Remplacer les joints spi de fourche
Vérifier l'état des fourches, purger le liquide et remplacer les joints
Saga restauration de la sportive Kawasaki ZX6R 636 modèle 2002 : 15ème épisode
- Difficulté :
- Durée :
- Budget :
Toute pièce en mouvement subit des contraintes et s'use davantage jusqu'à ne plus assurer sa fonction. C'est clairement le cas de la fourche qui assure l'amortissement et le parfait contact du pneu sur la route en toutes circonstances. La fourche est notamment constituée de deux pièces majeures avec le tube et le fourreau qui coulissent l'un dans l'autre. L'étanchéité entre ces deux pièces est assurée par un joint à lèvre, appelé également joint spi. Et c'est lui qui peut vieillir et demande à être changé. Témoin d'alerte : l'huile qui suinte en dehors.
Les éléments constitutifs d'une fourche
- tube
- fourreau
- ressort
- joint cache-poussière
- joint spi
- bouchon
- bagues de tube
- BTR de tige-amortisseur
- tige-amortisseur
- rondelles
- entretoise
- clip d'arrêt
S'il y a bien un élément avec lequel je ne vais donc pas plaisanter, c'est l'amortissement. Pas envie de m'envoyer dans le décor au premier freinage ou au premier virage. Des joints spi fatigués, c'est la garantie d'un effet pompe à vélo sur la moto et ce n'est pas rassurant sur la route. Si l'amortisseur arrière semble en bonne forme de prime abord et malgré son fort kilométrage, je ne peux pas en dire autant de la fourche, dont je devine qu'elle ne doit pas avoir été purgée depuis un moment. D'autant plus que les joints spi ne sont pas au mieux de leur forme, tant au niveau de leur aspect que de leur fonction. On dirait que seule la crasse assure encore l'imperméabilité de tout ce petit monde.
J'ai déjà assisté à un remplacement de joint spi sur ma Suzuki SV650, mais ne l'ai jamais fait entièrement moi-même. L'occasion est trop belle, d'autant plus que j'ai tout ce qu'il me faut sous la main au garage participatif. Je vais me chercher un bidon d'huile de fourche 10W, je commande dans la matinée les joints spi et les cache poussière chez Accessoirement et je réserve un créneau pour disposer du palan au garage le lendemain après-midi.
Fournitures
On trouve des joints spi à partir de 9 ¤ sur le web. Pas sûr qu'ils soient aussi efficaces, résistants et durables que des éléments certifiés par un distributeur ou une marque. En effet, on en trouve à 24 ¤ pour les 2 spi d'origine Kawasaki et 24 ¤ supplémentaires pour les cache poussière, soit un total de près de 50 ¤.
Pour sa part, Bihr propose les joints spi à 12 ¤ les 2 chez Tecnium, mais sans cache poussière et 33 ¤ les 2 chez SKF, toujours sans cache poussière. Les cache poussière sont aussi utiles que les déflecteurs et on recommande fortement de les remplacer. Du neuf avec du neuf, c'est toujours mieux. J'ai pour ma part opté pour du Tecnium. J'ai déjà testé sur ma SV ou ma Hornet 900. Avec plus de 50 000 km parcourus sans aucun problème sur l'une et plus de 80 000 sur la seconde, j'ai validé la marque et son sérieux.
Démontage de la fourche de la partie cycle
Motivé, j'attaque la remise en forme de la fourche. J'amène la moto au niveau du palan, sécurise mon installation par une béquille d'atelier arrière et je soulève légèrement l'avant de la moto pour pouvoir dégager la roue avant. Je démonte le garde boue avant, désolidarise les étriers de frein, commence à déserrer les « bouchons » supérieurs de la fourche au moyen d'un bonne douille, bien adaptée et sans jeu aucun. En effet, la partie supérieure, malgré son aspect solide, peut vite marquer et arrondir l'empreinte. Jusque là, tout va bien. Je libère les fourreaux de l'emprise des tés. Ils viennent tout seuls. Enfin avec un poil de WD40 histoire de.
