Ducati 959 Panigale
Evolution de la 899
Evolution de la 899, la Ducati 959 Panigale est la première sportive Euro4 du constructeur. Intrusive, la norme impose son carcan, mais l'électronique sait redonner vie à la super-midsize esthétisante du constructeur italien.
Euro 4 de série
Depuis près de 30 ans, les binômes sportif Ducati déclinent leur caractère transalpin sous forme de fratrie stylée. Accompagnée d'une inévitable inflation de cylindrée, de performances et de tarifs. Ainsi, la fin des années 90 voyait la légendaire 916 s'accompagner d'une version 748 et la décennie suivante multipliait les pairs italiennes. Aux audacieuses 999 et 749 se substituaient les séduisantes 1098 et 848, évoluant rapidement en 1198 et 898. La décade actuelle leur fait céder la place aux ravageuses Panigale 1199 et 899. Enfin, à la 1299 Panigale de cette année devenait indispensable une fausse jumelle : la 959. Sa cylindrée de… 955 cm3 en fait la mid-size de pointe du segment.
C'est sur le circuit de Valence Ricardo Tormo, théâtre de la dernière manche du MotoGP, que Ducati nous convie à essayer la dernière mouture de sa sportive "d'entrée de gamme".
Découverte
L'esthétique Panigale est un ravissement du design italien. Acérée, sportive presque agressive mais toujours élégante. Compacte, étroite, la 959 sculpte ses formes d'oeuvre d'art de course, avec maestria. Racée, la ligne des Ducati est une démonstration de style. Raison de plus pour blâmer les décideurs bornés de l'Euro 4, avilissant la sublime plastique de la 959 par une massive et grossière paire de silencieux superposés, en position latérale droite.
Adieu donc, en Europe, les pots sous la machine, où il désormais délicat de placer imposant catalyseur et silencieux. Un mal esthétique pour un bien écologique (?)…
La face avant évolue légèrement, s'élargissant discrètement. Des prises d'air additionnelles se déplacent sur les extrémités des flancs encadrant un feu anguleux. De même, la bulle est légèrement plus haute, entourée de rétroviseurs redessinés et de nouvelles ouïes ajourent le carénage. Complexes et aplatis, les volumes du réservoir de 17 litres reposent sur une boucle arrière affinée. Gainée, ses volumes supérieurs évidés miment des tunnels à effets venturi et se concluent par un feu arrière à leds à l'esthétique hors pair.
Le tout supporte de remarquables platines de repose-pieds passager, aux extrémités usinées offrant une meilleure adhérence aux semelles des bottes. Les entrailles de l'Italienne vous sont dévoilées en partie technique.
Parfaitement finis et ajustés, les composants de la 959 Panigale ne souffrent d'aucun reproche. Seule l'accessibilité à la béquille est réellement délicate. Finement intégré à l'habillage, elle oblige à contorsionner le pied jusqu'à déployer le court support latéral aluminium. Mais c'est beau.
Technique
Sous cette robe effilée, se dévoile à peine la structure aérienne de la 959 Panigale, dont elle reprend l'essentiel de sa devancière. Epurée, le cadre conjugue deux éléments monocoques en aluminium. Le twin desmodromique basculé de 21° en arrière, à quatre soupapes par cylindres et refroidi par liquide, qui équipait la 899 évolue sensiblement. Le bi-cylindre en L Superquadro de la 959 Panigale cube désormais… 955 cm3. La petite teigne délivre désormais la bagatelle de 157 ch à 10 500 tr.min et un couple de 10,74 da.Nm à 9 000 révolutions. Soit, respectivement plus 9 et plus 0,8 unités par valeur et 250 tours plus bas. Et désormais… c'est full même chez nous. Toutefois, la démultiplication finale s'allonge légèrement, passant de 14x44 à 15x43… norme oblige.
Cette cavalerie est, bien sûr, sous le joug de nombreuses puces savante afin d'en tirer le meilleur profit sur route ou circuit. La Ducati 959 Panigale bénéficie de trois modes de conduite (Race, Sport, Wet 100 ch), influant sur l'arrivée de la puissance via l'accélérateur Ride by Wire et sur les assistances électroniques. Celles-ci sont composés d'un réglage de frein moteur EBC (Engine Brake Control) réglable sur 3 niveaux, d'un contrôle de traction DTC ajustable sur 8 valeurs et de l'ABS course à trois variables. Le freinage est ainsi supervisé par une centrale ABS Bosch 9MP. Tous ces paramètres, indiqués au tableau de bord LCD noir et blanc, à trois intensités d'éclairage, sont donc modulés par le choix de cartographie moteur.
