Essai moto Harley-Davidson Road Glide CVO 117
Bienvenue dans la démesure façon Harley-Davidson
V2, 1923 cm3, 105 ch à 5450 tr/min, 166 Nm à 3500 tr/min, 385 kilos à sec, à partir de 41 290 €
A partir de quand, trop, c'est trop ? Ce que l'on veut dire par là, c'est qu'une grosse Harley-Davidson, ça a longtemps été une 1340. puis une 1450. Puis une 1584 (96 cubic inches). Puis une 1690 (103 cubic inches). Puis la génération des moteurs Milwaukee Eight a donné les 107 (1745 cm3) et les 114 (1868 cm3) et là, ça commençait vraiment à dépoter. Mais ce n'est pas tout : les séries limitées de la lignée CVO (pour Custom Vehicles Operations) ont toujours eu droit à un petit bonus : voici donc venu le moteur 117, qui chapeaute la gamme avec ses 1923 cm3. Ça commence à faire pas mal pour un bicylindre, non ?
Le CVO, c'est du haut de gamme : on n'a pas seulement le plus gros moteur disponible, c'est aussi le plus haut niveau d'équipement et de finition. La gamme CVO comprend cette année les Ultra, Street Glide et Road Glide. C'est cette dernière que nous avions à l'essai.
Avant d'aller plus loin, quelques chiffres : 1923 cm3, plus de 400 kilos en ordre de marche et plus de 41000 € ! Alors, c'est too much ? Ou c'est juste trop bien ? Pour le savoir, rien de tel qu'un essai.
Découverte
La formule n'est pas de moi, mais d'un collègue journaliste (dans un petit fanzine qui organise des manifs) : selon lui, avant, une Harley CVO, c'était "une moto de patron de cirque". Il faut dire qu'entre l'abondance de chromes, les placages de tableau de bord en faux bois façon Plastiwood®, les profondes peintures pailletées, l'engin ne se destinait pas aux âmes introverties.
Depuis peu, changement de programme : les CVO donnent dans une forme de noirceur classieuse qui s'approche de l'esprit "dark custom" si cher à la marque de Milwaukee. Du coup, ça confine presque à une certaine forme de discrétion, qui implique d'approcher la moto pour constater l'ampleur de la différence par rapport à une Road Glide standard ou même Special (celle qui, à l'instar de la Road King Special, a une grande partie de ses composants, moteur, transmission, trains roulants, recouverts de noir). Mais, une fois le nez dessus, on découvre la profondeur des peintures, assez uniques dans le genre et il faut admettre que ça lui donne une sacrée allure.
Maintenant, est-ce qu'il y a une forte différence avec une Road Glide normale ou une Road Glide Special ? Oui, évidemment, mais il faut avoir le nez dessus pour se rendre compte de la différence de finition, de profondeur de peinture et d'équipements.
Par contre, il y a tout de même une différence : la Road Glide CVO dispose et c'est une première dans la gamme Touring Harley, d'une roue avant de 21 pouces.
En selle
680 mm de hauteur de selle : c'est accessible à tout le monde, ça. 385 kilos à sec : ça peut effectivement en rebuter quelques-uns. C'est vrai que lors des manœuvres à l'arrêt, il faut absolument ne pas lui faire prendre de gite sinon, l'affaire peut rapidement se corser. Une fois que l'on a saisi cette facette des choses et que l'on acquit les rudiments de comment bien rouler sur un gros cruiser, on découvre une machine assez docile, plutôt agile et bien équilibrée, bien servie par un moteur souple.
Par contre et en dépit de la roue avant de 21 pouces, on n'a pas de différence notable ici avec une Road Glide normale.
De même au niveau du poste de pilotage, exception faite de l'habillage. On découvre donc un tableau de bord hyper complet, tout comme l'est le système d'info-divertissement Boom Box 6.5, avec GPS, fonction Bluetooth, le tout commandé facilement par deux joysticks aux commodos droit et gauche, une interface tactile et des boutons de raccourci.
Moteur et transmission
Là, ça change et c'est d'ailleurs le coeur de la compréhension de cette CVO. Il y a deux ans, en effet, Harley-Davidson a lancé la génération de moteurs Milwaukee-Eight, disponibles en 107 ci (1745 cm3) et en 114 ci (1868 cm3), selon les versions. Ce faisant, la marque de Milwaukee faisait un bond en avant au niveau des performances et de la douceur de fonctionnement. A la louche, le 107 (100 x 111,1 mm) sort entre 86 et 90 ch selon les machines et les systèmes de refroidissement et d'échappement, ainsi que de 145 à 150 Nm de couple. Le 114, lui, est bon pour un peu plus de 90 chevaux et 155 Nm, avec son moteur qui cote 102 x 114,3 mm. Pour obtenir le 117 (1923 cm3), Harley-Davidson a augmenté l'alésage du 114 : on est donc sur des cotes de 103 x 114,3 mm.
Le site Harley- Davidson France est assez avare en données techniques ; heureusement, nos amis teutons ont des dispositions légales plus rigoureuses (ah, la fameuse rigueur teutonne !). Du coup, on y apprend que le 117 développe 105 chevaux à 5450 tr/min et balance 166 Nm de couple, ce qui commence à faire pour un moteur de moto, dans l'absolu et pour un bicylindre en particulier, même si les chevaux pour un custom, ce n'est vraiment pas ça qu'on recherche en premier. Ce serait même antinomique avec l'esprit custom.
Dans les faits, ce bloc est assez silencieux au ralenti comme en action. Il est extrêmement souple et velouté à très bas régime, acceptant de reprendre sur un filet de gaz, ou même un peu en dessous de 2000 tr/min sur le dernier rapport. Le 117 se montre vraiment consistant dans une plage 3000 / 5000 tr/min et se révèle même vif à "haut" régime. Haut, en rapport à son architecture, ça veut dire entre 4500 et 5500 tr/min.
