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La Ducati du Pharaon

Le polar de l'été - Episode 6

La Ducati du Pharaon - 6

Dix sonneries. Bigre, ce doit être urgent, se dit Marc en reposant son carburateur arrière sur le bureau.

- Oui ?

- Inspecteur Farront ?

- Oui.

- C’est Emilie Julliot, du BRGM. On s’était vu il y a un mois à propos de cet éboulement dans une cave.

- Ah, oui.

- Alors, il y a du nouveau. J’ai envoyé une équipe faire un petit sondage pour vérifier qu’il n’y avait pas de risque d’éboulement supplémentaire et en fait ils sont tombés sur les vestiges d’un cratère d’obus.

- Comment ça ?

- On a étayé et creusé un peu et juste derrière ce que vous appelez des toilettes, on trouve les traces caractéristiques d’un cratère d’obus de calibre moyen. D’ailleurs on trouve les restes d’éclats métalliques enfoncés dans les traverses -ce sont bien des traverses de chemin de fer, comme vous le pensiez. C’est très net : on a même retrouvé des éclats fichés dans les parois du tunnel.

- Je ne comprends pas bien : l’obus est tombé dans le tunnel, c’est ça ? Et le chiotte a arrêté l’explosion ?

- Non, parce qu’on trouve de la maçonnerie sous le… ch… enfin les toilettes, quoi.

Marc a un grognement d’incompréhension.

La Ducati du Pharaon - épisode 6 : l'obus- En fait on pense que l’obus a éclaté en surface, mais qu’il est tombé juste sur le tunnel et donc qu’il l’a fait s’effondrer. Le chi… enfin les toilettes sont tombées dans le tunnel, tout d’un bloc, avec la personne dedans.

Nouveau grognement, dubitatif cette fois-ci.

- Bah, je ne suis pas un expert en explosifs, mais c’est la seule explication que je vois pour comprendre ce qu’on a trouvé.

- Et le chiotte est tombé tout droit ? En restant intact ?

- Ça s’est déjà vu : des immeubles qui chutent de plus d’un mètre lors d'un tremblement de terre et qui restent malgré tout debout et presque intacts. Là, vu l’épaisseur du bois et sa construction, c’était du genre solide -la preuve, le… chiotte a résisté au souffle. Mais il faudrait quand même demander à un spécialiste des explosifs… vous devez bien avoir ça chez vous, non ?

- Oui, oui, répond Marc pensivement, le cerveau partagé entre l’analyse de ce qui lui est exposé et la recherche d’un expert qu’il pourrait interroger.

- Bon, ben en tous cas pour nous ça s’arrête là : le couloir a été détruit sur plusieurs mètres, c’est sûr. On n’a ni le temps ni les fonds pour poursuivre. En tous cas merci : c’est toujours intéressant de trouver des vestiges. Heuh… dites…

- Oui ?

- Si vous trouvez le fin mot de l’affaire, vous me tiendrez au courant ? Je trouve ça bizarre, comme histoire.

- Moi aussi… moi aussi, répond Marc, songeur. Mais oui, bien sûr. Je vous glisserai un petit mot si jamais on trouve ce qui s’est passé.

Il raccroche. Et se mord immédiatement la lèvre inférieure : il n’a pas remercié son interlocuteur. Il ramasse et manipule pensivement son carburateur en se suçant les dents.

- Tout d’un bloc, tout d’un coup. Tout d’un bloc, tout d’un coup, répète-t-il.

Il tourne et retourne le carburateur, écoutant le bruit du flotteur dans la cuve qui vient cliqueter contre le pointeau d'arrêt, remplacé par un neuf pour avoir la paix. Il parcourt du doigt le carter de la pompe de reprise : le tarif du diaphragme neuf l'a désagréablement surpris. Pas loin de 25 euros pour un bête bout de caoutchouc découpé. Pareil pour la douzaine de petits joints toriques. La restauration de vieilles bécanes est un sport de riche.

- Tout d’un bloc, tout d’un coup. Tout d’un bloc, tout d’un coup, répète-t-il encore.

Le polar de l'été

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