Reducatiser une ducati déducatisée ...
... ou la version italo-motarde du "how much wood would a woodchuck chuck if a woodchuck could chuck wood". Les vieux geek qu'on n'appelaient pas encore de ce patronyme anglicisant comprendront la référence à la cultissime Ile du Singe, ou Monkey Island dans la langue de Billoute (Gate).
Alors quoi ? Aurais-je déducatisé Cerise, supprimé l'anachronique distribution desmodromique, aseptisé ses coups de piston, quatrecylindreenlignisé son mauvais caractère, oléaginoisé son embrayage, lissé la montée en régime comme un platrier son enduit de finition ?
En bref, aurais-je soudainement eu la nostalgie de l'électrique moteur de feu sevenfifty ?
Non, 'faut pas pousser mémé dans les orties avec une patte de crocodile, tout de même.
Quoique ...
Le caractéristique mais néanmoins anti-mécanique et onéreux bruit de crécelle de l'embrayage à sec ayant heurté mes chastes pavillons auditifs, j'avais tôt adopté le bartokit bien connu des spécialistes, qui outre le fait de supprimer ce bruit intolérable pour tout adepte un tant soit peu mécanicien, avait le bon goût, grâce à un vrai disque cônique intelligemment glissé parmi les impersonnels et standard disques lisses, de procurer une souplesse inconnue jusqu'alors et de soulager la musculation de la main gauche causée par l'utilisation intensive et parisienne de miss Cerise.
Jusqu'ici tout allait bien. Sauf que ledit Bartokit, sans doute inspiré par la légende qui veut qu'une bonne Ducati est une Ducati en panne, avait décidé de ne pas être en forme. Pas qu'il soit fatigué, non, non, il n'était tout simplement pas en forme "normale" pour un disque, à savoir un beau plan tel que même posé sur un marbre on ne glisse pas une feuille de papier dessous. Celui-ci avait décidé de se livrer à moi vrillé. Et un disque vrillé dans un embrayage, ça couine fort.
J'avais donc remplacé un bruit de crécelle par un couinement. Mouais, bof, on était loin de l'effet attendu. Exit donc le bartokit, à l'exception tout de même du fameux disque cônique qui me plaisait tant. Oui, mais.
Qui dit "exit le bartokit", dit retour du bruit de crécelle. Damned !!!! Nondedjiou !! Z'allez voir c'que vous allez voir !!! Il ne sera pas dit qu'un bête empilage d'anneaux métalliques plus ou moins ferrodoïsés aura raison de ma santé mentale, non mais !!
Re-bricolage de ce satané embrayage, donc. Et c'est là que je me dis : mais pourquoi n'ai-je donc pas pris une 800 à l'embrayage silencieux, oléagineux et tellement plus normal ! Re-bricolage, disais-je. Exit le reliquat de bartokit, y compris le cônique, réarrangement des disques pour néanmoins supprimer la crécelle-attitude ... tout ceci hier après-midi, sur le trottoir et sous la pluie. Il y a des fois je me dis que je dois être fada. Quoique, si fada il y avait, il y aurait maison dans le sud (ben oui, ici "fada" ne fait pas partie du vocabulaire habituel), routes ensoleillées, garage pour bricoler, etc, etc. Arrête, Fift, tu te fais du mal.
Et donc, ce matin, l'essai-vérité : contact, broum-broum, brrrrr, broum, brrrr, broum, broum, broum ...
Broum ? C'est tout ? Pas de kling, guiling-guiling, glingue, klong, gleglong et autres glinglginglin ? Victoire ! Les Anglais sont battus (oups, pardon, un reste de rugbymania) ! A nous la route, les oreilles reposées et la fierté mécanique !
Première, clang, ça passe bien, impeccable. Et c'est là que j'ai redécouvert le caractère Ducati. Vous vous rappelez le disque cônique du bartokit ? Je l'ai dégagé, hein. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ça se sent à la conduite. Déjà que Cerise était plutôt d'un naturel impatient, là ce n'est plus de l'impatience, c'est de la nervosité type pur-sang arabe à chaque fois que je fais semblant de relâcher la poignée dite "d'embrayage". Parce que la notion d'embrayage est censée induire une certaine notion de progressivité. Que dalle, oui. Cerise a retrouvé son naturel, et ne se prive pas de le faire savoir : combiner une rotation de la poignée droite avec un frémissement des doigts de la main gauche propulse la bête et celui qui essaie de la piloter dans un bond en avant qu'il convient de dompter, ne serait-ce que par bienséance pour les piétons environnants et pour éviter de se mettre au tas. Et encore, je n'ai pas testé le rétrogradage. Le moteur en prise directe sur la roue arrière, le nez dans le compteur, les yeux sur le bout du nez et le cortex dans les orbites. Ouaf ! M'est avis que le kit chaîne, du haut de ses 33000 bornes, ne va pas faire long feu à ce rythme.
