Essai moto Indian Pursuit Limited
Grand Manitou migrateur
V-Twin à 60°, 1.768 cm3, 121 ch et 178 Nm, 416 kg, 34.190 euros
Avec sa Challenger présentée en 2022, Indian a dévoilé un puissant maxi Bagger Touring au carénage monté sur le cadre. À l’opposé des machines classiques, portant sur leur fourche tout le poids des optiques et leur larges déflecteurs… Un vrai défi pour rouler serein et surtout manœuvrer. La demande pour des motos plus faciles allant croissant, la firme de Kings Mountain (USA-Caroline du Nord) dévoile cette année une déclinaison attendue avec la Pursuit. Plus de volume d’emport, plus de confort, plus de technologie, principe de continuité sur une même base, c’est la Pursuit.
Indian aime à rappeler son attention au marché européen et ses spécificités de réseau routier. Ainsi, conçues et fabriquées aux États-Unis, ses motos sont assemblées notamment en Pologne. Et pour notre essai, la marque évoque son périple de 2015 sur les routes des Alpes à fin de développement de sa gamme. C’est sur cet itinéraire sinueux que nous essayons la nouveauté 2022 afin de démontrer les capacités de sa nouveauté. De Chamonix à Annecy, par le col des Aravis et sur une boucle de 230 km de méandres exigeants, nous entamons la Pursuit.
Découverte
Impressionnante, presque intimidante, l’Indienne voyageuse est une monture taillée pour les grands espaces. Tout en superlatif, véritable malle roulante profilée, la Pursuit a pour principale différence avec la Challenger son top-case-dosseret capitonné de 65 litres. Si la machine perd la fluidité esthétique du bagger sur l’arrière, elle y gagne largement en praticité. L’élément loge deux casques et s’équipe d’une prise 12 volts. Un porte-bagage coiffe même son couvercle s’ouvrant largement. Avec les valises, la capacité d’emport est désormais de 133 litres. De multiples rangements complètent le tout et se verrouillent au cockpit. C’est d’ailleurs en aspect pratique et de confort que ce modèle s’affirme. Selle chauffante et ventilée (option), poignées chauffantes, carénages latéraux devant les jambes avec évents ajustables, protections de valises… Et pour réveiller les marmottes, 200 W de son et un égaliseur adaptatif selon la vitesse pilote jusqu’à 16 haut-parleurs !
La Pursuit reconduit les lignes imposantes fluides et la large tête de fourche du bagger intégrant une optique tout aussi surdimensionnée. Entièrement à leds, le feux central s’encadre de feux diurnes et clignotants en lames. La signature lumineuse est superbe. Au-dessus, son nouveau pare-brise plus long coulisse électriquement sur 120 mm. Presque planqué derrière cet ensemble, le long réservoir de 22,7 litres en goutte d’eau typique précède une selle monobloc. Une démarcation marquée scinde les espaces de l’équipage et l’accompagnant bénéficie donc d’un accueil largement optimisé. Sur la poupe, les clignotants intègrent les feux-stops, limitant la présence de ces derniers.
Toute la base technique de la Pursuit est similaire à celle de la Challenger. La nouveauté repose donc sur un cadre en aluminium coulé, formé de cinq pièces majeures. Les massives platines avant et arrière sont reliées entre elles par un solide élément formant épine dorsale et intégrant le colonel de direction. Le tout est fixé aux carters du tout aussi imposant bloc moteur. On admire ses volumes au dessin moderne et son carter gauche rutilant frappé du logo indien.
C’est en effet un V-twin ouvert à 60° à refroidissement liquide de 1768 cm3 (108 x 96,5 mm) qui anime le cruiser… Une injection à corps de 52 mm alimente le Léviathan américain qui développe 122 chevaux à 5 500 tours et 178 Nm de couple à 3 800 révolutions minute. De quoi faire sauvagement s’animer la tribu autour du totem mécanique. Trois modes moteurs (Pluie, Standard et Sport) pilotent la danse. Et pour limiter les effets de transe, une centrale inertielle Bosch régule le haras et les évolutions du cruiser en surveillant ABS et contrôle de traction. Le souffle du monument est capté par les volutes des collecteurs entièrement gainés de caches chromés. Deux longs silencieux fuselés viennent ensuite assurer l’expiration trépidante.
La partie-cycle du destrier des vastes plaines cherche à conserver une certaine agilité. Si son empattement est important avec 1 668 mm et une chasse de 150 unités, l’angle de colonne est fermé, avec une valeur de 25°. La machine repose sur une fourche inversée de 43 mm non ajustables coulissant sur 130 mm. Différence notable avec la bagger, son amortisseur arrière Fox est réglable électroniquement en précharge et débat sur 114 mm. L’interface pour ce faire est simplement remarquable; on en parle une fois en selle.
