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Histoire constructeur : Rudge

Inventeur de la transmission CVT pour les motos, vainqueur du TT...

Un nom qui a laissé des traces dans le monde de la collection moto et auto

Histoire constructeur : RudgeFondée en 1894 par la fusion de deux fabricants britanniques de vélos, la marque Rudge produisit des motos entre 1911 et 1946. Vous pensez donc probablement qu'il s'agit là d'une de ces centaines de marques de motos anglaises, telles qu'on peut les découvrir au fantastique National Motorcycle Museum de Birmingham et que sans le travail d'historiens ou de pervers nostalgiques, Rudge aurait sombré dans l'oubli. Grave erreur de jugement, jeune lecteur, car l'apport de Rudge à l'histoire de la mobilité est absolument considérable et va bien plus loin que les deux premières places au Senior TT de l'Île de Man en 1930 (et, la même année, des trois premières places au Junior TT), suivies en 1931 par les deux premières places au Lightweight TT, puis, en 1932, par les secondes et troisièmes places à la même épreuve.

Non, Rudge, c'est bien plus que ça. Car outre la première transmission motocycliste à variation continue (CVT), Rudge nous a aussi laissé ça :

Roues Rudge Borrani sur Ferrari Daytona

La Ferrari Daytona ? Le V12 Colombo ? La peinture verte Verde Germoglio (vert bourgeon, qui a été officiellement au nuancier Ferrari à l'époque, à la référence d'usine 20G-465 pour ceux qui aiment la précision) ? Que nenni !! Quoi alors ? Les roues, les mecs, les roues...

Vélos, roues, motos... et variateur !

Très vite, les dirigeants de Rudge ont cru dans la diversification. La firme de Daniel Rudge, après les vélos, a commencé par produire des roues rayonnées pour automobiles ; les rayons étaient démontables et réglables et ces roues avaient la réputation d'offrir une excellente rigidité. Le succès arriva donc rapidement.

Une franchise italienne fut créée en 1922 : la Rudge-Withworth Milano. C'est même avec ces roues qu'Enzo Ferrari gagna une des courses disputées en 1924 et, ensuite, la franchise fusionna dans une autre marque, Borrani, qui devinrent la monte standard sur les Ferrari quelques années plus tard. En toute logique, Maserati suivit le mouvement et aujourd'hui, dans le monde de l'automobile de collection, des roues Rudge ou Borrani montées d'origine sur une auto classique augmentent sa valeur. Mais revenons aux motos...

On a dit que la production des motos Rudge avait débuté en 1911 : c'est exact. Mais pendant deux ans, ils s'étaient fait la main en revendant des motos Werner sous leur propre nom. Werner était une marque peu connue, conçue par deux frères (Michel et Eugène) français, mais habitant d'abord en Russie avant de revenir à Paris et leur machine, produite de 1897 à 1908, était sommaire : en gros, un petit monocylindre de 216 cm3 positionné verticalement au-dessus du pédalier d'un gros vélo. Fans de technologie, les gens de chez Rudge voyaient là un beau potentiel d'optimisation. C’est ainsi que la maîtrise des roues et des rayons permit à Rudge d'inventer, en 1911, la Multi, la première moto avec une démultiplication variable, utilisant une poulie de transmission à taux variable, fixé en sortie de boîte, un peu comme sur une mobylette. Rudge appela sa technologie MultiGear.

 Rudge Muiltigear 750 de 1920

Dès 1912, Rudge proposait cette technologie sur une 500 et une 750 et gagna le TT en 1914 avec une machine équipée de cette transmission. Rapidement, d'ailleurs, cette technologie fut interdite au TT. On mesure l'inventivité de Rudge en réalisant que la première transmission CVT équipant une voiture apparut sur une DAF en 1955. De manière anecdotique, on notera que Rudge a produit un petit cyclecar à 4 roues, animé par un monocylindre de 750 cm3 et doté de la transmission MultiGear : il ne fut produit qu'en 1912 et 1913, mais cela montre bien la stratégie de l'entreprise de contribuer à une mobilité tous azimuts.

Rudge it, do not trudge it...

Tel était le slogan de la marque, un jeu de mots facile et le verbe "to trudge" signifiant quelque chose entre "patauger" et "avancer péniblement", en d'autres termes, rouler en Rudge était le meilleur moyen de ne pas faire du surplace.

C'est ainsi que les débouchés en compétition de la technologie Multigear furent réduits. Rudge développa alors sa propre boîte de vitesse à 4 rapports (dès 1923, après avoir utilisé des boîtes 4 faites par Jardine à partir de 1915). Ainsi, Rudge développa la Rudge Four, pas pour 4 cylindres (il s'agissait d'un mono de 325 cm3), mais pour 4 vitesses et 4 soupapes.

Rudge du TT des années 30

Dans les années 30, Rudge développa une gamme de machines routières, des 250, 350 et 500 cm3 et s'illustra encore par quelques victoires marquantes en compétition, mais l'entreprise commence alors à se faire rattraper techniquement par des concurrents toujours plus nombreux. Peut-être payait-elle là sa stratégie de diversification à outrance.

En témoigne ce chant du cygne : en 1938, Rudge sponsorisa un jeune homme, Billie Flemming, pour battre le record du monde de distance couvert en vélo en un an. Le record fut battu... et il tient toujours, avec 47 642 kilomètres.

En 1939, la production de motos cessa et l'outillage industriel fut consacré à la production d'armement en vue du conflit. La production de motos ne reprit jamais. Après la Seconde Guerre Mondiale, l'outillage de production de vélos fut racheté par une autre marque célèbre : Raleigh, qui fut plus connue pour ses vélos que pour ses motos...

Rudge de l'Ulster GP de 1934

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