Essai pneu Metzeler Sportec M7 RR
Un pneumatique champion sous la pluie
Désireux de nous faire essayer son pneu hypersport sous le soleil d’Almeria, Metzeler avait prévu un programme « essorage » à base de S 1000 RR 2015. Malheureusement pour nous, mais heureusement pour toi lecteur, nous avons dû passer en programme « rain » pour découvrir le pneumatique Sportec M7 RR.
Le Sportec M7 RR est une nouveauté 2014, qui remplace le Sportec M5, en affichant des prétentions sportives très supérieures. Une pointure donc, que nous avons pu essayer, sur route et sur piste, aux guidons de BMW R 1200 R et S 1000 RR 2015. Mais avant de démarrer pour voir ce que ce champion a dans le ventre, analysons un peu son contenu technologique et les options retenues par le manufacturier Germano-Italien.
Le premier bi-gomme pour les Européens
Jusque-là Metzeler utilisait exclusivement la technologie « Interact » pour offrir des zones de duretés différentes entre la bande de roulement et les épaules du pneu. En jouant sur la tension de la carcasse, afin d’autoriser plus ou moins de mouvements, le manufacturier modifie la température et donc le grip de la gomme, selon les zones. Le M7 RR y fait toujours appel, mais le joint au procédé bi gomme arrière. Désormais, l’Interact permet surtout d’adoucir la transition entre les deux gommes. A noter que si Metzeler avait déjà commercialisé un M5 bi-gomme outre Atlantique, c'est une première pour nous européens. Mais nous verrons que le résultat est à la hauteur de ce saut technologique
Nouveau profil et nouveau dessin
Profitant de l’expérience acquise lors des compétitions sur route, notamment avec Guy Martin sur l’île de Man, Metzeler a dessiné un nouveau profil plus haut, qui offre l’avantage d’une plus grande surface de contact au sol en virage. Un très bon point pour la confiance.
Ce pneumatique supersport a été conçu pour donner le meilleur dans des conditions « réelles », c’est-à-dire avec un bitume sale, inégal, parfois froid et humide, avec des différences de revêtement d’un endroit à un autre. Bref pour la route, mais avec de grandes ambitions sportives. Il est bien sûr tout à fait capable d’aller claquer un bon chrono sur piste, où il talonne d’ailleurs son cousin italien, le Pirelli Diablo Rosso Corsa. Une référence ! Un pneu « tous-terrains », en quelques sortes, aussi à l’aise sur route que sur la piste.
Le nouveau dessin comporte des rainures latérales, dont la largeur augmente vers les épaules, alors que leur profondeur diminue, pour améliorer le drainage sur l’angle. Le taux d’entaillement (ratio plein/vide) a lui aussi été revu par rapport à son prédécesseur. Il a été augmenté de 12,6% à 14,7% à l’avant et diminué de 12,6% à 11,1% à l’arrière grâce au meilleur drainage de l’eau assuré par le pneu avant. Autant de facteurs qui, associés aux rainures longitudinales interrompues, améliorent aussi la stabilité de la bande de roulement et la régularité de l’usure, selon Metzeler.
Plus endurant aussi !
Plus sportif et plus endurant, c’est possible, oui, d’une part grâce au profil et au dessin qui augmente la surface de gomme au sol et la rigidité de la bande de roulement, mais aussi grâce à la technologie bi-gomme arrière, qui permet d’utiliser un mélange plus dur au centre, sans nuire au grip en virage. Pour une meilleure tenue sur les sols froids et humides, le pneu avant et les épaules arrières utilisent un mélange 100 % silice. La bande centrale de roulement arrière, qui représente environ 45 mm de largeur (selon les tailles) est composée quant à elle de 70% de silice et utilise un substrat plus dur. Enfin, des additifs utilisés lors de la fabrication, favorisent l’homogénéité des mélanges et renforcent leur tenue à chaud, pour ne pas voir les performances du pneu se dégrader au bout de quelques tours de piste. Nous n’aurons malheureusement pas le loisir de le voir, faute d’une météo capricieuse.
