Confederate : histoire du constructeur
Hellcat, Wraith, Fighter : des motos construites à la main
Moteur S&S, cadre en épine dorsale et périphériques dédiés à la performance !
1991 : un avocat américain, Matt Chambers, décide de donner corps à sa propre vision de la moto sportive américaine. Les premières étapes de son travail sont d’abord conceptuelles et, en l’espace de trois ans, les locaux vont bouger de Bâton Rouge (Lousianne) vers San Francisco (Californie) puis La Nouvelle Orléans (Louisianne again). L’épisode de San Francisco fut mis à profit pour améliorer ses connaissances en termes de châssis avec des spécialistes de dragsters, Sandy Kosman et Martin Windmill. C’est de cette expérience que Matt Chambers décida de faire des cadres sous la forme d’une solide épine dorsale.
Dans l’esprit de Matt Chambers, Confederate Motorcycles doit proposer des machines exclusives, construites à la main, qui exsudent la puissance, la brutalité et l’accélération. Il met un point d’honneur à proposer des rapports couple moteur / poids extrêmement favorables. Le design, confié à Ed Jacobs, sublime le minimalisme en donnant à chaque élément de la moto une allure quasiment organique. Une Confederate se veut intimidante à regarder, mais doit être facile à conduire grâce à son parfait équilibre.
Le premier prototype reçut le nom de Ghost (fantôme) et fut mis en marche le jour de Veteran Day (le 11 novembre) ; on ne rigole pas avec le patriotisme aux USA ! Une ligne de production fut mise en place dans la foulée.
1996, première étape : la Hellcat
Rapidement, Confederate passa la vitesse supérieure avec son premier modèle commercialisé, la Hellcat. Le délire marketing de son concepteur explique sa création comme une machine qui serait, tout à la fois, « l’expression d’un sophistication cool et non-matérialistique, un design minimaliste orchestré par une précision organique toute droit issue de l’école du Bauhaus, ainsi qu’un symbole de l’énergie négative et du côté obscur du Caravage ». Rien que ça !
Nous voyons cependant dans la Hellcat les premiers traits conceptuels de Confederate : un muscle bike d’allure ramassée centrée sur un gros V-Twin soutenu par une solide épine dorsale ; le moteur S&S de 1700 cm3 sortait 120 ch, ce qui garantissait déjà de belles performances et de solides accélérations. Voilà pour le fond. Concernant la forme, le style Confederate n’est pas encore solidement achevé : certaines Hellcat sortent en rouge pimpant avec moteur en finition chromée : pour le côté obscur du Caravage, vous repasserez !
Néanmoins, environ 500 Hellcat de première génération ont été conçues de 1996 à 2001. Cela pourrait sembler comme un fort joli score : hélas, il a été insuffisant pour que Confederate échappe à une banqueroute en 2001.
2003-2005 : la Hellcat de seconde génération… et Katrina !
Pour remettre les créations de Matt Chambers en perspective, il est nécessaire de prendre un peu de recul sur la scène motocycliste alternative américaine. Au tournant des années 2000, à part Erik Buell qui semble avoir vu la lumière, la conception de la moto américaine se résume au bon gros V-twin conçu pour cruiser. Outre le géant Harley-Davidson, une multitude d’officines spécialisées conçoivent des cruisers tous plus clinquants les uns que les autres. Au niveau de la créativité, les fourches démesurées, les pneus arrières gigantesques, la peinture à paillettes et les têtes de mort semblent être les références principales. Le milieu s’enfonce dans un tuning sans limites dont le paroxysme sera atteint par la fantasque (j’ai failli écrire « dégénérée »…) famille Teutul et son célèbre show TV American Chopper, qui connaîtra une fin sous forme de sérieuses fâcheries familiales arbitrées par des tribunaux alléchés par des montagnes de dollars.
C’est dans ce contexte que Confederate, qui a réussi à renaître de ses cendres, sort la seconde génération de Hellcat. Les premières hésitations sont remisées et l’ensemble est nettement plus abouti : le traitement noir lui va beaucoup mieux et son côté muscle bike ressort désormais grâce à une ergonomie à mi-chemin entre le Panhead des années 40 et une superbike des années 80. La finition est mieux maîtrisée, le châssis est optimisé grâce à une fourche Marzocchi de 50 mm de diamètre surmontée de trois optiques lenticulaires tandis que les deux disques de frein avant sont pincés chacun par des étriers à 6 pistons. Le V-Twin S&S sort désormais 140 chevaux. Le pneu arrière de 240 est mieux mis en valeur grâce à un design épuré de la partie arrière, laissant l’impression que le pilote est assis sur une selle flottante.