On aura compris : ce moteur est un régal et oui, il en apporte encore un petit peu plus que le 114.
En ville
Une fois le gabarit et le poids bien intégré, on découvre une machine plutôt bien équilibrée qui se laisse manier assez facilement entre les files de voitures, entendu que le gymkhana ne sera jamais son truc. Souplesse du moteur et des commandes, boîte ferme, mais précise, tout va bien. Comme sur toutes les grosses Harley, l'été met en exergue une petite abondance de remontées caloriques, même si la génération Milwaukee Eight est en progrès par rapport aux précédentes. Malgré sa cylindrée supérieure, il ne chauffe pas plus que les 107 ou 114.
Sur autoroutes et grandes routes
A peine plus de 2000 tr/min en sixième : la CVO 117 trace sa route, impériale. Comme sur toutes les machines à l'influence bagger de la marque, on reprochera éventuellement un petit manque de protection sur le visage, ce qui devient plus pénible à des vitesses que ne pratiquent pas, généralement, les motards américains, donc tout s'explique. N'empêche, pour tracer la route longtemps, un déflecteur sur le haut du carénage n'aurait pas fait de mal.
Pour le reste, c'est le bonheur : position de conduite relax, ergonomie cool, moteur efficace et charmeur, les kilomètres défilent en toute tranquillité.
Sur départementales
C'est toujours étonnant de voir avec quelle facilité un tel paquebot se balance d'une courbe à l'autre, en toute décontraction. Evidemment, sur les bosses, le poids et l'inertie rappellent à l'ordre et la marge de manoeuvre se rétrécit. Mais sur du bon bitume et à condition de ne pas piloter comme un porc, on prend un véritable plaisir à enrouler, sans se traîner, en dessinant de jolies trajectoires bien arrondies et en démontrant aux autres motards, parfois stupéfaits, qu'une Harley bien menée, ça fonctionne plutôt bien. On l'a dit, ce type de moto convient évidemment mieux à une conduite décontractée, mais lors d'une accélération occasionnelle, le 117 dépote vraiment et l'allonge qu'il témoigne est une source de joie, certes simple, mais pas moins intense.
Partie-cycle
A part la roue avant de 21 pouces, chaussée d'un pneumatique de 130 x 60, la Road Glide CVO dispose d'une partie-cycle équivalente à celle des autres Road Glide. On rappellera ainsi que le châssis de toute la gamme Touring a entièrement été revu il y a deux ans, que tout cela repose sur de nouveaux amortisseurs arrière, réglables, ainsi que sur une nouvelle fourche à cartouche.
Freins
Trois freins à disque avec des étriers 4 pistons, à l'avant comme à l'arrière : le dispositif est suffisant vu la vocation de la moto, même s'il y a quand même du poids et que l'on peut, parfois, arriver un peu vite. En bonus, un bon dosage et une centrale ABS pas trop larguée. On rappellera qu'avec ces motos, le frein arrière joue un rôle essentiel.
Confort et duo
Pour le pilote, rien ne change par rapport à une Road Glide classique : un petit déficit de protection au vent, mais une bonne selle, une position relax et de quoi envisager de tailler la route en toute tranquillité, en dépit d'amortisseurs un peu secs sur les bosses. Pour le passager, par contre, la CVO propose un mieux avec une selle plate (elles sont bizarrement en pente vers l'arrière sur les autres modèles, ce qui est peu compréhensible), avec même un petit rebord sur l'arrière pour bien se caler. Vu la patate de l'engin, par contre, on peut envisager un petit sissy bar en cas de duo fréquent.
Consommation & autonomie
Lors de cet essai, on a constaté une consommation raisonnable, de l'ordre de 6 à 6,5 l/100, ce qui laisse plus de 350 kilomètres d'autonomie. Suffisant pour un usage tourisme. On rappellera la présence d'une jauge à essence et d'un indicateur d'autonomie.
Conclusion
Finition, moteur : voilà les deux arguments de cette CVO. Par rapport à une Road Glide standard, en 107, il y a évidemment un plus. Par rapport à une Road Glide Special, toute de noir vêtue, la différence de présentation ne sautera qu'aux yeux des initiés. Mais il est évident qu'une CVO s'adresse aux connaisseurs, aux passionnés. Car l'écart tarifaire est tout de même conséquent : c'est le prix de la rareté, certes, c'est aussi le prix pour se distinguer dans un monde de fans où chaque détail compte et, surtout, peut marquer sa différence. A ceux qui n'ont pas la somme d'une CVO, une Road Glide standard rend déjà bien des services et procure déjà bien du plaisir. Certes, ce gros moteur 117, quel bonheur !
Il n'empêche : plus de 41.000 euros, l'addition est salée. Et dans la crèmerie d'en face, on a une Indian Chief en finition Elite, tout aussi soignée, à 34.000 euros. Mais avec ce type de motos, on est évidemment dans un univers où la part de rationalité a un peu disparu. Il ne reste que la passion. C'est beau, la passion.
Points forts
- Look
- Qualité de finition
- Équipement complet
- Duo plus agréable que sur la Road Glide non CVO
- Puissance, couple, souplesse : agrément moteur exceptionnel
- Plaisir de conduite
Points faibles
- Tarif (carrément) dans les hautes sphères
- Un petit manque de protection aéro
La fiche technique de la Harley-Davidson Road Glide CVO
Conditions d’essais
- Itinéraire: petites routes variées + autoroutes interurbaines avec un peu de ville
- Kilométrage de la moto : 4000 km
La concurrence : Indian Chieftain Elite
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