Pourquoi il faut (encore) regarder le World Supersport

"Les 600 de Mondial Supersport restent de vraies motos de course, qui n'ont rien à envier au Moto2"

Kenan Sofuoglu se dirige vers un 5ème titre en Championnat du Monde Supersport

Faisons un constat qui n'engage que nous : dans le petit monde de la compétition moto, le Championnat du Monde Supersport n'est pas la discipline qui attire le plus de spectateurs et de remontées médiatiques. Peu de batailles en tête en dehors de trois ou quatre pilotes habitués aux avant-postes, des machines qui n'ont pas beaucoup évolué ces dernières années, un segment en total déclin commercial : la 600 sportive ne ferait plus rêver ? Nous avons demandé à Fabien Raulo, Coordinateur technique compétition au sein de Kawasaki Europe, de nous expliquer les tenants et aboutissements de la catégorie...

Fabien, êtes-vous d'accord sur le fait que cette catégorie semble en perdition ?

C'est difficile à dire, car nous sommes complètement impliqués dans ce championnat. Maintenant, c'est vrai que commercialement, les 600 sont dans une réalité compliquée. En Asie, les motos sportives sont plutôt dans la catégorie de 300 à 500 cm³ et en Europe, tous ceux qui aiment les sportives vont sur des 1000 cm³. Pour nous, cette catégorie reste une vitrine, puisque nous gagnons. Et je peux vous assurer que c'est une vraie moto de course.

Quel est le niveau de préparation d'une 600 de Mondial Supersport, aujourd'hui ?

Le nouveau règlement nous a fait abandonner l'électronique pour faire baisser les coûts et permettre à des teams privés d'être plus compétitifs. Comme en Moto2, nous n'avons pas de traction control, je veux dire, nous n'en avons plus, mais ce n'est pas très grave car un pilote comme Kenan Sofuoglu n'en a jamais beaucoup utilisé. Certains teams ont eu plus de mal à faire avec des nouveaux boîtiers, car auparavant, on pouvait faire des réglages prédictifs, virage par virage, du contrôle de traction et de gestion du frein moteur. Tout ça, c'est fini. Après, si l'on doit garder l'équipage mobile du moteur et les tubes extérieurs des suspensions, la préparation reste assez libre. Le moteur est vraiment préparé au niveaux de la culasse et des arbres à cames, les freins sont libres et il vaut mieux car un pilote comme Kenan freine vraiment comme un camionneur et nous avons aussi en permanence un technicien dédié aux suspensions, ce qui est fondamental car on a beaucoup de capacités de réglage.

Côté puissance, ça donne quoi, votre ZX-6R de Supersport ?

Disons que notre ZX-6R sort 150 chevaux, ce qui est nettement plus qu'en Moto2. On prend facilement 16000 tr/mn, voire parfois un peu plus...

Comment ça, parfois ?

Dans cette même logique de réduction des coûts, on ne peut plus modifier les rapports de boîte à chaque course. On est libre de définir nos rapports de boîte en début de saison, mais après cette configuration est figée pour tout le championnat. Sur un ou deux circuit, ce ne peut alors pas être optimal. On s'en sort en montant un peu le régime moteur jusque 16500 tr/mn pour gagner en allonge sur quelques sections du circuit... Du coup, on tape un peu plus dans le moteur.

Combien de moteurs disponibles pour la saison ?

6.Ils peuvent faire jusque 3000 kilomètres, en général on les change à 2000 pour conserver toute la puissance.

Quel est le budget d'une moto de World Supersport ?

Sur le plan technique, je dirais aux environs de 200 000 € la saison. Le nouveau règlement a fait baisser les coûts, avant c'était plus de l'ordre de 300 000 €.

La moto a beaucoup évolué d'une année à l'autre ?

Pas tellement, hélas. La principale modification, c'est le règlement concernant le boîtier électronique. Mais il est vrai que la base technique de la ZX-6R remonte à 2009...

Kenan Sofuoglu va sur son 5ème titre dans la discipline cette année. Un titre presque acquis "facilement". Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Quand on gagne, c'est qu'on a le meilleur pilote sur la meilleure moto. Kenan est vraiment un spécialiste de cette catégorie, notre machine marche bien, elle est fiable. Mais c'est vrai que nos victoires auraient plus de relief avec une compétition plus forte. Devant, on n'a que trois ou quatre pilotes réguliers, c'est dommage, car derrière, paradoxalement, ça bastonne bien pour les places d'honneur.

C'est quoi l'avenir de la discipline, pour vous ?

D'un point de vue sportif, Kenan sera encore avec nous l'an prochain et tant qu'il voudra rouler, nous serons contents de l'accueillir. Maintenant, c'est vrai qu'il nous faudrait des nouveaux modèles.

Et la prochaine catégorie 300 ?

C'est intéressant de voir qu'en Championnat du Monde, nous aurons l'an prochain une catégorie d'accès, avec des motos de 300 à 500 cm³ et très peu de préparation. Nous serons présents avec la Ninja 300, ce sera une année de découverte, on fera quelques courses et après on fera le point.

Plus d'infos sur le Championnat du Monde Supersport

• Site : www.worldsbk.com
• Toutes les actualités WSBK