite. Les différents effets de surfaces de cette ossature (satiné, rodhié), renforce l'aspect compétition des Kawa. Se dédoublant à sa base, la structure accueille également des éléments de protection moteur au centre et latéraux, en matière plastique.
Minimaliste, l'habillage améliore aussi ergonomie et contrôle des KX. Flancs et écopes sont désormais plus étroits au point de contact avec les jambes. La jonction très fine des divers éléments facilite maîtrise et mouvements de part et d’autre de ces coureuses tout terrain. Enfin, les poignées arborent des sculptures plus hautes optimisant leur accroche, ainsi qu'un matériau plus souple pour un meilleur confort.
Le coeur de ces graciles sauterelles est un mono-cylindre de 250 ou 450 cm3, selon l’humeur. Jupe courte, nervures externes et calotte interne en pont dotée d’un renfort type Bridged-box (exclusif sur une machine de série) procurent au piston forgé plus de légèreté et de solidité. Même recherche avec des soupapes en titane (admission : 31 mm ; échappement : 25 mm) diminuant les masses en mouvement tout en offrant plus de fiabilité à haut régime. Tout aussi remarquable, l'uni-cylindre de la 250 est alimenté par deux injecteurs, le premier en aval du papillon des gaz (position classique) et le second en amont, près de la boîte à air. Ces deux éléments ont chacun un rôle différent. L'injecteur aval assure une réponse linéaire et instantanée, tandis que l'injecteur amont se charge de la puissance. À mesure que le régime moteur et l'ouverture des gaz augmentent, ce dernier prend progressivement le relais de l'injecteur aval. Sur la KX 250 F, les orifices des deux injecteurs sont plus gros que sur la KX 450 F afin d'alimenter au mieux le débit sollicité par un régime moteur élevé. Comparativement, le débit de carburant est supérieur de 20% sur le quart de litre Kawasaki.
Pour plus d'agrément, le pilote peut choisir trois cartographies d'injection, parmi Standard (conditions normales), Hard (conditions difficiles) et Soft (conditions faciles). Il suffit de brancher l’un des trois coupleurs DFI à 4 broches fournis pour activer le profil moteur correspondant (non, ici, cela ne se modifie pas au guidon comme sur les machines de route). L’emplacement de la prise à droite de la colonne de direction, autorise un accès facile sans aucun démontage de pièces. En option, un ensemble calibrage de l’injection KX FI permet d'ajuster plus personnellement ces trois programmes (richesse du mélange, calage de l'allumage…). Autre point technologique, la KX250F 2014 se dote du mode "Launch Control" très proche de celui des KX d’usine et déjà présent sur la 450. Par pression sur un bouton, le pilote peut actionner une cartographie distincte de réglages moteur qui optimise les chances de prendre un bon départ en course sur terrain glissant.
Autre amélioration, la sélection est plus facile est durable (fourchette de sélection plus courte) et la boite de vitesse est optimisée. Enfin, les KX bénéficient d'un système de décompression automatique. Ce système centrifuge à masselottes, situé en bout d'arbre à cames d’échappement, facilite le démarrage.
Les principales mises à jour résident dans les suspensions. À l'instar des Kawasaki d’usine, les dispositifs de réglage de fourche et amortisseur sont revêtus d'aluminium anodisé bleu. Le nouveau système de suspension arrière Uni-Trak comporte un tirant situé sous le bras oscillant en aluminium brossé, ce qui permet d'augmenter l'amplitude du débattement, autorise un réglage plus fin et avantage aussi la motricité de la roue arrière. Une bombonne d'azote permet la mise en pression du combiné et garantie des performances constantes en dépit de l'échauffement.
La KX250F fut la première machine de cross de série à bénéficier d'une fourche SFF (Separated Function front Fork) Showa, qui dissocie la fonction d'amortissement de la fonction d'absorption des chocs; tube gauche de la fourche : élément amortisseur, tube droit : ressort. Depuis 2013, les tubes intérieurs de plus gros diamètre (ø48 mm) et la structure Type 2 améliorent la qualité de l'amortissement, le confort de pilotage, la résistance au talonnement et enfin la stabilité au freinage et à la réception des sauts. Comme la fourche ne compte plus qu’un seul ressort, les frottements entre le ressort et le tube interne diminuent considérablement (de 25 % environ) et le travail s'assouplit d'autant sur toute la longueur du débattement. De plus, l'emploi de pistons d'amortissement de plus gros diamètre favorise la progressivité du travail de suspension. La disparition de l’ensemble amortisseur du tube droit libère également de la place pour un réglage de précharge.