Innovation sur un bloc Superquadro de "moyenne cylindrée", un système de servomoteur constitue l'anti-dribble. Autre nouveauté, la sportive intègre le DQS (Ducati Quick Shifter) désactivable. En option, la 959 Panigale peut être équipée du DDA+ (Ducati Data Analyser Plus) couplé à un GPS.
Le poids est en hausse. La 959 Panigale est 7 kilos plus lourde que la 899 (176 kilos à sec contre 169).
Et si voulez en lire vraiment plus sur tous les détails mécaniques, suivez le guide technique de la 959 Panigale.
En selle
Avec 830 mm de hauteur de selle et une étroitesse peu commune, la 950 Panigale semble un jouet sulfureux . Habillées d'un revêtement mat gratté, plutôt confortables, les assises sont probablement les éléments les plus accueillants à bord. Pour les plus grands, l'ergonomie parait un peu étriquée. Instrument dévolue au sport, la Ducati ne s'embarrasse pas d'inutile espaces perdus.Hauts et reculés, ses repose-pieds basculent le corps vers l'avant et les yeux sur son té supérieur aluminium ajouré, taillé dans la masse. Y affleure les bouchons de tubes de fourche, garnis des molettes de réglages de l'hydraulique.
Au-dessus, un large écran TFT mono-chrome délivre sans mal les nombreuses informations disponibles. Au sommet le compte-tours barre-graphe coiffe le tachymètre. A ses côtés, le mode moteur retenu s'affiche ainsi que les valeurs de l'EBC (contrôle du frein moteur), de l'ABS et et du DTC (contrôle de traction). Le choix des cartographies moteur influe sur chacune de ces assistance et il est également possible de les paramètre individuellement selon ses gouts personnels. Indicateur de rapport engagé, horloge, température moteur et extérieure, vitesse et consommation moyenne, odomètre et partiels complètent ces données. Clair, simple d'emploi, l'écran est surtout très lisible, en toute occasion.
En piste
Une toux rapide et sèche précède les grondements amples du twin. Amples mais plus caverneux. En mode Sport (EBC au plus fort soit 1, ABS 2 et DTC 5) il est temps de prendre le large sur le tracé technique de Valence.
De prime abord, la 959 n'est pas évidente à emmener et demande un certain engagement de son pilote. Et cette cartographie typée route révèle déjà les travers normés d'une législation quatrième du nom. A moins de 7.000 tours en troisième, la Panigale super-midsize peine à montrer les dents qu'on connaissait à sa devancière. Un rapport en dessous et c'est l'injection qui secoue pilote et machine d’un mouvement sec à la remise des gaz. Brusque à haut régime, elle rend délicate le régime constant sur l'angle. D'autant que le frein moteur, trop présent, n'arrange rien à l'affaire en entrée de courbe. Et pour en sortir, le DTC régule parfois trop les relances. Enfin, le développé tout en courbes plus ou moins appuyées du circuit ne facilite pas la tâche du primo accédant que je suis sur ces lieux. Bref, la première session laisse perplexe et impatient de reprendre le guidon pour mieux découvrir la Transalpine.
Tout d'abord, passer en mode Race, logiquement plus adapté. S'il réduit déjà le frein moteur, il parait indiqué de forcer le trait en personnalisant sa valeur. L'ABS passe au minimum et le DTC à 3. Il ne faut pas plus de quelques virages pour retrouver un caractère plus latin et un comportement plus naturel et incisif. Le bloc enfin volontaire se fait plus démonstratif dès les mi-régimes, relançant la Panigale sans sécheresse et avec bien plus de conviction. Et les a-coups disparaissent.
De quoi apprécier le shifter QTS pour monter les rapports à la volée sans couper. Avec sa course allongée dopant le couple, le bicylindre en L est sensiblement plus rempli. Toutefois, en termes de puissance et malgré 9 chevaux supplémentaires, la ligne droite laisse encore un sentiment de manque. Logique, la couronne a perdu une dent pour gagner une norme… On tuttoie tout de même les 260 km/h avant d'agripper le levier de frein.
Mais revenons aux enchainements du tourniquet Ibérique. Comme la machine ne sur-pilote plus, il est plus facile de la maîtriser à la mise sur l'angle et conserver du gaz. De même, les sorties de courbes se font plus efficaces, toujours sous contrôle d'un anti-patinage désormais moins intrusif. Si la 959 n'est pas monture évidente, elle se livre désormais d'avantage sous les directives de son pilote. Rigide, la machine tourne d'un bloc mais il convient d'engager le corps pour l'emmener avec précision sur la trajectoire choisie. Une fois placée, l'Italienne est parfaitement stable. Réactives aux appuis sur les repose-pieds, la Panigale passe d'un bord à l'autre d'autant plus facilement que ses jantes chaussent, pour nous, des Pirelli Diablo Supercorsa SC. Leur profil en ogive dope forcément l'agilité de la Ducati, tout autant que sa motricité. Si les 4 mm d'amortisseur et d'axe de bras oscillant influent également, ces enveloppes course améliorent encore le ressenti.
