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Essai Ducati Diavel

La monture du Diable

Son nom parle pour elle... Diavel. LE Diavel s’il vous plait ! Le Diable et ses 162 démons. Pour nous, ce serait assurément sa machine. Ducati s’invite, à l’italienne, dans la cour des power cruiser : ça se voit, ça s’entend... et même plus ! Car, vous le comprendrez, le démon de Bologne n’a pas «que de la gueule», loin s’en faut.

Ducati Diavel

Découverte

Généralement, un muscle bike se résume à un gros moteur, deux roues, du tape à l’oeil... «et pis roule» ! Mais pas chez le constructeur transalpin. Du volume, oui, mais stylé. L’esthétique est forcément démoniaque, et ce, dans les moindre détails. L’unique optique ronde, barrée d’une ligne de diodes, semble incrustée dans la face avant. De part et d’autre filent les prises d’air dont les coques arborent une surface finement striée. Elles enserrent un large réservoir à la contenance pourtant courante de 17 litres. Des clignotants verticaux à LED habillent les écopes des flancs et, dans le puits de fourche, deux soufflets parent les projections d’eau/boue qui pourraient nuire à l’athlète Italien.

Phare Ducati Diavel

La seconde moitié de la machine semble plus léger tant l’avant est massif, large, puissant. La coque arrière parfaitement gainée parait tronquée au vue de la longueur du Diavel. Les longs feux arrières surplombent un massif monobras oscillant et un boudin surdimensionné de 240 mm ! Admirez la jante associée et les cylindres d’alu formant deux silencieux. Sabot moteur, long ras de roue et bavette déportée supportant l’immatriculation, éclairée par diodes, finalisent cette ligne de bodybuilder raffiné.

Tubes échappement moteur Ducati Diavel

Gage de caractère, c’est le bicylindre en L de 1198 cc, Testastretta 11°, qui composent les entrailles du Diavel. Nommé ainsi à cause de son angle réduit à 11° d’ouverture des valves d’admission et d’extraction, il délivre 162 chevaux à 9.500 tr/min et 13 mkg de couple à 8.000 tr/min (en version libre)... excusez du peu. Toutefois la bête est tenue en laisse par une électronique omniprésente. Le Ride by Wire gère l’ouverture des gazs selon 3 modes de traction : Urban, Normal, Sport. Le premier limite la puissance à 100 chevaux et surtout lisse davantage le comportement moteur.

Ducati Diavel

L’antipatinage DTC est également de la partie, paramétrable sur 8 niveaux et modulable selon la cartographie choisie. Ce V2 prend place dans un cadre mixte : treillis au revêtement mat et superbe platines alu aux méplats sensuels.

Pour limiter les ardeurs du démon, des étriers radiaux Brembo à 4 pistons pincent deux disques de 320 mm. Un dispositif à 2 pistons freine l’arrière. L’ensemble est sous surveillance ABS, déconnectable. L’amortissement se compose d’une fourche inversée de 50 mm, intégralement paramétrable et d’un amortisseur placé à l’horizontale, au ras du bitume. Celui-ci s’ajuste en précharge et détente.

Ducati Diavel arrière

En selle

On se love dans le Diavel, confortablement, l’échine du Diable se révélant fort moelleuse. Très accessible avec ses 770 mm de hauteur de selle, la Ducati propose une position moins typée cruiser que la concurrence. La flexion des jambes est à peine plus prononcée que sur un roadster. Les bras s’allongent finalement assez peu pour saisir le tube à peine cintré servant de guidon. Celui-ci masque, hélas, les vis de réglage de la fourche.

Pas besoin de sortir la clef pour la mise sous tension. Celle-ci se fait via une gâchette dont la manipulation s’acquiert aisément. L’écran LCD couleur placé sur le bidon, donc assez bas et obligeant à baisser la tête, s’anime alors. S’y regroupent les informations d’odomètre, choix de cartographie, intensité de l’antipatinage, et rapport engagé. Par pressions successives aux commodos de gauche, défileront également consommation moyenne, vitesse moyenne, partiel... etc). Il est possible également de personnaliser les réglages en «rentrant» dans le menu idoine. Pléthore d’informations sont alors accessibles et utiles après une certaine expérience aux commandes de la machine.

Compteur Ducati Diavel

Sous le cintre plat se trouve le deuxième compteur à cristaux liquides mais monochrome. Plus vaste, il affiche tachymètre, compte-tours type barre-graphe, horloge et température moteur. Le tout analogique reste d’une ergonomie perfectible mais correcte.

Menu Ducati Diavel

L’assise propose deux places, une fois le cache de selle passager démonté (fixation par vis btr...) L’ensemble bouge un peu sur la boucle arrière et pourrait être mieux ajusté. En revanche, une fois soulevée, la selle révèle une commande libérant une poignée passager au design acéré.

