Essai gamme Kawasaki VN
Les belles chromées d’Amérique Orientale
Dans le grand imagier motocycliste, la production de customs est, pour beaucoup, l’apanage d’une marque américaine. A tel point que, même face à aux représentantes d’une autre marque, le profane qualifie invariablement la machine de Harley Davidson. C’est dire, d’emblée, l’ampleur de la tache à laquelle s’attaque notamment Kawasaki, pour imposer son blason sur le segment. Car si le marché des hypersportives est à la baisse, à contrario le marché du custom est particulièrement porteur avec une croissance de 40 % des ventes entre 2010 et 2011 !
Le constructeur d’Akashi propose ainsi huit véhicules intégrant les codes typés du low riding. VN900 Classic et Classic Special Edition (bi-colore), Custom et Light Tourer constituent l’entrée de gamme. Suivent les ténors VN1700 en version Classic ABS, Tourer ABS, Custom Voyager ABS et Voyager ABS. A défaut de route 66, c’est sur le bitume vallonné de Bourgogne que nous nous rendons pour re-découvrir une sélection de cette gamme.
VN900 Custom, discrète rebelle
S’habillant d’essentiel, ce modèle custom conjugue le genre version marginal. Roue avant étroite et jetée loin devant, tout comme les cale-pieds fixés sur les berceaux du cadre, optique minimaliste, guidon formé de sections tubulaires soudées et large assise surbaissée quasi monoplace donnent le ton. Bienvenue au lone rider... timide. En effet, les lignes restent sages. Le reste de la panoplie est conforme aux standards du genre. Son réservoir aplati orné de motifs s’agrémente d’une platine centrale où se regroupent les instruments. Dans le large cadran du tachymètre prennent également la place jauge analogique et une fenêtre digitale pour l’odomètre, le partiel et l’horloge. Aux abonnés absent comme habituellement sur ce type de machine, le compte-tours, les warnings et l’articulation du bouchon d’essence que l’on posera où l’on peut en faisant le plein.
Pour animer sa machine, Kawasaki la dote d’un bi-cylindre en V de 903 cm3 à refroidissement liquide et un unique arbre à came. Les ailettes polies sont factices, servant plus à reprendre les codes des motorisation d’Outre Atlantique. Contenue, la puissance développée est de 50 ch (37 kW) à 5.700 tr/min mais le bloc délivre son couple de 78 Nm dès 3.700 tr/mn. La transmission est bien sûr confiée à une courroie. Un unique disque avant de 300 mm et arrière de 270 mm, chacun pincé par un étrier deux pistons se chargeront de stopper vos chevauchés infernales.
L’ergonomie reprend elle aussi les cotes spécifiques du custom. On tombe presque sur cette VN900 tant l’assise est basse. Sa vaste selle attend votre séant à seulement 685 mm du sol. Les jambes se tendent vers les repose-pieds, imitant les bras qui vont, eux, chercher la barre chromée du large guidon. On y retrouve des poignées typées de large section tandis que les commodos restent classiques. La fourche de 41 mm est dénuée de réglages et l’amortisseur ajustable uniquement en précharge.
Pour démarrer, pensez à amener la clef sur le côté gauche de la machine. Oui, comme sur les américaines... Le V-twin tousse à peine, relâchant alors un souffle à la sonorité plaisante et discret, tout comme la teinte noire mat des silencieux. La VN900 Custom se livre rapidement à son pilote. Bien que conforme à son nom, sa partie cycle n’impose pas un pilotage particulier. Hormis une direction un peu lourde à très faible allure dûe à son fort empattement et un angle de chasse très ouvert (33°), la Kawa rase-bitume est docile. Elle se paye même le luxe d’une garde au sol moins limitée que celle de ses soeurs. Ainsi, sur route, le custom reste plaisant à emmener, même à bonne allure.
Son twin à la puissance modérée gratifie l’équipage de son couple, vite disponible. S’il n’est pas un foudre de guerre, sa motorisation, bien que linéaire, confère beaucoup de fun à ce modèle. On évitera tout de même les appuis trop marqués sur les repose-pieds, au risque faire ensuite mordre leur platines soudées au cadre... avant de soi-même goûter la poussière. Capable de près de 170 km/h en pointe, la position aéro-frein du pilote ne pousse pas non plus aux tentatives de records. Mieux vaut rester au rythme auquel son look prédestine. Calé sur le 5° et dernier rapport au légal routier, on profite alors des bonnes dispositions du V twin tout en appréciant un confort de selle surprenant. Celle-ci pallie au travail sec de l’amortisseur dont le faible débattement n’absorbe que partiellement certaines bosses.
