Essai Husqvarna SMR 511
Petite machine, très SM, cherche pilote coquin...
Depuis son rachat par BMW, l’entreprise venue des contrées nordiques propose de nombreuses nouveautés désormais dédiées à la route. Mais, relocalisée à Varese, en Italie, Husky n’oublie pas sa production originelle : machines tout terrain et supermotard de haute volée. Pour la plupart, ces modèles sont conçus pour la compétition et à peine modifiés, Husqvarna rappelant ainsi son double titre en championnat du monde Supermotard. En témoigne cette SMR 511 dont, tant la robe que le coeur, revendiquent une filiation extrême.
Découverte
Lignes épurées, habillage minimaliste, la SMR, haute et fine, ne s’encombre d’aucun artifice, annonçant clairement sa vocation ludique et ses origines sportives. A peine cède-t-elle aux contraintes de l’homologation, s’affublant de minuscules clignotants et d’un support de plaque gracile. Affichant les codes esthétiques spécifiques au segment, la 511 souligne son optique frontale en delta d’un long garde-boue.
Celui-ci surplombe une fourche inversée Marzocchi de 50 mm au fort débattement et entièrement ajustable, encadrée d’écopes fines dont le galbe vient mourir sur les flancs pour s’évaser à nouveau sur l’arrière. L’ensemble supporte une longue selle courant depuis la colonne de direction jusqu’au milieu de la boucle arrière esthétiquement gainée. A l’extrémité de l’assise se trouve le bouchon du réservoir dont les deux derniers des 8,5 litres embarqués sous la selle sont visibles derrière le bloc moteur.
Celui-ci fait appel à la technologie BMW, reprenant ainsi le moderne mono-cylindre équipant la G 450 X. Sa culasse teintée d’un rouge vif, affirme des prétentions dynamiques de premier ordre. Doté d’une injection électronique Keihin à double papillon, il propose également deux cartographies, dont l’une adoucit le comportement moteur. Modifié en alésage et course (101 X 59,6) le bouilleur cube désormais 477 cm3 et développe 52 chevaux à 8.500 trs/mn. Cette puissance peut paraître modeste mais notre championne boxe chez les poids légers avec ses 132 kilos sur la balance, prête à entrer sur le ring. De quoi frapper vite et efficacement.
L’ensemble prend place dans un cadre à double berceau acier. Cette architecture se démarque du modèle allemand et son cadre tubulaire simplifié, reliant colonne de direction et bras oscillant sans fixation devant et sous le moteur.
Sous le long échappement titane, dressé vers les cieux, le bras oscillant aluminium reprend, lui, la technologie germanique avec le CTS (Système de Traction Coaxiale). Ce système élimine les variations de longueur de chaîne pendant les mouvements de suspension, optimisant la tenue de route. Le principe repose sur l’union entre le point de pivotement du bras oscillant et le pignon de sortie de la boîte de vitesse. Ainsi, durant tout le mouvement des suspensions, la chaîne ne subit aucun changement de longueur, sa tension restant la même. Chaîne et pignons doivent également être moins sujets à l’usure. Espérons-le, car avec ce montage, tout changement à ce niveau entraînera la dépose du bras oscillant...
Sa suspension est confiée à un amortisseur Sachs entièrement paramétrable dont le débattement joue sur 290 mm.
Pour tempérer les ardeurs de ses ébats avec son maître, la SMR 511 arbore des mono-disques avant et arrière de type wave, de 320 mm et 240 mm. Le premier est pincé par un étrier Brembo 4 pistons à fixation radiale, l’élément arrière par un étrier simple piston.
En selle
Farouche Amazone, la Husky ne se laisse pas facilement enfourcher. Ses 915 mm de hauteur de selle la destine aux longues jambes. Toutefois, la souplesse et l’amplitude de sa suspension tasse la machine, autorisant de bons appuis pour les clients d’un mètre quatre vingt et plus.
Stricte mono-place, la SMR reçoit les bottes de son pilote sur d’étroits repose-pieds de type enduro. L’assise est d’une extrême finesse, tant en épaisseur qu’en largeur, donnant l’impression d’être assis sur une rondin. Logique pour une machine de bûcheron. Difficile alors d’y choisir sa place.
Affleurant presque l’arrête de la selle en raison d’un profil d’assise presque horizontale, les genoux peinent à serrer le galbe des écopes. L’ensemble donne au final l’impression de survoler la machine.
Saisissant le large guidon aux extrémités fuselés masquant les systèmes de réglage de fourche, on domine alors un poste de pilotage réduit à sa plus simple expression et peu lisible. Un petit écran digital affiche juste un tachymètre, une horloge, un odomètre et un partiel.
A sa droite, le barillet de contact reçoit une clef minuscule et le blocage de la direction se fait par le biais d’un verrou déporté sur la colonne de direction. En revanche, le té supérieur de fourche est fait d’un solide bloc d’aluminium.
D’autres détails rappellent ses origines tout terrain sportives. Ainsi, on prendra garde à la béquille au relevé automatique, effectuant de plus une rotation de 180°. Attention également au collecteur d’échappement, dépourvu de protection au niveau bas du cadre, risquant de brûler la jambe droite de votre pantalon. J’en fis l’expérience...
Enfin, le minuscule levier d’embrayage surprendra le néophyte mais se manie sans gêne. De manière générale, la SMR 511 mêle ligne soignée, équipement de qualité et... finition course. Durites, fils et cosses ne s’embarrassent ainsi d’aucun apprêt.
