Essai Yamaha 500 XT (1976 – 1989)
Exquise XT
Après avoir inventé le concept du trail avec la DT 250, la firme japonaise eut l’audace de créer la 500 XT… Directement inspiré des machines anglaises comme la BSA Goldstar, le premier gros mono japonais va remettre au goût du jour ce type de motorisation. Dérivée de la TT 500, moto d’enduro, ses succès et les nombreux podiums trustés au Dakar, vont asseoir son image de machine fiable et robuste. Surtout, ils vont faire rêver toute une génération de motards de voyages et d’aventures…
Le gromono pour tous
A sa sortie en 1976, elle était commercialisée 10.193 francs (smic à 1.000 F pour 169 h)… Simple, polyvalente, la promesse de Yamaha, était d’offrir aux motards une machine capable de s’acquitter sans ombre du « moto boulot dodo », de s’amuser le week-end en tout-terrain et de pouvoir rejoindre le bout du monde. Rempli de caractère grâce à son couple conséquent, le monocylindre fournit des performances honorables. La partie cycle légère et maniable est une alliée de taille qui rend sa conduite joueuse et fort attachante. Mais ce qui va créer l’aura de la 500 XT, c’est son image de baroudeuse infatigable « Paris-Dakar ready ».
A cette époque naissent les rallyes raids et la fameuse épreuve éponyme. Les victoires de Cyril Neveu lors des deux premières éditions et les nombreux podiums d’autres pilotes vont définitivement écrire la légende et le mythe. Simplement équipées d’un gros réservoir, d’une nourrice additionnelle et de l’indispensable porte-bagages, ces machines de série partent affronter les dunes africaines et nourrissent les rêves d’évasions du plus grand nombre. La marque aux diapasons est parvenue à réhabiliter le monocylindre en le fiabilisant. Les motards redécouvrent ses charmes et le fameux cérémonial du démarrage au kick. La mise en route semble réclamer science et force, ce qui confère à la 500 une image de moto qui se mérite, une moto de puriste !
En 1983, Yamaha sort la 600 XT qui, excepté nom et genre, ne partage rien avec sa devancière. Frein à disque, démarreur électrique, mono–amortisseur, cette moto préfigure ce que sera le trail populaire des années 80 avec les Honda XL et autres Suzuki DR. Maintenue au catalogue jusqu’en 1989, la 500 va doucement tomber dans l’oubli jusqu’au début des années 2000. Ceux qui ont débuté la moto avec elle ou qui ont connu leurs premiers émois motards à l’enfance se sont mis à sa recherche. Son habillage minimaliste valorise le petit réservoir alu flanqué du logo noir et rouge, un classique. Comme avec son petit phare rond et son silencieux allongé, on la reconnaît entre toutes.
Rudimentaire et complet
Si la XT est dérivée de la TT 500 comme le soulignait le sticker "enduro" sur les flancs des premières versions, son débattement de suspensions est étonnamment réduit à l’arrière pour une tout-terrain (seulement 100 mm). Avec un angle de chasse assez ouvert et un guidon droit comme la justice, la 500 trône fièrement sur sa roue de 21 pouces à l’avant et semble bomber le torse. Le silencieux qui court le long de la selle affine la machine sans la rendre frêle pour autant. Le réservoir de seulement 8,5 litres et le cadre à simple berceau tubulaire renforcent l’aspect massif du moteur.
Eléments aujourd’hui obsolètes, les soufflets de fourches paraissent respecter une symétrie avec la paire d’amortisseurs arrière. Les gros clignotants contrastent avec le petit phare dont l’efficacité restera longtemps inexistante (passage en 12 v en 1986). Signe des temps, un seul rétro suffisait au bonheur de la maréchaussée. Au guidon, la barre de renfort recouverte d’une protection en mousse est sensée protéger le conducteur en cas de chute. On note le passage assez proéminent des câbles d’accélérateur. Freinage intégral à tambour oblige, toutes les commandes aux leviers sont à câbles et les réglages de tension sont protégés par des soufflets anti-poussière.
L’essentiel est là et finalement la Yamaha n’est pas chiche question commodos et instrumentation. La zone rouge s’affiche à 6 500 tr/min sur le compte-tours à fond noir, invitant à jouer du couple plus que de la puissance. On trouve le décompresseur à main gauche qui facilite le démarrage, à l’instar du hublot sur le carter indiquant la position du piston au point mort. Moyennant quelques procédures et un entretien régulier de l’allumage, le démarrage au kick peut se faire sans encombre, même s’il s’est construit une solide de réputation de briseur de jambes!
Qui kicke ?