Encore plus efficace, la KX 450 F est équipée de série d'une fourche à amortissement par pression d'air et non plus de ressorts. L'avantage est un poids réduit (- 750g), des ajustements simplifiés et une plus grande possibilité de réglages. Grâce à un adaptateur spécial (fourni avec la moto), une simple pompe à vélo équipée d'un manomètre permet d'ajuster la valeur. Comme sur la petite soeur, le diamètre intérieur des tubes de fourche a pu être augmenté doublant approximativement la surface de travail d'amortissement du piston. A la clef, une meilleure résistance au talonnement et une plus grande progressivité.
À l'avant comme à l'arrière, les Kawasaki sont équipées de freins à disques pétales (252 mm double pistons et 240 mm simple pince). Concernant l'élément du train directeur, un nouveau maître-cylindre à tige de poussée et de nouvelles plaquettes à coefficient de friction supérieur améliorent la force et la maîtrise du freinage.
Le tour du propriétaire fait, il est temps d'enfourcher ces MX Replica, paré à enchaîner les tours genoux au sol. Enfin, je me comprends...
Sur piste
Les univers route et terre n'ont finalement en commun que la passion de leur pratiquant, un guidon et deux roues. Ensuite, tout diffère, même le vocabulaire. Du circuit, on en jauge les "Vélodromes", "Tables", "Camels" ou autres "Woops"… Enfin, les cylindrées évoquées ne dépassent jamais le demi-litre. Pour autant, découvrant ces engins aux longues jambes et bien que rompu à l'utilisation de machines largement plus étoffées, Mr. Propre est en mode super-furtif. Il est des chiffres qui laisse songeur : poids 106 kg, puissance 43 chevaux… et une fabrication compétition qui laisse augurer un caractère aussi avenant que celui d'un chef mécano un soir de défaite de son team.
C'est donc serein et sûr de moi, méthode Coué, que je m'apprête à prendre part à ma première "course champêtre". Le temps de kicker correctement ma KX 250 F et mes collègues sont déjà vrombissant et bondissant. Difficile de prendre ses marques quand tout est inconnu. Le sol, les pneus, la machine… Assimiler l'essentiel est déjà un défi. Le plus délicat est finalement le ressenti, ou plutôt l'absence de ressenti du train avant. Désagréable impression que tout bouge et se ligue contre le pilote.
En ce monde d'instabilité je cherche ma trace, à défaut de trajectoire. Heureusement, le circuit retenu n'est pas extrême, autorisant le béotien que je suis à chevaucher son échine contrastée. Copieusement arrosé avant notre arrivée, sa surface alterne parties sèches et boueuses. Dans cette dernière, j'évite dans un premier temps, autant que faire se peut, de trop y mettre mes crampons. Las, l'enchaînement des difficultés ne tarde pas à m'y précipiter. Avec plus ou moins de bonheur, je parviens à terminer une première session, à l'issue de laquelle le premier constat est : la journée va être longue…
Après quelques minutes de repos, j'entreprends un début d'analyse de la discipline, suivant les conseils avisés de collègues expérimentés. Ma position, peu académique, m'empêche de tourner, de prendre les bosses et me fatigue inutilement. Briefé sur les bases du pilotage, je reprends les commandes de mon quart de litre avec de bien meilleurs résultats. La KX réagit finement aux appuis des jambes, sa géométrie légère et vive obéissant à la moindre pression. Idéale pour les habituées et rassurante pour un débutant, la 250 s'emmène vite avec beaucoup de plaisir. Je décide alors de me concentrer sur ce modèle moyen, la 450 représentant une catégorie bien supérieure en exigences. La machine embarque plus en virage et sa puissance, bien plus difficile à gérer, s'accorde mal à mon inexpérience.