En ville
Réveillé, le mono-cylindre hache l’air de son martèlement métallique qu’amplifie le long silencieux. La première claque et la Husky décolle sans entrain notable, la boite tirant assez long. Revêche, la sélection fait vite préférer le facile passage des vitesses à la volée, principe collant mieux à la philosophie de la supermot’.
Au quotidien, l’échassier de poche permet des demi-tours dans un mouchoir et une intégration ludique dans le trafic. Il faut toutefois composer avec un effet cheval à bascule généré par les suspensions souples à grand débattement.
L’équilibre remarquable de la machine et son poids réduit lui confèrent une agilité bienvenue en ville. Chaque phase de pilotage urbain devient alors prétexte aux facéties de pilotage. Petites rues, rond points... on bénéficie de la légèreté d’une partie cycle performante associée à un moteur dont la vivacité se révèle dans les tours. Peu démonstrative à bas régime, la motorisation encourage aux excès d’optimisme guère tolérés entre les murs de nos citées.
Autoroute et voies rapides
Capable d’environ 165 km/h en pointe, la SMR 511 vous fera amèrement regretter de vouloir couper au plus court. Apparaissant dès 90 km/h, les vibrations deviennent douloureuses à allure légale autoroutière. Pieds, séant, mains anesthésiées... à son bord, la croisière ne s’amuse en aucun cas. Les rétroviseurs deviennent également des zones où le flou n’est guère artistique. Ajoutez à ce tableau l’absence de toute protection au flux d’air et une grande sensibilité du train avant aux remous sur un fond sonore vrillant les tympans... Vous l’avez compris, cette Husqvarna est un non sens sur ces voies et vous rappellera vite à l’ordre. Sa spécialité c’est le virage serré.
Départementales
Inutile d’aborder sagement le réseau secondaire, la SMR préfère, de loin, qu’on lui «tape» dedans. Maintenu dans le haut du compte-tour, son moteur se dévoile et n’en finit plus de monter en régime.
Ainsi cravachés, les 52 chevaux sortent enfin des entrailles mécaniques. Le mono-cylindre se fait rageur et relance prestement la machine en sortie de courbes. L’important appui au guidon permet de balancer la Husky avec une extrême facilité, engageant la machine sur l’angle avec vigueur. L’équipage léger virevolte alors de virages en épingles, seulement limité par le grip des pneumatiques parfois inconstant. Les Pirelli Rosso Corsa sont semblent long à monter en température, occasionnant parfois quelques dérobades.
Progressif, le freinage est puissant et dosable mais la mise en oeuvre des étriers avant relève la machine. La roue arrière risque également le blocage rapide, du fait du fait de l’important transfert de masse lors des décélérations. Une fois affermis et mieux freiné en hydraulique, l’amortissement plus rigoureux atténuera un peu le phénomène et limitera également le pompage des suspensions en grandes courbes bosselées.
Partie-cycle
Equilibrée, légère et dotée d’éléments de qualité, la SMR 511 permettra bien des audaces aux amateurs du genre. Sa vivacité et sa précision en font un excellent outil à trajecter. Et sur mauvais revêtement, ses longues jambes lissent les défauts du bitume.
Freinage
En dépit d’une importante plongée du train avant, le freinage est efficace et procure un bon niveau de maîtrise. L’élément arrière est plutôt timide mais joue son rôle en courbe pour affiner les trajectoires.
Confort/Duo
Passez votre chemin sur ce point. Issue de la compétition, notre Husqvarna de célibataire oublie consciencieusement la qualité d’accueil pour son pilote et fait fi de tout bas. Son quotidien, c’est l’arsouille, le pilotage engagé. Tout autre utilisation la ferait paraître désagréable.
Consommation
Gare à la panne sèche. Les 9 litres de carburant s’évaporent vite au contact du bouillant caractère de la sylphide supermotard. 130 kilomètres d‘autonomie en moyenne. Mais bien moins pour les énervés de la poignée des gazs.
Conclusion
Performante, la SMR 511 ne trahit aucunement ses gênes extrémistes. Tout en elle évoque la course. Son allure, son équipement et ses capacités. Semblant anémique à bas régime, le bloc uni-cylindre donne le meilleur de lui même au fur et à mesure de sa montée en régime. Sa vivacité s’accorde alors pleinement à celle d’une partie-cycle savamment travaillée.
Un tel potentiel entraîne une exclusivité tout aussi importante. Son achat, tout comme son pilotage, doit donc tenir compte de cette contrainte. Et de son prix. Affichée à 7.490 €, la petite délurée fait payer cher ses passes d’armes. Pour autant, ce tarif est largement compétitif sur ce segment. L’entretien de son moteur issu de l’enduro suit également les principes inhérent à cette production. Comptez une révision d’importance toute les 40 à 50 heures... Mais la peu nombreuse concurrence paye le même tribut aux lois mécaniques. Ainsi, L'Autrichienne KTM 450 SMR, à la motorisation tout aussi exigeante, demande 9.150 € pour entrer dans votre garage. Encore mieux équipée et plus radicale, elle ne pourra, en revanche, s'exprimer que sur circuit.
A peine civilisée, la SMR 511 vous permettra donc de rejoindre le circuit le plus proche par les plus belles routes viroleuses. Habiter dans une région à virages fait en effet partie du pack obligatoire pour retirer tout l'agrément de ce modèle… Son exigence est décidément sans limite.
Points forts
- Partie cycle
- Caractère moteur
- Qualité d’équipement
Points faibles
- Exclusivité
- Prix élevé
- Sonorité de l’échappement
- Grip des pneumatiques d’origine
Concurrentes : Aprilia Dorsoduro 750, Ducati Hypermotard 796
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