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Moto et tourisme : la face cachée de la FIM

La Fédération Internationale de Motocyclisme (FIM) s'occupe aussi des grands rassemblements touristiques internationaux

Cette année, la commission tourisme de la FIM se penche sur le cas du rallye de Jordanie

Damiano Zamana, Directeur de la commission tourisme de la FIMDans le cadre de la troisième édition du Jordan Riders Rally, qui s'est déroulé les 29 et 30 avril derniers, la FIM avait dépêché sur place Damiano Zamana, le Directeur de la commission tourisme envoyé en Jordanie en qualité d'observateur. Son rôle, déterminer si le rallye de Jordanie mérite d'être inscrit au calendrier international de la FIM. Sur les bords de la mer Morte et de l'une des trois routes du sud, nous avons pu rencontrer cet Italien passionné de découvertes et de voyages à moto.

Le Repaire des motards : Damiano, vous dirigez une commission tourisme au sein d'une fédération à vocation sportive. Vous ne trouvez pas ça insolite ?

Damiano Zamana :

Vu de l'extérieur, en effet, cela peut paraître curieux. Mais la FIM a une fonction internationale et se doit d'avoir une vision globale de la moto. C'est pourquoi, avoir des épreuves sportives majeures, c'est important, mais à qui s'adressent ces courses ? Elles s'adressent aux motards de la rue, si je puis dire. A tout ces gens qui, de par le monde, utilisent une moto pour se déplacer ou bien parce qu'ils aiment ça. Si la FIM ne s'occupe pas de fédérer les motards, ni de cristalliser leur passion dans des événements de grande ampleur, c'est indirectement le sport moto qui en souffrira à terme.

C'est pour cette raison que la commission Touring and Leasure a été créée au sein de la FIM ?

Oui et non. En réalité, la commission que je dirige depuis 2014 existe depuis 1950. C'est donc une vieille entité au sein de la FIM. Mais il faut bien avouer qu'il y a encore quelques années, cette entité ne s'occupait pas de grand-chose. Et puis, il y eut cette grande assemblée de la FIM à Macao en 2010. C'est lors de ce rassemblement que nous avons décidé de renforcer l'action de cette commission. Il faut également préciser que la FIM possède d'autres commissions qui ne traitent pas de questions sportives, dont une s'occupe de la sécurité des motards et plaide pour le port du casque dans le monde entier. Nous avons aussi une commission qui gère les questions d'ordre environnementales.

La FIM n'encadre pas que les compétitions mais également certains rassemblements touristiques internationaux

Suite à cette assemblée de Macao, quelles furent les lignes directrices dictées par la commission tourisme de la FIM ?

Nous souhaitons tout simplement promouvoir le tourisme à moto, développer ce qui existe et inciter toujours plus de pays à créer des choses autour de la moto. En Europe, il y a environ 37 millions de motards. C'est évidemment le continent le plus représenté. Mais notre action touche également des pays dans lesquels la moto est encore à l'état embryonnaire. Nous travaillons aussi récemment sur les événements vintage. Enfin, une dernière voie de développement concerne tout ce qui touche à la moto tout terrain vue sous un angle touristique. Je veux parler des voyages qui s'adressent aux amateurs de trail, dont le nombre est croissant. Il y a aussi la mode du vintage...

Quel exemple type vous vient à l'esprit quand vous parlez de pays où la moto est en pleine croissance ?

L'année dernière, je me suis rendu au Zimbabwe, pour la sixième édition du Tour of African Nations qui rassemble des motards venus de différents pays africains. Le Zimbabwe est un pays très pauvre où l'on ne s'attend pas à trouver un événement moto d'envergure internationale.

Cela veut dire que la FIM travaille à la mise en oeuvre de nouveaux événements ?

Non, nous travaillons sur des événements qui existent déjà. Notre commission travaille chaque année au contact des fédérations nationales à la recherche d'événements intéressants. Lorsque quelque chose de nouveau existe, nous allons sur place constater comment les choses se déroulent et, éventuellement, apporter notre expertise.

Vous avez parlé tout à l'heure des événements vintage. C'est quelque chose d'important pour la FIM ?

Il y a depuis quelques années une mode du vintage et des événements qui se créent autour de ça. A partir du moment où un domaine permet de rassembler des motards venus de différents pays, alors oui, bien sûr que l'on regarde ça de près. Dans ce secteur, on travaille conjointement avec la Fédération internationale des véhicules anciens, la FIVA. Cette fédération s'occupe du règlement technique des événements vintage et nous en assurons la promotion. L'un des événements majeurs du genre est les 800 km d'Argentine, qui regroupe des motos japonaises des années 1970 et 1980, mais aussi des Royal Enfield ou encore des Moto Guzzi. Il y a un autre événement important de ce genre-là en Malaisie.