Poignée Ducati Diavel

Les repose-pieds de l’accompagnant, minimalistes et à peine visibles le long de la coque, se déploient avec grâce. Superbes gestes esthétiques. La beauté du Diable?

Repose pied Ducati Diavel

En ville

Une fois le neiman électronique ouvert, la bête ne semble guère apprécier d’être dérangée. Un grondement ample, étonnamment homologué, rappelle que les vaste entrailles sur lesquelles vous êtes assis ne sont guère dociles. Mode Sport enclenché, le Diavel bondit et martèle l’air de ses coups de pistons. Le rodéo commence et votre permis vire au rouge brique. Chaque portion de route en deux feux est une piste de départ arrêté. L’infernale Ducati zèbre les cieux de l’éclair de son phare et écrase l’environnement de moult décibels. Comment rester à vitesse légale avec une monture à peine domptée? Voila l’équation à résoudre. Simple, passer en mode Urban.

Evidemment. Ainsi muselée, le Diavel gratifie son pilote d’un agrément de conduite appréciable. Même la bande son est différente, moins agressive. On profite alors d’une machine bien plus souple, permettant des évolutions urbaines à 50 km/h à 2.300 tr/min sur le 4e rapport. Et sans trop renâcler. Les regards des passants se font plus amènes, voire envieux.

J’accepterai même l’invitation courtoise de deux admirateurs bleus marines. Et oui, le fruit défendu tente les plus investis des hommes de loi... le Malin à toutes les astuces.

Le premier virage serré rappelle que l’arrière train du Diavel est plutôt généreux. Il convient, à basse vitesse, de forcer l’inclinaison en augmentant l’appui sur le guidon. L’habitude vient vite et fait oublier également un fort empattement. L’interfile est plutôt aisée tant la Transalpine est équilibrée. Reste une largeur de guidon prononcée qui, toutefois, gène peu au quotidien. A l’inverse, manipuler les commodos, clignotants notamment, devient vite pénible tant ceux-ci sont petits. Gants d’hiver prohibés sur cette Ducati.

A l’étroit dans cet univers dense et limité de toute part, le Diavel invite, voire exige de plus vastes terrains de jeux.

Autoroute et voies rapides

Passés les 4.000 tours, le pilotage devient orgiaque. Même sur le dernier rapport. Si la poussée s’atténue après 9.000 tours, bridage oblige, le feu brûle avec force le coeur de l’Italienne. Le dosseret de selle tente de vous garder à bord tandis que les bras s’agrippent à la barre de direction. 260 km/h en pointe. Et sans la moindre protection. Ducati aime déguiser ses sportive en trail ou, ici, en custom. Le carnaval ne fait pas long feu et, revenu à une vitesse légale deux fois moindre, la pression d’air se fait acceptable. Le muselage national conserve une bonne part de sa santé au Diavel dont la centrale ECU spécifique à notre marché sera onéreuse à changer. Fi de ces bassesses administratives, notre démon a soif de virages et ne saurait attendre d’avantage.

Ducati Diavel

Départementales

C’est en le laissant libre que le Diavel donne le meilleur de lui même. Il n’a besoin d’un maître que pour le guider. Ainsi, le power cruiser se fait agile au long des courbes prises à bon rythme. La relative lourdeur disparaît et l’équipage se lance dans une salsa du Démon. Il faut alors prendre garde à ne pas arriver trop vite dans un virage serré, sous peine d’avoir à élargir la trajectoire, le cale-pied blessant le bitume de sa griffe métallique. Ces repose-pieds ne sont pas très long et les talons butent contre le monobras à gauche et les silencieux à droite. En utilisation normale, ce n’est guère dérangeant. En revanche, en pilotage un peu dynamique, cela oblige à rentrer les pieds vers l’intérieur pour ne pas trop limer les bottes. Peu agréable à la longue, d’autant que la garde au sol, bien que respectable pour ce type de machine, montre vite ses limites.

Ducati Diavel

Et les limites, le Diavel n’en a que faire! Son caractère démoniaque pousse son pilote à tester et abuser tant et plus du souffle rauque, de la force brute de son coeur V2. Même bridé, le couple disponible maltraite méchamment, mais pour notre grand plaisir, les 240 mm de large du boudin arrière. La monte de Pirelli Diablo (!) Rosso II confère un grip excellent et le profil assez sport laisse une maniabilité appréciable dès que le rythme s’accélère.

En cartographie Normale, le muscle bike donne accès à toute la puissance disponible. Mais pour un comportement moteur encore plus explosif, activez le mode Sport. Ce dernier ouvre en grand les stalles des enfers et enlève toutes brides aux étalons qui en sortent. Les lignes droites vous aspirent et ça sent le souffre pour le reste du papier à points.

