Essai Fantic Caballero Rally 500
Eloge de la simplicité efficace
Monocylindre de 449 cm3, 40 cv et 43 Nm, 150 kg à sec, 7.190 euros
Fantic… pour certains d'entre nous, ce nom évoque quelques publicités aux visuels un peu surannés. Dans une atmosphère typique des années 70, libre et positive, des machines légères au look tout terrain accompagnent des jeunes gens insouciants. Lumière dorée, pleine nature, groupe de motards. Mais aussi image de compétition, enduro ou trial et multiples victoires de pilotes aux combinaisons claires. Fantic…
Fondée par deux anciens de la marque italienne Garelli, Fantic Motor apparait en 1968 dans la province italienne de Brianza. Les machines s’équipent alors de mécaniques Minarelli de 50cm3.
C'est en1969 que la marque se fait réellement un nom sur le marché moto. Elle propose au salon de Milan une motocyclette légère de 50cm3 de type Scrambler urbain : la Caballero. Le deux-roues motorisés est alors en pleine croissance et la pratique de l'enduro et du tout-terrain se popularise en Italie. Fantic Motor accède rapidement à la notoriété, notamment auprès d’une clientèle jeune. Ainsi, dans les années 70, la marque parvient à se faire une place solide sur le marché et devient le troisième constructeur italien en termes de ventes après Piaggio et Garelli. Face à un désintéressement de la discipline enduro dès les années 80, Fantic peine à survivre et disparaît finalement en 1998. La marque est ensuite rachetée en 2004 mais guère dynamisée.
C'est en 2014 qu'un groupe d'investisseurs reprend son destin en main. Avec deux idées : créer des vélos électriques hautes performances et, bien sûr, des motos. Au côté de machines tout terrain sportive de 50, 125 et 250 cm3, des modèles plus polyvalents et stylés. Ainsi Fantic revient réellement sur le devant de la scène en proposant une nouvelle Caballero ! Cette reprise patronymique du légendaire modèle de 1969 définit désormais une signature à part entière regroupant des cylindrées de 125, 250 et 500 cm3.
Jusqu'alors proposée en versions Scrambler et Flat Track, la Caballero s'enrichit d'une troisième déclinaison "Rally", uniquement disponible en moteur demi-litre. Nous emmenons cette dernière aux alentours montagneux du nord-est de l'Italie, sur les hauteurs de Valdobbiadene, terroir du Prosecco et écrin de naissance de la signature Fantic. Une marque décidément pétillante.
Découverte
Le coup de crayon signant le style des Fantic Caballero est décidément des plus réussis. Compacte (1.425 mm d'empattement), haute, étroite, légère (150 kilos), la Rally affiche un fort caractère. Quelques traits posent une esthétique puissante et élégante pour cette machine à vocation tout terrain plus affirmée. Ainsi, la machine parait presque plate, liant presque dans une même ligne néo-classique selle spécifique et réservoir. Son coloris vert olive mat est en fait une absence de peinture. Un peu terne sur les photos, la teinte est plus lumineuse en réalité. Ce choix brut en standard est pertinent, collant davantage à l’esprit simple de l’engin, même si des options permettent de la modifier encore. Le réservoir ovalisé de 12 litres est étroit et flanqué d’écopes aluminium parant les côtés du radiateur. Un métal qui aurait été bien sur les flancs de la machine… En matière plastique, ils supportent une plaque pour numéro. Surmontée d’un déflecteur, l’optique à leds et réflecteurs multiples apporte une vraie modernité au style global.
Comme sur les autres déclinaisons, un cadre berceau acier supporte l’ensemble et accueille le monocylindre Zongshen de 449 cm3 (94.5 x 64 mm). La course est plutôt courte pour cette mécanique mono-piston. Refroidissement liquide, simple arbre à cames et 4 soupapes compose une technologie simple et éprouvée à défaut d'être remarquable. Le bloc développe 40 chevaux à 7.500 tr.min et 43 Nm de couple à 6.000 tr.min. On regrette (historiquement) ce choix exotique, mais la rentabilité à ce niveau permet probablement de proposer aussi quelques belles pièces par ailleurs. Comme les platines repose-pieds et le té supérieur en alu taillé dans la masse. Et également le double silencieux superposé Arrow. Le sabot ne protège malheureusement pas d'origine le collecteur, exposé.
La version Rally soigne son équipement et se démarque de ses soeurs par l’adoption d’un bras oscillant aluminium, d’un sabot moteur, d’une grille de radiateur et de phare et d’un garde-boue haut fixé sur le té inférieur. Le guidon reçoit une barre de force gainée de mousse. Mais surtout ses suspensions débattent sur 200 mm (+50). La fourche inversée FRS d'origine espagnole passe à 43 mm (contre 41), entièrement réglable à fonction différenciée (compression à droite, détente à gauche). Elle se combine à un amortisseur de même origine lui aussi paramétrable en hydraulique. Associé à des jantes aluminium rayonnées de 19 et 17 pouces, l'ensemble est une vraie invitation à traverser le paysage par les voies sauvages. Nos machines d'essais sont d'ailleurs chaussées de pneus Michelin Anakee en 110/80 et 140/80.