Des jantes aluminium à 15 branches de 19 et 16 pouces renforcent l’effet cruiser et sont chaussées de Metzeler Cruisetec en 130/60 et 180/60. De solides étriers avant Brembo à montage radial et quatre pistons mordent des disques de 320 mm. La frette arrière de 298 unités est pincée par un élément de même marque à deux pistons.
Amples carénages et surfaces métalliques témoignent d’un très bon niveau de finitions. On apprécie particulièrement les carters moteur mats surmontés des têtes de cylindres polies. La version Pursuit Limited s’habille de strass. Les commodos sont garnis de chrome, tout comme les nombreuses barres de protections latérales et les valises reçoivent des inserts en alu brossé. Également, le garde-boue avant s’orne d’une tête de chef indien, figure de proue vintage et amulette anti-soucis.
En selle
La monture n’est pas sauvage. Prenez place sans façon sur votre fauteuil posé à seulement 672 mm du sol. La selle est remarquablement dessinée, notamment en partie lombaire pour bien y caler votre séant. La position induite ne casse pas le dos, même sur longue distance, gardant celui-ci assez droit. L’accueil passager est donc des meilleurs avec ce dosseret rembourré et ergonomique. Et ses repose-pieds type plateaux ajoutent au confort. Ceux du pilote sont encore plus vastes. Les bottes s’y posent naturellement, tout comme les gants sur les poignées de forte section. L’amplitude s’exprime aussi sur les commandes, des poussoirs aux leviers, tout est solidement bâti. Dommage, la commande d’embrayage n’est pas ajustage en écartement.
Certes, il y a beaucoup de boutons, mais pas de panique, point besoin de rituel d’initiation. L’esprit Ergonomie habite l’Indian Pursuit Limited, rend sa maîtrise technologique intuitive. Il prend surtout corps dans un écran TFT tactile de 7 pouces, au centre du cockpit, accessible à tout moment du bout des gants. Extrêmement bien pensé, ce Ride Command permet notamment un réglage optimal et simple de la suspension arrière. L’interface utilisateur présente un graphisme général avenant et didactique. Comme sur la Challenger, vous pouvez personnaliser l’affichage des infos en plaçant, comme des widgets, les fonctions préférées sur un côté de l’écran. J’apprécie particulièrement les indications des données de parcours : distance, temps passé en mouvement, temps passé à l’arrêt et même altitude et dénivelé ! On retrouve bien sûr compteur de vitesse, compte-tours, odomètre, deux partiels, jauge de carburant, mais aussi boussole, carte/navigation, température de l’air ambiant, indicateur de rapport engagé, état du véhicule (tension de la batterie, vidange d’huile). Le GPS est lui aussi très clair et efficace à suivre. L’ensemble peut bien sûr être lié au smartphone et intègre l’Apple Car Play. Enfin la rapidité d’exécution générale du software est exemplaire.
Deux compteurs analogiques intégrant deux fenêtres LCD surmontent l’écran. Les infos de ces dernières sont redondantes avec celles du TFT, mais utiles en mode GPS pour conserver un oeil sur la jauge de carburant. Toutefois, les compteurs font vraiment trop automobile. Un agencement plus original, circonscrit en un seul élément par exemple, eut été plus sympa…
En ville
Le démarreur tousse fort pour éveiller le twin dans un grondement ample. Ça ronfle sévère sur les coups de gaz et l’aventure commence déjà en sonorité. Le tipi roulant décolle et démontre en quelques mètres un équilibre excellent. Dès la mise en mouvement, la machine s’emmène du bout des gants, prouvant la qualité de partie-cycle de l’Indian. Cette qualité sera une constante durant notre essai. De même que la disponibilité moteur. Le gros bicylindre se fait conciliant en évolutions urbaines, reprenant si besoin dès 2 000 tours en cinquième, au légal. Si la boite répond vite, la sélection claque un peu, notamment à la descente des vitesses.
Les rétroviseurs renvoient un large champ dénué de vibration et la Pursuit s’emmène avec douceur dans le trafic. Préférez les grands boulevards aux petites rues. Les demi-tours demandent un peu d’espace. La machine avoue un poids d’environ (suivant version) 416 kg prête au tortueux voyage chamanique. C’est impressionnant, surtout en manœuvre à très basse allure. Gare aux sols non plan, aires de demi-tour caillouteuses et autres surfaces en dévers… Si la moto penche un demi-degré de trop c’est la chute. Ou le tour de rein. Bref, il faut un peu de physique, d’anticipation et de savoir-faire. Garder un filet de gaz est une des clefs pour conserver votre dignité…
Mais la monture s’apprivoise rapidement. Sur route mouillée, on se méfiera du couple important qui peut faire glisser l’arrière en dépit de l’électronique. J’ai testé un peu fort en sortie de rond-point et le cruiser s’est mis en travers, oscillant ensuite de l’encolure pour se stabiliser. Le mode Pluie réduit ce risque. Dommage, seul le choix de cartographie moteur est moins simple, obligeant à 2 ou 3 manip’ sur l’écran. Un accès guidon eut été plus facile.
