Hubert Kriegel, voyageur en side-car : 180.000 km à travers plus de 50 pays
Une seule philosophie : le plaisir du voyage et de la découverte
Plus de 10 ans autour du Monde
Pour tous les motards qui ont en eux l’ADN du voyage, ces chiffres doivent faire rêver : 10 ans sur la route, plus de 180.000 km, plus de 50 pays… Et ce n’est pas fini.
Le 16 février 2005 à 6 h 04 du matin, Hubert Kriegel quittait New York en direction du Cercle Polaire Arctique. Depuis, il est sur la route.
Après une vie professionnelle qui l’a vu embrasser plusieurs carrières différentes (directeur du Paradis Latin, imprimeur et photograveur, coursier à Los Angeles, agent immobilier à New York), Hubert Kriegel a considéré qu’il serait plus heureux et plus libre à parcourir le monde en side-car qu’à rester retraité sédentaire dans une grande ville. Et qu’en plus, ça lui coûterait moins cher.
Depuis ce jour, il a sillonné l’Amérique du Cercle Polaire à la Cordillère des Andes, il a longuement baroudé en Sibérie, en Mongolie et en Asie centrale, il a fait un tour en Europe, descendu l’Afrique par la côte Atlantique. Hubert Kriegel est en ce moment en Inde, où il semble bien se plaire. Nous l’avons rencontré récemment lors d’un court passage à Paris.
Un side sinon rien
Avant de partir pour ce grande périple, Hubert était déjà un grand voyageur, ayant fait plusieurs virées en Asie et au Moyen Orient dans les années 70, à l’époque sur une Moto Guzzi attelée. Le side-car, pour lui, c’est une évidence. Le side-car, c’est la stabilité, la capacité de chargement, une multitude d’aspects pratiques, une certaine forme de tranquilité d’esprit.
« Tu me vois », dit Hubert, « je ne suis pas très grand ni très costaud, j’ai toujours de la peine quand je croise des motos chargées à bloc ».
En side, Hubert peut charger ses équipements, son ordinateur, son appareil photo, accessoire indispensable car son site est surtout un recueil de photos de voyage assorties de légendes souvent sobres mais toujours pleines d’humour et d’humanisme.
La première partie du voyage sur le continent américain a été faite avec une BMW R 100 GS équipée d’un panier Ural ; ensuite, en traversant l’Atlantique, Hubert a changé de monture et a opté pour un side Ural à 2 roues motrices, plus efficace sur les terrains difficiles.
Malgré tout, Hubert voyage « relativement » léger et quand la météo le permet, on le reconnaît à son équipement plutôt light : un short, des chaussures bateau, ses indéfectibles lunettes rouges et son jet Joe Bar Team. Un équipement à la hauteur d’un concept auquel il est fort attaché : la liberté totale.
De – 40°C à + 40°C, le choc des extrêmes
Hubert est modeste. Il ose des choses et se met dans des situations qui paraîtront extrêmes à l’immense majorité d’entre-nous. Comme aller camper en plein hiver sur le lac Baïkal, dans une petite tente toute frêle, posée près d’un feu protégé du vent par quelques blocs de glace.
Dans les déserts glacés ou brûlants, Hubert va se confronter à la nature. « La nature, c’est fascinant, mais ça fout la trouille », reconnaît-il, ce qui ne l’empêche pas de traverser la Mauritanie par les pistes sablonneuses plutôt que par la route, ou de se faire une petite retraite introspective d’une semaine, seul, sans bouger, sur une plage perdue en Namibie.
Il y a peu, Hubert a franchi la plus haute route du monde dans l’Himalaya, à 5602 mètres d’altitude.
Coup de cœur, coup de blues
Avec autant de pays traversés, difficile de demander un palmarès des pays traversés.
« Il n’y a pas de pays où les gens sont méchants, quand tu voyages seul, en side-car, les gens viennent vers toi de manière bienveillante. De toute façon, je ne reste dans des endroits que quand ils me plaisent, ça ne dure pas assez longtemps pour prendre du négatif, je ne prends que du positif. Je fais des rencontres brèves, mais intense ».