Pour stopper leur rotation, un mono-disque pétale avant de 320 mm est pincé par un étrier ByBre (la filiale asiatique de Brembo) à deux pistons et fixation radiale. L'arrière, élément simple piston serre une frette de 230 mm. L'ensemble est sous la surveillance d'un ABS Continental à deux canaux et désactivable pour un offroad efficace.
La finition globale est contrastée avec un bel ensemble d'équipements, mais une intégration des connectiques électrique perfectible, notamment au niveau moteur. Traitement de surface et finition des pièces mécaniques sont toutefois sans problème. Difficile d'intégrer tous les câbles, durites et autres fils indispensables sur un engin aussi épuré. Il faudra donc composer avec la présence assez visible de ceux-ci et avec un collecteur bas assez exposé. La fixation de certains éléments par vis et boulon pourrait être plus soignée. En option sur notre modèle, porte-paquet et protection carbone latérale anti-brûlure sur le collecteur.
En selle
La Caballero Rally se veut efficace en franchissement et pousse sa selle à 860 mm de haut. Pas de panique, l'étroitesse de la machine limite largement cette altitude, même si un pilote d'1.70m ne mettra pas les deux pieds à terre. Spécifique, sa finition vintage surpiquée s'associe à une épaisseur bienvenue. La position induite est naturelle, les jambes peu fléchies. Le buste droit laisse les mains tomber sur un large cintre.
On apprécie le commodo gauche original bombé, cerclé d'une bague rotative pour passer des codes au plein phare. On y trouve également le poussoir coupant l'ABS. Le basculeur des clignotants est plus pénible à actionner et aucun levier n'est réglable en écartement. Pas de pare-mains également.
Sous les yeux, l'instrumentation se réduit à une fenêtre LCD circulaire étroite mais qui loge l'essentiel : sous un demi-cercle affichant jauge essence et température se placent l'horloge et le tachymètre. Odomètre et partiel défilent via un des deux boutons de commande. Une pression longue à gauche remplace les jauges par un compte-tour des plus sommaires et peu lisible. Un élément plus valorisant et efficace serait bienvenu.
En ville
Quelques hoquets et l'uni-cylindre martèle gentiment l'air du crépitement de ses échappements superposés. La musique est agréable, point fort de la personnalité attendue sur une machine transalpine. La Caballero Rally ne déçoit pas sur ce point, craquant à chaque coup de gaz. Légère, la machine décolle prestement sous la vivacité de son moteur. La roue avant fait de même avec facilité si l'on joue davantage. Le bloc est également disponible reprenant facilement à bas régime sur le troisième rapport. Si la sélection pourrait être plus douce, elle est précise et verrouille bien. On note enfin une bonne rétrovision.
Facétieuse, la Fantic vibre honnêtement et s'emmène avec aisance dans le trafic. Son gabarit contenu est un plaisir, tout comme son rayon de braquage ultra-court. Logique pour une machine à la génétique enduro marquée. A son aise en environnement urbain, la petite Italienne se vit également fort bien hors des murs.
Autoroute et voies rapides
Absence de protection, 40 chevaux ne sont pas idéaux pour l'autoroute et le mono n'y est pas plus à l'aise que son motard. La Rally, comme vous, y supportera des incursions que l'on essaiera de rendre brèves.
Départementales
Volontaire, la mécanique vivante de la Fantic Caballero Rally dynamise les évolutions sur le réseau secondaire. Saine, quoiqu'un peu vivante sur ses suspensions à grands débattements réglées trop souples, l'enduro stylée s'emmène à bon rythme. La monte de pneu mixte n'est pas pour aider à la précision. Gageons qu'avec un ajustement de l'hydraulique et des gommes au profil plus routier, la Transalpine se fasse encore plus plaisante. Car on ne s'ennuie guère à son guidon. Emmené par les modulations soutenues de l'échappement, l'équipage file de courbes en virages sans traîner. Là encore, le poids réduit de la Fantic fait merveille, optimisant une bonne vivacité de partie cycle. Intuitive, la Rally se pilote sourire aux lèvres, sa simplicité technique en appelant un autre : celui de rouler détendu.
La vigueur sympathique du bloc demande vite à tester les freins. Si le train avant plonge (trop) vite, son ajustement en est surement la cause. Bien que trop souple sur nos machines, la fourche encaisse toutefois correctement le mordant de l'étrier. La pression facilement modulable du maître-cylindre axial donne un bon ressenti et contrôle à la prise du levier. Transparent dans sa mise en oeuvre, l'ABS permet des décélérations puissantes sans intrusion pénible. Désactivé, on testera les stoppies. Si l'étrier arrière assure un bon travail, l'ergot de sa pédale ultra court grève un peu l'agrément.