Lancée à fond de six devant les stands ou de trois entre deux courbes, la 959 Panigale se ralentie à un doigt. Maitre-cylindre radial et étriers monoblocs encaissent sans mal les plus fortes décélérations. Ces dernières peuvent occasionner un manque de franchise. Mais les freins se gardent longtemps sur l'angle, sans mouvement parasite. Empiler les rapports se fait avec la même aisance, tant du fait de l'anti-dribble que d'une poignée d'embrayage à la souplesse remarquable. De même, la boite travaille avec une grande précision, quelle que soit la charge moteur. Enfin, bien qu'un poil souple sur circuit, les suspensions effectuent un excellent travail, tant en accélération qu'à la prise des freins. La fourche travaille efficacement en fin de course et l'amortisseur absorbe la fougue du twin de Bologne. En augmentant légèrement la compression et fermant de même la détente, la 959 gagne sensiblement en précision et agilité. Pour autant, il faut payer de sa personne pour corriger des trajectoires trop aléatoires et soigner son pilotage.
Profondes, les vocalises de la 959 sont finalement plus attrayantes en échappement de série qu'avec les silencieux Akrapovic. Pour récupérer le son d'origine, il faudra passer par la ligne titane complète, menant aux cartouches placées en position basse. Aux environs de 5 000 €, cet accessoire rend tout son sens et son potentiel mécanique à la belle Italienne. Un plaisir à écouter et qui rend justice au bloc, donnant 5 % de puissance supplémentaire à 8 000 tours et retire 6 kilos !
Partie-cycle
Rigide et performante, la 959 Panigale peut compter sur ses équipements haut de gamme pour optimiser précision et agilité. Peu intuitive, elle demande de l'attention et un pilotage de qualité pour s'exprimer au mieux.
Freinage
L'équipement des ralentisseurs ne changent pas avec un équipement Brembo haut de gamme. Des étriers monobloc Brembo M4.32 à fixation radiale et 4 pistons attaquent les disques semi-flottants de 320 mm du train avant. L'arrière est équipé d'un disque de 245 mm et d'un étrier à deux pistons. Maitres cylindres radiaux et durites tressées complètent cette dotation, assistée par un ABS Bosch course installé de série. Si les valeurs 2 et 3 évitent le décollage de la roue arrière, le niveau 1 lui laisse toute liberté.
Puissant et endurant, l'équipement Brembo assure des décélérations de premier ordre mais manque de franchise sur les plus gros freinages. Plutôt transparent sur le réglage minimal, l'ABS joue parfaitement son rôle, permettant de retarder au mieux la prise du levier et de conserver longtemps les freins sur l'angle.
Conclusion
Sculpture sportive, remarquablement équipée, la Ducati 959 Panigale subit les affres castratrices de la norme Euro4, tant en esthétique qu'en comportement mécanique. Moins caractériel, le bloc fait également les frais d'une démultiplication (légèrement) rallongée. En dépit de performances chiffrées à la hausse, la réponse moteur semble parfois trop lissée par les effets d'une législation peu crédible. Moins démonstrative, l'athlète super-midsize sait rester efficace sur circuit, pour peu que l'on ajuste ses assistances électroniques nombreuses. De même, sa partie cycle haut de gamme et un atout important.
Tarifée 16.590 € en rouge et 16.790 € en blanc, la 959 Panigale propose un rapport prestations/prix conforme à son équipement. Toutefois, l'Aprilia RSV4 RR ne demande que 17 200 € pour donner accès à plus de performances. Réclamant 21.290 €, la 1299 Panigale offre bien plus de fougue et de tempérament. Mais qu'arrivera-t-il à ces deux dernières quand l'Euro4 leur sera passé dessus?
Un simple changement de couronne (+3 dents) changerait probablement la personnalité de la 959. Pas tout a fait une 1.000 cm3 mais vraiment plus une petite sportive, la petite Panigale évolue, seule, entre deux mondes. Objet à part, c'est peut-être là son argument majeur pour séduire les motards à la recherche d'une nouvelle catégorie intermédiaire. Séduisante, la 959 mérite le détour et ne s'offre qu'aux pilotes exigeants.
Points forts
- Esthétique racée
- Electronique efficace
- Précision de la partie-cycle
Points faibles
- Caractère dilué
- Vivacité à tester sur revêtement imparfait
- Peu intuitive
- Echappement peu élégant
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La fiche technique de la Panigale
Coloris
- Rouge Ducati, jantes Noir Brillant.
- Soie Blanc Arctique, jantes rouges.
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