Bien rouler de nuit
Voir et être vu : il ne faut pas choisir pour rouler !
La nuit est pleine de dangers, que l'on peut éviter avec quelques précautions.
Que ce soit par obligation ou par plaisir, rouler la nuit à moto n'est pas un exercice naturel et demande de prendre en compte un certain nombre de paramètres. Visibilité, réflectivité, sécurité : on vous dit tout.
Noir, c'est noir...
Notre bon Johnny H., ce poète, avait raison : noir, c'est sacrément noir. Du coup, rouler la nuit pose deux problèmes.
Un, on ne voit rien. Et comme l'on sait tous que la moto va là où son pilote regarde, si ce dernier n'y voit rien, ça devient un peu compliqué.
Deux : cette visibilité réduite, additionnée à un certain nombre de risques (profitant qu'il y a moins de monde sur la route, certains roulent plus vite, tandis que d'autres, hélas, subissent les effets de la fatigue, alors que d'aucuns n'ont pas les compétences requises pour maîtriser un véhicule dans cet environnement si particulier et qu'une petite portion, malheureusement, est sous le coup des effets de l'alcool) contribue à créer plus de dangerosité.
Car il ne faut pas se voiler la face : la nuit, objectivement, ça craint. Avec seulement 10 % du trafic, la nuit est responsable de plus de 40 % des décès sur la route et de 33 % des blessés hospitalisés : les accidents y sont donc à la fois plus nombreux et plus violents, avec un pic de danger entre 4 et 6 heures du matin. Et dire que le motard est un petit être fragile...
"Mais voici dans l'ombre, qu'une ronde sombre, se fait, l'Enfer autour danse, tous dans un silence, parfait" (Alfred de Musset, La Nuit, poème).
Priorité numéro 1 : vous !
S'il y a déjà peu de véhicules sur les routes la nuit, il y a encore moins de motos. Le motard constitue donc une minorité et sa première priorité doit être de ne pas se faire shooter par les autres. Si le look full black confère à celui qui le porte une vraie attitude rebelle d'aspirant Lorenzo Lamas, disons tout de suite qu'il n'est pas adapté à la conduite nocturne. Vous avez toujours rêvé de briller en société ? Eh bien voici l'occasion de vous surpasser !
Ami motard, le jaune fluo et les bandes réfléchissantes vont devenir tes meilleurs compagnons de route. Tu penseras donc à utiliser des vêtements (bottes, pantalon, blouson) équipés de larges bandes réfléchissantes, voire à mettre un gilet fluo (ou plutôt une surveste qui ne flottera pas comme un gilet de chantier) par dessus (j'en vois déjà sortir les bazookas mais on vous parle de conduite de nuit, pas de jour, qu'on soit clair!).
La présence des bandes réfléchissantes sur le casque ne se discute même pas (d'ailleurs, elles sont obligatoires et leur absence est soumise à une contravention de 4ème classe qui peut vous coûter 135 € et 3 points sur votre permis), mais tu peux aller plus loin dans la démarche, avec un casque jaune fluo agrémenté d'un dispositif, installé à l'arrière de la calotte du casque, qui fait doublon avec les feux stops. Il existe aussi un sac à dos qui permet d'indiquer sa direction aux carrefours et qui duplique le feu stop. C'est too much ? Peut-être. Mais si la sécurité est à ce prix...
La baisse de température inhérente à la disparition (heureusement temporaire et cyclique) de notre astre céleste doit être prise en compte : un motard qui se caille est un motard qui fatigue plus vite, qui se déconcentre, qui perd en réflexes et en temps de réaction. Bref, c'est un motard qui se met en danger. A vous de prévoir des équipements en phase avec la météo et la distance parcourue.
Et parce que la vue, c'est la vie, l'état de la visière ou des lunettes est tout aussi primordial. Entre la saleté, les projections, les vieilles gouttes d'eau et les insectes suicidaires, la vie d'un écran n'est pas de tout repos. Prenez le temps de les nettoyer régulièrement, lors de chaque arrêt. Un écran sale peut réduire la visibilité de 30 %. A contrario, adopter un écran de casque jaune permet d'accentuer les contrastes.
Priorité numéro 2 : la moto
La moto doit vous permettre de voir et d'être vu. La qualité et le réglage des phares est donc une priorité.
Pour le réglage du phare, il faut se mettre en conditions réelles : la moto doit être chargée comme lors d'un vrai trajet et le pilote, en selle, habillé de ses vrais équipements. Si vous roulez en duo, il faut que le passager soit là aussi. La règle dit qu'en code, la moto doit éclairer la route à partir de 30 mètres et qu'en phare, la portée doit être d'au moins 100 mètres. Pour être plus clair : pas question de faire ça en charentaises dans votre garage, en vérifiant rapidement si votre destrier éclaire bien entre la chaudière et le congélateur.