Dynamiques, les relances permettent de s'échauffer sur le bitume avant de tester un revêtement plus incertain.
Offroad
Machine à la polyvalence revendiquée, la Caballero Rally se sait taillée pour franchir les espaces hors bitumes. Debout sur les repose-pieds, la position pourrait être plus efficace et agréable si les flancs ajourés n'étaient pas si proéminents. Notamment côté droit où collecteurs et silencieux accroissent ce volume. Si l'on adopte une parfaite attitude sur l'avant, cette gène n'est plus sensible. On dirige alors efficacement la machine sur piste gravillonneuse ou plus cassante encore.
Légèreté et compacité de la Fantic font toujours merveille et permettent un pilotage facile. Si les appuis aux pieds ne sont pas les plus francs pour contrôler la machine, le grand cintre permet un bras de levier important. Idéalement placé sous les gants, il contribue à un guidage efficace.
Là encore, la souplesse de la fourche ne permet pas de voir la Rally sous son meilleur profil. Les chocs les plus rudes font parfois claquer les tubes en butée. Et la machine se dandine plus que de raison sur les inégalités plus ou moins marquées du terrain. Toutefois, la traction reste convaincante et la mécanique assure un travail efficace pour monter à l'assaut des pentes italiennes. Autre bon point, sans l'ABS, le freinage montre toujours un excellent contrôle au levier. De quoi garder un bon rythme sans se faire peur.
La disponibilité et une certaine sportivité du bloc délivrent un vrai agrément en tout terrain. Vif, l'uni-cylindre fait vite dériver la Fantic dont les écarts se gèrent avec naturel. Prévisible, elle se montre docile et agile sous la charge espiègle de son gros piston.
Partie-cycle
Légères, efficaces, mais très classiques les Caballero Rally délivrent un vrai agrément de pilotage et se montrent saines en toute occasion. On regrette un amortissement trop souple que nous n'avons pas eu le temps d'ajuster pour analyser davantage l'équipement.
Freinage
Puissantes, mais modulables, les décélérations fournies sont satisfaisantes, mais amoindries par la souplesse des suspensions. Egalement, en offroad, l'ergot trop court de la pédale ne permet pas un total contrôle.
Confort/Duo
Avec sa selle épaisse, la Rally vous mènera loin sans souffrir. D'autant que ses suspensions à fort débattement améliorent encore le confort d'une position naturelle. Emmener un passager sur court trajet est possible. Il lui faudra néanmoins accepter une position crapaud, jambes écartées.
Consommation
Non mesurée.
Conclusion
Conjuguant style affirmé et polyvalence réelle, la Fantic Caballero Rally 500 est un séduisant petit destrier. Armé d'essentiel et d'élégance efficace, la Transalpine se rêve tant en utilitaire de charme qu'en baroudeuse sans complexe. Confortable et sur, l'ensemble permet de tracer sereinement sa route ou son chemin. A son bord, on rêve de périples mixtes sans complexe, toujours accompagné d'un style séducteur.
Tarifée 7.190 €, la Fantic Caballero Rally 500 convainc sans mal en dépit de quelques finitions un peu trop justes. Les 400 euros supplémentaires (Scrambler et Flat Track demandent 6.790 €) sont amplement justifiés par l'équipement et une polyvalence nettement supérieurs du dernier rejeton de la famille. La concurrence n'est pas forte, surtout à ce tarif. Une KTM 690, bien plus performante (mais au style et confort… autrichiens) réclame 8.990 €.
Séduisante et raisonnablement performante, la Caballero Rally sera peut-être ce trail léger, facile et simple que vous cherchiez au fond de votre mémoire. Fantic vous remet le pied à l'étrier pour une évasion au quotidien.
Points forts
- Personnalité et disponibilité moteur
- Partie cycle vive
- Prétentions tout terrain
- Polyvalence
- ABS déconnectable
- Sélection précise
- Sonorité flatteuse
- Efficacité globale
- Tarif
Points faibles
- Suspensions trop souples
- Ergot de pédale de frein trop court
- Flancs proéminents
- Instrumentation sommaire peu lisible
- Finitions connectique trop justes
La fiche technique de la Fantic Caballero Rally 500
Conditions d’essais
- Itinéraire: routes sinueuses à revêtement variable, sec, piste
- Météo : variable, 20°C
- Kilométrage de la moto : 100 km
- Problème rencontré : RAS
Equipements essayeur
- Casque AGV AX9
- Veste T.UR J-One
- Jean Vanucci Armalith 2.0
- Bottes Dainese Storm
Commentaires
Super essai ! Merci !
11-10-2019 21:06Le problème va être le réseau de distribution (surtout ici en Belgique), sinon voilà une moto simple, légère, passe partout qui rappelle certains standards de plaisir à l'ancienne. Pour ma part j'envisagerais bien la Rally avec les pneus de la Flat Track. Belle réalisation en tous les cas.
02-05-2020 11:28Merci pour cette article éclairant