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Essai Kawasaki ER-6f millésime 2012

Couteau suisse premier prix

Si l’ER-6n est un best-seller historique dans la gamme de Kawasaki depuis son apparition en 2006, sa déclinaison carénée “f” peine toujours à séduire les foules. Aux vues de ses qualités, cette troisième génération mérite d’inverser cette tendance…

Kawasaki ER6f 2012

Découverte

Après l’ER-6n en octobre dernier, c’est au tour de la version carénée “f” d’évoluer en profondeur. En toute logique, cette dernière reprend à son compte la très longue liste de modifications apportée au petit roadster Kawasaki : cadre, bras oscillant, moteur, suspensions, échappement… mais également un tout nouveau carénage. Passons rapidement sur le look, très “Kawa” (ndlr : donc tout sauf consensuel) avec des sources d’inspiration diverses piochées dans la gamme : ZX-10R, un peu de ZZR 1400 et beaucoup de Z 1000 SX, notamment au niveau de la tête de fourche. Au-delà de l’esthétique, Kawasaki souligne avoir travaillé l’évacuation des calories dispersées par le moteur. Un point que nous n’avons malheureusement pas pus vérifier par ce mois de février sibérien… Reste que les formes de cette troisième mouture sont nettement plus cohérentes que l’itération de 2009 qui ressemblait sous certains angles à une ZX-6R anorexique. L’abandon de la selle monobloc au profit d’un élément à deux étages plus “aérien” donne à l’avant un côté plus trapu et agressif.

Kawasaki ER6f 2012

Bien vu. Enfin, Kawasaki a eu la bonne idée de doter cette ER-6f d’une bulle réglable, mais nous y reviendrons dans le détail un peu plus loin…

Bulle Kawasaki ER6f

En selle

Première constatation, Kawasaki a beaucoup travaillé sur la qualité perçue : faisceau électrique bien dissimulé, peu de visseries apparentes, jeu très faible entre les différentes pièces de carrosserie… Le nouveau cadre à tubes dédoublés, plus étroit à l’entrejambe, permet aux personnes de petite tailles (moins d’1,70 m) de poser facilement les deux pieds à terre malgré une hauteur de selle qui passe de 785 à 805 mm. Les commandes, toutes réglables, tombent naturellement sous les mains et le triangle selle guidon repose-pied défini une position très naturelle. L’autre bonne surprise vient du tableau de bord. L’ancien était certes 100 % digital mais souffrait d’une piètre lisibilité. Pas de ça ici. Le nouveau bloc compteur intègre un compte-tours analogique dans sa partie supérieure et, à l’étage en dessous, un écran digital couplé à un ordinateur de bord qui affiche le niveau de carburant, la vitesse, le kilométrage total, deux trips partiels, les consommations moyennes et instantanées, l’autonomie résiduelle et l’heure. Dernière innovation, un voyant “éco” qui s’éteint dès que vous tordez un peu trop l’accélérateur. Une nouveauté dans l’air du temps.

Compteur Kawasaki ER6f 2012

Ville

Étroitement dérivée de sa variante roadster, l’ER-6f se montre très à l’aise en ville. À l’exception de la boîte de vitesse un peu accrocheuse, toutes les commandes sont douces et offrent un excellent ressentit. Légère, équilibrée et bonne braqueuse, cette Kawa est capable de reprendre sur un filet de gaz dès 2.000 tr/min sur les 3 premiers rapports et les modifications apportées au bicylindre vertical (admission et échappement retravaillés, nouvel arbre d’équilibrage…) apportent un gain sensible en couple dès 3000 tr/min. Aux régimes d’utilisation usuels, la réponse à l’accélération a également progressé, plus douce que par le passé notamment à la reprise des gaz.