Aussi la première fois, c’est non sans émotion qu’on s’apprête à démarrer l’engin. Pour le motard moderne, kicker n’a rien de naturel. Tel un pilote et sa check-list, on se répète une dernière fois la procédure. Les plus trouillards seront heureux d’apprendre que les puristes démarrent à la main… Starter à froid, gaz fermé, on appuie sur le kick jusqu’à sentir le point de compression (hublot opaque). On décompresse au guidon tout en appuyant sur le kick à mi-course. En relâchant la gâchette, on laisse remonter le kick (hublot transparent). Il est temps d’animer la bête d’un élégant et ferme coup de jarret. Moteur, on savoure pleinement sa victoire sur Kick, le retour, se délectant de la sonorité caractéristique et pleine d’entrain de l’échappement.
Si le moteur ne dispose que de 32 chevaux, ce sont des purs sang. Pas très puissant, il répond pourtant dès les plus bas régimes, prêt à bondir à la moindre sollicitation, de quoi arsouiller entre deux feux sans rougir. En revanche, l’architecture « old fashion » du mono impose de jouer du sélecteur et de l’embrayage. Il cogne en bas, manque d’allonge dans les tours et vibre généreusement. Les monocylindres n’ont plus la côte depuis le début des années 90, mais ils se sont aseptisés avec le temps.
Culasse 4 soupapes, double arbre à came et balancier d’équilibrage… En tentant de lisser les défauts, on castre également les caractéristiques intrinsèques. Si comme souvent les imperfections font le caractère d’une machine, le freinage faiblard de la 500 XT y contribue-t-il ? Alors que la généralisation de l’ABS sur les motos neuves commence à être évoquée, force est de constater que les tambours avant/arrière de notre monture, ralentissent plus qu’ils ne freinent. Anticipation fortement conseillée. Concernant les balades en duo, une bonne dose d'amitié de la personne transportée s'avère nécessaire. Absence de poignées de maintien, sécheresse des suspensions, proximité cuisse/pot d'échappement inconfortable... Par ailleurs, les kilos ajoutés nuisent à l'entrain du monocylindre. La selle du 500 XT se partage volontiers pour un saut de puce, mais guère davantage...
Retour aux sources
Pour échapper à la morosité routière ambiante, la 500 XT est un remède des plus efficaces, une recette simple au bonheur motard. Son moteur est expressif et vivant, ludique sans être pousse au crime et génère d’excellentes sensations. Reste à s’accommoder des vibrations et d’un freinage digne du gramophone à l’heure du MP3.
Accessible et fiable mécaniquement, son utilisation régulière n’engendre pas un budget excessif. On trouve encore quantité de pièces et une mine d’informations parmi les nombreux aficionados de celle qui a gagné le premier Dakar. Capitale que l’on se doit de rejoindre sur une 500 XT. Il n’est jamais trop tard pour vivre ses rêves !
Chronologie
- 1976 La version première XT 500 type 1E6 est remplacée dès juillet par le modèle de type 1N5, dont la principale différence se situe au niveau de l’échappement (partie arrière du pot qui perd son embout de rétrécissement).
- 1977 La XT évolue et prend le type 1U6. Certainement la plus célèbre de la série, elle se caractérise par la présence du petit hublot sur le moteur qui permet de visualiser le repère pour positionner correctement le piston au démarrage. Le passage du collecteur est modifié pour un positionnement latéral qui améliore la garde au sol et l'expose moins aux chocs.
- 1978 La culasse reçoit un ailetage plus important, le carter de chaîne est remplacé et les tés sont modifiés avec deux boulons par tubes.
- 1979 Les modifications interviennent sur le moteur pour en améliorer la fiabilité : montage du joint spi de vilebrequin côté droit avec la lèvre positionnée extérieurement et son immobilisation par un circlips, modification du circuit de lubrification et du carter d’embrayage. L’inscription « Enduro » disparaît des caches latéraux.
- 1980 La XT repasse par la case homologation à cause d'une nouvelle définition de la géométrie de la colonne de direction et des caractéristiques qui en découlent : fourche à axe déporté plus courte, mais débattement inchangé, entraxe colonne à tube de fourche réduit. La soupape d’admission provient de la SR 500 (+ 2 mm). Le réservoir passe en alu et les jantes revêtent une anodisation dorée.
- 1981-85 Les caractéristiques de la XT se stabilisent et seul le moteur à partir du numéro 1U6 163 396 reçoit des modifications, comme l'adoption d'une vis et d'un linguet pour immobiliser les axes de culbuteurs qui avaient tendance à endommager leurs logements.
- 1986 Changement important avec le passage du système électrique en 12 volts.