Le freinage est à la hauteur des 278 kg de la machine. Sa mise en oeuvre progressive révélera une fourche plutôt souple mais gérant correctement les transferts de masse, malgré le poids global.
Attachante, facile de prise en main, la VN900 Custom souffre uniquement de ses quelques plastiques (compteurs). Sa motorisation, efficace mais discrète, fait oublier le caractère velu habituel de ce type de machine mais devrait séduire à contrario la gente féminine, plus douce. Contrairement aux 1700 bien moins chères que les modèles d'outre-atlantique, c’est essentiellement son prix de 8.899 € qui peut faire tiquer, moins chère de mille euros qu'une Yamaha Midnight Star mais dépassant de 500 euros l'entrée de gamme référence qu'est la XL883N Iron. Elle séduira du coup essentiellement ceux et surtout celles que l'aspect trop communataire Harley pourrait déranger.
VN900 Light Tourer, voyageuse stylée
Reprenant les caractéristiques mécaniques et pour beaucoup la partie cycle de sa soeur dépouillée, la VN900 Light Tourer se destine au voyage et s’équipe en prévision. Vaste pare-brise, large optique et feux additionnels, longues platines de repose-pieds, guidon aux cornes marquées, sacoches et selle passager plus accueillante informent de ses prétentions routières. En outre, l’accompagnant pourra s’adosser au sissy-bar.
La machine se fait également plus séductrice, parant de chrome son V-twin et nombre des ses attributs. Platine d’instruments et différents supports (pare-brise, phares...) ainsi que caches de fourche font étinceler leur surface. Celle-ci contraste d’autant plus avec l’unique coloris noir de la Light Tourer. On regrette la qualité commune de la bagagerie dont les fausses boucles métalliques cachent une attache en vraie plastique.
Son l’angle de colonne moins ouvert (32°) et sa chasse plus réduite (160 mm contre 182 mm), améliore son agrément en ville, en dépit d’une monte de pneu adoptant un boudin large (130/90). Légèrement plus performant, le bi-cylindre développe 54 CV (40 kW) à 6000 tr/mn et voit son couple augmenter avec 82 Nm (8,4 m/kg) à 3,500 tr/mn. Dans les faits, ses rapports de boite plus longs que celui de la Custom ne change guère le comportement dynamique auquel s’ajoute quatre kilos (282 kg en ordre de marche). La sonorité du bloc est également plus feutrée au sortir des échappements chromés.
Pour cumuler les kilomètres, préférez le réseau secondaire à son bord. Son large écran limite certes la pression d’air sur le haut du corps mais laisse remonter les flux, et éventuellement la pluie, au niveau du torse à vitesse plus élevée. Les vibrations du twin sont également importantes au légal autoroutier.
En dehors des voies rapides, la Light Tourer se montre convaincante avec un confort au long cours appréciable. Bénéficiant des appuis au grand guidon, la machine se dirige naturellement même si la direction est parfois un peu floue. La garde au sol limitera également les excès d’optimisme. Dédiée au cruising, la VN900 Light Tourer charme alors au rythme plus contemplatif qu’imposent les petites routes sinueuses.
Style, équipement... l’esprit est là et le charme ne manque pas. Une motorisation plus démonstrative serait bienvenue au regard d’un poids conséquent. Là encore, un tarif de 10.299 € la met face à une XL1200N Nightster de la Motor Company. Mais Kawasaki à cette fois-ci l’avantage de proposer une vraie routière.
VN1700 Custom Voyager ABS, bagger confort
Après les feux VN 1600, les modèles 1700 cm3 Kawasaki représentent la classe croiseur longue distance. Là encore, ils reprennent une esthétique dont les codes ont été définis dans le Wisconsin depuis plus de 50 ans. Avec tout de même une différence notable.
