Ardennes : culture et patrimoine
D'Arthur Rimbaud au Festival Mondial des marionnettes
Entre vallées et châteaux-forts, un département riche en histoire
Si le département des Ardennes dispose bien d'une figure iconique, il s'agit sans aucune contestation possible d'Arthur Rimbaud. Car avant de finir comme trafiquant d'arme miséreux et gangréné sur les plateaux éthiopiens et avant de venir s'éteindre à Marseille à l'âge de 37 ans, cet esprit libre et libertaire a laissé de brillants écrits et marqué son époque par sa liaison tumultueuse avec Paul Verlaine.
Pas étonnant donc que sa ville natale, Charleville-Mézières, lui dédie un musée construit dans un ancien moulin sur un pont qui enjambe la Meuse et situé en face de sa maison natale, le tout à quelques pas de la Place Ducale, copie quasi conforme de la Place des Vosges parisienne. Il faut cependant rendre à César ce qui lui appartient : la Place Ducale a été construite en 1606 par l'architecte Clément Métezeau, tandis que la Place des Vosges voit le jour en 1607 et est signée Louis Métezeau, son frère. On notera par ailleurs que la ville de Charleville n'est pas rancunière, car souffrant atrocement de sa jambe dans la chaleur et la poussière du désert africain, le poète maudit écrivait dans ses "Lettres de Harar" : "il n'y a pas d'endroit plus désagréable au monde, à part bien sûr Charleville-Mézières". L'une des vertus de l'Histoire est qu'elle sait panser les plaies.
Outre Rimbaud, le département a donné naissance à quelques autres personnalités illustres : Robert de Sorbon (créateur de la Sorbonne), André Dhotel, Guillaume de Machault, Hippolyte Taine et même Yannick Noah !
Une vie culturelle dynamique
Le département n'en est pas pour autant focalisé sur le passé. Certes, la ville de Sedan qui peut s'enorgueillir de posséder le château fort le plus étendu d'Europe (il couvre plus de 35 000 mètres carrés sur 7 étages, certains murs faisant 27 mètres de large !) organise des fêtes médiévales ; il faut dire que le cadre s'y prête et que la visite du château est fortement recommandée. De l'autre côté de la frontière, mais à une quinzaine de kilomètres seulement (et avec les délices des 8 kilomètres de virages vers Corbion si l'on passe par la forêt et que l'on évite l'autoroute), le château fort de Bouillon mérite lui aussi le détour.
Mais les Ardennes sont aussi connues pour le Festival Mondial de la Marionnette (la ville possède même une école très réputée de formation au métier de marionnettiste) et, tout comme en Avignon, le festival off qui se déroule dans la rue et dans des lieux publics vaut tout autant que le in. Se tenant fin septembre, le Festival des Marionnettes existe depuis 1961 et est devenu un rendez-vous incontournable, générant plus de 150 000 visiteurs dans cette ville qui compte à peine 60 000 habitants.
Autre festival à se construire une solide réputation, année après année : le Cabaret Vert, un festival rock qui se tient fin août, toujours à Charleville-Mézières. Est-ce à dire que la préfecture s'arrogerait toutes les distractions ? Pas du tout : plus au sud du département, le château en ruines de La Cassine propose chaque été un spectacle son et lumière de haut niveau. Spécificité unique en France : les spectateurs sont installés sur des gradins mobiles se déplacent sur des rails, d'une scène à l'autre, le château faisant office de décor naturel.
Un patrimoine industriel qui mériterait d'être mieux mis en valeur
Dans le nord du département, la vallée de la Meuse dispose d'un riche passé industriel et sidérurgique, une activité qui a hélas périclité comme ailleurs dans le nord et l'est de la France, à partir de 1975. Bien avant cela, c'est la région du Sedanais qui s'était illustrée par ses compétences en textile et tapisseries, avec notamment les dentelles et tapisseries royales du Point de Sedan. Avec 75 000 points au mètre carré, les tapis de Sedan offraient une finition et un velours exceptionnels.
Pour se rendre compte de ce passé riche, on pourra visiter le Musée de la Métallurgie à Bogny-sur-Meuse, dans le nord du département, ou encore le musée de la feutrine de Mouzon, plus au sud, un musée unique en Europe. Mais dans l'ensemble, faute de budget, sans doute et peut-être aussi que le deuil d'un passé n'a pas été totalement fait, le patrimoine industriel n'est pas encore valorisé à sa juste valeur. Rêveurs et architectes en herbe peuvent donc se balader le long du bassin industriel de la Vallée de la Meuse et l'imaginer au plus fort de son activité.
Tout n'a cependant pas disparu : les fonderies Invicta, à Donchery, font encore partie des belles réussites industrielles.
Une nature luxuriante et des villes fortifiées
L'industrie s'est historiquement concentrée dans le nord du département, les plaines du sud restant plus propices à l'agriculture. Les visiteurs à l'âme voyageuse se laisseront transporter par les méandres de la Meuse, qui taille son chemin dans le massif ardennais en dessinant de jolis lacets qui font cas d'école dans les manuels de géologie. A l'époque du plein emploi, le fleuve comportait nombre de péniches venant alimenter les aciéries. Aujourd'hui, c'est une navigation de plaisance qui trace sa voie au milieu de la forêt et les villes de la vallée l'ont compris en installant des facilités pour les touristes en bateau.
Pour les villes du nord, le déclin industriel du passé les pousse à se réinventer un présent : c'est le cas de Rocroi (bientôt Rocroy, car la ville tient à son histoire !), qui profite de sa physionomie singulière et de ses remparts pré-Vauban pour attirer les touristes fans d'architecture. Ou de bonnes choses, car la une nouvelle bière artisanale, la bien nommée Rocroy, ne se vend que sur place. Raison de plus... qui permet de se projeter en arrière, à l'époque où, de la fin des années 50 au début des années 80, un motocross international était organisé dans les remparts. C'était bien avant que la notion de patrimoine ne soit considérée comme aujourd'hui... et que les architectes des Bâtiments de France ne viennent siffler la fin de la récréation !
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