Tourist Trophy, l'épreuve à haut risque
IOMTT : un parcours mythique de plus de 60 km sur l'Ile de Man
Un record de morts pendant la course avec une 150e victime en 2022
L’année 2019 marque la 100e édition du Tourist Trophy, l’épreuve mythique disputée sur l’Ile de Man. Mythique, elle l’est aussi de par sa dangerosité : de nombreux morts ont été recensés, notamment en raison du Mad Sunday, une journée où n’importe qui dans le public peut prendre la route sur la Mountain Road entre Ramsey et Douglas.
Ces tragédies n’ont cependant rien d’anecdotique, puisqu’elles remettent régulièrement en cause la raison d’être d’une épreuve de laquelle le vainqueur le plus fructueux, Michael Dunlop, a pu s’imposer à 29 reprises !
Collier et Fowler inaugurent le Tourist Trophy
Si 1907 marquait la première édition de l’Isle of Man TT Race, l’appellation Tourist Trophy remonte à trois ans plus tôt. Une nouvelle loi venait alors de réglementer les limitations de vitesses au Royaume-Uni, ce qui avait poussé l’un des membres du gouvernement de l’époque, Julian Orde, à consulter les autorités de l’Ile pour autoriser la tenue de compétitions sur des axes de circulation.
Cette consultation a mené à l’apparition d’une loi en 1904, baptisée Highways (Light Locomotive) Act. Le Gordon Bennett Eliminating Trial a ensuite été organisé deux années de suite, pour être remporté par Clifford Earl à deux reprises. La première course de Tourist Trophy sur quatre roues, la RAC Tourist Trophy, allait suivre le mouvement.
Disputée sur le St John’s Short Course de 1907 à 1910, le Tourist Trophy a d’abord permis à Charlie Collier et sa Matchless-JAP de s’imposer en monocylindre, Rem Fowler l’imitant en bicylindre, au guidon d’une Norton dotée d’un moteur Peugeot. Le frère de Charlie Collier, Harry, était également en course, mais des problèmes moteurs avaient réfréné ses ardeurs. Or, le vainqueur Collier disposait d’une machine avec pédales, ce qui lui avait grandement facilité la tâche. Du moins, le choix d’interdire cette astuce l’année suivante allait dans ce sens.
Quant à Fowler, c’est grâce à un spectateur qu’il a pu remporter la course. En proie à de gros soucis techniques, il s’était résigné à abandonner la partie. Or, en apprenant qu’il menait la course, il est reparti au charbon en signant en prime le meilleur tour, malgré un temps global 13 minutes plus modeste que celui de Collier.
Le Tourist Trophy esquisse ses normes
En 1911, le tracé actuel, le Snaefell Mountain Course qui comporte plus de 60 km et 264 virages, sera adopté pour la première fois. Les catégories n’étaient pas aussi définies qu’aujourd’hui : après les deux premières éditions où les bicylindres étaient opposés aux monocylindres, on parlait de 500 monocylindres et 750 bicylindres en 1909 comme en 1910.
C’est d’ailleurs en 1911 que la distinction Junior/Senior TT est apparue, avec une première en prime : deux compétitions distinctes avec d’un côté les monocylindres 300 cc et les bicylindres 340 cc, de l’autre les monocylindres 500 et les bicylindres 585 cc. Les limitations de cylindrée ne feront plus qu’une par catégorie l’année suivante : 350 cc en Junior TT, 500 cc en Senior TT.
En 1922, le Lightweight TT viendra rejoindre les catégories existantes. Une course supplémentaire apparaissait, remportée pour la première fois par Goeff Davison, un journaliste qui concourrait sur une Levis deux-temps.
Le Sidecar TT suivait le mouvement en 1923. Quatorze side-cars se sont donc affrontés, alors que le succès n’était pas attendu pour cette nouvelle catégorie. Freddie Dixon et Walter Perry formaient le duo gagnant pour cette première.