Un petit tour sous le soleil
Arrivé avec un peu d’avance, nous profitons d’un soleil magnifique pour aller rouler sur les départementales tortueuses qui sillonnent les reliefs au-dessus d’Almeria. Les choses sérieuses sont prévues pour le lendemain et sur piste. Nous n’avons pas de photographe avec nous, mais une bonne petite virée en moto, ça ne se refuse pas, surtout au guidon de la R 1200 R qui nous avait tant séduit lors de sa présentation.
D’ordinaire équipée du Roadtec Z8, elle devient plus vive en M7 RR, avec un avant plus tranchant, qui bascule plus dans les rond-points. C’est le bénéfice du nouveau profil plus pentu sur les flancs. C’est un peu plus nerveux, mais dès que l’on hausse le rythme, on se sent plus en sécurité grâce à la plus grande surface de gomme au sol. De ce fait, le retour d’info est excellent, on sent bien l’avant, sur ce roadster qui abandonne le Telelever au profit d’une fourche inversée. La stabilité à haute vitesse (moins de 200 tout de même), est excellente et le pneu arrière encaisse sans broncher le couple du vigoureux bicylindre. Les changements des revêtements ne le perturbent pas. Nous attendrons la piste pour juger du grip sur les très fortes prises d’angles, mais sur route, pas de soucis, ça accroche vraiment.
La pluie fait des claquettes
Malheureusement, le lendemain, la côte espagnole nous offre un tout autre visage. La mer bleue et lisse est devenue grise avec de gros rouleaux. Le vent souffle et le bitume est constellé de flaques d’eau. Nous montons donc au circuit par les petites routes de montagne, avec des S 1000 RR en mode « pluie ». Snif. Malgré des bracelets et 165 chevaux dans les épingles, la moto et le pneumatique se comportent bien dans cet exercice délicat. Même dans ces conditions carrément bien pourries, on se sent en confiance, alors que certaines portions aussi lisses que luisantes. L’électronique est là en guise de parachute et on se plait à hausser gentiment le rythme en comptant sur elle, sans qu’elle ne se fasse sentir. La limite de décrochage, semble assez éloignée de ce qu’un motard moyen osera sur route mouillée.
En piste !
Nous voilà sur le circuit d’Alméria aux ordres de Jürgen Fuchs, ex pilote de GP, qui nous montre les trajectoires, sous une pluie quasi incessante. Plus question de tester le Racetec RR qui avait été évoqué également, ce sera le M 7 RR toute la journée. Il fait trop froid et humide. Malgré tous ses efforts pour adopter un rythme qui me convienne, je ne parviens pas à le suivre et je continue seul au bout de quelques tours. La S 1000 R n’est pas non plus ma tasse de thé. Trop puissante à mon goût, elle demande des qualités de pilote que je n’ai pas. Je préfèrerais une 600, ou une 1000 GSXR, mais qu’à cela ne tienne, il faut faire avec et heureusement l’électronique veille au grain. C’est une furie cette moto !
En mode « sport », la roue avant décolle légèrement au passage de la quatrième, sans couper les gaz grâce au shifter (environ 230 km/h). Le M7 RR ne décroche pas. En bout de ligne droite, sous la pluie, un freinage optimiste déclenché à plus de 270 fait intervenir l’ABS, sans n’affecter en rien la stabilité. C’est rassurant. La compatibilité entre les pneus et les dispositifs d'assistances électroniques est parfaite. En ce qui concerne l'ABS, le secret repose sur une parfaite adhérence pneu/jante. Le signal de vitesse envoyé à la centrale électronique ne doit pas être perturbé, afin qu'elle détecte au plus vite et le plus exactement possible, les micro-blocages et les reprises de grip. En clair, il ne faut pas polluer le signal.