La direction, très naturelle, met immédiatement en confiance et il suffit de quelques kilomètres à son guidon pour se sentir comme chez soi. Les adeptes de la pole-position aux feux rouges dans les embouteillages pesteront contre les rétroviseurs fixés sur le carénage, et à l’écartement un chouia trop large pour ce genre d’exercice. Les autres seront contents de ne pas contempler leurs coudes…

Kawasaki ER6f 2012

Autoroutes et voies rapides

Une fois n’est pas coutume, notre parcours de présentation emprunte une longue portion d’autoroute histoire de vérifier tous les bienfaits du nouveau carénage. Le gain en protection est notable comparé au millésime précédent. Seuls les pieds et les mains restent quelque peu exposés. Et la bulle ajustable ? L’intérêt des réglages n’est pas anecdotique, puisque les différences ressenties sont bien réelles entre chaque position mais, l’angle de l’écran restant fixe d’une position à l’autre, elles n’influent pas à proprement parlé sur la protection. Le jeu ici est de trouver le positionnement le mieux adapté à votre taille… Pour mon mètre soixante-dix, la position basse s’est révélée parfaite. Sur le réglage intermédiaire, le léger gain en protection s’accompagne de bruits aérodynamiques désagréables dans le casque. Quant à la position haute, elle est carrément assourdissante. Il faudra donc bricoler un peu avant de trouver la position idéale. Sachez juste que l’ajustement de la bulle se fait via 4 vis BTR, mais elle impose de démonter également la bulle soit 4 vis supplémentaires. L’opération est fastidieuse la première fois (10 minutes), plus rapide ensuite (5 au troisième démontage !). Une fois ce détail réglé à la convenance du pilote, le carénage de l’ER-6f permet de cruiser tranquillement jusqu’à 150 km/h sans ressentir les effets néfastes du vent, de la pluie ou du froid.

Kawasaki ER6f 2012

A un rythme “allemand”, l’aiguille du compte-tours vient flirter avec la zone rouge aux alentours de 220 km/h et la partie-cycle ne bronche pas, même en grande courbe. A des allures plus légales, quelques vibrations remontent dans les repose-pieds aux alentours de 120 km/h (5500 tr/min en 6ème) mais rien de désagréable si on porte autre chose que des tongs.

À cette allure, l’ordinateur de bord indique une consommation moyenne de 4,2l/100 km, soit une autonomie supérieure à 300 km. Si vous avez le fessier sensible, sachez que l’épaisseur de la mousse de selle a presque doublé sur ce millésime 2012 et le gain en confort “immédiat” est appréciable. Nous n’avons pas poussé le vice jusqu’à vider un réservoir d’une traite pour vérifier le moelleux sur la durée mais les possesseurs peuvent donner leur avis sur le sujet ici !

Kawasaki ER6f 2012

Départementales

Sur le réseau secondaire, l’ER-6f se révèle aussi fun et rigoureuse que sa cousine roadster. Précis et neutre, le train avant se place là ou se pose le regard tout en réclamant très peu d’effort à la mise sur l’angle malgré la géométrie du cadre, retouché pour plus de stabilité (l’angle de chasse passe de 24,5° à 25°, la chasse de 102 à 110 mm et l’empattement s’allonge de 5 mm). Le guidon, plus large et offrant un meilleur bras de levier, combiné a l’excellente monte pneumatique d’origine (des Dunlop Roadsmart II) ne sont sûrement pas étrangers au phénomène. Même à rythme élevé, l’ER-6f accepte les corrections de trajectoire et la prise de frein sur l’angle sans se figer ni se désunir. Les suspensions, également retouchées avec des débattements augmentés et des ressorts plus souples, sont annoncées par Kawasaki comme plus rigoureuses et plus confortables. Le gain en rigueur est effectivement sensible: l’avant et l’arrière travaillent mieux sur les bosses que la précédente génération.