Quinze bornes de faites ce matin, et j'ai l'impression d'avoir redécouvert la moto. Je sens qu'il va me falloir un peu d'entraînement, parce que la balade de Nowel avec madame en passagère, ça risque de faire séance de rodéo sinon.
pour le réçit
c'est qu'elle on du caractère les belles latines.
Déducatiser la Ducati? Ciel, si ceci se savait, nous nous désolidariserions aussitôt!
Fi! Fift, vous méritâtes ce châtiment à vous justement infligé par cette bella donna dont vous tentâtes de noyer le caractère pourtant déjà bien trempé.
Que vous est-il donc passé par le crâne pour vous voulussiez ainsi transmuter un VDQS (Vintage Desmodromique de Qualité Supersport) en vile piquette de supermarché?
La Transalpine est dure? Elle part trop vite? La belle affaire! Exercez votre doigté, que diable! Soyez à la fois ferme et sensible. Cessez de titiller comme le premier godelureau venu, et mettez-y toute la main! Vous ne voyez pas qu'elle n'attend que ça, la gaillarde? Même Madame Fift pourra pour une fois vous en être reconnaissante, quand votre senestre redevenue habile et sûre se fourvoiera dans la zone rouge.
En attendant, promettez-nous de renoncer à ses côneries pour nippophiles attardés et à vos bains d'huile pour freluquets cacochymes. C'est une cavale haquenée que tenez entre vos jambes, Fift, pas une jument de manège pour promener des chérubins. Tâchez de vous en souvenir!
Sacré Fift, un KITABART avec un dix vrillé se renvoie chez Bart au lieu d'être monté :)
Sato>
Encore eût-il fallut que je susse que ledit disque était à voile (et pas à vapeur, quoique, vu comme ça chauffe ...) avant de parcourir les quelques 5000 km au bout desquels il s'est mis à couiner comme certaine femelle porcine qu'on prépare à sa destinée jambonesque. Je doute que mon fournisseur breton, qui entre-temps a abdiqué dans la fourniture française des kits de conception belge, ne me le reprenne dans des conditions décentes.
J'ai donc adopté la méthode dite "des vieux barbus", non homologuée par notre maison-mère à tous (amen) qui lorgne désormais du côté des garçons coiffeurs, et qui consiste à ajouter un vieux disque garni en fond de cloche.
Ne me reste plus qu'à me faire pousser la barbe comme un biker harley :).
Cyrano>
Certes, certes, le viril gling-gling permettant à tout néophyte averti (!) d'identifier une Ducati, et propre à introduire dans son esprit lyophilisé des rumeurs de panne imminente, ce viril gling-gling, donc, fait probablement partie du charme incohérent de nos transalpines. Ceci dit, il n'en est pas moins anti-mécanique au possible et à l'opposé de ce que je conçois comme une conception noble.
Accessoirement, supprimer ce bruit revient aussi à préserver cloche et noix, et donc à éviter de les changer après 20 000 de nos chers kilomètres, réduisant d'autant l'abime qu'une révision cause dans mon compte-courant. Cette dernière considération bassement matérielle et tellement éloignée des hauteurs sur lesquelles nous, Ducatistes, évoluons, est bien entendue totalement étrangère à mon choix quant au bartokit .
N'empêche, elle arrache désormais, la Cerise.
Coyotte> C'est sûr !
Dé-gling-er le berlingot, était-ce une raison suffisante pour transformer votre Cerise en conifère et la faire couiner comme n'importe quelle anglaise branlante (Gode save the couine)? Vous devenez gâteux, Fift.
Le gâteux sur la Cerise, mon dieu, c''est le monde à l'envers.
Quant à m'honorer du titre de ducatiste, c'est très urbain de votre part, mais si j'avoue avoir parfois des désirs ultramontains au passage d'une robe rouge, mon profil toutefois vous apprendra que c'est avec une geisha, souple et conciliante, que je repais mes envies de sybarite.
Heu, est-ce que le barto-chose existe en version Guzzi ?
Parceque ma solution de mettre des bouchons d'oreilles marche relativement bien pour le bruit, mais le levier super dur et le point de patinage a 2mm du debut de la course je trouve ca moyen, sans meme aller jusqu'a imaginer l'usure mecanique cloche et noix (j'ai juste 5000 miles soit 8000km dont 1600 fait par moi).
