De Tanger à Agadir, la route côtière au Maroc
800 kilomètres en bordure du continent africain
Un périple entre villes modernes et villes traditionnelles, le long de l'Atlantique
Terre ! Que la traversée soit courte (une petite heure en arrivant d'en face, d'Algesiras sur la côte espagnole) ou longue (une bonne quarantaine d'heures en provenance de Sète, comme nous l'avons expérimenté), l'accès au Maroc se fait par bateau. Avec un peu de chance, votre arrivée aura été saluée avec panache par une horde de dauphins, très nombreux dans le détroit de Gibraltar et aussi joueurs que leur réputation le laisse entendre. Sur le nouveau port de TangerMed, le passage à la douane est désormais très structuré, même s'il n'est pas rare de devoir passer une ou deux heures pour toutes les motos. Aucun passage particulier n'est mentionné pour les motos, mais il est communément admis, même par les douaniers eux-mêmes, qu'elles passent devant les files de voitures. TangerMed est un port en eaux profondes crée pour le transport de personnes (un peu) et le business (beaucoup), entre 2004 et 2007. Une fois passé la douane, la zone de TangerMed est moderne : on y trouve de quoi se restaurer, changer de l'argent et faire le plein. Comptez en ce moment (fin 2015) environ 1 euro (10 dirham) le litre de Super.
TangerMed, son autoroute, ses radars...
Ceux qui aiment rouler dans des zones peuplées de panneaux "pour votre sécurité" ne seront pas dépaysés. Dans des paysages montagneux déjà dépaysants, de larges autoroutes à 4 voies dessinent de belles arabesques sur le relief. On serait tenté de... mais ce ne serait pas raisonnable, car la présence policière est très soutenue. Radars fixes et automatiques sont légion. On en profite donc pour s'imprégner du paysage. Ce qui frappe, outre la beauté du site, c'est la modernité des lieux. A l'est de TangerMed, Tetouan étale ses quartiers de villégiatures sur des kilomètres et la douceur de vivre en bord de mer est palpable. A l'est, vers la ville de Tanger, on double nombre d'exploitations agricoles intensives et d'usines, tandis que les camions représentent une partie importante du trafic autoroutier. Sauf à vouloir visiter Tanger, on aura donc intérêt à descendre plein Sud pour découvrir des lieux plus en phase avec l'idée de vacances, ou tout simplement de voyage à moto. Kenitra, Rabat, Casablanca, les panneaux annonçant des villes aux consonances exotiques se succèdent les uns aux autres. On constate que la limitation de vitesse à 120 km/h sur l'autoroute est globalement respectée à part par quelques SUV sportifs aux vitres teintées qui doivent avoir de quoi négocier... Chemin faisant, les stations service sont relativement nombreuses sur l'autoroute, à raison d'une tous les 40 ou 50 kilomètres. On y trouvera de quoi se restaurer à des tarifs nettement plus avantageux que des prestations similaires en France. Comptez l'équivalent de 5 euros pour une grosse assiette de kefta, des galettes de blé et du thé à la menthe.
Après 300 kilomètres de route, nous faisons escale à Mohammedia (qui s'appelait auparavant Fedala), une ville construite au XIVème siècle et qui s'apprécie pour sa Casbah (vieille ville historique) à taille humaine. Juste en face de l'entrée de la vieille ville, nous descendons à l'hôtel Riad Jnane Fedala, La patron a remis plus d'un an à refaire toutes les mosaïques en faïence du grand salon. En haut, les chambres séduisent par leur décoration traditionnelle, à base de couleur ocre et bleu. Bienvenue au Maroc !
Casablanca, la capitale
Cette petite halte sera profitable avant d'affronter, le lendemain, le chaos de la circulation de Casablanca. La capitale du Maroc ne semble pas posséder les axes de circulation nécessaires au trafic généré par les plus de 4.2 millions d'habitants qui y vivent. Les grands boulevards sont saturés et les policiers font ce qu'ils peuvent pour fluidifier le trafic autour de la gare centrale. On découvre, au nord de la ville, une avenue remplie de concessions Ferrari, Porsche et Bentley.