Au fur et à mesure des tours, les (bonnes) positions commencent à devenir plus naturelles, me permettant d'élever mon rythme de passage. La Kawasaki se fait presque oublier, me laissant essayer des techniques pour mieux appréhender les obstacles. Seule l'injection parfois brutale à la remise des gazs et un régime compliqué à conserver sur le sol cassant me pose soucis. Hormis ce point, la KX 250 F est une machine à avaler les difficultés, ses suspensions effaçant la plupart des chocs. Chevauchées par les gabarits plus imposant, elles pourront toutefois talonner sur les compressions les plus violentes. Celles de la 450 délivre un agrément supérieur et semblent sans limite.
Plus à l'aise, je pousse un peu le mono-cylindre sur les quelques espaces dégagés. Le bouilleur affiche une santé respectable, reprenant facilement à faible régime mais bombardant rapidement vers les hautes sphères. Les sorties des vélodromes se font vives, expulsant l'équipage vers le tremplin naturel suivant. Ce caractère vif se gère assez bien à l'embrayage lors des passages en courbe sur sol meuble. Le train avant trouve alors son chemin et procure un excellent guidage. En dépit d'une meilleure aisance, mes ambitions mordent à nouveau la poussière sur un freinage trop appuyé. L'équipement est hautement efficace mais demande un peu expérience pour être finement dosé. Rentrer en glissade avec l'arrière exige une certaine maîtrise sous peine de caler. Le temps de redresser la machine, constater que le kick est plutôt souple d'emploi et je passe au stand changer le levier d'embrayage "un peu" tordu. Le métier rentre plus ou moins en douceur...
Parvenu à la fin de cette journée d'essai, le bilan est grandement positif. Si je ne peux juger en toute objectivité de tous les aspects techniques des KX, l'aspect plaisir et facilité est indéniable. Chaque nouvelle session apportait son lot de satisfaction, loin de mon début éreintant.
Partie-cycle
Vive, précise et légère, les KX 250 F et 450 F sont de véritables émanations du monde de la compétition. Leur grande agilité demande même un peu de retenue aux pilotes les moins aguerris, sous peine de générer des mouvements involontaires. Particulièrement qualitatif, l'équipement embarqué saura satisfaire les plus capés des amateurs.
Freinage
Performant, l'ensemble procure d'excellentes décélérations. Mordant et endurant, le freinage s'avère d'une grande efficacité. Le dispositif arrière est particulièrement convaincant, permettant d'affiner les trajectoires et optimisant les manœuvres.
Conclusion
La légende KX continue sa marche, assurée d'une relève constante et sous surveillance. Sans cesse améliorées, les fers de lance Kawasaki tiennent têtes à de nombreuses rivales. Particulièrement présents, les constructeurs nippons offrent un large choix. Yamaha oppose ainsi ses YZ250F et YZ450F demandant 7.499 € et 7.999 €, tarif particulièrement attractif. Suzuki dégaine ses RM-Z250 et RM-Z450 pour 7.699 € et 8.299 € tandis que Honda propose ses CRF250R et CRF450R pour 7.890 € et 8.690 €. Enfin, chez KTM, on citera les 250 SX-F et 450 SX-F, plus légère que les vertes et disponibles, au prix fort, contre 8.450 € et 9 .260 €.
Placées, les Kawasaki s'affichent à 7.999 € et 8.699 €. Leurs prestations générales, leur construction soignée et leur filiation émaillée de succès internationaux sont un gage de qualité indéniables. Pour rappel, la famille comporte également les KX 85 "grandes roues" (4.899 €)
et "petites roues" (4.799 €) ainsi qu'un modèle 65 cm3.
Machine dédiées aux performances de haut niveau, les KX permettent de perfectionner sans cesse ses acquis et monter en cylindrée si besoin. L'univers de la compétition client n'est pas loin, gage pour chacun de détenir une part de la légende Green Team.
Points forts
- Caractère moteur
- Performances
- Partie cycle
- Finitions et équipement
Points faibles
- Suspensions pouvant talonner sur les gros chocs (KX 250 F)
Concurrentes : Ducati Mostro 620, Honda CBF 500, Honda CBF 600, Suzuki SV 650
Coloris
Vert
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