Ceci dit j'ai vu des Ducati samedi a notre mondial du 2 roues local et ce qui m'a choque c'est que l'embrayage semble s'ebruiter meme au point mort (je crois avoir bien vu le motard sans aucune main sur les demi-guidons de sa 916), ma Guzzi ne s'ebruite que quand je touche la poignee...
Tintin>
Sur une 916 (embrayage à sec, même principe que sur la SS), c'sets justement au point mort que l'embrayage fait du bruit. C'est pour cela que la cloche et la noix s'usent.
Ce bruit est dû à un jeu important entre le fond des canelures de la noix (où reposent les disques lisses) et le fond des canelures de la cloche (où reposent les disques garnis). Au point mort, les disques ne sont donc pas pressés les uns contre les autres, et avec les vibrations du twin, ils cognent contre les parois de la cloche et de la noix.
Dans le bartokit, il y a un gros disque épais qu'on met au fond, et qui comble ce fameux jeu. C'est sur ce gros disque que viennent s'appuyer les disques d'embrayage, au lieu d'appuyer sur le fond des canelures de la noix (le disque le plus au fond est en standard un disque lisse). L'idée est de ne plus appuyer sur les canelures de la noix qui sont trop profondes.
Sinon, en mettant deux disques garnis au fond, au lieu du disque lisse, cela revient presque au même : l'ensemble des disques vient appuyer sur le fond des canelures de la cloche, et plus celle de la noix. Utiliser deux disques permet d'éviter qu'ils se déforment avec la pression des ressorts.
Dans ce cas, le bruit n'apparaît que au débrayage, ce qui n'est pas très grave car c'est assez court.
Je ne connais pas l'embrayage des Guzzi, mais il me semble qu'il s'agit d'un monodisque, et pas d'un multidisque, d'où le point de patinage très court. Donc l'opération n'est pas possible. En plus, l'accessibilité est nettement moins bonne . Pour décaler ton point de patinage, je n'ai pas trop d'idées ...
Hé bé.....
dire que le rêve des technocrates politiquement corrects, c'est de nous faire rouler avec des véhicules soigneusement "normés" et civilisés....
Mouhahaha !
Ptit Loup1300 a écrit:
> Hé bé.....
>
> dire que le rêve des technocrates politiquement corrects, c'est
> de nous faire rouler avec des véhicules soigneusement "normés"
> et civilisés....
correction : ça c'est pour le neuf, maintenant, if you want, en occaze, moto ou BAR,
tu trouves encore plein de politiquement incorrect, le pied
En même temps, pour rouler full stock au niveau embrayage avec une Ducat' "à sec", il faut au choix :
- aimer son banquier
- vouloir faire oeuvre de charité auprès du Ducati Store (Score ?) du coin
- avoir envie de suicider son larfeuille.
Messieurs Fift et Cyrano,
Vous lire est un délice de chaque instant, même si je ne pipe mot de votre mésaventure technique, mais en gentilshommes que vous êtes, vous conviendrez avec mon humble personne qu'il faut laisser la mécanique aux mécaniciens, les cloches dans les clochers, les noix dans la salade, et les motocyclettes seront bien gardées.
J'ai hâte de vous lire à nouveau.
Bien à vous.
Charlot.
Fift, helas tu as totalement raison. Merci pour ta reponse.
Je crois que mon probleme vient en partie du levier reglable qui est positionne au plus pres, je vais tester un ajustement different ce soir.
C'est mon premier embrayage hydrolique et mon premier a sec, ca change enormement de la Buell qui avait son bain d'huile dedie (transmission primaire et moteur n'utilisent pas la meme huile sur le moteur H.D. mais cela disparait sur le moteur Rotax de la 1125R).
Sinon oui, il n'y a qu'un disque pousse par les ressorts mais 3 plaques dont 2 identiques se trouvent derriere lui.
Pour finir le tout est coince entre le moteur et le cardan en plein milieu de la moto donc depose du moteur obligatoir pour y acceder...
>Charlot. Merci de ces compliments qui nous vont droit au coeur.
Et pour les cloches, et surtout pour les noix,
Sachez que Fift, tout autant que moi,
s'en occupe lui-même avec assez de maitrîse,
Pour qu'il ne tolère pas qu'un autre les lui brise.
(On m'apprend à l'instant qu' un obscur auteur du 19ème, au talent visionnaire sans doute, aurait paraphrasé mes vers en une piécette depuis lors oubliée. Quelle étrangeté!)