Mais encore ? « Je n’ai pas aimé l’Afrique », avoue quand même Hubert. « Tu es bien accueilli mais rapidement, on te demande de l’argent et ça casse la relation ».
A contrario, Hubert a adoré la Mongolie. « J’ai fait l’effort d’apprendre le Mongol avec un prof et ensuite, j’ai acheté un GPS car il n’y a que de mauvaises cartes. La Mongolie, c’est magique, les valeurs humaines y sont extrêmement fortes, rien n’a changé. Dans le même genre, j’ai beaucoup aimé le Lesotho, c’est un pays lunaire, avec des paysans perchés dans les montagnes, avec un vrai sens de l’accueil ».
On pense alors qu’Hubert a un faible pour les grandes étendues peuplés de nomades au train de vie traditionnel. Ce serait ne pas prendre en compte son nouveau coup de foudre pour l’Inde : « les gens sont simples et bienveillants, il n’y a pas d’agressivité en Inde ».
Chaque année, Hubert consacre de deux à trois mois à visiter famille et amis en France et aux Etats-Unis. Le reste du temps, il le repasse sur la route.
Carpe Diem
Les Blues Brothers étaient en mission pour le Seigneur ; Hubert, de son côté, ne revendique… rien. « Je ne suis pas dans une démarche humanitaire ou un truc du genre, les écologistes me font chier, je ne fait pas de tri sélectif… », dit-il, avec son franc-parler. « Je n’ai pas de héros, pas de modèles », ajoute t-il, « mais je suis quand même admiratif des mecs qui font la même chose que moi à vélo, car eux, ils ne peuvent pas tricher ni se la raconter ».
« Je suis dans une démarche égoïste », ajoute t’il. On apprécie quand même la richesse de son site (que l'on vous recommande d'aller visiter) et la grande qualité de ses photos, qui ne seraient pas présentes si, inconsciemment, la notion de partage lui était étrangère. Son site reçoit en moyenne mille connexions par jour. « Chaque jour, quand je me lève, je me pose quand même la question : est-ce que j’ai envie de continuer ? ».
La réponse est évidente et le calendrier d’Hubert est déjà rempli pour les 6 prochains mois, avec notamment une étape à Goa. « Goa est une ville détestable, il y a plein d’anciens expatriés, plein de junkies, plein de filles bizarres. Mais au bout de la ville, il y a une petite plage, avec des petites cabanes à louer et tu restes là, à pêcher ton poisson. C’est le paradis ».
On imagine qu’un tel voyage a son lot de galères. Une assertion qu’Hubert balaye rapidement. « J’ai le sens de la rue, c’est un art de vivre. En outre, je ne bois pas, je ne fume pas et je ne vais pas voir les filles. C’est le soir dans les bars que les problèmes arrivent ».
Et la moto, dans tout ça ? « Tu as beau tout préparer, c’est un autre truc qui va casser. Je suis un mauvais mécanicien, je fais des mauvais diagnostics, mais tu trouves toujours quelqu’un pour t’aider ».
C’est peu de dire que l’Ural a été optimisé, a connu nombre de soudures et de pièces changées, mais il roule toujours.
Un soutien de l’usine, peut-être ? « Ils m’aiment beaucoup, à l’usine, ils m’envoient plein de mails pour me dire qu’ils sont contents de ce que je fais ». Et depuis 2008, ils m'envoient des pièces quand j'en ai besoin.
Cela dit, la communauté du web prend le relais. Hubert est un personnage connu et ses aventures sont suivies, avec des gens qui l’attendent sur ses points de passage et l’entraide de la communauté des grands voyageurs fonctionne dès qu’il a besoin d’aide ou d’une pièce détachée.
Pour parodier un certain chanteur, Hubert, c’est l’incarnation de « vous ne m’ôterez pas ma liberté de voyager ! ». Et sa devise ferait bien d’en inspirer plus d’un : « n’oubliez pas de prendre un risque aujourd’hui ».
Plus d'infos sur Hubert Kriegel
- Site : le site d'Hubert
- Tous les voyages
Commentaires
Sacré personnage ! Et son initiative correspond assez bien à un fantasme rémanent, probablement pas seulement chez moi....
31-01-2016 17:10