Évidemment, une telle machine réclame de l’air et des longues distances. Son truc à elle, c’est la chevauchée lointaine et la découverte.
Autoroute et voies rapides
Ouvrez en grand et le twin vous propulse avec force dans un vrombissement envoûtant. La sonorité de la Pursuit est particulièrement présente et plaisante. Avec son coeur de feu, on est vite au-delà du légal, dans un confort peu commun. Salon roulant, l’Indian Pursuit Limited abrite remarquablement son équipage. Une pression sur le poussoir du pare-brise et la défection est sans défaut. Via l’écran, ventilation de la selle, ajustement de la précharge rapide… la machine s’ajuste à vos souhaits pour ne vus laisser que le plaisir du cruising. D’ailleurs, le régulateur de vitesse est lui aussi excellent et intuitif. Ça évitera le mauvais oeil sur votre permis. Nous n’avons pas testé les hautes vitesses, mais à près de 150 km/h, à 5 000 tours, la moto reste parfaitement stable. Au final, seul l’ennui vous guette. Mais au milieu des montagnes, il n'est pas difficile de trouver une tangente pour l’évasion.
Départementales
Connaissez vous la King of Bagger Race…? Assurément une épreuve haute en couleur et en divertissement où performances des pilotes et machines impressionnent. Tout comme les courses remportées par Indian avec Jeremy McWiliams. En clair, prenez une Challenger, allégez là au max en conservant son esthétique et ses valises (!) et placez là sur la piste. Sensations garanties. C’est également ce que vous vivrez, en plus sage, au guidon de la Pursuit Limited. Jamais à court de dynamique, sa mécanique patate fort, notamment en mode Sport. Bon point, les trois modes offrent une vraie différence de caractère. La réaction à la poignée est alors optimale et chaque rotation précipite en avant le cruiser dans un profond rugissement. Cette ample accélération est toujours teintée de douceur, emportant l’équipage dans un gant de velours puissant. En zone sinueuse, le troisième rapport vous emporte vigoureusement de 60 à 120 km/h, entre 3 à 6 000 tours, soit proche des valeurs de perfs’ maxi du bloc.
Cette plage moteur utile apporte un grand agrément, laissant l’embrayage au repos en conduite appuyée. Sur le sec et bien chaud, les Metzeler Cruisetec font passer toute la force du bloc au sol, assurant des sorties de courbes toniques. L’équipage mobile s’active avec frénésie, communiquant juste ce qu’il faut d’inertie pour faire apprécier sa force. Parfaitement saine, la Pursuit permet d’apprécier votre déplacement, quelle que soit votre allure. Ses performances mécaniques autorisent tout dépassement et relance.
Lancé à bon rythme, entre deux virages, on attrape les freins qui ont alors fort à faire avec les quatre quintaux. Si l’avant pourrait être un peu plus mordant, les étriers montrent une bonne consistance. C’est surtout le large disque arrière qui ajoute une grande efficacité aux décélérations. Ce type de machine régule ainsi mieux leur vitesse en jouant de la pédale. En pilotage enroulé rapide, c’est très sensible pour garder rythme et précision. Mais un freinage combiné eut été une excellente chose sur cette imposante machine.
On peut alors attaquer le virage. Anticipation est un maître mot pour éviter les angoisses d’une courbe trop serrée. Le gabarit important et une garde au sol réduite limitent l’improvisation aux commandes de ce type d’engin…
Emmenée avec raison, l’Indian est alors un maxi culbuto facile à piloter. À nouveau, son équilibre étonnant lui confère une facilité fort appréciable qui permet de se concentrer sur le voyage. Bon, les épingles les plus serrées en duo demanderont surement plus de doigté et d’expérience. Mais l’excellente liaison poignée/injection permet de contrôler les passages en courbe au millimètre. Le mode Standard y assure douceur et précision. On profite aussi à plein de la vie mécanique du twin, pas avare en musique et autres gargouillis d’échappement. Un sentiment de plaisir confirmé par un amortissement efficace, survolant les défauts du bitume. Seules les très importantes compressions peuvent faire talonner l’amortisseur arrière. Un ralentisseur passé beaucoup trop vite par exemple. Mais hors bêtise, la Pursuit est un pullman de chaque instant.