En l’absence de comparaison, dans des conditions difficiles et sur un revêtement que je ne connais pas, je ne peux que me fier à mes sensations. Et en l’occurrence, elles sont plutôt bonnes. La limite de décrochage est très large. Le M7 RR est à la fois prévenant grâce à un bon retour d'informations et progressif. La mise sur l'angle est facile, mais progressive elle aussi. La moto n'est pas tombante, ce qui permet de bien suivre la trajectoire que l'on s'est fixée. L’après-midi, une dernière session sur le séchant confirme les sensations. A 285 km/h, alors que la S 1000 RR accélère encore comme une damnée, on ne décèle pas de mouvement parasite. C’est stable. Certes, difficile de mettre en défaut la rigidité de la carcasse à l’accélération sur l’angle dans ces conditions, mais la confiance est là.
Incontestablement ce M7 RR est un très bon client pour les amateurs de sport. Il est polyvalent, endurant, rapide en piste, ce que des tests indépendants et internationaux prouvent. Par ailleurs, il n’a pas peur de se mouiller! S’il ne réussit pas la quadrature du cercle, il s’en approche, offrant un spectre d’utilisation très large, qui conviendra à tous les usages. Sa longévité accrue de 20% par rapport au Sportec M5 n’est pas la moindre de ses qualités. Assurément, Metzeler a mis dans le mille !
Prix
Prix environ 245/255 € hors pose en 120/180 X 17. prix constaté sur le web: 225 € le jeu.
Tableau des dimensions
Pneu avant | Pneu arrière |
110/70 ZR 17 M/C 54 W TL | 150/60 ZR 17 M/C 66 W TL |
120/60 ZR 17 M/C 55 W TL | 160/60 ZR 17 M/C 69 W TL |
120/70 ZR 17 M/C 58 W TL | 180/55 ZR 17 M/C 73 W TL |
190/50 ZR 17 M/C 73 W TL | |
190/55 ZR 17 M/C 75 W TL | |
200/55 ZR 17 M/C 78 W TL |
Trois questions à Piero MISANI, directeur R&D moto
Metzeler se spécialise dans les pneus de courses sur route, mais quelle est la différence avec un pneu de course traditionnel, sur piste?
Les contraintes rencontrées en course sur route sont très différentes de celles de la piste. Le revêtement peut-être très changeant et le pneu doit y être toujours performant, malgré tout. Sur une piste, c'est toujours le même bitume, même si certaines zones sont plus usées que d'autres. Globalement, les écarts sont plus faibles.
Le sol est aussi plus bosselé peut-être?
oui effectivement, sur la route, on a même des plaques d'égout! Le pneu doit donc avoir une bonne faculté d'amortissement, tout en assurant une bonne rigidité au freinage, c'est le rôle de notre carcasse acier à 0°, un brevet qui date de 1991. Vous pouvez visionner des vidéos du passage de Ballaugh bride au TT et vous verrez ce qu'encaissent les pneus de course sur route!
Et en terme de vitesse, c'est plus facile sur la route?
Non c'est pire!!! à la Nordwest 200, ils restent 22 secondes à fond de 6ème avec la S 1000 RR! Ca fait plus de 1800 m, ! Aucun circuit moto n'a de telle ligne droite. Un pneu de piste n'y résisterait pas. De telles applications demandent aussi beaucoup de raideur sur les flancs pour une bonne stabilité à haute vitesse. Cette formidable expérience nous a permis de développer le nouveau Racetec RR que vous essayerez prochainement. Nous allons forcément nous revoir, car avec le froid et la pluie, il n'était pas à son affaire aujourd'hui. A très bientôt donc!
Points forts
- Confiance
- Large limite de décrochage sur le mouillé
- Endurance accrue de 20%/ Sportec M5
- Potentiel sportif important
Points faibles
- Non découverts dans ces conditions d’essais
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