Titan : histoire du constructeur
Le premier fabricant de customs à grande échelle
Une success story à l'américaine, avec ses réussites, ses faillites et ses drames
En 1990, les Etats-Unis vont connaître une décennie de croissance ininterrompue, ce qui alimente le mode de vie américain qui est, en toute tradition, totalement tourné vers la consommation. Au tournant des années 2000, le taux de croissance de l’économie était quasiment identique à celui des années 60 (avec une pointe à 5,2 % en 2000 et 4,4 % en 1997 et 1998 et une augmentation du PNB de 25 % entre 1996 et 2000).
Si ces petits cours d’économie vous ennuient (après tout, vous n’êtes pas ici sur lerepaireduFMI.com !), ne retenez qu’une chose : à condition qu’il ait un boulot moyen, l’Américain moyen est quasiment capable d’avoir accès à tous ses idéaux : la maison, le 4x4 full size ou la muscle car V8, le frigo qui fait des glaçons, la machine à pop corn. Et une voire plusieurs motos ; à crédit, certes, mais si ça rend la chose possible, elle n’est pas sans conséquences sur la fin de l’histoire. Mais patience.
Si l’abondance de biens ne nuit (peut-être ?) pas, le problème vient alors de se différencier de son voisin. Qu’il ait le même Dodge Ram ou la même Mustang que vous, passe encore, mais la même Harley-Davidson, là, ça coince. Car la moto, aux States, ça se personnalise. Et certains ne se contentent pas d’une énième Harley-Davidson personnalisée. C’est bien trop banal.
1995, Phoenix, Arizona
Cette envie pour certains de se distinguer, la famille Ovenden l’a bien compris et crée la marque Titan basée dans l’Arizona à Phoenix. Le contexte est d’autant plus porteur qu’Harley-Davidson lui-même est, quelque part, victime de cette économie florissante en ayant du mal à satisfaire à la demande.
Le business model de la famille Ovenden se distingue des autres assembleurs par deux points cruciaux. Premièrement, les motos Titan vont exister à grande échelle et les fondateurs de la marque vont particulièrement travailler tout l’écosystème de la vente de motos, en incluant l’assurance, des opérations de partenariat avec les banques pour le financement à crédit, la mise en place d’une cote pour les motos d’occasion. Titan fait même son entrée en bourse, au NASDAQ, en 1997. Tout comme les acteurs majeurs du monde de la moto, en fait.
Deuxièmement, pour satisfaire au plus grand monde, il ne faut pas trop verser dans l’extrême : les motos Titan sont donc gentiment customisées et, surtout, rapidement disponibles à la commande.
En 2001, cependant, l’entreprise connait sa première faillite. Elle est alors rachetée par Donald Proudfoot, qui est à l’époque le plus gros revendeur de la marque, avec sa concession Titan basée en Floride. Le marché, hélas, est devenu plus concurrentiel avec de nombreux autres assembleurs de customs, tels que Big Dog, American Iron Horse et bien d’autres. Titan ne survit pas à la crise des subprimes de 2007, qui voient les taux d’intérêt augmenter rapidement et l’activité économique décliner simultanément. L’équation de la croissance perpétuelle est rompue : l’Américain moyen ne peut plus financer toutes ses envies à crédit. Donald Proudfoot est en même temps accusé de fraude par les autorités fédérales avec des histoires de faux numéros de série sur les motos. Les actifs de Titan sont alors revendus à la société Arizona Motorcycle Works, dirigée par Hope Smith, la petite amie de Proudfoot. Ce dernier est tué par balles l’année suivante lors d’un cambriolage dans sa maison, sans que les circonstances ne soient jamais complètement élucidées.
Les derniers modèles en stock mirent plusieurs années à se vendre dans les vitrines des concessionnaires. De 2009 à 2012, un investisseur a revendu quelques machines sous la marque Titan à partir d’une concession à Toronto, au Canada. La marque Titan n’a plus fait parler d’elle depuis 2012.
Du mild-custom
Les motos Titan avait néanmoins réussi à se construire rapidement une belle réputation de qualité et de solidité. Le modèle principal était la Gecko, dont les grandes lignes permettent de dire qu’elle est, proche, dans l’esprit, à une Harley-Davidson Dyna, ici motorisée par un V2 S&S de 1600 cm3 à boîte séparée. Selle basse, roue de 18 devant, pneu de 180 à l’arrière : les Titan Gecko se distinguaient par leur grande facilité de prise en main, la patate de leur S&S qui frôlait les 90 chevaux et l’équilibre de leur châssis. Selon les désirs du client, peintures sobres ou psychédéliques, ainsi qu’abondance de chromes étaient tout à fait possibles.
Le modèle Titan Sidewinder était un peu plus radical, avec sa longue fourche et sa colonne de direction haut placée. Elles paraissent désormais bien datées lorsque l’on voit la créativité du monde du custom d’aujourd’hui.
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