Partie-cycle
Doté d’une grande rigidité, le cruiser Touring Indian se montre efficace et précis. Sa géométrie lui assure un équilibre excellent et conserve une agilité très correcte en virage. Intuitive et saine, elle laisse le pilote se concentrer sur le plaisir du pilotage.
Freinage
Les étriers avant ont fort à faire pour stopper les 400 kg. Le ressenti à la poignée pourrait être plus franc, mais assure des décélérations consistantes. L'élément arrière seconde efficacement le système et demeure nécessaire pour stopper rapidement la machine. Sa mise en oeuvre et particulièrement sensible en courbe pour asseoir le cruiser. On regrette l’absence de freinage combiné.
Confort/Duo
Votre squaw préférée appréciera votre monture de chef. La Pursuit semble lui être dédiée en confort. Avec ses 133 litres de rangement, elle devrait pouvoir y loger sa collection de mocassins Loubouquetin. L’amortissement efficace et particulièrement ajustable optimise encore les évolutions. Enfin, la protection au vent est excellente, du casque aux bottes.
Consommation
Lors de cet essai effectué à rythme varié, souvent tonique, la consommation moyenne relevée est de 6,6 litres au 100 km. À allure plus raisonnable, moins de 6 unités devraient être la norme, autorisant 350 à plus de 400 km d'autonomie. De quoi épuiser votre discothèque ou votre vigilance.
Révisions
Entretien à 800 km, puis à 4.000 km puis à 8.000 km puis à 16.000 et tous les 8.000 km.
Essai en vidéo
Conclusion
Évolution confort et technologique de la Challenger, l’Indian Pursuit Limited optimise les possibilités de voyage et duo. Son confort superlatif servi par une technologie de haut niveau et une interface de référence lui assure le podium de la catégorie. Enfin, sa mécanique envoutante à la sonorité typée et élégante complète un ensemble fort plaisant pour des évolutions efficaces. Tarifée 34 440 € en version Dark Horse, 34 190 en Limited et 35 740 en Limited bicolore, la Pursuit est une routière très haut de gamme dans la catégorie qui fera regarder également l'alternative Roadmaster.
On lui opposera naturellement la Harley-Davidson Road Glide Limited, au prix de 32 690 €. La machine de Milwaukee possède une mécanique sensationnelle et plus authentique.
Plus technologique et dotée d’une partie cycle plus affinée, l’Indian Pursuit Limited pointe plus surement vers l’horizon. Voyageuse tout confort, elle est la puissance suprême des esprits voyageurs. Saurez-vous guider le vaisseau du grand Manitou ?
Points forts
- Esthétique forte
- Disponibilité moteur
- Amortisseur ajustable
- Interface écran TFT
- Confort
- Mode moteur différencié
- Boîte rapide
Points faibles
- Sélection sonore
- Levier embrayage non réglable
- Freinage non combiné
La fiche technique de l'Indian Pursuit Limited
Conditions d’essais
- Kilométrage : 230 km
- Itinéraire : routes sinueuses humides et sèches
- Météo : soleil, de 18 ° à 26°C
- Problème rencontré : ras
Commentaires
mouais...les performances sur ce genre de bécane c'est bien mais le look et les sensations moteur ça compte aussi et là, Harley & Davidson ont encore de beaux jours devant eux !!!
31-05-2022 18:21Entre une Road-Glide Limited et une Pursuit Limited, en esthétique c'est vraiment un choix perso.
01-06-2022 09:51Pour l'agrément, la qualité de fab et de conception... c'est très factuel en revanche. Indian est loiiin devant. Pour un prix quasi comparable.
Si la HD peut séduire d'avantage en mécanique à l'ancienne, l'Indian est partout meilleure.
Pour être objectif, je n'ai jamais essayé d'Indian, j'aimais pas trop le look et je suis à ma 3 ème Harley.
01-06-2022 12:18J'ai pas de potes chez Indian, je ne veux pas de refroidissement liquide et la concession Indian est trop loin de chez moi.
Pour le reste c'est une question de goût et je ne recherche pas la performance à tout prix, comme quoi le choix de la moto ce n'est pas que la moto. Cette Indian me parait pas mal mais à 34000 balles et idem chez Harley, je dis stop, plus cher que ma voiture et pas le même service.
Mea culpa...suite à une invitation je suis allé essayer la Challenger Dark Horse chez le concessionnaire !!! J'aurais pas dû ! Elle va bientôt rejoindre l'écurie de la maison. Effectivement, rapport à mon premier commentaire, elle est pas terrible en photo mais en vrai ben c'est franchement sympa. Je ne parle même pas des perfs et de la tenue de route par rapport à ma Street Glide (CVO pourtant...) y'a pas photo ! Bon, le ape et le pot décat seront bientôt en commande faut quand même pas déconner non plus, hein !!!
08-04-2023 17:35