Le carénage de la tête de fourche est fixe, solidaire du cadre. Ce vaste poste de pilotage intègre une unique optique ronde gainé de chrome ainsi que de factices prises d’air. Il domine un vaste réservoir surmonté d’une platine logeant bouchon de réservoir et contacteur surdimensionné. Tout aussi larges, les moelleuses assises de l’équipage encadrée de larges valises profilées invitent au voyage. Cette bagagerie loge sans peine un casque intégral, de chaque côté. L’ensemble de la boucle arrière et rabaissée pour satisfaire au look bagger et se pare d’un feu à leds au dessin particulièrement valorisant.
La machine met en avant son gros coeur à deux cylindres en V, habillant ses culasses et ses collecteurs de chrome. Mécanique à refroidissement liquide, le gros twin tente là aussi le mimétisme avec les motorisations made in USA. Fausses ailettes polies, cache rond du filtre à air, dessin des carters... on déplierait presque la bannière étoilée. De même le cadre est une très classique poutre centrale à double berceau en acier.
Le cockpit surmonté d’une casquette fumée soigne un aspect rétro et se montre particulièrement complet. Cadrans de tachymètre, compte-tours et jauges d’essence et de température moteur encadrent une large fenêtre digitale centrale. L’ordinateur de bord y prend place listant consommation instantanée, moyenne, odomètre, partiels, horloge. Enfin, l’autoradio s’intègre avec goût dans cette ensemble fleurant bon les fifty’s. Enfin, deux haut parleurs et coffres fermant à clef se logent de part et d’autre du carénage.
Confortablement installé sur les assises larges, on lève un peu les bras pour saisir le large guidon aux poignées massives. Les commodos suivent cette tendance à l’embonpoint avec moins de grâce. Anguleux, leur ergonomie demeure correcte mais gagnerait à être plus synthétique. Trop de fonctions spécifiques sont en effet disponibles, alourdissant leur dessin.
Le train avant est conduit par une fourche gainée mat de 45 mm et repose sur un large pneumatique de 130 mm. Deux amortisseurs pneumatiques ajustables en pression d’air absorbent les mouvements du train arrière posé sur un boudin de 170 mm. Pour freiner les quelques 382 kg du paquebot japonais, deux disques de 300 mm sont pincés à l’avant par des étriers à 4 pistons. A l’opposé, un système double pistons mord une simple galette de même taille.
Le gros V-twin se montre extrêmement polissé. C’est à peine s’il vibre et tout au plus si on l’entend, contrastant avec sa pulpeuse plastique.
L’équilibre de la VN1700 Voyageur est excellent. Sa direction libre de tout poids superflu la rend plus agréable en ville qu’une Street Glide sans pour autant faire de miracle avec le rayon de braquage. La sélection se montre parfois rugueuse, demandant précision et fermeté.
Quittant au plus vite le milieu urbain, l’équipage goûte vite aux plaisirs du cruising confort. De larges repose-pieds et une position type salon permettent de se détendre au son de votre musique favorite. Radio ou mieux, connexion Ipod/Iphone pilotée au guidon accompagneront vos déplacements.
Prenez le temps. Car votre monture ne vous laissera guère d’autre choix. Impériale sur autoroute, 6e rapport overdrive enclenché et régulateur de vitesse activé, la Kawa file sans broncher, dissumulant presque la cavalerie et ses 54 kW (73 chevaux) à 5,000 tr/min. Sur ce Custom Voyager, la vitesse légale présente l’avantage de limiter les remous ressentis sur le haut du casque.
Son couple maxi 13,6 da.Nm (13.9 m/kg) pourtant disponible dès 2,750 tr/min remue sa masse avec douceur. Sur route, les relances sont flegmatiques si l’on n'abat pas quelques vitesses. A contrario, pour qui décide de rouler souple, la VN1700 est un monument de douceur. De plus, sa commande électronique des gazs gère les accélérations avec une grande souplesse. Ainsi mené, on évite de faire trop souvent frotter les platines de cale-pieds qu’une garde au sol restreinte met vite à mal.
A bord, c’est donc temps calme et mer d’huile, pourvu que la chaussée reste lisse. L’amortissement sec des combinés arrières secoue parfois sèchement les vertèbres. Heureusement, la sellerie atténue le phénomène et l’ensemble demeure agréable. Ralentir efficacement votre navire demandera l’action simultanée des freins avants et arrières. Conforme au cahier des charges de la sculpturale production d’Akashi, le système repose également sur l’ABS, efficace.