L'action de la FIM ne se cantonne pas à l'Europe et concerne la moto en général, du vintage au tout-terrain

Quels sont les critères requis par la FIM pour qu'un événement obtienne son approbation ?

D'un point de vue technique, nous sommes assez libres. On ne réclame jamais d'un événement qu'il soit réservé à tel ou tel type d'engins. Nous laissons ça aux organisateurs privés qui souhaitent orienter leur manifestation vers un type spécifique de motos. En revanche, nous sommes très regardants sur la manière dont se déroule chaque événement. Pour nous, le point crucial est que chaque manifestation soit capable de donner une bonne image de la moto dans le monde entier. Nous sommes donc assez stricts sur les questions de sécurité et nous observons par exemple si un événement donné dispose de l'approbation des autorités locales, voire le support de la police. Ce que nous voulons éviter à tout prix, c'est d'offrir le label de la FIM a des manifestations qui laissent libre cours à des motards de faire des wheelings sur route ouverte, de rouler sans aucune protection, ou bien de causer des nuisances sonores à toute une population.

Ce sont les seuls critères exigés par la FIM ?

Non, notre activité s'inscrit dans une logique de long terme. Nous ne nous associons donc qu'avec des événements durables, organisés chaque année et dont nous constatons la croissance régulière. Nous faisons aussi attention à ce que les événements moto soient organisés dans le respect de l'environnement. Enfin, dernier critère capital, que l'événement en question possède une portée internationale et attire des motards de plusieurs nationalités.

Organisation, portée internationale et image de la moto sont les principaux critères de la FIM

Comment la FIM procède-t-elle lorsqu'elle prend connaissance d'un nouvel événement ?

Nous venons systématiquement constater sur place comment les choses se déroulent. Nous échangeons avec les organisateurs. Nous donnons clairement notre avis et, éventuellement, nous livrons des axes de développement. Parfois, une seule visite ne suffit pas et un événement a besoin de temps pour mûrir un peu.

Les événements retenus par la FIM obtiennent au final un financement ?

En effet, nous supportons les événements qui obtiennent le label de la FIM. Ce financement est variable selon le type d'événement donné et le projet qu'il défend.

En quelques chiffres, que représente la commission tourisme à la FIM ?

14 personnes travaillent au sein de cette commission. Il s'agit de personnes qui viennent d'un peu partout. Nous avons un collaborateur en Angleterre, un autre en Espagne et un autre au Costa Rica. Chaque année, la commission tourisme supporte 4 événements qui font partie de cette commission depuis très longtemps. Ce sont des événements classiques, pour nous. Et tous les ans, nous allons visiter en moyenne 5 nouveaux événements. Enfin, notre objectif pour 2017, c'est de pouvoir mettre en place un calendrier regroupant 15 événements de par le monde, en plus des 4 événements classiques de la commission tourisme. Parmi ces 15 événements, nous souhaitons une répartition équitable entre 5 événements vintage, 5 événements touring et 5 événements offroad.

Le Jordan Riders Rally semble bien parti pour recevoir le label FIM

Un calendrier de 15 événements, cela signifie que vous refusez des candidatures ?

Tout à fait. C'est pourquoi nous avons mis en place une charte et que nous allons constater sur place afin de nous assurer de la manière dont les événements sont organisés.

Vous étiez présent lors de la troisième édition du Jordan Riders Rally. Allez-vous accorder le label FIM à cet événement ?

Je pense que c'est bien parti. Peut-être pas dès 2017, mais dans un futur proche, certainement. Le Jordan Riders Rally possède de nombreux atouts. Tout d'abord, c'est un événement qui regroupe déjà des motards venus de nombreux pays différents. Ensuite, les relations du rallye de Jordanie avec les autorités locales sont excellentes. L'épreuve est d'ores et déjà encadrée par la police. Donc d'un point de vue de sécurité, nous sommes déjà satisfaits. Ensuite, pour la FIM, supporter un événement au Proche Orient, une région du monde politiquement agitée, ce serait donner un signe fort qui témoignerait de la volonté de la FIM de développer la moto partout dans le monde. Autre point positif, le fait que des femmes motardes participent déjà à ce rallye. C'est un autre signe d'ouverture. Si l'on doit évoquer les lacunes du Jordan Riders Rally, je pense que cet événement a encore besoin de grandir et de mûrir un peu. C'est vrai d'un point de vue du travail préparatoire en amont de l'événement, mais aussi concernant l'organisation sur le terrain.

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