Une bonne raison pour découvrir le Diavel dans un rôle plus léger. Car musarder est également possible à son guidon. Tout comme réaliser une escapade dominicale. L’Italienne saura alors vous séduire de ses vocalises profondes et son confort assez inattendu. Avenante, elle restera à tout moment prête à éreinter la première courbe qui passe.

Ducati Diavel

Sur l’angle, la remise des gazs en grand engendre parfois de légères dérobades, sous la surveillance de l’antipatinage. 13 mkg de couple passent en effet à la roue arrière et demandent un certain niveau de réalisme... Le DTC, très réactif, n’est pas de trop pour éviter les glissades, tant en ville que sur route. Idem pour l’excellent freinage des étriers avant qui stoppent l’élan diabolique avec force et endurance. L’arrière est plus timide et demande à «casser» la cheville pour réagir, en raison d’une position des pieds très horizontale. Logique pour un custom.

Arrière Ducati Diavel

Partie-cycle

L’équipement embarqué, fourche inversée de 50 mm (!) et amortissement de qualité sont à la hauteur des performances du Diavel. Le cadre mixte offre une rigidité maximale et l’ensemble laisse filer sereinement l’équipage, tant en grande courbe que lors des changements d’angle rapide.

L’amortisseur Sachs réagit finement dans toutes les conditions, hormis au passage de ralentisseurs épais que le Diavel apprécie plus modérément.

Freinage

L’attaque des étriers est progressive mais le freinage devient vite mordant si l’on insiste à peine. Neutre à la prise des leviers sur l’angle, le Diavel est facile à diriger, peut être même trop au vu de ses capacités dynamiques. On oublie vite à son bord que c’est bien un custom de 240 kg que l’on pilote.

Freins Ducati Diavel

Confort/Duo

Certainement la plus confortable de la gamme. Comme quoi l’enfer peut être accueillant... pour son pilote. Les superbes accessoires passager tiennent plus de l’esbroufe à l’italienne que d’une réelle efficacité. Pour un déplacement urbain, ou péri-urbain limité si votre accompagnant est lui aussi subjugué par votre monture, la seconde place pourra convenir. Au delà... c’est du satanisme.
Vous pourrez alors, sous la pluie, le marquer du sceau de l’infamie, maculant son dos de projections de toutes sortes. La boue, c’est bon pour la peau, c’est bien connu. Mais alors cette jolie bavette à diodes? C’est du design Monsieur !

Consommation

Le Diable demande son lot d’esprit de pétrole distillé. Mais pas plus que de raison pour un 1200 cm3 caractériel. De 7 à 8 litres au 100 km. Soit une autonomie frisant les 200 km. Evidement si vous le provoquez, attendez vous à être corrigé à la pompe bien plus fréquemment.

Echappements Ducati Diavel

Conclusion

Un plaisir mécanique de tous les instants, voila ce que propose cette machine, limitée par d’autres aspects. Belle à se damner, l’infernale italienne exigera effectivement de vous un pacte. Oubliez les aspects pratiques, la versatilité, le duo. Le Diavel est exigeant mais sait rendre en plaisir ce qu’il prend en exclusivité. A réserver aux plus expérimentés, cette surprenante Ducati vient bousculer le segment du custom à la sauce testostérone.

Yamaha à certes relancé son superlatif VMax : 200 chevaux et 16,6 mkg de couple... mais aussi 310 kg et 21.990 € pour l’acquérir! Moins extrême, une Harley-Davidson V-Rod Muscle noire exige 18.990 € mais reste à des kilomètres des capacités et qualités dynamiques du Diable de Bologne.

Affiché à un tarif d’appel de 16.990 €, le Diavel joue extrêmement bien placé. D’autant que des versions encore mieux finies achèveront sans doute de séduire les plus récalcitrants. Ainsi, Diavel carbon noir à 19.990 €, Diavel carbon rouge à 20.390 € et futur Diavel Cromo, vendu 18.990 € dès avril 2012 sauront prendre encore quelque part de marché. Les plus fortunés ou possédés opteront pour la version AMG tarifée à 25.990 €. En évitant tout de même de trop tirer le diable par la queue.

Points forts

  • Caractère moteur diabolique
  • Partie cycle
  • Equipements et finitions
  • Qualité de l’assistance électronique
  • Sonorité démoniaque

Points faibles

  • Tableau de bord scindé en deux
  • Lisibilité des écrans
  • Exclusivité

La fiche technique Ducati Diavel

 

Les avis dans le test motards Ducati Diavel

Concurrentes : HD VRod muscle, Yamaha VMax