Casablanca, cependant, est intéressante à plus d'un titre. Son patrimoine architectural est impressionnant et les influences Art Déco sont encore visibles sur nombre d'immeubles anciens, bien mis en valeur dans le film Casablanca (1942) avec Humphrey Bogart et Ingrid Bergman. La Grande Mosquée est une autre attraction incontournable : la mosquée Hassan II, véritable symbole de la ville, est érigée en partie sur la mer et possède le minaret le plus haut du monde (210 mètres de haut). Construite en 1986, c'est également la cinquième plus grande mosquée du monde. Elle a nécessité la contribution de 10 000 ouvriers et artisans, qui ont réalisé 80 millions d'heures de travail.
Quitter Casablanca oblige à franchir, encore une fois, des zones remplies d'usines et de fermes intensives et à ne pas douter, en dépit d'inégalités criantes entre les villes et les campagnes, de la vitalité économique du Maroc. Raffineries, usines de traitement de souffre et autres usines de conditionnement de sardines vous titillent les narines. Une cinquantaine de kilomètres au sud de Casablanca, la route devient plus agréable et bucolique. Petite curiosité géographique : la présence de prés salés en bordure de mer.
Essaouira, la bien dessinée
Premier vrai coup de coeur depuis le départ ! Essaouira tient son charme d'une accumulation d'influences: comptoir portugais du 16ème siècle, redessinée par le Sultan Mohamed ben Abdellah fin XVIIIème en faisant appel à des architectes internationaux de renom, port de pèche artisanal extrêmement actif, ex-protectorat français, ville artistique et paradis des surfeurs.
De ce mélange naît une ambiance indescriptible : l'activité des dizaines de petits bateaux bleus s'agglutinant dans le port aux remparts à la Vauban survolé par des centaines de mouettes, la sérénité apportée par des chats gras et paresseux faisant la sieste sur les filets de pêche, tout cela contraste avec le calme des galeries d'art à seulement quelques dizaines de mètres de là en lisière de la médina classée au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2001. Orson Welles a tourné Othello à Essaouira en 1952. En 2004, Ridley Scott y a reconstitué la Jerusalem médiévale pour le film Kingdom of Heaven. Et on s'y verrait bien rester plus longtemps.
Esssaouira - Agadir : 180 kilomètres de bonheur
De nouveau, la route pointe plein sud. Large, sinueuse, bien revêtue, à flanc de montagne sur la fin : que du bonheur. On fera attention aux contrôles de vitesse qui peuvent avoir lieu dans quelques gros villages, mais pour le reste, quel plaisir de flâner à 80 ou 90 km/h en se laissant porter par le vent, les embruns, l'alternance des couleurs, en s'arrêtant de temps en temps pour se mettre à l'ombre d'un arbre perdu dans un sol rocailleux pour s'imprégner de ce paysage.Au cap Rhir, les montagnes du Haut-Atlas se jettent dans l'Océan Atlantique. Au bout de trois heures, l'étape du jour arrive presque trop tôt. Agadir, la ville blanche a été massivement détruite par un tremblement de terre en 1960. De fait, la ville est moderne et surprend d'abord par son alignement d'hôtels en bord de mer, contribuant à créer une ambiance assez impersonnelle.
Conclusion
Cet itinéraire permet, en quelque sorte, de faire son entrée dans le Maroc. Ce n'est pas injuste de dire que le sentiment d'évasion arrive vraiment au fur et à mesure que l'on se déplace vers le sud, le nord industrialisé et urbanisé étant moins compatible avec l'idée que l'on se fait du voyage à moto. Les balades bucoliques sur la route côtière, le long de l'Océan Atlantique, permettent déjà de s'imprégner de la douceur de vivre marocaine. Concernant la logistique, essence, restauration, hébergement, tout est facile.
Commentaires
Merci Philippe pour ce récit de notre voyage commun au Maroc
29-11-2015 10:42Hervé & Hélène en Pacific Coast