Ce sont de belles pièces. Certes, la fourche n'est pas inversée, mais elle constituait le top de ce que l'on pouvait avoir sur une « petite » sportive de l'époque. Cette fourche est surtout le top de ce que j'ai jamais eu sur une moto perso. C'est dire. J'inspecte tout dans le détail et je me félicite de l'état général, plutôt bon.
Je remise les étriers qui, je le sais déjà, vont avoir droit à un traitement de faveur prochainement. Je démonte le té de fourche supérieur, histoire de pouvoir le repeindre correctement et je laisse sur chaque pièce d'où elle vient la visserie, sauf pour celle retenant les trois éléments constituant le garde boue. Elles, je les remise dans ma boîte compartimentée. Avec un peu de chance, elles ne reviendront pas de sitôt, j'ai déjà commandé de quoi les remplacer et refaire le carénage complet. Je reviens sur les tubes, à présent volants.
La Revue Moto Technique donne toutes les informations nécessaires aux opérations de maintenance et de remplissage.
En les serrant dans les mors de l'étau. Je « débouchonne » sans difficulté tout ce petit monde en retenant la pièce : c'est que ça pousse en dessous ! Je dévisse ensuite le siège de ressort de fourche en le désolidarisant de la tige inférieure. Il faut trois mains et des outils fins, dont une clef plate, mais tout va bien jusque là.
Première étape validée. L'ouverture se passe sans encombre. Le démontage de la partie supérieure aussi.
Purge de l'huile de fourche
J'enlèverai ensuite les ressorts de fourche, dont je mesure la longueur pour vérifier qu'ils ont encore les bonnes cotes. La longueur est bonne et ils sont eux aussi en bon état et manifestement de type progressif. Je purge la fourche en la retournant dans le mors. Tête vers le bas, je fais coulisser le fourreau pour pomper jusqu'à évacuer tout l'huile viciée du circuit interne, puis je laisse s'égoutter. Ensuite, je nettoie le tout au dégraissant.
Astuce : avant de commencer et surtout si l'on n'a pas la revue technique : on verse l'huile dans un récipient doseur ce qui permet de savoir la quantité d'huile à remettre plus tard dans le fourreau. On vide et on refait la mesure avec le deuxième fourreau pour vérifier les deux valeurs.
Pour info, je verse l'huile usagée, puante et d'une couleur indiquant que ça devait faire un moment qu'elle réclamait sa retraite dans le récipient prévu à cet effet. Un autre avantage de faire de la mécanique ici, c'est que tout est recyclé régulièrement et que l'on n'a pas à courir partout pour se débarrasser des fluides « corporels » de la moto. Une opération que l'on fait normalement en déchetterie (et surtout pas naturellement ailleurs).
Pour info,certains concessionnaires et ateliers de mécanique moto acceptent de reprendre l'huile moteur et l'huile de fourche, quitte à faire payer une participation au recyclage. Ça vaut le coup de se renseigner. L'important c'est ne pas vider son huile dans la nature.
Démontage des fourreaux
Bon. Je note l'ordre des pièces. Il y a deux rondelles, une entretoise, l'écrou, un joint torique, une tige et une tige plongeuse dans chaque fourreau. Maintenant, il faut que je parvienne à enlever de foutu boulon 6 pans de 12x22 qui est dans le pied de fourche. C'est lui qui retient en place le cylindre de fourche, bref, le bas de la cartouche. Et il faut à tout prix qu'il s'en aille pour que je puisse finir de démonter les fourreaux.
En théorie, cela nécessite un outillage spécifique, que je n'ai pas, bien entendu. Évident également, à la main, je n'ai pas assez de «couple » instantané pour débloquer la pièce. Il me faudrait une clef pneumatique à choc avec une vitesse de rotation capable de... Mais dites moi, il y a un compresseur ici, non ? Manque de chance, je n'ai pas ce qu'il faut sous la main et ça ne passe pas. TILT.
Il y a une concession Renault juste en face du garage. Je tente le tout pour le tout. Je passe voir le gérant, qui propose de m'aider. Ils sont géniaux, ces pros, non ? Il faut que je passe pendant la pause déjeuner, histoire de ne pas interférer avec les rendez-vous clients. Je prends date et je lui ramène les fourreaux bien purgés et bien nettoyés le lendemain. Malgré toute sa bonne volonté, un pistolet pneumatique et un outillage adapté, rien n'y fait non plus. Non de non, mais que vais-je donc bien pouvoir faire ? Je suis bloqué de chez bloqué.