Par rapport aux automobiles (qui, de plus, ont adopté ces derniers temps des technologies LEDs, Matrix voire Laser et disposent souvent de feux dont le faisceau se règle automatiquement), la moto reste le parent pauvre de la grande famille de l'Éclairage ! Peu de constructeurs proposent des options xénon, à part BMW sur certaines machines, BMW qui a même présenté un prototype de moto avec des feux au laser. La solution peut alors consister à remplacer l'ampoule faiblarde proposée en monte d'origine, non pas pour une 100 W, qui aurait surtout pour conséquence d'éblouir les autres usagers voire de mettre en péril l'installation électrique de votre moto, mais par des ampoules à LEDs ou au xénon de puissance équivalente, mais dont la technologie peut procurer jusque deux fois plus de puissance lumineuse. Le montage de feux additionnels homologués peut être une bonne solution, également.
La moto elle-même peut être rendue plus visible par l'ajout de bandes réfléchissantes sur les jantes, le carénage, les valises latérales... Les esthètes se reporteront sur des bandes réfléchissantes de couleur qui créent un délicat ton sur ton avec la moto, peu visibles de jour mais efficaces de nuit.
Savoir adapter sa conduite
Les principes de base de la sécurité routière demandent d'adapter sa vitesse en fonction de l'environnement et de la visibilité.
En toute logique, on sera en sécurité en roulant moins vite de nuit que de jour puisque, dans tous les cas, vous ne pourrez "lire la route", découvrir son état et son niveau d'adhérence qu'au dernier moment. Il faut également savoir que selon les régions et le saisons, la traversée de forêts peut présenter un risque à cause du passage d'animaux sauvages.
La moto possède également ses propres caractéristiques physiques, liés aux transferts de masse. Une moto souple en suspensions ou disposant de grands débattements aura tendance à éclairer la cime des arbres à l'accélération et la roue avant au freinage, tandis que le faisceau lumineux n'est pas étudié pour éclairer l'intérieur des virages. Sur des routes sinueuses ou avec de forts dénivelés, il faudra prendre en compte ces spécificités. Une conduite toute en souplesse prévaudra toujours sur une conduite brutale ou tout simplement sportive.
En cas d'éblouissement par un véhicule venant en face, il faut baisser les yeux et se guider en lisant les pointillés du côté extérieur de la route. La pupille remet en effet un certain temps à se réadapter aux conditions en cas d'éblouissement et cette phase doit durer le moins longtemps possible. Dans la même logique, les spécialistes de la vision ne recommandent pas de s'exposer à une lumière crue lors des pauses, sachant que l'œil aura ensuite plus de mal à se réacclimater aux conditions de la conduite nocturne.
Votre moto va également se comporter différemment : la température plus fraiche aura des incidences sur le comportement du moteur, des suspensions et des pneus.
Bien entendu, ces conseils doivent être suivis avec encore plus d'acuité et d'humilité en cas de conduite nocturne sous la pluie.
Mais que ces conseils ne nous privent pas de l'essentiel : rouler de nuit, sous un ciel généreusement étoilé, par une température presque clémente, c'est aussi un grand moment de plaisir à moto !
Commentaires
Article intéressant, mais j'aurais un peu plus insisté sur les animaux en tant que risque inhérent à la conduite nocturne.
13-04-2016 16:38Dans mon expérience et celles de mes connaissances, il y a eu beaucoup de rencontres avec des sangliers et lapins, et quelques unes avec des renards ou des gallinacés, quand ce n'est pas avec un chat.
Certaines de ces rencontres se mal finies pour l'animal, quand d'autres ont entraîné des blessures plus ou moins graves sur le conducteur et/ou sa monture.
Attention, dès la tombée du jour, lorsque vous traversez une forêt, un sous-bois, ou simplement que vous ne voyez pas ce qui se trouve derrière le talus du bord de route.
Excellente remarque, j'en parle un tout petit peu dans le dernier chapitre. On sait qu'il y a environ 40 000 accidents par an impliquant des véhicules et un animal, mais les chiffres spécifiques à la moto sont difficiles à obtenir. Il faut être particulièrement prudent :
13-04-2016 18:01- Le matin tôt et à la tombée de la nuit : ce sont les heures de déplacement du gibier.
- Lors des périodes de chasse (de septembre à février) : un animal effrayé, rabattu ou en fuite, peut se précipiter sur la route.
- En avril-mai et en automne : ce sont les grandes périodes de transhumance du gibier.
- Au printemps, période de reproduction des espèces.
En fait, il faut être tout le temps prudent !
PG
"En fait, il faut être tout le temps prudent !"
14-04-2016 10:49C'est bien résumé :)
Pour en remettre une couche, les déplacements de gibiers sont flagrants à la tombée de la nuit (et je suppose au lever du jour, mais je suis dans mon lit !), mais ce n'est pas rare non plus en pleine nuit.
Pour faire régulièrement des trajets nocturnes (en voiture par contre), je vois souvent des sangliers sur les bords de route.
Je pense à une route en particulier, où je suis presque surpris quand je ne croise aucun sanglier, c'est la D6 entre Alès et Bagnols-sur-Cèze.
L'endroit où on est le plus susceptibles d'en voir, c'est dans un enchaînement de deux longues lignes droites (pointe de vitesse hautement déconseillée dès la disparition du soleil) bordée de larges bas-côtés agrémentés d'arbres fournissant visiblement leur repas aux sangliers.
Je peux vous dire qu'ils sont pas effrayés par les voitures : ils regardent passer comme le ferait une vache.
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