L’année suivante, l’Ultra-Lightweight TT venait seconder l’épreuve du Lightweight. La philosophie de la course, inciter des modèles de série à concourir, permettait à cette nouvelle catégorie de se créer pour des machines de 175 cc. En revanche, en 1926, le side-car avait disparu et trop peu d’inscriptions à l’Ultra-Lightweight ont fait capoter cette épreuve. Celles-ci déserteront le Tourist Trophy jusqu’à l’épreuve de 1939 incluse, la seconde guerre mondiale venant ensuite empêcher l’épreuve de se tenir jusqu’en 1947.
L’après-guerre ouvre la voie aux Clubman et séduit la FIM
Après huit ans d’absence, le Tourist Trophy revenait sur le devant de la scène. Les catégories avaient été doublées, pour accueillir les catégories Lightweight, Junior et Senior habituelles sous le signe Clubman, qui accueillait des roadsters quasiment identiques à ceux que vous pouviez croiser sur la route.
L’édition 1948 conservait ses catégories et accueillaient un nombre record de 100 participants. Rien de tel pour attirer l’attention, puisqu’entre 1949 et 1976, l’épreuve avait sa place au sein du championnat du monde FIM de Grand Prix moto, l’équivalent du MotoGP actuel, qui avait notamment consacré Giacomo Agostini 5 années de suite de 1968 à 1972.
Ne vous y trompez pas : les Britanniques ont également eu leur heure de gloire, voire plus encore : Geoff Duke s’imposait à trois reprises en Senior TT et à deux autres reprises en Junior TT, parvenant à remporter en 1951 les deux catégories. Dans ces deux catégories, John Surtees s’illustrera également, dont 4 fois en Senior TT.
Cependant, dans cette période, le plus fructueux avait sans conteste été Mike Hailwood, vainqueur en Lightweight sur 125 et 250 cc, tout comme en Junior TT. La catégorie Senior TT l’a même vu s’imposer à six reprises, dont cinq consécutives de 1963 à 1967.
Une catégorie supplémentaire, la Clubman 1000 cc viendra se greffer aux autres en 1949, 1950 et 1953. En revanche, plusieurs années, dont 1958, perdent plusieurs catégories, tombant pour celle-ci à deux seules, Junior et Senior. L’année suivante, deux nouvelles appellations intègrent le Tourist Trophy, les 350 et 500 cc Formula One, qui ont permis aux manufacturiers britanniques de bénéficier de leur quart d’heure de gloire. Si vous trouviez cela compliqué, sachez que cela ne faisait que commencer dans les années 60 ! Comme vous pouvez le voir, les variations y ont été nombreuses...
Production | Ultra Lightweight | 50 cc | Sidecar | Lightweight | Junior | Senior | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1960 | X | X | X | X | X | ||
1961 | X | 125 / 250 | X | X | |||
1962-1966 | X | X | 125 / 250 | X | X | ||
1967 | 250 / 500 / 750 cc | X | X | 125 / 250 | X | X | |
1968 | 250 / 500 / 750 cc | X | 500 / 750 cc | 125 / 250 | X | X | |
1969-1970 | 250 / 500 / 750 cc | 500 / 750 cc | 125 / 250 | X | X |
Fait peu surprenant, de nombreuses dénominations de catégories ont aussi fleuri durant les décennies suivantes, avec en prime, sponsoring oblige, la présence d’un généreux partenaire au sein des catégories. En 2016, les différentes catégories mêlent Superbike, Sidecar, Superstock, Supersport, TT Zero, Lightweight ou encore Senior TT.
3 anecdotes sur le Tourist Trophy que vous ignoriez peut-être
Traditionnellement, la compétition de North West 200 fait figure de banc d’essai avant d’aborder le Tourist Trophy pour ses concurrents. A une exception près : si le Tourist Trophy se présente sous la forme d’un contre-la-montre, ce n’est pas le cas du North West 200, qui se dispute non pas sur l’Ile de Man mais en Irlande du Nord.
En 2001, l’épreuve a dû être annulée en raison… de l’épidémie de fièvre aphteuse qui sévissait alors ! Le Tourist Trophy n’était pas la seule compétition annulée : le championnat britannique des rallyes avait tout bonnement été rayé de la carte.