La solution arrive avec un autre bricoleur du garage qui passe à point nommé. Il sait qu'il y a là un « pétard » électrique, avec plusieurs possibilité de réglages. Il le sort et propose de m'aider. Il prend les choses en mains, n'étant pas à son coup d'essai manifestement. Après plusieurs tentatives et plusieurs réglages différents, Z750 K1 (le petit nom du boulon), capitule et se laisse faire. Victoire ! La fourche peut à présent être entièrement démontée. Conclusion, ce que l'air ne put faire, la fée le fit. Fiou.
Remplacement des joints spis
Je peux à présent procéder au remplacement des joints spi. Facile. Ou presque. Un coup de tournevis et le clips le retenant en place saute. Je garde les pièces, au cas où, je pourrais en avoir besoin au moment de tasser le nouvel élément. Je vais remplacer les spis usés par les neufs. Enfin si je parviens à mettre le nouveau en place.
Une fois ce clips parti, il ne reste donc plus qu'à tirer sur le fourreau et à enlever le vieux Spi. Le nouveau doit être tassé pour reprendre la place et assurer pleinement son rôle, mais on ne doit absolument pas l'endommager. Je protège au passage les nouveaux spis en faisant une capote en scotch que je lubrifie pour mieux coulisser dans son emplacement favori. Graou. Voici que tout est en place. Je remonte le tout, y compris les deux « Z » qui ne font plus les malins.
Ainsi, le joint spi coulisse sans risque et prend sa place. Il n'y a plus qu'à le rentrer de force dans son logement.
Il existe un outil génial spécifique, dont je ne dispose pas. Tant pis, je trouve un tube de grand diamètre, que je retaille pour que le tube de fourche puisse passer à l'intérieur. Manque de pot, ça ne marche pas. Et quand ça ne marche pas, que fais-je ?
Je prends mes fourreaux sous le bras et je file chez Rollbiker. Ils ont tout ce qu'il faut comme outillage pour le remettre en place. Edouard "bague" le tube avec la masselotte adaptable, le fameux "outil pour joint de fourche". Il donne quelques coups vers le bas et le tour est joué, le joint est en place et pas prêt de bouger. On rajoute ça sur ma note ? Retour à quelques 800 m de là au garage.
Remplissage des fourreaux avec la nouvelle huile
Je remonte le fourreau. Pas question de se rater sur la quantité d'huile. J'adopte la mesure préconisée par la Revue Moto Technique et la verse dans chaque fourreau.
Une autre solution consiste à mesurer la hauteur d'huile dans le fourreau, en l'absence du ressort. Si l'on a un doute sur la quantité à mettre, il peut être intéressant de jauger la quantité ôtée : on a alors la valeur usuelle. Dans mon cas, j'ai l'info.
Ceci fait, je remets ressort, rondelle et entretoise et revisse le tout jusqu'au chapeau. Je pose les fourreaux au sol et teste l'enfoncement. Génial, tout va bien. La compression est forte, tandis que je sens bien le frein hydraulique agir. Les réglages d'origine préconisés en matière de pré-charge, de compression et de détente sont fournis par la RMT, je les appliquerai dès que j'aurais remonté les fourreaux.
Mais il est tard et je n'aurais pas terminé ce soir. Il faut que je déplace ma moto. Un tournage de vidéo a lieu demain matin au garage La Forge. Je n'étais pas au courant, sinon, je ne me serais pas lancé là dedans, moi ! Le responsable en charge ce soir là, me propose de mettre la moto sur un chariot roulant et de la pousser jusqu'à son emplacement à quelques mètres de là. Je ne le sens pas, mais alors pas du tout. Il est pressé, décontracté... Pas moi ! Et j'avais raison, vous le découvrirez dans le prochain épisode.
A retenir
- Bien respecter la quantité d'huile requise
- Faire attention à la viscosité de l'huile requise. Si 10W est standard, des sportives requièrent du 5W (CBR 1000RR par ex.). Une bonne marque d'huile est un plus : elles travaillent et vieillissent mieux.