Kawasaki ER6f 2012

Pour le confort en revanche, la différence est plus difficilement perceptible que lors de la présentation du roadster. La faute aux faibles températures ambiantes -moins de 10°- néfastes pour l’hydraulique lors de notre essai. Et comme les suspensions ne sont pas réglables…

Côté caractère moteur, le vertical twin de 72 chevaux offre deux visages : coupleux et plutôt discret dans ses vocalises de 3 à 6500 tr/min, il se montre expressif et rageur au-delà, grimpant avec entrain vers la zone rouge, le tout enrobé de vocalises rauques et métalliques.

Freinage

Le double disque avant s’avère convaincant avec un toucher précis et un mordant qui conviendra autant aux débutants qu’aux conducteurs confirmés. La puissance est correcte dans l’absolu, mais demande une forte poigne pour en tirer toute la quintessence. L’élément arrière manque de feeling mais joue parfaitement son rôle de stabilisateur.

Kawasaki ER6f 2012

Duo

La place réservée au sac de sable est accueillante, même si la surface qui lui est dévolue semble être plus faible que sur le millésime 2009 et sa selle monobloc. L’assise épaisse, les repose-pieds bas et les larges poignées de maintien latérales la placent parmi les bons élèves de la catégorie et notre passager d’un jour n’a relevé aucune perturbation aérodynamique (remous, etc) à hautes vitesses depuis son poste d’observation.

Kawasaki ER6f 2012

Pratique/accessoires

Petite déception, l’espace est compté sous la selle. Une fois démonté la portion arrière (l’avant accueille la batterie et les fusibles), on trouve à peine la place pour un bloc disque même si Kawasaki annonce que l’espace est prévu pour recevoir un antivol homologué. Pourquoi pas… Une chose est sûre, la version ABS, dont la centrale électronique de gestion sera logiquement logée ici, ne pourra probablement plus accueillir qu’un chiffon pour ne pas se mouiller le fondement les jours de pluie…

Heureusement, l’ER-6f se rattrape sur d’autres points. Citons en vrac les leviers réglables, la commande de warning au guidon, une molette de réglage accessible pour ajuster la hauteur de l’éclairage ou encore de multiples crochets disposés sur la partie basse de la boucle arrière et au niveau des clignotants qui permettent d’arrimer facilement un paquet sur la selle passager. Enfin, le catalogue d’accessoires des verts permet de transformer l’ER-6f en mini GT avec valises latérales (35 L), top case (30 L) et sacoche de réservoir. Pour une bulle plus protectrice ou une selle confort, il vous faudra passer par la case accessoiristes.

Kawasaki ER6f 2012

Conclusion

Ceux qui se laisseront séduire par l’ER-6f plutôt que par sa cousine sans carénage ne le regretteront pas. Contre 500 € supplémentaires, ils hériteront d’une mini sport-GT, certes plus sport que vraiment GT mais autrement plus polyvalente qu’un simple roadster. Seulement voilà, les machines à vocation routière, fussent-elles d’entrée de gamme, n’ont jamais eu la côte dans l’Hexagone. L’ancienne version “f” ne représentait que 20 % des ventes d’ER-6 et cette nouvelle mouture, malgré toutes ses qualités, ne devrait pas (ou peu) inverser cette tendance. Face à la concurrence en revanche, le roadster caréné de Kawasaki devrait tirer son épingle du jeu. L’ER-6f version 2012 s’affiche en concessions au tarif de 6 999 € dans sa version standard et 7 599 € équipée de l’ABS. Face à une Honda CBF 600 S, une Suzuki GSX 650 F/A ou une Yamaha XJ6 Diversion F, toutes dans la même gamme de prix, la petite Kawasaki dispose de qualités routières équivalentes tout en offrant un potentiel sportif et un capital “fun” des plus séduisants.

Points forts

  • Polyvalence
  • Prise en main aisée
  • Partie cycle fun ET rigoureuse
  • Améliorations moteur (couple, souplesse) sensibles

Points faibles

  • Boite rugueuse à bas régimes
  • Espace réduit sous la selle
  • L’option ABS un peu cher

Concurrentes : Honda CBF 600 S, Suzuki SVS 650, Yamaha XJ6 Diversion F