Terminons enfin sur la différence entre le Manx Grand Prix et le Tourist Trophy. Le Manx Grand Prix, ou MGP pour les intimes, emprunte le tracé du Tourist Trophy. L’événement se résume en une alternative plus axée sur la compétition amateur vis-à-vis du Tourist Trophy. Organisé en août/septembre au lieu de fin mai et début juin, le Manx Grand Prix est véritablement à part de l'IOMTT.
En 2019, le TT a vu 46.000 spectateurs assister à la course, l'un des records de fréquentation de l'épreuve en dix ans alors que l'on attend encore plus de monde en 2020. Les Anglais représentent naturellement 58% des spectateurs.
L'édition 2022 a malheureusement vu cinq morts supplémentaires pour passer la barre des 150 morts sur l'épreuve. Et un nouveau mort en 2023 s'est ajoutée à la longue liste des décès.
Les records de victoires sur le Tourist Trophy
- 29 victoires : Michael Dunlop
- 26 victoires : Joey Dunlop
- 23 victoires : John McGuinness
- 17 victoires : Dave Molyneux
- 16 victoires : Ian Hutchinson
- 14 victoires : Mike Hailwood, Ben & Tom Birchall, Peter Hickman
- 12 victoires : Bruce Anstey
- 11 victoires : Steve Hislop, Phillip McCallen
- 10 victoires : Giacomo Agostini, Robert Fisher, Stanley Woods, Ian Lougher
- ...
Les motos les plus victorieuses sur le Tourist Trophy
- Honda : 266 victoires
- Yamaha : 238 victoires
- Suzuki : 112 victoires
- Norton : 94 victoires
- Kawasaki : 53 victoires
- BMW : 46 victoires
- MV Agusta : 34 victoires
- Triumph : 23 victoires
- Aermacchi : 19 victoires
- AJS : 19 victoires
- ...
Les records de vitesse en course sur le Tourist Trophy
La première barrière à être battue a été les 100 mph de moyenne (161 km/h), avec Bob McIntyre. Puis viendra la barrière des 200 km/h. Aujourd'hui certains pilotes tournent à plus de 208 km/h de moyenne au tour en supersport !
Catégorie | Pilote | Moto | Année | Temps | Vitesse moyenne |
---|---|---|---|---|---|
Record absolu | Peter Hickman | BMW M 1000 RR | 2023 | 16:36.114 | 218.447 km/h |
TT Superbike/Senior TT | Peter Hickman | BMW S 1000 RR | 2018 | 16:42.778 | 217.989 km/h |
Supersport | Michael Dunlop | Yamaha YZF-R6 | 2023 | 17:21.605 | 209,863 km/h |
Lightweight TT / Supertwin | Michael Dunlop | Paton S1-R | 2018 | 18:26.543 | 197,546 km/h |
250 cc | John McGuinness | Honda | 1999 | 19:08.200 | 190,370 km/h |
125 cc | Chris Palmer | Honda | 2004 | 20:20.870 | 177,864 km/h |
TT Zero | Michael Rutter | Mugen | 2019 | 18:34.172 | 196,195 km/h |
Superstock TT | Peter Hickmann | BMW M 1000 RR | 2023 | 16:36.115 | 218.447 km/h |
Sidecar TT | Ben & Tom Birchall | Honda LCR | 2023 | 18:45.850 | 194,159 km/h |
Newcomer | Glenn Irwin | Honda CBR1000RR-R | 2022 | - | 208,973 km/h |
Féminine | Jenny Tinmouth | Honda CBR1000RR Fireblade | 2010 | 18:52.420 | 193,032 km/h |
Commentaires
Longue vie au TT !
05-07-2017 12:15.
N'en déplaise aux alarmistes et autres sécuritaires de tout poil...
moins que ca et surtout beaucoup moins que sur l everest ou simplement en accident menagés, vive cette course, cette ile et toutes les autres road races ou regne le plaisir et le respect entre tout les pilotes quel qu'en soit le niveau ( pas comme en France)
16-07-2017 11:32Le danger (réel ou perçu) est un des arguments de vente de l'épreuve.
16-07-2017 16:13