- Le changement de joint spi de fourche coûte aux alentours de 120 à 200 ¤ en concession ou chez un mécano moto. Et ça les vaut parfois... Opter pour de bons spis, de marque, c'est partir l'esprit tranquille (et sans huile)
A ne pas faire
- Ne pas vérifier les réglages remis par un « pro ». Il est important de vérifier tous les réglages offerts par votre fourche au moment de reprendre la route. 2 fois je suis passé par un pro (service « rapide »), 2 fois il m'a mis des réglages différents dans chaque fourreau et surtout des réglages totalement farfelus. Attention, danger.
- Mal resserrer les fourreaux
- Mal resserrer les étriers de frein
- Mettre une huile trop dure en espérant améliorer le comportement d'une fourche trop souple. Il vaut mieux jouer sur les réglages avant ou changer de ressort ou de fourche.
Outils
- Clef à douilles et douilles,
- Clef plate,
- Tournevis plat,
- Scotch d'électricien,
- « tasseur » de joint spi,
- Pistolet pneumatique, pistolet électrique,
- Un palan,
- Un étau,
- Des mors
- De quoi récupérer l'huile souillée,
- Un verre doseur et/ou une réglette graduée ou une jauge à hauteur d'huile
Fournitures
- Joints Spi et caches poussière : 23 ¤ chez Tecnium
- Huile de fourche : 12 ¤ le litre de 10W Motul
Plus d'infos sur la restauration
- Lire l'épisode 1 avec la présentation du projet et de la Saga Restauration
- Consulter l'annuaire Restauration
Commentaires
Réglages très très souvent farfelus... plus qui est que le poids du motard et la charge de la moto a sa plus grande importance, pour le style de conduite c'est plus compliqué cela dépend surtout où l'on roule et sur quel revêtement. Cela compte évidemment aussi pour la suspension arrière.
18-05-2020 10:36Il est incroyable de constater l'influence que peut avoir une simple vidange ou a fortiori un changement de qualité ou quantité d'huile de fourche sur le comportement de la moto.
18-05-2020 11:35C'est toute une aventure ce changement d'huile de fourche et de spi... un pro le fera à ma place.
18-05-2020 12:08Merci pour cette restauration !
@Max: s'il s'agit d'une simple vidange, c'est très simple, on ouvre, on vide l'huile, on nettoie, on remet de l'huile et on referme.(En gros. En très gros)
18-05-2020 12:41La complication vient avec la complexité de la fourche et en fonction ses multiples réglages, qui ajoutent des pièces internes).
Sur une fourche non réglable, on souffre bien moins !
C'est clair que les fourches OEM sont très basiques, on n'a rarement de la cartouche fermée pressurisée. Et il n'a pas fait le changement des bagues de guidage qui demandent encore plus de patience.
18-05-2020 15:35Sachant que la vidange, c'est bien, mais ce n'est que la première étape. Il faut valider le comportement, ne serait-ce que par la mesure de la course morte et détente. Sans cela, le remède peut-être pire que le mal.
Il est toujours préférable de débloquer ce qui doit l'être avec les tubes de fourches tenus serrés par les tés de fourche et non par un étau
19-05-2020 14:08Vidanger l'huile de fourche est super simple si on a une béquille centrale ou si la moto peut être levée par un lève moto "standard". C'est reloud quand il faut commencer à sortir un panlan, un escabeau etc.
Félicitations !
21-05-2020 10:00J'ai peut être lu trop vite. Il est bien de faire jouer la fourche plusieurs fois en faisant la vidange pour éliminer toute l'huile qui se cache entre les clapets. J'en ai sorti ainsi une grosse quantité sur ma vieille Katoche. Idem au remplissage pour éliminer les bulles d'air.
Remplacer de la 5W par de la 10W est excessif pour durcir une fourche, mais les mélanger pour obtenir un grade intermédiaire est possible (sortez les calculettes). Ca permet de transformer une pompe à vélo en fourche de moto plus confortable.
Les tubes PVC de plomberie permettent de pousser le joint spy en place selon les diamètres, ou aussi de faire des cales supplémentaires pour pré-contraindre les ressorts pour pas cher.
Bonne continuation Benoit.