75 exemplaires de cette seconde série de Hellcat seront produits et la firme a de plus grandes ambitions… Hélas, l’ouragan Katrina vient ravager les locaux de Confederate en même temps qu’une grande partie de la ville de la Nouvelle Orléans. Confederate arrive à lever à nouveau 5 millions de dollars pour reconstruire une usine à Birmingham, Alabama, à deux pas du musée et du circuit Barber.
2007 : la Wraith, une sculpture qui roule
Signe que le monde du « custom » américain commence à penser autrement : en 2007, la Confederate Wraight remporte le premier prix au championnat du monde de custom AMD de Sturgis.
Il faut dire que cette moto vous envoie comme un uppercut avec sa fourche en carbone, sa solide épine dorsale, sa selle suspendue et son monobras oscillant. Le design est à a fois clinique, industriel et squelettique : la Wraith a été voulue comme étant le 357 Magnum de la moto, selon ses concepteurs.
Le dynamisme n’a pas été occulté, avec des roues en carbone, des pneus Pirelli Diablo Corsa, un amortisseur de direction Öhlins, un amortisseur arrière Penske réglable. Le moteur sort alors 120 ch. La Wraith a été produite de 2007 à 2009.
Du concept de la Wraith sera issu une version appelée Fighter : on la reconnaît à sa fourche à parallélogramme et à son épine dorsale plus travaillée. Elle sera produite de 2009 à 2011.
En tout, 42 Wraith et 58 Fighter ont été produites.
2015 : une Hellcat de 2.2 !
Alors qu’une seconde fournée de 61 Fighter a été relancée en 2015, vendus 119 500 $, Confederate retravaille son modèle le plus accessible, la Hellcat et présente la version X132 Speedster, dénommée ainsi parce qu’elle fait appel à une motorisation S&S X-Wedge de 132 ci, soit 2163 cm3. L’injection électronique commande des corps de 58 mm et le tout développe 121 ch, mais un couple solide de 190 Nm ! Le design est toujours organique (remarquez la forme du bras oscillant ou des carters moteurs), tandis que les composants restent de qualité, à l’image de la solide fourche inversée WP de 48 mm de diamètre, des freins Beringer et des roues en carbone.
Une de ces Hellcat préparée a battu un record de vitesse sur le lac salé de Bonneville, à 279 km/h. Les 65 exemplaires de la Hellcat prévus pour 2015, vendus 69 500 $, sont déjà tous vendus.
Conclusion
Les Confederate sont des sculptures roulantes, personne ne peut en douter ! Si la Wraith nous paraît la plus aboutie et la plus délirante dans l'esprit, leur conception en fait des engins singuliers dans la production motocycliste américaine.
Au fil des années, le tarif est passé de 60.000 $ pour les Hellcat à plus de 120.000 $ pour les dernières Fighter, en sachant qu’une Wraith était affichée 92.500 $ en 2007. Pas étonnant, dès lors, que l’on trouve dans la clientèle quelques people, tels que Tom Cruise, David Beckham, Eddie Van Halen, Ryan Reynolds, Brad Pitt…
Confederate a lancé fin 2015 un appel à investissement sous forme d’actions et ambitionne de produire de nouveaux modèles à la fois dans la lignée des Hellcat, Wraith et Fighter, mais également d’arriver sur des segments de marché plus accessibles afin qu’un plus grand nombre puisse accéder à la philosophie de Confederate : the Art of Rebellion.
Mais alors que le climat politique se tend outre-Atlantique avec l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, la marque paye le prix de son nom qui renvoie à la Civil War et aux mouvements suprémacistes blancs. Confederate décide alors en août 2017 d'emprunter une nouvelle direction en se tournant vers la motorisation électrique, en partenariat avec Zero Motorcycle et d'en profiter pour prendre le nom de Curtiss Motorcycles pour ce nouveau départ.
Renaissance
Trois ans plus tard et alors que Curtiss a commercialisé une ultime P40 Warhawk Final Edition, le nom et la propriété intellectuelle de Confederate Motorcycles sont vendus à Ernest Lee. Ce dernier relance la marque en 2020 et la production à Birmingham, en Alabama, mais opte pour le nom de Combat Motors. Le retour de la marque se fait avec les F-117 Fighter, P-51 Combat Fighter et FA-13 Combat Bomber déjà connu, une Wraith redessinée et deux nouvelles Hellcat, désormais réalisées sur des bases de Harley permettant une homologation à travers le monde.
Commentaires
Instructif, mais franchement très loin des visées et ambitions du "motard moyen" européen. Mis à part les afficionados des motorisations de style Harley, ce n'est guère une mode répandue chez nous.
31-01-2016 15:55