Histoire constructeur : Fantic Motor
Les machines d'enduro italiennes
La marque Fantic Motor apparait en 1968 dans la province italienne de Brianza sous l’impulsion de Mario Agrati et de Henry Keppel-Hesselink, tous deux issus du constructeur Garelli. Le nom de Fantic Motor est la contraction du mot anglais "fantastic". La production débute presque immédiatement dans une toute nouvelle usine de 1.200 m² avec 30 employés. Provocation ou non, Agrati et Keppel installent leur usine à seulement 6 km de celle de leur ancien employeur et désormais concurrent...
La firme débute dans un premier temps par la construction de véhicules de loisirs avec notamment une gamme de cyclomoteurs et de machines de petites cylindrées qui rencontrent un joli succès notamment à l’exportation. Les machines italiennes s’équipent alors de moteurs de tondeuses à gazon de marque Aspera et de mécaniques Minarelli de 50cm3.
Le phénomène Caballero
Lors du salon de Milan 1969, Fantic dévoile son scrambler Caballero, nommée en référence à la marque de cigarettes préférée de Kessel, propulsé par un moteur deux-temps Minarelli de 50 cm3. À l'origine, les deux associées ne comptaient vendre que 500 exemplaires de ce qu'ils considéraient comme un modèle de niche. Mais brillamment stylisée, abordable financièrement et bonne à tout faire, la moto capte l'attention des ados et devient un véritable best-seller. Ce sont pas moins de 10.000 exemplaires qui sortiront des chaines de productions automatisées de Fantic, ces dernières contrastant nettement avec les manufactures de la concurrence. Deux ans après sa présentation, la Caballero devient le cyclomoteur le plus vendu de toute l'Italie, dominant une concurrence féroce sur ce segment face à des poids lourds renommés tels que Gilera et, évidemment, Garelli. La revanche est prise.
Conçue par Julius Maffessoli et utilisant un cadre Verlicchi portant un moteur Minarelli P4 SS, la Caballero Cross 50 n'était pas une moto de compétition, mais un cyclomoteur de ville à l'allure sportive que les jeunes pouvaient conduire dès 14 en Italie. Elle est en plus arrivée à une époque où l'engouement pour le tout-terrain connaissait une croissance importante.
Ce best-seller a ensuite été rejoint rapidement par une version de 100 cm3 en 1971 puis de 125 cm3 en 1973, toujours propulsées par des moteurs Minarelli désormais produits spécifiquement pour Fantic. En 1972, les Caballero furent même rejointes par la Fantic Chopper 50, puis 125 deux ans plus tard, un cyclo équipé d'un guidon haut et d'une fourche à l'inclinaison radicale lancée pour surfer sur le succès d'Easy Rider diffusé en 1970 dans le pays. Encore une fois, ce qu'Agrati et Kessel considéraient comme un modèle de niche s'est transformé en succès mondial.
Succès en compétition et succès commerciaux
En 1974, Fantic a transformé sa Caballero de ville en une véritable moto de compétition avec la Caballero Regolarità 125 puis créa le Fantic Motor Racing Team l'année suivante. Les succès en compétition tout-terrain ont été immédiats et permis à la marque de remporter jusqu'au Silver Vase lors des ISDE de 1978 en Suède. En 1981, Fantic fournissait les motos à l'équipe d'Italie qui remportait les ISDE à domicile sur l'ile d'Elbe et continuait à s'étendre dans le milieu du offroad. La marque s'est ainsi lancée dans le trial au début des années 1980, remportant par la suite deux titres mondiaux consécutifs avec Thierry Michaud en 85 et 86, puis en enchainant sept victoires aux Scottish Six Days Trial.
À cette époque, l'usine s'était étendue à 20.000 m² au sein de laquelle 160 employés produisaient environ 50.000 motos par an, faisant de Fantic l'un des plus gros constructeurs italiens.
Le déclin de l'enduro
Pourtant, les années 80 marquent une période difficile pour la firme qui doit faire face à un désintéressement de la discipline de l’enduro tandis que les mécaniques Minarelli qu’elle utilise encore pour concevoir ses machines souffrent d’un certain vieillissement comparativement à la concurrence. Et ce que Keppel qualifiait lui-même de "gestion plutôt cool" commence à se répercuter sur l'activité avec plusieurs années de baisse des ventes et des problèmes avec les fournisseurs, alors que des problèmes de trésorerie s'installaient. Pour ne rien arranger, Fantic avait du mal à fournir ses concessionnaires en motos qui se sont progressivement tournés vers le plus petit, mais dynamique Aprilia.
Un troisième titre mondial de Trial de Michaud en 1988 n'a pas changé la donne puisque Fantic avait été racheté en avril 1987 par Fabbrica Motoveicoli (FM), une holding détenue par Paolo Berlusconi, frère du magnat des médias Silvio qui devint par la suite Premier ministre durant 9 ans. Mais Paolo n'avait pas le talent de son grand frère pour les affaires et même après avoir racheté ce qu'il restait de Garelli en 1992, ces années de déclin ont finalement pris fin en 1955 avec le dépôt de bilan de FM et la fermeture de l'usine Fantic Motor.
Première renaissance
En 2003, Fantic a été relancé par Federico Fregnan, un ancien propriétaire de Caballero qui a acquis la marque après sa faillite et l'a transférée dans une petite usine de 2.000 m² à Trévise. Ironiquement, c'est juste à côté de chez Aprilia qui était entre-temps devenu un acteur mondial de la moto. Là, au cours de la décennie suivante, 10.000 motos Fantic ont été construites, des 50 et 125 cm3 enduro et supermoto.
Pour marquer le retour de la marque aux affaires, Fregnan avait fait le pari improbable de participer aux 250GP en 2005 avec un bicylindre en V à 90° deux-temps conçu par l'équipementier de F1 CRP Technology (aujourd'hui devenu le producteur des motos électriques Energica) et piloté par le Champion du Monde 125 Arnaud Vincent. Mais cela n'a duré qu'une seule saison et n'a apporté aucun résultat concret. En 2006, Fregnan est revenu à l'univers du tout-terrain plus traditionnel et a remporté le Championnat de France d'Enduro 50 avec une Caballero à moteur Minarelli. En 2009, Fantic lançait de nouveaux modèles Caballero de plus grande capacité avec des moteurs quatre temps de 200 cm3 puis de 300 cm3 en 2012, mais les ventes n'ont jamais vraiment décollées, car Fregnan avait d'autres choses en tête, à la tête de l'entreprise familiale Elektra, spécialisée dans les machines à café et l'une des plus réputées du pays.
Une nouvelle orientation
Ainsi, fin 2014, Fregnan est approché par un consortium d'entrepreneurs locaux mené par Mariano Roman, ancien responsable du développement produit chez Aprilia. Il avait oeuvré chez le constructeur de Noale durant 23 ans sous la direction du propriétaire de l'époque Ivano Beggio. Un accord pour le rachat fut rapidement trouvé et Fantic Motor fut vendue 2 millions d'euros cash, plus des royalties sur les futures ventes.
La renaissance de Fantic débute alors, d'abord via le tout-terrain puis avec le retour de la lignée Caballero, un scrambler décliné du 125 au 500 cm3 puis peu à peu proposé dans différentes variations. Parallèlement, Fantic se met aussi au vélo à assistance électrique et reprend progressivement du poids. Fin 2020, Fantic Motor rachète même son vieil associé Minarelli à Yamaha. La marque italienne poursuit son développement et s'oriente désormais vers de plus grosses cylindrées...
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