La Ducati du Pharaon
Le polar de l'été - Episode 8 et fin
- C’est marrant. C’est un peu comme si on était la dernière famille qui lui reste, dit Alex à mi-voix.
Ils sont debout devant la petite plaque de pierre claire toute neuve vissée au mur où l’on peut lire : ‘Odette Franz, 1891-1918’.
Marc ne répond pas.
- Tu vas être en retard à la conférence de presse, remarque Alex.
- Je n’y vais pas. Je m’en fous. C’est Berthier qui me remplace.
- Pourquoi ? T’es con. C’est ton enquête.
- Bah. Il a un geste de la main.
Marc et lui sortent du cimetière. Ils s’arrêtent devant la 750 SS.
- Elle est finie ? demande Alex.
- Oui, depuis mardi. Mais bof. C’est bien, mais bof. Je vais la revendre. Ça m’amuse de bricoler, mais pour rouler dans Paris je préfère le Vespa.
Le préfet se tient sur une petite estrade devant une trentaine de journalistes assemblés, trop heureux d’avoir quelque chose à se mettre sous la dent en cette dernière semaine de juillet où il ne se passe traditionnellement rien. Après les amabilités d'usage, il ouvre le bal :
- Cette découverte pour le moins étrange s’est faite de manière fortuite il y a cinq mois. Il a fallu la ténacité de l’inspecteur en charge de l’affaire et l’expertise de plusieurs spécialistes pour résoudre cette véritable énigme digne d’un roman de Sherlock Holmes. Les faits se déroulent début août 1918. A ce moment-là, les Allemands bombardent Paris avec des pièces d’artillerie situées à quasiment 120 kilomètres de la capitale. Les Parisiens appellent à tort ces canons la ‘Grosse Bertha’. En un peu moins de cinq mois, quelque 400 obus atteignent Paris et sa banlieue, faisant près de 300 morts et plus de 600 blessés…
- ... ce matin-là, un obus tombe sur la commune de Châtillon, qui n’a évidemment pas la forme que nous lui connaissons aujourd’hui : c’est un village de la périphérie parisienne, avec quelques petits immeubles et des maisons particulières, ceinturées de potagers et de pâturages…
- ... nous pensons que la malheureuse a été tuée sur le coup, au moment même où le réduit était englouti sous terre par la force de la déflagration…
- ... dans les archives départementales, nous avons retrouvé cette photo, prise par un anonyme et qui montre bien la façade de la maison touchée par l’obus, partiellement effondrée, ce qui explique que le fossé d’effondrement du couloir n’a pas été remarqué sur le moment...
- ... fait singulier: Odette Franz était sur le point de retrouver le nom de son arrière-grand-père : Louis France. Ce dernier a combattu au sein de la Grande Armée. Blessé, il est resté en Allemagne... ou plutôt en Prusse, parce que l'Allemagne n'existait pas encore à l'époque. C'est là qu'il s'est marié. Le père d'Odette, lui, a fait le chemin inverse pendant la guerre de 1870. Blessé au combat lui aussi, il a fait comme son grand-père : il est resté sur place. Il se marie à Meaux en 1886 et Odette naît cinq ans plus tard...
- ... sa demande de changement de patronyme avait été acceptée et il ne lui restait plus qu’à se rendre à la Préfecture pour officialiser cette décision...
- ... une victime de plus de l'incendie allumé par Gavrilo Princip...
- ... près d’un siècle s’est écoulé depuis ces tragiques événements...
- ... réconciliation franco-allemande...
- ... fraternité entre les peuples...
Marc tombe un rapport et ouvre les gaz en plongeant dans le gauche du tunnel de la Concorde.
Le polar de l'été
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Commentaires
Alors, ça vous a plu ?
07-09-2017 20:34oui très sympa cette petite enquête historique. ça fait voyager dans le temps. Bravo!
13-09-2017 10:35