Très stylée, cette VN1700 Custom Voyager fait la part belle aux virées contemplatives. Ses lignes et son équipement teintés de vintage en font une routière low riding au charme suranné. Sa motorisation pourtant ample se fait oublier. C'est sans aucun doute son tarif de 17.999 € qui fera en dernier recours la différence pour convaincre les mordus de custom routier avec près de 6.000 euros de moins qu'un modèle équivalent chez la référence du segment. C’est en effet le prix d’une Harley Davidson Street Glide. Une différence financière et mécanique qui fera réfléchir et laisse largement le budget pour équiper la Kawasaki et son pilote de nombres d’accessoires...
VN1700 Voyager ABS, cruiser luxe
Développées sur une même base, la Voyager ABS soigne d’avantage encore le confort pour un peu moins d’authenticité que le modèle Custom. Large pare-brise, projecteurs additionnels, top case caréné formant dossier de salon pour le passager et des chromes à profusion! Telles sont les différences majeures entre les deux modèles. Cette voyageuse se fait aussi plus confortable. Sellerie, repose-pieds passager, déflecteurs de jambes, tout est sous le signe du Plus.
Le V-twin brille de mille feux. Quasiment toutes ses surfaces sont couverte de revêtement rutilant. Même finition pour la planche de bord et la platine de réservoir, la malle arrière et les bords des valises, le logo de réservoir et les carénages de fourche. Si les commodos sont identiques à ceux du Custom, les capots de réservoirs d’hydraulique se parent également de métal. On distingue enfin une sérigraphie de compteur plus classique encore.
La protection offerte contre les intempéries et la pression aérodynamique est excellente. Par temps chaud, des clapets d’aération, réglables manuellement, laisseront l’air circuler plus aisément au niveau des jambes. A bord de la Voyager, le temps s’arrêterait presque. Peut être aussi en raison d’un moteur trop docile pour certain. La sérénité est de mise et la Kawasaki de croisière offre le même agrément audio que le Bagger. Sachez profiter de sa meilleure acoustique que les flux d’air ne viennent aucunement perturber.
On regrettera un espace de rangement du coffre arrière un peu trop juste. Pouvoir loger l’équivalent de deux autres casques eut été appréciable. Autre point d’achoppement, la consommation est conséquente, sur les deux modèles, avec une moyenne de plus de 8 litres au 100 km. Cylindrée, architecture moteur et poids en sont bien sur la cause, ne laissant à l’équipage que 250 kilomètres d’autonomie.
Avec un tarif juste sous la barre symobolique des 20.000 euros (19 999€), cette VN1700 Voyager ABS se fait plus accessible au niveau prix que sa concurrente directe, mais sans atteindre la qualité d'une Electra Glide Classic à 24.190 € (4.000 euros plus chère). Conjuguant le plastique sur une esthétique connue, elle propose cependant une prise en main facile et une douceur déconcertante. La challenger la plus probable reste alors la Victory Cross Country.
Conclusion
La gamme des VN900 se distingue par son agrément mécanique. Deux fois moins chères que leurs aînées, le rapport prestation/prix séduira les adeptes du custom allégé. Les VN1700 ont pour elles un équipement hyper complet ainsi qu'un confort pullman au long cours pour un prix bien inférieur aux références américaines... sans oublier une extension de garantie à 4 ans proposée pour un euro symbolique par la marque verte.
Pertinente, agréable au quotidien, la gamme de customs Kawasaki est très - trop ? - proche de la production américaine, dont ils se distinguent essentiellement par le prix et une très grande douceur au niveau caractère. Leur qualité réside entre autre dans cette discrétion feutrée, loin des exubérantes cousines d'Outre Pacifique et de leur image trop communautaire. Authenticité contre facilité… votre choix révèlera quel type de rebelle sommeille en vous.
Points forts
- Prix
- Agrément de conduite
- Confort
- Equipement
Points faibles
- Caractère moteur
Concurrentes : Harley Davidson Street Glide, Moto guzzi California vintage 16490€.
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