- 1987-89 Pas d’évolution technique. En 1989, commercialisation d'une série limitée "anniversaire" baptisée XT500SP avec différentes pièces chromées ou polies.
- 1990 La XT est retirée du catalogue Yamaha France et la dernière XT500 neuve est officiellement vendue en 1992 par un concessionnaire de la marque.
Marché de l’occasion
Produite à 61.510 exemplaires dans le monde, dont 17 884 exemplaires pour la France. Le marché regorgeait de machines et de pièces à la fin des années 90, mais aujourd’hui la nostalgie fait grimper les prix du marché. Pour un peu moins de 1.000 €, on trouve des machines à restaurer. N’oublions pas que les plus anciennes ont déjà dépassé une trentaine d’années d’existence. Autant dire qu’elles ont eu plusieurs vies qui ne les ont pas toujours épargnées. La moyenne du marché tourne autour des 2 000 à 2 500 € avec des kilométrages entre 30 et 50 000 km. Ajoutez-y un bon millier d’euros si vous rêvez d’une machine dans un état concours entièrement restaurée.
Identification
- 1976 - 1E6 - 1E6 001 101
- 1976 - 1N5 - 1N5 000 101
- 1977 - 1U6 - 1U6 000 101
- 1979 - 1U6 - 1U6 110 101
- 1980 - 1U6 - 1U6 130 101
- 1981 - 1U6 - 1U6 140 101
- 1986 - 1U6 - 1U6 205 101
- 1988 - 1U6 - 1U6 209 101
- 1989 - 1U6 - 1U6 212 101
Châssis : méfiance
Certains utilisateurs s’en sont peut-être un peu trop donnés à cœur joie en tout-terrain. D’autres n’ont pas résisté à faire des facéties sur la roue arrière. Assurez-vous donc que le cadre est bien d’aplomb et que les roues sont alignées. Les soudures surchargées sont un mauvais signe, vérifiez à ce propos que le radiateur d’huile dans le cadre n’est pas fendu.
L’espérance de vie des roulements au niveau de la direction et du bras oscillant dépasse rarement les 20.000 km. Surveillez qu’il n’y ait pas de points durs, surtout au niveau du bras oscillant, il peut y avoir risque de soudure avec impossibilité de démonter ! Ausculter les suspensions arrière qui ne doivent pas présenter de fuite ou de points durs et dont les tiges sont droites.
Mécanique solide, mais…
Le filtre air avec le pot d'échappement sont les éléments qui brident le plus le rendement. Les préparations à base de cornet de filtration et d’échappement trafiqué peuvent altérer la fiabilité (soupapes brûlées), engendrant une consommation excessive en carburant comme en lubrifiant. Préférez un modèle dont la segmentation a été changée il y a moins de 25.000 km. Les modèles équipés de kit moteur (600 cm3) se révèlent plus fiables que ceux d’origine côté étanchéité. Les culbuteurs sont le point faible du moteur. Parfois avant 1984, les caches culbuteurs ont du jeu et l’huile s’en va dans les roulements au lieu de graisser les culbuteurs et leurs axes.
Entretien
Globalement une machine fiable au prix d’un entretien minimum. Consommation en essence 5 litres aux 100, conso d’huile normale entre ½ et 1 l d’huile aux 1 000 km.
Station-service
Vidange moteur tous les 3 000 km avec remplacement du filtre. Huile 15w50. Contrôle du filtre à air et de la bougie et du jeu aux soupapes tous les 3 000 km. Graissage du pivot de bras oscillant tous les 3 000 km. Réglage des culbuteurs et de la tension de chaîne de distribution tous les 5 000 km maxi. Tous les 10 000 km, nettoyage des rupteurs pour les modèles d’avant 1986. Remplacement de la chaîne de distribution tous les 40 000 km.
Pièces détachées
On trouve encore quelques références d’origine chez Yamaha. La popularité de la XT via Internet joue en la faveur des passionnés. On trouve ainsi en Allemagne et Hollande deux sociétés spécialisées offrant un grand nombre de pièces. Des accessoiristes se sont également penchés sur le cas de la XT tout au long de sa carrière, mais les stocks commencent à s’épuiser.
Enfin, les annonces, forums, salons et brocantes permettent également de dénicher la pièce convoitée. Hormis le passage à 12 volts en 1986 et le changement du couvercle d’embrayage en 1979 (risque de casse moteur), pratiquement tout est compatible sur la XT d’un millésime à l’autre.
Points forts
- Moteur vivant
- Maniabilité et légèreté
- Fiabilité éprouvée
- Machine mythique
Points faibles
- Marché surcoté
- Freinage inefficace
- Eclairage symbolique (sur les 6v)
- Vibrations féroces
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